đ„ïž Ceotto Avis De Deces Vitry Le Francois
LacĂ©rĂ©monie religieuse aura lieu le samedi 16 juillet 2022, Ă 10 heures, en l'Ă©glise de Saint-Cheron. Madame FRANĂOIS repose au funĂ©rarium de Vitry-le-François, 52 avenue du colonel
Lesderniers avis de dĂ©cĂšs publiĂ©s dans L'Union. LâUnion est un quotidien rĂ©gional français, dont le siĂšge se trouve Ă Reims (Marne). Il est diffusĂ© dans les dĂ©partements de la
MadameLACOLOMBE repose au funérarium de Vitry-le-François, 52 avenue du Colonel Moll. son époux et ses enfants. vos Condoléances Sur
10heures en l'Ă©glise de Jussecourt. Madame GĂRARD repose au funĂ©rarium de Vitry-le-François, 52 avenue du Colonel Moll. son Ă©poux Robert dĂ©cĂ©dĂ© en 2002. Pas de plaques. ceotto S.a
MonsieurPaul GRATIA. à l'ùge de 94 ans. Les obsÚques seront célébrées le mercredi 3 août 2022 à 10 h 30 en l'église de Chateau-Porcien (08). Monsieur GRATIA repose au funérarium de Vitry
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à l'ùge de 86 ans. Les obsÚques seront célébrées le mardi 5 juillet 2022 à 14 h 30 en la collégiale Notre Dame de Vitry-le-François. Monsieur DEHAUT repose au funérarium de Vitry
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3ia7. ï»żJB Monsieur Jean François BOUCHON Date du dĂ©cĂšs 27 mai 2014 Vitry-le-François 51300 VITRY LE FRANĂOIS - MORLAINCOURT 55Marie-JosĂ©e BASTELICA sa compagne ;Thomas et Catherine BOUCHON,Magali BOUCHON et Julien,Ses enfants ;FrĂ©dĂ©rique et Yann MĂZOU,Damien LAHANQUE,Les enfants de sa compagne ;Noa, Achille, Joseph, Robin, LoukaSes petits-enfants ;Jean-Marie et GeneviĂšve BOUCHON,GĂ©rard et Francine BOUCHON,Remi et Nicolle BOUCHONSes frĂšres, belles-soeurs, neveux, niĂšces ;Jack et Christine BASTELICA ;Ses cousins, cousines, ses tantes ;Jean-Claude et Marie-ThĂ©rĂšse COUFFON,Toute la parentĂ© et amis,Ont la douleur de vous faire part du dĂ©cĂšs de M Jean François BouchonSurvenu le 27 mai 2014 Ă l'Ăąge de 64 crĂ©mation a eu lieu dans la plus stricte intimitĂ© pouvez dĂ©poser vos messages de condolĂ©ances et tĂ©moignages sur ce prĂ©sent avis tient lieu de faire-part et de remerciements. Mur du souvenir EA Equipe Avis-De-DĂ©cĂšs a allumĂ© une bougie Nous vous adressons nos sincĂšres condolĂ©ances. Allumer une bougie de deuil Ăcrire un message de condolĂ©ances Voir plus de services POMPES FUNĂšBRES
See other formats / f u A' V . i 4 ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES Sommaire I. ĆUVRES DE SAINT FRANĂOIS. II. BIOGRAPHIES PROPREMENT DITES. I. Note prĂ©liminaire. II. PremiĂšre Vie par Thomas de Celano. III. Coup d'oeil sur l'histoire de l'Ordre de 1230-1244. IV. LĂ©gende des Trois Compagnons. V. Fragments de la partie supprimĂ©e de la LĂ©gende. VI. Seconde Vie par Thomas de Celano PremiĂšre loartie. VII. » » » DeuxiĂšme partie. VIII. Documents secondaires Biographie Ă Vusage du chĆur. Vie versifiĂ©e. Biographie de Jean de Ceperano. Vie de frĂšre Jidien. IX. LĂ©gende de saint Bonaventure. X. De laudibus de Bernard de Besse. III. DOCUMENTS DIPLOMATIQUES. I. Donation de l'Alverne. II. Registres du cardinal Hugolin. III. Bulles. XXXII VIE DE S. FRANĂOIS IV. CHRONIQUEURS DE L'ORDRE. I. Chronique de frĂšre Jourdain de Giano. il. Eccleston ArrivĂ©e des FrĂšres en Angleterre. III. Chronique de fra Salimbene. IV. Chronique des Tribulations. V. Les Fioretti et leurs appendices. VI. Chronique des XXIV gĂ©nĂ©raux. VII. Les ConformitĂ©s de BarthĂ©lĂ©my de Pise. VIII. Chronique de Glassberger. IX. Chronique de Marc de Lisbonne. V. CHRONIQUEURS ĂTRANGERS A L'ORDRE, I. Jacques de Vitry. II. Thomas de Spaiato. III. Chroniqueurs divers. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES Il est peu de vies dans l'histoire aussi bien docu- mentĂ©es que celle de saint François. Ceci Ă©tonnera sans doute plus d'un lecteur, mais pour s'en convaincre on n*a qu'Ă parcourir la liste ci-dessus qui a Ă©tĂ© cependant rendue aussi succincte que possible. Il est admis dans les milieux savants que les Ă©lĂ©ments essentiels de cette biographie ont disparu ou ont Ă©tĂ© complĂštement altĂ©rĂ©s. L'exagĂ©ration de certains Ă©cri- vains religieux, qui adoptent tout, et, entre plusieurs rĂ©cits d'un mĂȘme fait, choisissent toujours le plus long et le plus merveilleux, a amenĂ© une exagĂ©ration pareille en sens contraire. S'il fallait signaler au fur et Ă mesure des Ă©vĂ©nements les rĂ©sultats de ces deux excĂšs, ce volume devrait ĂȘtre doublĂ© et mĂȘme quadruplĂ©. Les personnes qui s'occupent de ces questions trouveront dans les notes la brĂšve indication des documents originaux d'oĂč provient chaque rĂ©cit*. Pour ne plus revenir aux erreurs qui ont cours sur les documents franciscains, et en signaler en quelques 1. Si quelqu'un de studieux se trouvait embarrassĂ© par la raretĂ© extrĂȘme de certains ouvrages citĂ©s, je me ferai un devoir et un plaisir de les communiquer, ainsi que la copie des manuscrits d'Italie. XXXIV VIE DE S. FRANĂOIS lignes rextreme importance, j'en prendrai deux pour exemple nul parmi les contemporains n'a aussi bien parlĂ© de saint François que M. Renan -, il y revient dans tous ses ouvrages avec une piĂ©tĂ© Ă©mue, et il Ă©tait mieux Ă mĂȘme que personne de connaĂźtre les sources de cette histoire. Cependant il n'hĂ©site pas Ă dire, dans les pages qu'il consacre au Cantique du soleil, l'Ćuvre la plus connue de saint François L'authenticitĂ© de ce morceau paraĂźt certaine, mais il faut remarquer qu'on n'en a pas l'original italien. Le texte italien qu'on pos- sĂšde est une traduction d'une version portugaise, laquelle Ă©tait elle-mĂȘme traduite de l'espagnol *. » Or le texte italien primitif existe^, non seulement dans de nombreux manuscrits en Italie et en France, â en particulier Ă la Mazarine^, â mais aussi dans le livre fort connu des ConformitĂ©s'*', Une erreur, d'une portĂ©e bien autrement grave, est celle que fait le mĂȘme Ă©crivain en niant l'authenticitĂ© du Testament de saint François cette piĂšce n'est pas seulement la plus belle expression du sentiment reli- gieux de son auteur, elle constitue aussi une sorte d'auto- biographie et contient la rĂ©vocation solennelle et Ă peine dĂ©guisĂ©e de toutes les concessions qui lui avaient 1. E. Renan. Nouvelles Ă©tudes d'histoire religieuse, Paris 1884, in-8op. 331. 2. V. ci-aprĂšs p. 349 ss.. 3. BibliothĂšque Mazarine, Ms. 8531 SpĂ©culum perfectionis S, Francisci; le cantique se trouve au f» 51. Cf. Ms. 1350 datĂ© de 1459. Ce texte a Ă©tĂ© iubliĂ© par BĆhmer dans les Romanische Studien, Halle 1871, p. 118â122. Der Sonncngesang v. Fr. d'A. 4. Conform. Milan 1510 202 b 2 s. Au reste il est exact que Diola, dans les CronicJie degli ordini instituti da S. Francesco, Venise 1606, 3 vol. in-4o traduites sur la version castillane de l'ouvrage composĂ© en portugais par Marc de Lisbonne, a eu la sottise de remettre en italien cette traduction d'une traduction. I ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES XXXV Ă©tĂ© arrachĂ©es. On verra plus loin que son authen- ticitĂ© est parfaitement inattaquable i. Ce double exemple suffira, j'espĂšre, pour montrer la nĂ©cessitĂ© d'aborder cette Ă©tude par un examen consciencieux des sources. Si rĂ©minent historien dont il vient d'ĂȘtre question Ă©tait encore de ce monde, il aurait pour cette page son large et bienveillant sourire, ce simple oui, oui.,, qui faisait jadis trembler d'Ă©motion ses Ă©lĂšves dans la petite salle du CollĂšge de France. Je ne sais ce qu'il penserait de ce livre, mais je sais bien qu'il aimerait l'esprit dans lequel il est entrepris, et me pardonnerait aisĂ©ment de l'avoir choisi comme bouc Ă©missaire de mes colĂšres contre les savants et les hagiographes. Les documents Ă examiner ont Ă©tĂ© divisĂ©s en cinq catĂ©gories. La premiĂšre comprend les Ćuvres de saint François. La seconde, les biographies proprement dites. La troisiĂšme, les documents diplomatiques. La quatriĂšme, les chroniques de VOrdre. La cinquiĂšme, les chroniques d^ auteurs Ă©trangers Ă VOrdre. 1. Voir page 384 ss.. ĆUVRES DE SAINT FRANĂOIS Les Ă©crits de saint François * sont assurĂ©ment la meilleure source Ă consulter pour arriver Ă le connaĂźtre, et on ne peut que s'Ă©tonner de les voir si nĂ©gligĂ©s par la plupart de ses biographes. Il est vrai qu'ils donnent peu de renseignements sur sa vie, et ne fournissent ni dates, ni faits ^^ mais ils font mieux que cela ils marquent les Ă©tapes de sa pensĂ©e et de son dĂ©veloppement spiri- tuel. Les lĂ©gendes nous racontent François tel qu'il a Ă©tĂ©, et par lĂ mĂȘme subissant un peu le joug des cir- constances, obligĂ© de se plier aux exigences de sa situation de gĂ©nĂ©ral d'un ordre approuvĂ© par l'Eglise, de thaumaturge et de saint. Ses Ćuvres, au contraire, nous montrent son Ăąme mĂȘme ; chaque phrase a Ă©tĂ© non 1. RassemblĂ©s d'abord par Wadding Anvers, 1623, in-4o ils ont Ă©tĂ© publiĂ©s depuis lors bien des fois, en particulier par le P. de la Haye Paris 1641, in-f-^. Ces deux Ă©ditions devenues rares ont Ă©tĂ© reproduites âd'une maniĂšre fort peu satisfaisante â par l'abbĂ© Horoy S. Francisci Assisiatis opĂ©ra omnia Paris, 1880, in-4o. En l'absence d'une Ă©dition un peu exacte, celle du R. P. Bernardo da Fivizzano est la plus commode Opuscoli di S. Francesco cVAssisi, 1 vol. in-12 de 564 p. Firenze, 1880. Le texte latin y est accompagnĂ© d'une traduction italienne. Prix 2. Die Briefe, die unter seinem, Namen gehen, mOgen theilweise Ă cht sein. Aber sic tragen kaum etwas zur nĂ heren Kenntniss bei und kunnen daher fast ganz ausser Acht bleihcn. MĂ»ller, Die An fange des Minorilenordens, Freiburg i/B., S", 1885, p. 3. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES XXXVII seulement pensĂ©e, mais vĂ©cue, et nous apporte encore palpitantes les Ă©motions du Poverello. Aussi, lorsque clans les Ă©crits des Franciscains, on trouve une parole de leur maĂźtre, elle se dĂ©cĂšle d'elle- mĂȘme, elle se dĂ©tache tout Ă coup avec un son pur et doux qui va rĂ©veiller une fĂ©e endormie au fond de votre Ăąme, et vous fait tressaillir. Cette fleur d'amour des paroles de saint François, serait un fort bon critĂšre pour juger de l'authenticitĂ© des opuscules qui lui sont attribuĂ©s par la tradition 5 mais ce travail de triage n'est ni long ni difficile. Si plus tard, on a fait çà et lĂ des efforts peu discrets pour lui faire honneur de miracles qu'il n'a pas faits, qu'il n'aurait mĂȘme pas souhaitĂ© faire, on n'a jamais cherchĂ© Ă grossir son bagage littĂ©raire de piĂšces fausses ou supposĂ©es ^. La meilleure preuve en est qu'il faut attendre Wadding, c'est-Ă -dire le dix-septiĂšme siĂšcle, pour trouver le premier et le seul sĂ©rieux effort tentĂ© en vue de rĂ©unir ces prĂ©cieux souvenirs. Plusieurs se sont Ă©garĂ©s 2, mais ce qui reste suffit pour nous donner en quelque sorte la contre-Ă©preuve des lĂ©gendes. 4. On a bien attribuĂ© Ă saint François des morceaux qui ne sont j as de lui ; mais ce sont lĂ des erreurs involontaires et faites sans aniĂčre-pensĂ©e. Le souci de l'exactitude littĂ©raire est relativement nouveau, et il Ă©tait plus facile, Ă ceux qui ignoraient l'auteur de certains opuscules franciscains, de les attribuer Ă saint François, que d'avouer leur ignorance ou de faire de longues recherches. 2. Par exemple la premiĂšre RĂšgle; probablement aussi des can- tiques; une lettre aux frĂšres de France, Eccl. 6; une autre aux frĂšres de Bologne {PrĆdixerat per litteram in qua fuit pluri- mura latinum, Eccl. ib. ; une lettre Ă Antoine de Padoue, autre que celle qui nous reste, puisque, au tĂ©moignage de Gelano, elle Ă©tait adressĂ©e Fralri Antonio episcopo meo 2 Gel. 3, 99 ; des lettres Ă sainte Claire i Scripsit ClarĆ et sororibus ad consola- tionem Htteram in quĂą dabat benedictionem suam et absolvebat, etc. Conf. fo 185 a 1. Cf. Test. B. ClarĆ. A. SS. Augusti t. II, XXXVIII VIE DE S. FRANĂOIS Dans ces pages, François se donne Ă ses lecteurs comme il se donnait autrefois Ă ses compagnons ; cha- cune d'elles est la prolongation d'un sentiment, un cri du cĆur, ou un Ă©lan vers l'Invisible. Wadding a cru devoir insĂ©rer dans son recueil plu- sieurs piĂšces suspectes ; de plus, au lieu de suivre les manuscrits les plus anciens qu'il avait sous les yeux, il s'est souvent laissĂ© Ă©garer par des auteurs du seiziĂšme siĂšcle, dont la critique et l'exactitude Ă©taient bien les moindres prĂ©occupations. Pour Ă©viter la longue et toute nĂ©gative besogne Ă laquelle il faudrait procĂ©der, si on le prenait comme point de dĂ©part, je vais me borner Ă une Ă©tude positive de cette question. Toutes les piĂšces qui seront Ă©numĂ©rĂ©es se trouvent dans son recueil. Elles y sont parfois dĂ©coupĂ©es d'une façon bizarre; mais Ă mesure que chaque document sera Ă©tudiĂ©, on trouvera des indications suffisantes pour opĂ©rer les redressements nĂ©cessaires. Les archives du Sacro-Convento d'Assise ^ possĂšdent p. 767 Plura scripta tradidit nobis, nepost mortem suam decli- naremus a paupertate\ des lettres au Cardinal Hugolin. V. 3. Soc. 67. Ce n'est pas seulemĂŽnt Ă la nĂ©gligence qu'il faut attribuer la perte de bien des opuscules Quod nephas est cogitare, in provincia Marchie et in plurihus aliis locis iestamentum heati Francisci mandaverunt {prelati ordinis districte per ohedientiam ah omni- bus auferi et comburi. Et uni fratri devoto etsancto^ cujus nomen est N. de Rocanato combuxerunt dictum testamentum super caput suum. Et toto conatu fuerunt solliciti, annulare scripta beati patris nostri Francisci, in quibus sua intentio de ohservantia rĂ©gule declaraturn. Ubertin de Casai, apud Archiv, III, p. 168-109. 1. L'Italie est trop aimable pour les artistes, les archĂ©ologues et les savants, pour ne pas leur faire la faveur d'amĂ©nager d'une façon pratique ce dĂ©pĂŽt, le plus prĂ©cieux de toute l'Ombrie. MĂȘme avec la complaisance Ă toute Ă©preuve du conservateur M. Alessandro et de la municipalitĂ© d'Assise, il est trĂšs difficile de profiter de ces trĂ©sors empilĂ©s dans une chambre sombre sans une table pour Ă©crire. ETUDE CRITIQUE DES SOURCES XXXIX un manuscrit dont rimportance ne saurait ĂȘtre exagĂ©rĂ©e. Il a Ă©tĂ© dĂ©jĂ Ă©tudiĂ© Ă maintes reprises ^ et porte le n° 338. On semble cependant ne pas s'ĂȘtre aperçu d'un dĂ©tail de forme, qui ne laisse pas d'avoir une grande impor- tance c'est que le n^ 338 n'est pas un manuscrit, mais toute une collection de manuscrits d'Ă©poques assez di- verses, qui ont Ă©tĂ© rĂ©unis parce qu'ils avaient Ă peu prĂšs le mĂȘme format et ont reçu une foliotation unique. Ce caractĂšre factice du recueil montre que chacune des piĂšces qui le compose, doit ĂȘtre examinĂ©e Ă part, et qu'on ne saurait dire, en bloc, qu'il est du treiziĂšme ou du quatorziĂšme siĂšcle. La partie qui nous intĂ©resse, parfaitement homogĂšne, est formĂ©e de trois cahiers de parchemin fol. 12 a -44 b et renferme une partie des Ćuvres de François. 1° La RĂšgle dĂ©finitive approuvĂ©e par Honorius III le 29 novembre 1223^ fol. 12a-16a. 2° Le Testament de saint François ^ fol. 16 a- 18 a. 3° Les Admonitions 4 fol. 13a-23b. 4° La Lettre Ă tous les chrĂ©tiens ^ fol. 23 b-28 a. 5^ La Lettre Ă tous les membres de l'Ordre rĂ©unis en Chapitre gĂ©nĂ©ral 6 fol. 28a-31a. 6° Un avis Ă tous les clercs sur le respect de l'Eucha- ristie 7 fol. 31b-32b. i. En particulier parEhrle Die historischen Handschriften von S. Francesco in Assisi. Archiv, t. I, p. 484. 2. Voir pages 288 ss.. et 324. 3. Voir page 384 et suiv. 4. Voir page 297 et suiv. 5. Voir page 373 et suiv. G. Voir page 369 et suiv. 7. Voir page 376. XL VIE DE S. FRANĂOIS 7° Un morceau trĂšs court prĂ©cĂ©dĂ© de la rubrique ; Des vertus qui ornĂšrent la Vierge Marie et qui doivent orner l'Ăąme sainte »l fol. 32 b. S^ Les laudes Creaturarum ou Cantique du soleil ^ fol. 33 a. 9° Une paraphrase du Pater introduite par la rubrique Incipiunt laudes quas ordinavit, B. pater noster Franciscus et dicĂ©bat ipsas ad onmes Ăźioras diei et noctis et ante offi- cium B. F. MariĆ sic incipiens Sanctissime Pater ^ fol. 34 a. 10° L'office de la Passion 34 b-43 a. Cet office, oĂč les psaumes sont remplacĂ©s par des sĂ©ries de versets bibli- ques, a pour but de faire suivre, heure par heure, Ă celui qui le dit, les Ă©motions du CrucifiĂ© depuis le soir du Jeudi saint ^. 11° Un rĂšglement pour les frĂšres en retraite dans les ermitages ^ fol. 43 a-43 b. Un coup d'Ćil sur cette Ă©numĂ©ration suffit pour voir que les opuscules de François rassemblĂ©s lĂ , s'adressent 1. Le voici tout entier nBegina sapientia, Dominus te salvet^ cum tua sorore sancta pura simplicitate. â Domina sancta pau- pertas, Dominus te salvet, cum tua sorore sancta humilitate. â Domina sancta caritas, Dominus te salvet, cum tua sorore sancta obedientia. â SanctissimĆ virtutes omnes, vos salvet Dominus, a quo venitis et procĂ©dais , Son authenticitĂ© nous est garantie par une citation de Gelano 2 Gel. 3, 419. Cf. Spec. 126 b et 127 a. 2. Voir p. 349 ss.. 3. Je n'y reviendrai pas; texte dans les ConformitĂ©s, 138a 2. 4. L'authenticitĂ© de cet office, auquel il n'est fait aucune allusion dans les biographies de saint François, est rendue certaine par la vie de sainte Glaire Officium crucis , prout crucis amator Franciscus instituerat. {Clara didicit et affectu simili frequenta- vit, A. SS. Augusti, t. Il, p. 761 a. 5. Il commence Illi qui voluntstare in heremis. Ce texte se trouve aussi dans les ConformitĂ©s 143 a 1. Cf. 2 Gel. 3, 43. Voir p. 125. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES XLI Ă tous les frĂšres, ou sont des sortes d'encycliques qu'ils sont chargĂ©s de transmettre Ă leurs destinataires. L'ordre mĂȘme de ces piĂšces montre que nous avons en ce manuscrit la bibliothĂšque primitive des FrĂšres Mineurs, la collection dont chaque ministre provincial emportait une copie. C'Ă©tait vraiment leur viatique. Matthieu Paris nous raconte son Ă©tonnement, Ă la vue de ces moines Ă©tranges, vĂȘtus de tuniques rapiĂ©cĂ©es, et portant leurs livres dans des sortes de fourreaux suspen- dus au cou^. Le manuscrit d'Assise a Ă©tĂ© sans doute destinĂ© Ă cet usage ; s'il est muet sur les voyages qu'il a faits, sur les frĂšres pour lesquels il a Ă©tĂ© un guide et une inspiration, il nous fait du moins descendre, mieux que toutes les lĂ©gendes, dans l'intimitĂ© de saint François, et vibrer Ă l'unisson de ce cĆur qui n'a jamais sĂ©parĂ© la joie, l'amour et la poĂ©sie. De quelle Ă©poque est ce manu- scrit ? Il faudrait ĂȘtre palĂ©ographe pour le dĂ©terminer. On trouvera plus loin une hypothĂšse qui, si elle Ă©tait fondĂ©e, le ferait remonter jusqu'aux environs de 1240 2. Son contenu mĂȘme semble corroborer cette date re- culĂ©e. Il y a lĂ en effet beaucoup de piĂšces dont s'allĂ©- gea rapidement le Manuel du FrĂšre Mineur. BientĂŽt on se contenta de la RĂšgle pour tenir compa- gnie au brĂ©viaire ; on y ajoutait parfois le Testament. Mais les autres Ă©crits, s'ils ne tombĂšrent pas tout Ă fait dans l'oubli, cessĂšrent du moins d'ĂȘtre d'un usage jour- nalier. 1. Nudis pedihus incedentes, funiculis cincti, tunicis griseis et talaribus peciatis, insuto capucio utenies . . . nihil sibi ultra noc^ tem reservantes . . . libros continue suos ... in forulis a collo dependcntes bajulantes. Historia Anglorum, Pertz Scrijot. t. 28, p. 397. Cf. 2 Gel. 3, 135 ; Fior. 5 ; Sjwc. 45 b. 2. Voir page 370 n. 1. XLII VIE DE S. FRANĂOIS Ceux des Ă©crits de saint François qui n'ont pas d4n- tĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral ou ne concernent pas les FrĂšres, n'ont na- turellement pas trouvĂ© place dans ce recueil. Dans cette nouvelle catĂ©gorie il faut ranger les documents suivants 1 La RĂšgle de 1221 K 2° La RĂšgle des Clarisses, que nous ne possĂ©dons plus sous sa forme premiĂšre 2. 3° Une sorte d'instruction spĂ©ciale pour les ministres gĂ©nĂ©raux ^. 4° Un billet Ă sainte Claire '*. 5*^ Un autre billet Ă la mĂȘme^ 6° Un billet Ă frĂšre LĂ©on ^. 7° Quelques oraisons 7. 8° La bĂ©nĂ©diction de frĂšre LĂ©on. â L'autographe original, qui est conservĂ© dans le trĂ©sor du Sacro-Con- vento, a Ă©tĂ© fort bien reproduit par l'hĂ©liogravure^. 1. Voir page 288 et suiv. 2. Voir page 179. 3. Voir page 365 et suiv. 4. Voir page 272. 5. Voir page 377. 6. Voir page 300. 7. a Sanctus Dominus Deus noster. Cf. Spec. 126 a. Firmamen- tum 18 b 2. Conform. 202 b 1. b Ave Domina sancta. Cf. Spcc. Vil a. Conform. 138 a 2. c Sancta Maria virgo. Cf. Spcc. 126b. Conform. 202b 2. 8. V. S. François, in-4o, Paris 1885 Pion p. 233. L'authenticitĂ© de cette bĂ©nĂ©diction paraĂźt bien Ă©tablie puisqu'elle Ă©tait dĂ©jĂ prĂ©- cieusement gardĂ©e du vivant de Thomas de Celano. On n'a jamais songĂ© Ă demander Ă cette piĂšce un tĂ©moignage historique. Peut-ĂȘtre est-ce un tort? Le centre de la feuille est occupĂ© par la bĂ©nĂ©diction qui fut dictĂ©e Ă frĂšre LĂ©on Benedicat tibi Dominus et custodiat te, ostendat faciem suam tibi et misereatur tui convertat vultum ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES XLIII Quant aux deux fameux cantiques Amor de caritade * et In foco Vamor ml mise^j ils ne sauraient ĂȘtre attri- buĂ©s, du moins sous leur forme actuelle, Ă saint François. Il appartient Ă M. Monaci et Ă ses nombreux et sa- vants Ă©mules, de faire la lumiĂšre sur ces dĂ©licates ques- tions, en publiant d'une maniĂšre scientifique les monu- ments de la poĂ©sie italienne Ă ses dĂ©buts. J'ai indiquĂ© plus haut quelques opuscules dont on retrouve la trace certaine, mais qui ont Ă©tĂ© perdus. Ils sont en nombre bien plus considĂ©rable qu'on ne le pen- serait au premier abord. Dans le zĂšle missionnaire des premiĂšres annĂ©es, les frĂšres ne pouvaient songer Ă col- lectionner des documents. On n'Ă©crit pas ses mĂ©moires en pleine jeunesse. suum ad te et det tibi pacem. Au-dessous, François ajouta le signe thau T qui Ă©tait comme sa griffe Bon. 51 ; 308 et les mots frater LĂ©o Dominus benedicat te. Puis quand ce souvenir passa parmi les reliques du Saint, frĂšre LĂ©on, pour l'authentiquer en quelque sorte, ajouta les indications suivantes vers le milieu Beatus Franciscus scripsit manu sua istam benedictionem mihi fratri Leoni; vers le bas Simili modo fecit istud signum thau cum capite manu sua. Mais l'annotation la plus prĂ©cieuse se trouve au haut de la feuille Beatus Fran- ciscus duobus annis ante inortem. suam fecit quadragesimam in loco AlvernĆ ad honorem BeatĆ Virginis MariĆ matris Dei et heati Michael archangeli a festo assumptionis SanctĆ MariĆ Vir- ginis usque ad festum, sancti Michael septembris et facta est super eum m,anus Domini per visionem et allocutionem seraphym, et impressionem stigmatum in corpore suo. Fecit lias laudes ex alio latere catule scriptas et manu sua scripsit gratias agens Domino de bĂ©nĂ©ficia sibi collato. V. 2 Gel. 2, 18. 1. Wadding en donne le texte d'aprĂšs S. Bernardin de Sienne. OpĂ©ra t. IV, sermo 16 extraord. et sermo feriĆ scxtĆ Parasceves. Amoni Legtnda trium Sociorum, p. 166. 2. Wadding en a puisĂ© le texte dans S. Bernardin toc. cit. Sermo IV extraord. Il a Ă©tĂ© reproduit aussi par Amoni ioc. cit. p. 165. On en trouvera deux versions fort curieuses dans les Miscellanea 1888, p. 96 et 190. XLIV VIE DE S. FRANĂOIS Il faut se rappeler aussi que la Portioncule n'avait ni archives, ni bibliothĂšque. C'Ă©tait une chapelle de dix pas de long, avec quelques huttes Ă Fentour. L'Ordre Ă©tait dĂ©jĂ vieux de dix ans, qu'on n'y avait vu qu'un seul livre un Nouveau Testament. On ne le garda mĂȘme pas. Un jour, François, n'ayant rien d'autre, le donna Ă une pauvre femme qui demandait l'aumĂŽne, et comme Pierre de Catane, son vicaire, s'Ă©tonnait de cette pro- digalitĂ© Ne nous avait-elle pas donnĂ© ses deux fils pour l'Ordre? » rĂ©pliqua vivement le maĂźtre^. 1. 2 Gel. 3, 35. Ce fait eut lieu sous le vicariat de Pierre de Catane, par consĂ©quent entre le 29 sept. 1220 et le 10 mirs 1221. II BIOGRAPHIES PROPREMENT DITES I. Note prĂ©liminaire. Pour apprĂ©cier d'une façon un peu exacte les docu- ments qui vont nous occuper, il faut les replacer au milieu des circonstances de leur Ă©closion, les Ă©tudier jusque dans le dĂ©tail, et dĂ©terminer la valeur spĂ©ciale de chacun d'eux. Ici, plus que partout ailleurs, il faut se garder des thĂ©ories faciles et des gĂ©nĂ©ralisations prĂ©cipitĂ©es. La mĂȘme existence, racontĂ©e par deux contemporains Ă©gale- ment vĂ©ridiques, peut prendre des tons bien diffĂ©rents. C'est surtout le cas, si l'homme dont il s'agit a soulevĂ© des enthousiasmes et des colĂšres, si sa pensĂ©e intime, si ses crĂ©ations ont prĂȘtĂ© Ă des discussions, si ceux-lĂ mĂȘme qui sont chargĂ©s de rĂ©aliser ses idĂ©es et de conti- nuer son Ćuvre se divisent et s'attaquent. Or, il en fut ainsi pour saint François. De son vivant, et sous ses yeux, des divergences se manifestĂšrent, sour- dement d'abord, puis au grand jour. Ivre d'amour, il Ă©tait allĂ© de chaumiĂšre en chaumiĂšre, de chĂąteau en chĂąteau, prĂȘchant la pauvretĂ© absolue ; mais cet Ă©lan d'enthousiasme, cet idĂ©alisme illimitĂ© ne pouvaient ĂȘtre de longue durĂ©e. L'Ordre des FrĂšres Mineurs, en grandissant, s'ouvrait non seulement Ă quel- ques Ăąmes d'Ă©lite arrivĂ©es au paroxysme des ardeurs XLVI VIE DE S. FRANĂOIS mystiques, mais Ă tous les hommes qui aspiraient Ă une rĂ©forme religieuse laĂŻques pieux, moines dĂ©sillusionnĂ©s sur la vertu des anciens ordres, prĂȘtres effrayĂ©s des vices du clergĂ© sĂ©culier, tous apportaient â sans le vou- loir sans doute, et mĂȘme Ă leur insu, â trop de leur vieil homme pour ne pas transformer peu Ă peu la nou- velle institution. Plusieurs annĂ©es avant sa mort , François avait aperçu le pĂ©ril et fait tous ses efforts pour le con- jurer. On le vit dĂ©jĂ agonisant rassembler ses forces, pour dĂ©clarer encore une fois ses volontĂ©s aussi claire- ment que possible, et pour conjurer ses frĂšres de nĂ© jamais toucher Ă la RĂšgle, mĂȘme sous prĂ©texte de la commenter ou de l'expliquer hĂ©las , quatre ans ne s'Ă©taient pas Ă©coulĂ©s, et GrĂ©goire IX inaugurait, sur la priĂšre des FrĂšres eux-mĂȘmes, la longue sĂ©rie des pontifes qui ont expliquĂ© la RĂšgle * ! La pauvretĂ©, telle que François l'avait voulue, ne fut bientĂŽt qu'un souvenir. Le succĂšs inouĂŻ de l'Ordre ne lui amenait pas seulement de nouvelles recrues, il amenait l'argent. Comment le refuser quand on avait tant d'oeuvres Ă fonder? Beaucoup de frĂšres trouvaient que leur maĂźtre avait exagĂ©rĂ© bien des choses, qu'il y avait dans la RĂšgle des nuances Ă observer, par exemple entre les conseils et les prĂ©ceptes. Une fois la porte ou- verte aux interprĂ©tations, il devenait impossible de la fermer. La famille franciscaine se divisait donc eu partis opposĂ©s qu'il est souvent difficile de distinguer. Il y avait d'abord quelques hommes remuants, indis- ciplinĂ©s qui se groupaient autour des anciens frĂšres. Ceux-ci trouvaient, dans leur qualitĂ© de premiers com- pagnons du Saint, une autoritĂ© morale souvent plus i. Bulle Quo elongati du 28 septembre 1230. Voir p. 387. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES XLVIl grande que l'autoritĂ© officielle des ministres et des gar- diens. Le peuple se tournait d'instinct vers eux comme vers les vĂ©ritables continuateurs de l'Ćuvre de saint François. Ce n'Ă©tait pas sans raison. Ils avaient la vigueur, la vĂ©hĂ©mence des convictions absolues; Teussent-ils voulu, ils n'auraient pas pu tran- siger. On les voyait apparaĂźtre tout Ă coup dans les villes ou les villages pour sommer les grands aussi bien que le peuple de fciire pĂ©nitence. Lorsqu'ils descendaiect de leurs ermitages des Apennins, les yeux brillants de fiĂšvre, perdus encore dans la contemplation, tout dans leur personne racontait leurs radieuses visions ; et la foule Ă©tonnĂ©e et subjuguĂ©e s'agenouillait pour baiser la trace de leurs pas, le cĆur mystĂ©rieusement troublĂ©. Un groupe plus nombreux Ă©tait celui des frĂšres qui, sans ĂȘtre moins saints, condamnaient ces allures. NĂ©s loin de l'Ombrie, dans des contrĂ©es oĂč la nature semble une marĂątre, oĂč l'adoration, bien loin d'ĂȘtre l'acte ins- tinctif de l'Ăąme heureuse s'Ă©panouissant pour bĂ©nir le PĂšre cĂ©leste, est au contraire le cri de dĂ©tresse de l'atome perdu dans l'immensitĂ©, ils voulaient surtout une rĂ©forme religieuse, rationnelle et profonde. Ils rĂȘvaient de ramener l'Eglise Ă la puretĂ© des anciens jours, et voyaient dans le vĆu de pauvretĂ©, entendu dans le sens le plus large, le meilleur moyen de lutter contre les vices du clergĂ©; mais ils oubliaient ce qu'il y avait eu, dans la mission de saint François, de fraĂźcheur, de gaietĂ© italienne, de poĂ©sie ensoleillĂ©e. Pleins d'admiration pour lui, ils voulaient cependant Ă©largir la base de son Ćuvre, et pour cela ne renoncer Ă aucun moyen d'influence, surtout pas Ă la science. Cette tendance dominait en France, en Allemagne et en Angleterre. En Italie elle Ă©tait reprĂ©sentĂ©e par une fraction trĂšs XLVIII VIE DE S. FRANĂOIS puissante, sinon par le nombre, du moins par l'autoritĂ© de ses reprĂ©sentants. C'Ă©tait celle que favorisait la papautĂ©. Ce fut celle de frĂšre Elie et de tous les ministres gĂ©nĂ©raux de TOrdre au XIIP siĂšcle, si on en excepte Jean de Parme 1247 â 1257 et Raymond Gaufridi 1289â1295. Dans la PĂ©ninsule, un troisiĂšme groupe, celui des relĂąchĂ©s, Ă©tait de beaucoup le plus nombreux les hommes vulgaires auxquels la vie monastique paraissait la plus facile existence, les moines girovagues heureux de s'at- tirer un regain de succĂšs en Ă©talant la RĂšgle nouvelle, y formaient la majoritĂ© de la famille franciscaine. On comprend sans peine que des documents Ă©manĂ©s de milieux si divers portent l'empreinte de leur origine. Les hommes qui vont nous apporter leur tĂ©moignage, sont les combattants de la lutte sur la question de la pauvretĂ©, lutte qui a troublĂ© l'Eglise pendant deux siĂšcles, passionnĂ© toutes les consciences, et qui a eu ses bourreaux et ses martyrs. Pour dĂ©terminer la valeur de ces tĂ©moignages, il faut donc avant tout en rechercher l'origine. Il est Ă©vident qu'un rĂ©cit des intransigeants de droite ou de gauche peut n'avoir qu'une trĂšs mince valeur s'il s'agit de points controversĂ©s ; d'oĂč la conclusion, que l'autoritĂ© d'un narrateur peut varier de page Ă page ou mĂȘme de ligne Ă ligne. Ces idĂ©es, si simples qu'on a presque besoin de s'ex- cuser de les exprimer, n'ont cependant jamais guidĂ© ceux qui ont Ă©tudiĂ© la vie de saint François. Les plus savants, comme Wadding et Papini, ont juxtaposĂ© les rĂ©cits des divers biographes, Ă©laguant çà et lĂ ceux qui Ă©taient par trop contradictoires ; mais ils ont fait cela au hasard, sans rĂšgle ni mĂ©thode, guidĂ©s par l'impression du moment. il ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES XLIX Le long travail du Bollandiste Suysken est viciĂ© par un dĂ©faut analogue rivĂ© Ă son principe que les plus anciens documents sont toujours les meilleurs i, il s'est Ă©tabli sur la PremiĂšre Vie par Tiiomas de Celano comme sur un roc inĂ©branlable et a jugĂ© toutes les autres lĂ©- gendes Ă travers celle-lĂ ^. Quand on rattache les documents aux circonstances troublĂ©es de leur apparition, quelques-uns perdent un peu de leur autoritĂ©, d'autres qui avaient Ă©tĂ© nĂ©gligĂ©s, comme Ă©tant en contradiction avec les tĂ©moignages devenus quasi officiels, reprennent tout Ă coup voix au chapitre, tous enfin gagnent une vie qui double leur intĂ©rĂȘt. Ce changement de point de vue dans l'apprĂ©ciation des sources, cette critique que je serais tentĂ© d'appeler soli- daire et organique, amĂšne une transformation profonde dans la biographie de saint François. Par un phĂ©nomĂšne qui peut sembler Ă©trange, on arrive Ă tracer de lui un portrait qui se rapproche bien plus de celui qu'il a dans l'imagination populaire en Italie, que de celui qu'en ont fait les savants historiens mentionnĂ©s plus haut. Lorsque François mourut 1226, les partis qui divi- saient l'Ordre Ă©taient dĂ©jĂ entrĂ©s en lutte. Cet Ă©vĂ©ne- ment prĂ©cipita la crise frĂšre Elie remplissait depuis cinq ans les fonctions de ministre gĂ©nĂ©ral avec le titre de vicaire. Il dĂ©ploya une stupĂ©fiante activitĂ©. Investi de la confiance de GrĂ©goire IX, il Ă©carta les zĂ©lanti 1. Il va sans dire que je ne veux pas m'Ă©lever contre ce principe, un des plus fĂ©conds de la critique, mais encore ne faut-il pas l'em- ployer isolĂ©ment. 2. Les travaux d'Ă©rudition parus en Allemagne dans ces derniĂšres annĂ©es pĂšchent par le mĂȘme dĂ©faut. On les trouvera citĂ©s en temps utile dans le corps de l'ouvrage. L VIE DE S. FRANĂOIS des charges, fortifia la discipline jusque dans les pro- vinces les plus Ă©loignĂ©es, obtint de nombreux privilĂšges de la curie, et prĂ©para avec une incroyable rapiditĂ© la construction de la double basilique oĂč devaient reposer les cendres du StigmatisĂ© ; mais malgrĂ© tous ses efforts, le chapitre de 1227 le laissa de cĂŽtĂ© et choisit Jean Parenti comme ministre gĂ©nĂ©ral. Furieux de cet Ă©chec, il mit aussitĂŽt tout en Ćuvre pour ĂȘtre nommĂ© au chapitre suivant. Il semble mĂȘme qu'il n'ait tenu aucun compte de la nomination de Jean Parenti, et qu'il ait continuĂ© Ă se comporter comme s'il eĂ»t Ă©tĂ© ministre 1. TrĂšs populaire parmi les Assisiates, tout Ă©blouis de la magnificence du monument qui surgissait sur la Colline de V enfer j devenue la Colline du paradis'^ sĂ»r d'ĂȘtre appuyĂ© par une partie considĂ©rable de l'Ordre et par le pape, il poussa les travaux de la basilique, avec une dĂ©cision et un bonheur peut-ĂȘtre uniques dans les an- nales de l'architecture 2. 1. Eccl. 13. Voluerunt ipsi, quos ad capitulum concesscrat venire frater Helias; nam omnes concessit etc. An. fr. t. I, p. 241. Cf. Mon. Germ. hist. Script, t. 28, p. 564. 2. La mort de François est du 3 oct. 1226. Le 29 mars 1228 Ălie reçoit l'emplacement de la basilique. L'Instrumentum dona- tionis est conservĂ© encore aujourd'hui Ă Assise PiĂšce n» 1 du deuxiĂšme paquet Ă ' Instrumenta diversa pertinentia ad Sacrum Conventum. Il a Ă©tĂ© publiĂ© par Thode Franz von Assisif p. 539. Le 17 juillet de la mĂȘme annĂ©e, lendemain de la canonisation, GrĂ©goire IX posait solennellement la premiĂšre pierre. Moins de deux ans aprĂšs, l'Ă©glise basse Ă©tait terminĂ©e et le 25 mai 1230 on y transportait le corps du Saint. En 1236, l'Ă©glise supĂ©rieure Ă©tait achevĂ©e Ă son tour. Elle Ă©tait dĂ©jĂ dĂ©corĂ©e d'une premiĂšre sĂ©rie de fresques, et Giunta peignait Ăhe de grandeur naturelle, agenouillĂ© au pied du crucifix au-dessus de l'entrĂ©e du chĆur. En 1239, tout Ă©tait parachevĂ©, et le campanile recevait les fa- ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LT Tout cela ne pouvait se faire sans soulever l'indigna- tion des zĂ©lateurs de la pauvretĂ©. Lorsqu'ils virent sur le tombeau de celui qui avait dĂ©fendu Ă ses disciples le simple contact de l'argent, un tronc monumental destinĂ© Ă recueillir les aumĂŽnes des fidĂšles, il leur sembla que la prophĂ©tie de saint François, annonçant l'apostasie d'une partie de l'Ordre, allait se rĂ©aliser. Un vent de rĂ©volte passa sur les ermitages de l'Ombrie. Ne fallait-il pas empĂȘcher par tous les moyens cette abomination dans le lieu saint? On savait Elie terrible dans ses sĂ©vĂ©ritĂ©s, mais ses adversaires se sentaient le courage d'aller jusqu'au bout et de tout souffrir pour dĂ©fendre leurs convictions. Un jour, on trouva le tronc brisĂ© par frĂšre LĂ©on et ses amis * . On voit Ă quel degrĂ© d'acuitĂ© la lutte Ă©tait parvenue. C'est sur ces entrefaites que parut la premiĂšre lĂ©gende. II. PremiĂšre Vie par Thomas de Celano^. Thomas de Celano en Ă©crivant cette lĂ©gende, sur laquelle il devait revenir plus tard pour la corn- meuses cloches dont le carillon rĂ©jouit encore toute la vallĂ©e de l'Ombrie. Ainsi donc, trois mois et demi avant la canonisation, Ălie recevait l'emplacement de la basilique. Le procĂšs de canonisation commença fin mai 1228 1 Gel. 123 et 124. Cf. Potthast 8194 ss.. 1. Spec. 167 a. Cf. An. fr. t. II, p. 45 et note. 2. Les Bollandistes en ont donnĂ© le texte A. SS. Octobris t. II, p. 683-723 d'aprĂšs un manuscrit de l'abbaye cistercienne de Long- pont au diocĂšse de Soissons. â Il a Ă©tĂ© publiĂ© ensuite Ă Rome en 1806, sans nom d'Ă©diteur en rĂ©alitĂ© par le P. Rinaldi Conventuel sous le titre Seraphici viri S. Francisci Assisiatis vitĆ duĆ auctore B. Thoma de Celano, d'aprĂši un manuscrit de Fallerone, . la Marche d'AncĂŽne qui dans les environs de Terni fut volĂ© LU VIE DE S. FRANĂOIS plĂ©ter, obĂ©issait Ă un ordre exprĂšs du pape GrĂ©- goire IX *. Pourquoi celui-ci ne s'Ă©tait-il pas adressĂ© Ă un des frĂšres de l'entourage immĂ©diat du Saint? Le talent de l'auteur pourrait expliquer ce choix; mais, outre que les prĂ©occupations littĂ©raires ne doivent dans ce cas venir qu'au second rang, frĂšre LĂ©on et plusieurs autres prou- vĂšrent plus tard qu'ils savaient, eux aussi, manier la plume. Si Celano fut chargĂ© de la biographie officielle, c'est par les brigands au frĂšre chargĂ© de le rapporter. Ce second texte a Ă©tĂ© reproduit Ă Rome en 1880 par le chanoine Amoni Vita prima S. Fraiiciscij auctore B. Thoma de Celano, Roma, tipografia dĂ©lia face 1880, in-8°, 42 p. Les citations seront faites d'aprĂšs la division introduite par les Bollandistes, mais dans plusieurs pas- sages importants le texte Rinaldi-Amoni donne de meilleures leçons que celui des Bollandistes. Ce dernier a Ă©tĂ© retouchĂ© et complĂ©tĂ© çà et lĂ . Voir par exemple 1 Cel. 24 et 31. Quant aui manuscrits, le R. P. Denifle estime que le plus ancien parmi ceux qui sont connus est celui de Barcelone Archiva de la corona de Aragon, p. Ripoll. n. 41 {Archiv t. I, p. 148. Il y en a un Ă la BibliothĂšque nationale de Paris, fonds latin, n» 3817, qui renferme une curieuse note Apud Perusium felix domnus papa Gregorius nonus gloriosi secundo pontiflcatus sut anno, quinto Kal. martii 25 fĂ©vrier 1229 legendam hanc recepit, confirmavit et censuit fore tenendam. Un autre manuscrit, qui mĂ©- rite de fixer l'attention, soit par son anciennetĂ© , XIII siĂšcle, soit par la correction du texte, et qui semble avoir Ă©chappĂ© aux recherches des Ă©rudits s'occupant des Franciscains, est celui que possĂšde l'Ăcole de mĂ©decine de Montpellier, n» 30 in-folio velin Passion aie vĂȘtus ecclesiĆ S. Benigni divionensis. La lĂ©gende de Celano y occupe les f"s 257 a â 271 b. Le texte finit brusquement au milieu du para- graphe 112 par suspiriis ostendebant. A part cette lacune finale il est complet. Cf. Archives Pertz t. VII, p. 195 et 196. V. Catalogue gĂ©nĂ©ral des manuscrits des bibliothĂšques publiques des dĂ©parte- ments, t. l, p. 295. 1. V. 1 Cel. Prol. Jubente doynino et glorioso Papa Gregorio. Celano l'Ă©crivit aprĂšs la canonisation 16 juillet 1228 et avant le 25 fĂ©vrier 1229, car la date indiquĂ©e plus haut ne suscite aucune difficultĂ©. ETUDE CRITIQUE DES SOURCES LUI qu'Ă©galement sympathique Ă GrĂ©goire IX et Ă frĂšre Elie, il avait Ă©tĂ© mis, par son absence, en dehors des luttes qui avaient marquĂ© les derniĂšres annĂ©es de la vie de François. TempĂ©rament irĂ©nique, il appartenait Ă la catĂ©gorie de ces Ăąmes qui se persuadent facilement que l'obĂ©issance est la premiĂšre des vertus, que tout supĂ©- rieur est un saint et que, si par malheur, il ne Test pas, on n'en doit pas moins agir comme s'il l'Ă©tait. Nous avons sur sa vie quelques renseignements ori- ginaire de Celano dans les Abruzzes, il rappelle d'une façon discrĂšte que sa famille Ă©tait noble et ajoute mĂȘme, avec une pointe de naĂŻvetĂ©, que le maĂźtre avait des Ă©gards particuliers pour les frĂšres nobles et lettrĂ©s. C'est aux environs de 1215, lorsque François revint d'Espagne, qu'il entra dans l'Ordre i. Au chapitre de 1221, CĂ©saire de Spire, chargĂ© de la mission d'Allemagne, le prit parmi ceux qui devaient l'accompagner 2. En 1223, il Ă©tait nommĂ© custode de Mayence, Worms, Cologne et Spire. Au mois d'avril de la mĂȘme annĂ©e, lorsque CĂ©saire, dĂ©vorĂ© du dĂ©sir de revoir saint François, revint en Italie, il chargea Celano de remplir ses fonctions jusqu'Ă l'arrivĂ©e du nouveau provincial '^. Jusqu'ici aucun renseignement ne permet de dĂ©cider oĂč il se trouva Ă partir du chapitre provincial tenu Ă Spire le 8 septembre 1223. Il a dĂ» ĂȘtre Ă Assise en 1228, car son rĂ©cit de la canonisation est celui d'un 1. 1 Cel. 56. Peut-ĂȘtre Ă©tait-il fils de ce Thomas comte de Celano auquel Richard de S. Germano fait si souvent allusion dans sa chronique 1219-1223. Voir aussi deux lettres de FrĂ©dĂ©ric II Ă Honorius III des 24 et 25 avril 1223 publiĂ©es dans Winckelmann ; Acta imperii inedita, t. I, p. 232. 2. Jord. 19. 3. Jord. 30 et 31. LĂV VIE DE S. FRANĂOIS tĂ©moin oculaire. Il y Ă©tait encore en 1230, et sans doute revĂȘtu d'une charge importante, puisqu'il put remettre Ă frĂšre Jourdain des reliques de saint François t. Ăcrit d'un style attachant, fort souvent poĂ©tique, son livre respire une admiration Ă©mue pour son hĂ©ros ; ce tĂ©moignage s'impose immĂ©diatement comme sincĂšre et vrai ; quand il est partial, c'est sans le vouloir et peut- ĂȘtre mĂȘme sans le savoir. Le point faible de cette biographie, c'est le tableau qu'elle nous trace des rap- ports de frĂšre Elie et du fondateur de l'Ordre lorsqu'on relit les chapitres consacrĂ©s aux deux derniĂšres annĂ©es, il s'en dĂ©gage l'impression fort nette qu'Elie aurait Ă©tĂ© dĂ©signĂ© par François pour lui succĂ©der ^. Or, si l'on rĂ©flĂ©chit qu'au moment oĂč Ă©crivait Celano, Jean Parenti Ă©tait ministre gĂ©nĂ©ral, on s'apercevra tout de suite de la portĂ©e de ces indications^. Toutes les occasions sont saisies pour donner un rĂŽle prĂ©pondĂ©rant Ă Elie*. C'est un vrai manifeste en sa faveur. Y a-t-il lieu d'accuser Celano? Je ne le crois pas. Il faut simplement se rappeler que son travail a pu ĂȘtre Ă 1. Jord. 59. Cf. Glassberger ann. 1230, Quant Ă la question de savoir s'il est l'auteur du Dies irĆ, elle serait dĂ©placĂ©e ici. 2. Gela est si vrai que la plupart des historiens ont Ă©tĂ© amenĂ©s Ă croire Ă deux gĂ©nĂ©ralats d'Ălie l'un de 1227-1230, l'autre de 1236- 1239. La lettre Non ex odio de FrĂ©dĂ©ric II 1239 Ă©nonce la mĂŽme idĂ©e RĂȘvera papa iste qucmdam religiosum et timoratum fratrem Helyam, ministrum ordinis fratrum minorum ab ipso beato Francisco pĂątre ordinis migrationis suĆ tempore constitutum . . . in odium nostriim . . . deposuit. Huillard-BrĂ©holles Hist. dipl. FrĂ©d. Il, t. V, p. 346. 3. Il n'est nommĂ© qu'une fois. 1 Gel. 48. 4. 1 Gel. 95, 98, 105, 109. Le rĂ©cit de la bĂ©nĂ©diction est surtout significatif. Super quem inquit {Franciscus teneo dexteram meam? Super fratrem Heliam, inquiunt. Et ego sicvolo, sit ... 1 Gel. 108. Ges derniers mots dĂ©cĂšlent l'intention d'une façon Ă©vidente. Cf. 2 Gel. 3, 139. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LV bon droit appelĂ© lĂ©gende de GrĂ©goire IX. Elie Ă©tait riionime du pape, et c'est sur ses renseignements que le biographe a travaillĂ©. Il ne pouvait pas ne pas s'arrĂȘter avec une complaisance particuliĂšre sur son intimitĂ© avec François. Par contre, on ne peut s'attendre Ă j trouver des dĂ©tails qui auraient pu appuyer les prĂ©tentions des adversaires d'Elie, de ces zĂ©lateurs indociles qui dĂ©jĂ se paraient avec orgueil du titre de Compagnons du Saint et cherchaient Ă constituer dans l'Ordre une sorte d'aristocratie spirituelle. Parmi eux s'en trouvaient quatre qui, durant les deux derniĂšres annĂ©es, n'avaient pour ainsi dire pas quittĂ© François. On devine combien il Ă©tait difficile de ne pas parler d'eux. Celano tait soigneusement leur nom, sous prĂ©texte de mĂ©nager leur modestie! ; mais par les louanges prodiguĂ©es Ă GrĂ©- goire IX, Ă frĂšre Elie^^ Ă sainte Claire ^ ou mĂȘme Ă des personnages tout Ă fait secondaires, il montre que sa discrĂ©tion Ă©tait loin d'ĂȘtre toujours aussi en Ă©veil. Tout cela est trĂšs grave ; il ne faudrait cependant pas l'exagĂ©rer. Il y a une partialitĂ© Ă©vidente, mais il serait injuste d'aller plus loin et de croire, comme on l'a fait plus tard, que les derniers temps de la vie de François aient eu le caractĂšre d'une lutte contre la personne mĂȘme d'Ălie. Cette lutte a existĂ©, mais contre des ten- dances dont François n'aperçut pas la source. Il emporta dans la tombe ses illusions sur son collaborateur. 1. 1 Gel. 102; Cf. 91 et 109. FrĂšre LĂ©on n'est mĂȘme pas nommĂ© dans tout l'ouvrage. Ange, IlluminĂ©, Masseo non plus ! 2. 1 Gel. Prol.; 73-75; 99-101; 121-126. AprĂšs S. François c'est GrĂ©goire IX et frĂšre Elle, 1 Gel. 69; 95; 98 ; 105, 108; 109. qui occupent le premier plan. 3. 1 Gel. 18 et 19; 116 et 117. LVI VIE DE S. FRANĂOIS Au reste ce dĂ©faut est aprĂšs tout secondaire en ce qui concerne la physionomie mĂȘme de François. Elle y apparaĂźt, comme dans les Trois Compagnons ou les Fioretti, avec un sourire pour toutes les joies, des flots de larmes pour toutes les douleurs ; on sent Ă chaque instant TĂ©motion contenue, le cĆur de l'Ă©crivain sub- juguĂ© par la beautĂ© morale de son hĂ©ros. 111. Coup d'Ćil sur rhistoire de TOrdre de 1230-1244. Lorsque Thomas de Celano termina sa lĂ©gende, il sentait mieux que personne les lacunes de ce travail, pour lequel il n'avait pu rĂ©unir que des matĂ©riaux in- suffisants. Elie et les autres frĂšres d'Assise lui avaient racontĂ© la jeunesse de François et son activitĂ© en Ombrie ; mais outre qu'il avait prĂ©fĂ©rĂ©, soit par prudence, soit par amour de la paix, garder le silence sur certains Ă©vĂ©ne- ments ^, il y avait de longues pĂ©riodes sur lesquelles il n'avait recueilli aucune donnĂ©e 2. Aussi semble-t-il indiquer l'intention de reprendre son ouvrage pour le complĂ©ter ^, Ce n'est pas ici le lieu de faire l'histoire de l'Ordre, 1. Ceux qui se passĂšrent pendant l'absence de François 1220â 1221. Il glisse sur les difficultĂ©s rencontrĂ©es Ă Rome pour l'appro- bation de la premiĂšre RĂšgle; il ne mentionne ni la seconde, ni la troisiĂšme, et ne fait aucune allusion aux circonstances qui les pro- voquĂšrent. Il les connaissait cependant, ayant vĂ©cu dans l'intimitĂ© de GĂ©saire de Spire, le collaborateur de la seconde 1221. 2. Par exemple le voyage de François en Espagne. 3. 1 Gel. 88. Ea sola quĆ necessaria magis oceurrunt ad prae- sens, intendimus adnotare. Il est Ă remarquer que dans le pro- logue il parle au singulier. ĂTLDE CRITIQUE DES SOURCES LYII mais quelques renseignements sont nĂ©cessaires pour re- placer les documents dans leur milieu. Ălu ministre gĂ©nĂ©ral en 1232, frĂšre Elie en profita pour travailler avec une indomptable fermetĂ© Ă la rĂ©a- lisation de ses idĂ©es. De nouvelles collectes furent orga- nisĂ©es dans toutes les provinces pour la basilique d'As- sise dont les travaux Ă©taient poussĂ©s avec une activitĂ© qui n'a nui ni Ă la soliditĂ© de l'Ă©difice, ni Ă la beautĂ© des dĂ©tails, aussi achevĂ©s et aussi parfaits que dans aucun monument de l'Europe. On conçoit les sommes Ă©normes qu'il avait fallu drai- ner pour mener Ă bien, en si peu de temps, une pareille entreprise. De plus, frĂšre Elie avait exigĂ© de tous ses subordonnĂ©s une obĂ©issance absolue nommant et desti- tuant les ministres provinciaux selon ses vues person- nelles, il nĂ©gligeait de convoquer le chapitre gĂ©nĂ©ral et envoyait dans toutes les provinces ses Ă©missaires, sous le nom de visiteurs, pour y assurer l'exĂ©cution de ses ordres. Les modĂ©rĂ©s d'Allemagne, de France et d'Angleterre trouvĂšrent bien vite ce joug insupportable. Il leur Ă©tait dur d'ĂȘtre dirigĂ©s par un ministre italien rĂ©sidant Ă As- sise, bourgade placĂ©e en dehors des voies de la civilisa- tion, tout Ă fait Ă©trangĂšre au mouvement scientifique con- centrĂ© dans les universitĂ©s d'Oxford, Paris et Bologne. Ils trouvĂšrent, dans l'indignation des zĂ©lanti contre Elie et son mĂ©pris de la KĂšgle, un appui dĂ©cisif. Le mi- nistre n'eut bientĂŽt, pour se dĂ©fendre, que son Ă©nergie, la faveur du pape et de rares modĂ©rĂ©s italiens. Il rĂ©prima plusieurs tentatives de rĂ©volte par un redouble- ment de vigilance et de sĂ©vĂ©ritĂ©. Ses adversaires arrivĂšrent cependant Ă s'assurer des intelligences en cour de Rome ; le confesseur du pape fut mĂȘme gagnĂ© ; malgrĂ© tout, le succĂšs de la conspiration Ă©tait encore incertain quand s'ouvrit le chapitre de 1239. LYIII VIE DE S. FRANĂOIS GrĂ©goire IX, encore favorable Ă Ălie *, le prĂ©si- dait. La peur donna tout Ă coup du courage aux con- jurĂ©s ; ils jetĂšrent leurs accusations Ă la face de leur ennemi. Thomas d'Eccleston nous fait un rĂ©cit colorĂ© de ce qui se passa. Elie fut fier, violent, mĂȘme menaçant. Il y eut alors, des deux cĂŽtĂ©s, des cris, des vocifĂ©rations ; on allait en venir aux mains, lorsque quelques mots du pape ramenĂšrent le silence. Sa rĂ©solution Ă©tait prise il abandonnerait son protĂ©gĂ©. Il lui fit demander sa dĂ©mission. Elie, indignĂ©, refusa. Alors GrĂ©goire IX expliqua qu'en le maintenant en charge, il avait cru rĂ©pondre au vĆu de la majoritĂ©, qu'il n'entendait pas l'imposer Ă l'Ordre, et que, puisque les frĂšres ne voulaient plus de lui, il le dĂ©clarait dĂ©chu du gĂ©nĂ©ralat. La joie des vainqueurs, dit Eccleston, fut immense et ineffable. Ils choisirent Albert de Pise, provincial d'An- gleterre, pour lui succĂ©der, et mirent dĂšs lors tout en Ćuvre pour reprĂ©senter Elie comme une crĂ©ature de FrĂ©dĂ©ric II 2. L'ancien ministre Ă©crivit bien au pape pour expliquer sa conduite, mais la lettre ne parvint pas Ă destination. Elle avait dĂ» passer par les mains de son successeur qui ne la remit pas lorsque Albert de Pise fut mort, on la trouva dans sa tunique 3. 1. En 1238 il avait envoyĂ© Ălie Ă CrĂ©mone, chargĂ© d'une mission pour FrĂ©dĂ©ric IL Salimbene ann. 1229. â V. aussi l'accueil de GrĂ©goire aux appelants contre le gĂ©nĂ©ral Jord. 63. 2. Voir la lettre de FrĂ©dĂ©ric II Ă Ălie sur la translation de sainte Elisabeth, mai 1236. Winkelmann, Acta, t. I, p. 299. Cf. Huillard- BrĂ©holles. Hist. dipl. Intr. p. ce. 3. Les Ă©lĂ©ments de ce rĂ©cit sont Catalogus Ministrorum de Ber- nard de Besse, ap. Ehrle, Zeitschrift, t. 7 1883 p. 339. SpĂ©culum 207 b et surtout 167 aâ 170 a. Eccl. 13. Jord. 61â63. SpĂ©culum Morin, tract. I, fo 60 b. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LIX Toute la fureur du vieux pontife se dĂ©cliaĂźna contre Ălie. Il faut lire les documents pour voir Ă quel diapa- son elle pouvait monter. Le frĂšre riposta avec une virulence moins verbeuse, mais plus accablante encore ^. Ces Ă©vĂ©nements eurent Ă travers toute l'Europe un retentissement inimaginable 2, et jetĂšrent dans l'Ordre un trouble profond. Beaucoup de partisans d'Elie se laissĂšrent persuader qu'ils avaient Ă©tĂ© trompĂ©s par un imposteur et se rapprochĂšrent du groupe des zĂ©lateurs qui ne cessait de rĂ©clamer l'observation pure et simple de la RĂšgle et du Testament. Thomas de Celano fut de ce nombre^. Il voyait avec une profonde tristesse les influences innombrables qui travaillaient sourdement l'institut franciscain et le me- naient Ă sa ruine. DĂ©jĂ dans les couvents circulait un refrain chantant la victoire de Paris sur Assise, c'est-Ă - dire de la science sur la pauvretĂ©. Les zĂ©lateurs reprenaient courage. Peu accoutumĂ©s aux subtilitĂ©s de la politique ecclĂ©siastique, ils ne com- prenaient pas que le pape, tout en maudissant frĂšre Elie, 1. Asserebat etiam ipse prĆdictus frater Helyas . . . papam . . . fraudem facere de pecunia collecta ad succursum TerrĆ SanctĆj scripta etiam ad beneplacitum suum in camĂ©ra sua hullare clam et sine fratrum assensu et etiam cedulas vacuas^ sed bullatas, militas 7iunciis suis traderet . . . et alia multa enormia imposuit domino papĆ, ponens os suum in celo. Matth. Paris, Chron. Maj. ann. 1239, ap. Mon. Ger. liist. Script, t. 28, p. 182. Cf. Ficker, n. 2685. 2. V. Ryccardi de S. Germano chron, ap. Mon. Germ. hist. Script, t. 19, p. 380, ann. 1239. â La lettre de FrĂ©dĂ©ric se plaignant de la disposition d'Ălie 1239 Huillard-BrĂ©holles, Hist. Dipl. V, p. 346â349. Cf. la Bulle, Attendite ad petram, fin fĂ©vrier 1240, ibid. p. 111â lld. Potthast, 10849. 3. Il Ă©tait sans doute aussi parmi les plus ardents adversaires de l'empereur. Son village avait Ă©tĂ© brĂ»lĂ© sur l'ordre de FrĂ©dĂ©ric II en 1224, et les habitants transportĂ©s en Sicile, puis Ă Malte. Richard de S. Germano, loc. cit. ann. 1223 et 1224. LX VIE DE S. FRANĂOIS ne modifiait en rien l'orientation gĂ©nĂ©rale qu'il avait donnĂ©e Ă l'Ordre. Les ministres gĂ©nĂ©raux Albert de Pise 1239â1240, Aimon de Faversham 1240â1244, Crescentius de Jesi 1244 â 1247 furent tous, avec des nuances diverses, les reprĂ©sentants du parti mo- dĂ©rĂ©. La premiĂšre lĂ©gende de Thomas de Celano Ă©tait devenue impossible. Le rĂŽle qu'il y donnait Ă Elie Ă©tait presque un scandale. La nĂ©cessitĂ© de la remanier et de la complĂ©ter s'imposa clairement au chapitre de GĂȘnes 1244. Tous les frĂšres, qui avaient quelque chose Ă raconter sur la vie de François, furent invitĂ©s Ă le mettre par Ă©crit et Ă l'adresser au ministre Crescentius de Jesi *. Celui-ci fit immĂ©diatement rĂ©diger, sous forme de dia- logue, un opuscule qui commençait par les mots Venera- hĂŻliwn gesta Tatruni. DĂ©jĂ au temps de Bernard de Besse on n'en avait plus que des fragments^. Mais heureusement, plusieurs des travaux qui virent le jour Ă la suite de la dĂ©cision de ce chapitre nous ont Ă©tĂ© conservĂ©s. C'est Ă elle que nous devons la LĂ©gende des Trois Compagnons et la Seconde Vie par Thomas de Celano. 1. V. le prol. de 2 Gel. et des 3 Soc. Cf. Glassberger, ann. 1244. An. fr. t. II, p. 68. SpĂ©culum Morin, tract. I, 6l b. 2. Catalogus Ministrorum^ Ă©ditĂ© par Ehrle Zeitschrift, t, 7, 1883 n» 5. Cf. Spec. 208 a. Marc de Lisbonne en parle un peu plus longuement, mais il en fait honneur Ă Jean de Parme, Ă©d. Diola, t. II, p. 38. D'autre part, dans le manuscrit 691 des archives du Sacro-Gon\ento Ă Assise, c'est un catalogue de la bibliothĂšque du couvent fait en 1381 on trouve, f» 45 a, l'indication de cet ouvrage Dyalogus sanctorum fratrum cum postibus cujus principium est Venerabilia gesta patrum dignosque memoria, finis vero non indigne feram me quoque reperisse consortem. In quo lihro omnes quaterni sunt XllI. y ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LXT IV. LĂ©gende des Trois Compagnons ^ La vie de saint François qui nous est parvenue sous le titre de LĂ©gende des Trois Compagnons, fut terminĂ©e le 11 aoĂ»t 1246, dans un petit couvent du val de Rieti, qui reviendra souvent dans le cours de cette histoire, celui de Greccio. Cet ermitage avait Ă©tĂ© le sĂ©jour prĂ©fĂ©rĂ© de François, surtout dans les derniers temps de sa vie. Il l'avait ainsi rendu doublement cher au cĆur de ses disciples ^. Aussi le voyons-nous devenir, dĂšs les premiers temps de l'Ordre, le quartier gĂ©nĂ©ral des Observants 3, et rester Ă travers les siĂšcles un des foyers les plus purs de la piĂ©tĂ© franciscaine. Cette lĂ©gende avait pour auteurs des hommes dignes de raconter saint François, et peut-ĂȘtre les plus capables de le faire les frĂšres LĂ©on, Ange et Rufin. Tous trois avaient vĂ©cu dans son intimitĂ© et l'avaient accompagnĂ© durant les annĂ©es les plus importantes; ils avaient eu soin, du reste, de recourir Ă d'autres pour complĂ©ter leurs souvenirs, en particulier Ă Philippe, le visiteur des 1. Le texte en a Ă©tĂ© publiĂ© pour la premiĂšre fois par les Bollan- distes, A. SS. Octobris t. II, p. 723-742 d'aprĂšs un manuscrit du couvent des FrĂšres Mineurs de Louvain. C'est d'aprĂšs cette Ă©di- tion que nous faisons nos citations. Les Ă©ditions publiĂ©es en Italie, dans le courant de ce siĂšcle, sont devenues introuvables, sauf la derniĂšre, due Ă l'abbĂ© Amoni. Celle-ci est malheureusement trop fautive pour servir de base Ă une Ă©tude scientifique. Elle a paru Ă Rome en 1880 in-S» de 184 p. sous le titre Legenda S. Francisci Assisiensis quĆ dicitur Legenda trium sociorum ex cod. membr. BĂźblioth. Vatic. num, 7339. 2. 2 CeL 2, 5; 3, 7; 1 CeL 60; Bon. 113; 1 CeL 84; Bon. 149; 2Cel. 2, 14; 3, 10. 3. Jean de P..rme s'y retira en 1276 et y vĂ©cut Ă peu prĂšs jusqu'Ă sa mort 1288. Tribul. Archiv, t. II 1886, p. 286. LXir VIE DE S. FRANĂOIS Clarisses, Ă IlluminĂ© de Rieti, Ă Masseo de Marignane, Ă Jean, le confident d'Egide et de Bernard de Quinta- valle. De pareils noms promettent beaucoup et par bonheur on n'est pas trompĂ© dans son attente. Tel qu'il nous est parvenu, ce document est le seul qui, au point de vue historique, soit digne d'ĂȘtre placĂ© Ă cĂŽtĂ© de la PremiĂšre Vie de Celano. Le nom des auteurs et l'Ă©poque de la composition indiquent avant tout examen Ă quelle tendance il devra sans doute se rattacher ; ce sera le premier manifeste des frĂšres restĂ©s fidĂšles Ă l'esprit et Ă la lettre de la RĂšgle. Tout ceci est confirmĂ© par une lecture attentive c'est au moins autant un panĂ©gyrique de la PauvretĂ© qu'une histoire de saint François. On s'attend aussi Ă voir les Trois Compagnons nous raconter, avec une complaisance toute particuliĂšre , les innombrables traits de la lĂ©gende qui ont eu Greccio pour théùtre ; on court Ă la fin du volume pour y chercher le rĂ©cit des derniĂšres annĂ©es dont ils avaient Ă©tĂ© les tĂ©moins, et l'on est tout surpris de ne rien trouver. Tandis que la premiĂšre moitiĂ© de l'ouvrage raconte la jeunesse de François, complĂ©tant çà et lĂ la PremiĂšre Vie de Celano, la seconde ^ est consacrĂ©e Ă un tableau des premiers temps de l'Ordre; tableau d'une fraĂźcheur et d'une intensitĂ© de vie incomparables, et oĂč les auteurs Ă force de sainte naĂŻvetĂ© atteignent bien souvent au sublime; mais, chose Ă©trange, aprĂšs nous avoir si longue- ment parlĂ© de la jeunesse de saint François, puis des premiers temps de l'Ordre, la narration saute brusque- ment de l'annĂ©e 1220 Ă la mort et Ă la canonisation, 1. 3 Soc. 25-67. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LXIII auxquelles ne sont du reste consacrĂ©es que quelques courtes pages ^ Ceci est trop extraordinaire pour ĂȘtre le rĂ©sultat du hasard. Que s'est-il donc passĂ©? Il est Ă©vident que la LĂ©gende des Trois Compagnons, telle que nous l'avons aujourd'hui, n'est qu'un fragment de l'original qui sans doute fut revu, corrigĂ© et considĂ©rablement Ă©laguĂ© par les autoritĂ©s de l'Ordre avant qu'on la laissĂąt circuler'^. Si les auteurs avaient Ă©tĂ© interrompus dans leur travail et obligĂ©s d'en Ă©courter la fin, comme on pourrait le sup- poser, ils l'auraient dit dans leur lettre d'envoi ; mais il 1. 3 Soc. 68-73. 2. Le ministre gĂ©nĂ©ral Crescentius de Jesi fut un adversaire dĂ©- clarĂ© des zĂ©lateurs de la RĂšgle. L'idĂ©e contraire a Ă©tĂ© soutenue par M. Millier {AnfĂ nge p. 180; mais le savant Ă©rudit n'a, paraĂźt-il, pas connu les rĂ©cits de la Chronique des Tribulations qui ne laissent aucun doute sur les persĂ©cutions qu'il dirigea contre les zĂ©lateurs {Archiv, t. II, p. 257-260. Si l'on Ă©tait tentĂ© de contester la valeur historique de ce tĂ©moignage, on en trouverait la confirmation dans les bulles du 5 aoĂ»t 1244 et du 7 fĂ©vrier 1246 Potthast 11450 et 120007. C'est aussi Crescentius qui obtint une bulle rappelant que la basilique d'Assise Ă©tait Caput et Mater ordinis, tandis que pour les zĂ©lateurs cette qualitĂ© appartenait Ă la Portioncule 1 Gel. 106; 3 Soc. 56; lion. 23; 2 12; Conform. 217 b ss. Voir aussi sur Crescentius, Glassberger ann. 1244. An. fr. p. 69; Sbaralea Bull. fi\ I, p. 502 ss. Conform. 121 h 1. M. MĂ»ller a Ă©tĂ© induit en erreur par une mĂ©prise d'Eccleston 9 {An. fr. I , p. 235. Il est Ă©vident que le chapitre de GĂȘnes 1244 n'a pas pu se prononcer contre la JDe- claratio RegulĆ publiĂ©e le 14 nov. 1245. C'est au contraire Cres- centius qui a provoquĂ© cette Declaratio, contre laquelle , non sans peine, les zĂ©lateurs trouvĂšrent une majoritĂ© au chapitre de Metz 1249 prĂ©side par Jean de Parme ennemi dĂ©cidĂ© de toute Decla- ratio Archiv II, p. 276. Cette maniĂšre de voir se trouve confirmĂ©e par un passage du SpĂ©culum Morin Rouen 1509, fo62a In hoc Capitulo [Nar- honnĆ] fuit ordinatum quod declaratio D. Innocenta p. IV ma- neat suspensa sicut in Capitulo METENSI. Et prĆceptum est omnibus ne quis ittatur ea in iis in quibus expositioni D. Gregorii IX contradicxt. LXIV VIE DE S. y a d'autres arguments Ă invoquer en faveur de cette hypothĂšse. FrĂšre LĂ©on ayant eu le premier et principal rĂŽle dans la rĂ©daction de l'Ćuvre des Trois Compagnons, on l'ap- pelle souvent LĂ©gende de frĂšre LĂ©on ; or, la LĂ©gende de frĂšre LĂ©on se trouve plusieurs fois citĂ©e textuelle- ment par Ubertin de Casai, accusĂ© par le parti de la commune observance en cour d'Avignon. Ubertin se serait Ă©videmment bien gardĂ© d'en appeler Ă un docu- ment apocryphe une fausse citation aurait suffi Ă le confondre, et ses ennemis n'auraient pas manquĂ© d'ex- ploiter son imprudence. Nous avons en mains toutes les piĂšces du procĂšs^, attaques, rĂ©ponses, ripostes^ et nulle part nous ne voyons les relĂąchĂ©s arguer de faux leur adversaire. Celui-ci du reste fait ses citations avec une prĂ©cision qui ne laisse rien Ă dĂ©sirer 2. Il en appelle Ă des Ă©crits qui se trouvent dans l'armoire du couvent d'As- sise et dont il a tantĂŽt une copie, tantĂŽt un original 3. Nous sommes donc autorisĂ©s Ă conclure que nous avons lĂ des fragments qui ont survĂ©cu Ă la suppression de la derniĂšre et de la plus importante partie de la LĂ©gende des Trois Compagnons. 1. PubliĂ©es avec tout l'appareil scientifique nĂ©cessaire par le P. Ehrle S. J. dans ses Ă©tudes Zur Vorgeschichte des Concils von Vienne, Archiv II, p. 353-416; 111, p. 1-195. 2. Voir par exemple Archiv III, p. 53 ss. Cf. 76. Adduxi vcrha et facta b. Francisai sicut est aliquando in legenda et sicut a soclis sancti patris audivi et in cedulis sanctĆ memorice fratris Leonis legi manu sua conscriptis, sicut ab ore beati Francisci audivit. Ib. p. 85. 3. HĆc omnia patent per sua [^B. Francisci] verba expressa per sanctum fratrem virum Leonem ejus socium tam de mandata sancti patris quam etiam de devotione prĆdicti fratris fuerunt solemniter conscripta, in libro qui habetur in armario fratrum de Assisio et in rotulis ejus, quos apud me Jiabeo, manu ejusdctn fratris Leonis conscriptis. Archiv III, p. 168. Cf. p. 178. I ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LXV 11 n'y a pas Ă s'Ă©tonner que l'Ćuvre des plus chers amis de François ait subi de si graves mutilations. C'Ă©tait le manifeste d'un parti que Crescentius pour- suivit de tout son pouvoir. AprĂšs la rĂ©action passagĂšre du gĂ©nĂ©ralat de Jean de Parme nous verrons un homme de la valeur de saint Bonaventure, provoquer la suppression de toutes les lĂ©gendes primitives pour leur substituer sa propre compilation ! Il semble vraiment Ă©trange que personne ne se soit aperçu de l'Ă©tat fragmentaire de l'Ćuvre des Trois Compagnons. Le prologue seul aurait dĂ» suggĂ©rer cette idĂ©e. Pourquoi se mettre trois pour Ă©crire ces quelques pages? Pourquoi cette Ă©numĂ©ration solennelle des frĂšres dont ils invoquent le tĂ©moignage et la collaboration? Il j aurait une disproportion Ă©tonnante entre l'effort et le rĂ©sultat. De plus, les auteurs disent qu'ils ne se contentent pas de raconter les miracles, mais qu'ils veulent surtout exposer les idĂ©es de François, et sa vie avec ses frĂšres \ or on chercherait inutilement, dans ce qui nous reste, des rĂ©cits de miracles ^. Une traduction italienne de cette lĂ©gende, publiĂ©e par le P. Stanislao Melchiorri^, m'a tout Ă coup apportĂ© une confirmation indirecte de ce point de vue. Ce reli- gieux n'en est que l'Ă©diteur et a pu seulement arriver Ă savoir qu'en 1577, elle avait Ă©tĂ© tirĂ©e d'un manuscrit trĂšs ancien, par un certain Muzio Achillei de San Severino ^. 1. 3 Soc. prol. Non contenti narrare solum miracula . . . con- versationis insignia et pii beneplaciti voluntatem. 2. Leggenda di S. Francesco^ tipografla Morici e Badaloni. Recanati 1856, 1 vol. in-S». 3. Voir la prĂ©face du P. Stanislas. LXVI YIE DE S. FRANĂOIS Cette traduction italienne ne renfermait pas les der- niers chapitres de la lĂ©gende, ceux qui racontent la mort, les stigmates et la translation i. Elle a donc Ă©tĂ© faite Ă une Ă©poque oĂč l'on n'avait pas encore remplacĂ© la partie supprimĂ©e par un court rĂ©sumĂ© des autres lĂ©gendes. De tout cela se dĂ©gagent deux conclusions pour la critique 1° Ce rĂ©sumĂ© final n'a pas la mĂȘme autoritĂ© que le reste de l'ouvrage, puisqu'on ignore l'Ă©poque Ă laquelle il a Ă©tĂ© ajoutĂ©. 2° Les fragments d'une lĂ©gende de frĂšre LĂ©on ou des Trois Compagnons, Ă©pars dans des compilations postĂ©rieures, peuvent ĂȘtre parfaitement au- thentiques. Dans son Ă©tat actuel, cette LĂ©gende des Trois Com- pagnons est le plus beau monument franciscain et l'une des productions les plus dĂ©licieuses du moyen Ăąge. Il y a dans ces pages, je ne sais quoi de doux, d'intime, de chaste, une sĂšve de jeunesse et de virilitĂ© quelesFioretti rappelleront sans y atteindre jamais. A plus de six cents ans de distance, nous y sentons revivre le rĂȘve le plus pur qui ait fait tressaillir l'Eglise chrĂ©tienne. Ces frĂšres de Greccio qui, Ă©parpillĂ©s dans la mon- tagne Ă l'ombre des oliviers, passaient des journĂ©es Ă chanter l'hymne du soleil, sont les vrais modĂšles entrevus par les maĂźtres ombriens primitifs. Ils se ressemblent tous, ils sont gauchement posĂ©s, tout en eux et autour d'eux pĂšche contre les rĂšgles les plus Ă©lĂ©mentaires de l'art *, cependant leur souvenir vous poursuit, et lorsque vous aurez oubliĂ© depuis long- temps les Ćuvres des maĂźtres impeccables, vous re- verrez sans effort les crĂ©ations de ces ouvriers inconnus, car l'amour appelle l'amour; et ces personnages Ă©tri- 1. 3 Soc. 68-73. ĂTLDE CRITIQUE DES SOURCES LXVII quĂ©s ont un cĆur trĂšs bon et trĂšs pur; un amour plus qu'humain rayonne dans tout leur ĂȘtre ; ils vous parlent et vous rendent meilleurs. Tel est ce livre, premier cri des Spirituels, oĂč dĂ©jĂ l'on voit naĂźtre quelques-unes de ces doctrines hardies qui ne divisaient plus seulement la famille franciscaine en deux branches ennemies, mais qui devaient mener quelques-uns de leurs dĂ©fenseurs jusque sur le bĂ»cher de l'hĂ©rĂ©sie 1. V. Fragments da la partie supprimĂ©e de la LĂ©gende des Trois Compagnons. Nous pouvons faire maintenant un pas de plus et tĂą- cher de grouper les fragments de la LĂ©gende des Trois Compagnons ou de frĂšre LĂ©on qui se retrouvent dans des Ă©crits postĂ©rieurs. Ici plus que jamais il faut se mettre en garde contre les thĂ©ories absolues un des principes les plus fĂ©conds de la critique historique consiste Ă prĂ©fĂ©rer les docu- ments contemporains des faits racontĂ©s, ou tout au moins câŹux qui en sont le plus rapprochĂ©s, mais encore faut-il mettre une certaine discrĂ©tion Ă l'employer. Le raisonnement des Bollandistes ne voulant rien sa- voir des lĂ©gendes Ă©crites aprĂšs celle de saint Bonaventure 1. Il ne s'en faut pas de beaucoup que saint François n'y soit re- prĂ©sentĂ© comme reprenant l'Ćuvre de JĂ©sus interrompue par la faute du clergĂ© sĂ©culier depuis les temps apostoliques. Les viri erarjgreh'ci jugent les membres du clergĂ© filios extraneos 3 Soc. 48 et 51. Cf. 3 Soc. 48. Inveni virum .... per quem credo Domi- nus velit in toto mundo fidem sanctĆ EcclesiĆ reformare. Cf. 2 Cel. 3, 141. Videbatur rĂȘvera fratri et omnium comitantium turbĆ quod Christi et b. Francisai una persona foret. LXVIII VIE DE S. FRA^NĂOIS 1260, sous prĂ©texte que, venant aprĂšs plusieurs autres biographes autorisĂ©s, il a Ă©tĂ© mieux placĂ© que personne pour se renseigner et pour complĂ©ter l'Ćuvre de ses prĂ©dĂ©cesseurs, semble inattaquable ^ En rĂ©alitĂ©, il est absurde, car il suppose que saint Bonaventure ait voulu faire Ćuvre d'historien. C'est oublier qu'il Ă©crivait non seulement dans un but d'Ă©dification, mais comme ministre gĂ©nĂ©ral des FrĂšres Mineurs. DĂšs lors son premier devoir Ă©tait de garder le silence sur une foule de faits, et non sur les moins intĂ©ressants. Que dire d'une biographie oĂč le Testament de saint François n'est pas mĂȘme mentionnĂ©? Il est facile de laisser de cĂŽtĂ© un Ă©crit du quatorziĂšme siĂšcle, sous prĂ©texte que l'auteur n'a pas vu ce qui se passait cent ans avant, mais encore ne faut-il pas ou- blier que beaucoup de livres de la fin du moyen Ăąge ressemblent Ă ces vieilles maisons oĂč quatre ou cinq gĂ©- rations ont travaillĂ©. Une inscription sur leur façade n'indique souvent que le passage du dernier restaura- teur ou du dernier dĂ©molisseur ; et les noms qui s'Ă©ta- lent avec le plus de complaisance ne dĂ©signent pas tou- jours les vĂ©ritables ouvriers. Tels ont Ă©tĂ© beaucoup de livres franciscains; chercher Ă les attribuer Ă un auteur serait une entreprise illu- soire ; des mains fort diverses y ont travaillĂ©, et cet amalgame mĂȘme a son charme et son intĂ©rĂȘt. En les feuilletant, j'allais dire en les frĂ©quentant, on arrive Ă voir clair dans cet enchevĂȘtrement, car toute Ćuvre d'homme porte la trace de la main qui l'a faite ; cette trace peut ĂȘtre d'une dĂ©licatesse presque imperceptible; elle n'en existe pas moins, prĂȘte Ă se rĂ©vĂ©ler Ă des yeux exercĂ©s. Quoi de plus impersonnel que la photographie 1. A. SS. p. 552. t ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LXIX d'un paysage ou d'un tableau, et pourtant, au milieu de plusieurs centaines d'Ă©preuves, l'amateur ira droit Ă celle de tel ou tel opĂ©rateur prĂ©fĂ©rĂ©. Ces rĂ©flexions m'ont Ă©tĂ© suggĂ©rĂ©es par l'Ă©tude atten- tive d'un curieux livre, bien des fois imprimĂ© depuis le XVI*' siĂšcle, le SpĂ©culum VitĆ S. Francisa et sociorum eJusK Un travail complet sur cet ouvrage, ses sources, ses Ă©ditions imprimĂ©es, les diffĂ©rences nombreuses que l'on trouve entre les manuscrits, exigerait Ă lui seul un volume et l'histoire abrĂ©gĂ©e de l'Ordre; je ne peux songer Ă donner ici que quelques indications, en pre- nant pour base la plus ancienne Ă©dition, celle de 1504. Le pĂȘle-mĂȘle qui y rĂšgne est effroyable. Les traits de la vie de François et de ses compagnons y sont entassĂ©s sans aucun plan ; plusieurs y sont rĂ©pĂ©tĂ©s Ă quelques pages d'intervalle d'une maniĂšre diffĂ©rente^ ; certains chapitres ont Ă©tĂ© introduits si maladroitement 1. Venetiis, expensis domini Jordani de Dinslaken per Simonem de Luere, 30 januarii 1504. â Impressum MĂ©tis per Jasparem Hochffeder, anno Domini 1509. â Ces deux Ă©ditions sont identiques, petit in-12 de 240 folios mal numĂ©rotĂ©s. â ĂditĂ© avec le mĂȘme titre par SpĆlberch, Anvers 1620, 2 tomes en un volume in-S», 208 et 192 pages, avec une foule de changements. Le manuscrit le plus important semble celui de la Vaticane 4354. Il y en a deux Ă la Mazarine, 904 et 1350 datĂ©s de 1459 et 1460, un Ă Berlin Man. theol. lat. 4», n° 196 ssec. 14. V. Ehrle, Zeit^ schrift, t. VII 1883, p. 392 s. ; Analecta fr. 1. 1, p. XI; Miscellanea^ 1888, p. 119, 164. Cf. A. SS., p. 550-552. Les chapitres sont numĂ©rotĂ©s dans les 72 premiers folios seule- ment, mais ces numĂ©ros fourmillent d'erreurs f» 38 b caput LIX, 40 b LIX, 41 b LXI, ibid LXII, 42 a LX, 43 a LXI. Puis aux f^s 46 b et 47 b sont deux chapitres LXVI. Il y a deux LXXI, deux LXXII, deux LXXIII, etc. 2. Par exemple l'histoire des brigands de Monte-Gasale, fo 46 b et 58 b. Les remarques de frĂšre Ălie Ă François qui chante sans cesse 136 b et 137 a. La visite de Jacqueline de Settesoli, 133 a et 138 a. La bĂ©nĂ©diction autographe donnĂ©e Ă frĂšre LĂ©on 87 a ; 188 a. LXX VIE DE S. FRANĂOIS que le compilateur a oubliĂ© d'enlever le numĂ©ro d'ordre qu'ils avaient dans l'ouvrage auquel il les emprunte * ; enfin on est tout Ă©tonnĂ© de trouver plusieurs Incipit^. Cependant avec un peu de persĂ©vĂ©rance on aperçoit bientĂŽt quelques clartĂ©s dans ce labyrinthe. Tout d'abord, voici quelques chapitres de la lĂ©gende de Bonaventure, qui semblent mis lĂ en avant-garde comme pour protĂ©ger le reste du livre. Faisons-en abstraction, ainsi que de toute la sĂ©rie des chapitres des Fioretti, nous aurons diminuĂ© l'ouvrage de prĂšs des trois quarts. Retranchons encore deux chapitres tirĂ©s de saint Ber- nard de Clairvaux, puis ceux qui contiennent des priĂšres franciscaines, ou les diverses attestations sur l'in- dulgence de la Portioncule, nous arrivons finalement Ă une sorte de rĂ©sidu, qu'on me passe l'expression, d'une homogĂ©nĂ©itĂ© remarquable. Le style y est diffĂ©rent de celui des pages environ- nantes et rappelle de trĂšs prĂšs celui des Trois Compa- gnons ; une seule pensĂ©e traverse ces pages, celle que la pierre angulaire de l'Ordre est l'amour de la pauvretĂ©. Pourquoi n'aurions-nous pas lĂ des lambeaux de la lĂ©gende originale des Trois Compagnons? On n'y trouve rien qui ne cadre avec ce que nous savons, rien non plus qui rappelle les enjolivements d'une tradition tar- dive. Ce qui confirme cette hypothĂšse, c'est que divers pas- sages que nous y trouvons sont citĂ©s par Ubertin de Casai et par Angelo Clareno comme Ă©tant de frĂšre LĂ©on, 1. Au fo 20b on lit Tertium capitulum de charitate et compas- sions et condescensione ad proximum, Capitulum XXVI, Cf. 26 a, 83 a, 117 b, 119 a, 122 a, 128 b, 133 b, 136 b oĂč sont des indices semblables. 2. Fo 5 b. Incipit SpĂ©culum vitĆ h. Francisci çt sociorum ejus, fo 7 b. Incipit SpĂ©culum perfectionis. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LXXI et une comparaison attentive des textes montre que ces auteurs n'ont pas pu les puiser dans le SpĂ©culum, ni le SpĂ©culum chez eux. Il y a, du reste, une phrase qui, sans tenir compte de l'inspiration ou du style, suffirait au premier abord pour marquer l'origine commune de la plupart de ces mor- ceaux ^ Nos qui cum ipso fuimus. Nous qui avons Ă©tĂ© avec lui ! Ces paroles, qui reviennent presque Ă chaque rĂ©cit 2, ne sont dans bien des cas qu'un hommage recon- naissant des compagnons Ă leur pĂšre spirituel, mais par- fois aussi elles renferment quelque chose d'amer; ce sont les ermites de Greccio qui tout Ă coup rappellent leurs titres ne sommes-nous pas les seuls, les vrais inter- prĂštes des instructions du Saint, nous qui avons sans cesse vĂ©cu avec lui, nous qui, heure aprĂšs heure, avons recueilli ses paroles, ses soupirs et ses chants? On comprend que ces prĂ©tentions n'aient pas Ă©tĂ© du goĂ»t de la commune observance et que Crescentius, usant d'une autoritĂ© incontestable, ait fait supprimer presque toute cette lĂ©gende '^. Quant aux fragments qui nous ont Ă©tĂ© ainsi conservĂ©s, s'ils nous fournissent de nombreux dĂ©tails sur les der- niers temps de la vie de François, ils ne sont cependant pas ceux dont la perte est le plus regrettable; les auteurs qui les reproduisent dĂ©fendaient une cause ; aussi ne leur devons-nous guĂšre que des traits qui par 1. On la chercherait en vain dans les autres morceaux du SpĂ©cu- lum, et elle se retrouve dans les fragments de frĂšre LĂ©on, citĂ©s par Ubertin de Casai et par Angelo Glareno. 2. Fo 8 b, 11 a, 12 a, 15 a, 18 b, 21 b, 23 b, 26 a, 29 a, 33 b, 43 b, 41 a, 48 b, 118 a, 129 a, 130 a, 134 a, 135 a, 136 a. 3. Thomas de Gelano ne dit-il pas dans le prologue de la Seconde Vie liOramusergo, benignissime pater, ut laboris hujus non con- temnenda munuscula .... vestra henedicHone consecrare velitis, corrigendo errata et superflua resecantes , LXXII VIE DE S. FRANĂOIS quelque cĂŽtĂ© concernent la pauvretĂ©; ils n'avaient que faire des autres rĂ©cits, n'Ă©crivant pas une biographie. Mais, mĂȘme dans ces limites restreintes, ces lambeaux ont une importance de premier ordre ; aussi n'ai-je pas hĂ©sitĂ© Ă les employer largement. Il va sans dire que tout en attribuant leur origine aux Trois Compagnons et Ă frĂšre LĂ©on en particulier, il ne faut se faire aucune illusion sur la lettre mĂȘme des textes qui nous sont parvenus. Les morceaux donnĂ©s par libertin de Casai et Angelo Clareno, sont de vĂ©ritables citations et, Ă ce titre, mĂ©ritent une pleine confiance. Quant Ă ceux qui nous sont conservĂ©s dans le SpĂ©culum, ils ont pu ĂȘtre souvent Ă©courtĂ©s; des notes explicatives ont pu se glisser dans le texte, mais nulle part on ne voit la trace d'interpolations dans le mauvais sens du mot *. Enfin, si l'on compare ces fragments aux rĂ©cits cor- 1. La lĂ©gende des 3 Soc. fut conservĂ©e au couvent d'Assise Omnia . . . fuerunt conscripta . . . per Leonem ... m lihro qui habetur in armario fratrum de Assisio. Ubertin, Archiv III, p. 168. Plus tard, frĂšre LĂ©on semble ĂȘtre revenu plus en dĂ©tail sur certains faits; il confia ces nouveaux manuscrits aux Glarisses /n rotulis ejus guos apud me habeo, manu ejusdem fratris Leonis conscriptis n \ ibid.. Cf. p. 178. uQuod secjuitur a sancto fratre Conrado predicto et viva voce audivit a sancto fratre Leone qui presens erat et regulam scripsit. Et hoc ipsum, in quibusdam rotulis manu sua conscripiis quos commendavit in monasterio S. ClarĆ custodiendos .... In illis multa scripsit . . . quĆ industria fr, Bonaventura omisit et noluit in legenda publiĂ©e scribere, maxime quia aliqua erant ibi in quibus ex tune deviatio regulĆ publice monstrabatur et nolebat fr aires an te tempus in- famare », A^^bor, hb. V, cap. 5. Cf. Antiquitates^ p. 146. Cf. SpĂ©cu- lum, 50 b. Infra scripta verba, frater LĂ©o socius et Confessor B. Francisci , Conrado de Offida, dicebat se habuisse ex ore Bcati Patris nostri Francisci, quĆ idem Frater Conradus retulit, apud Sanctum Damianum prope Assisium. Conrad d'Offida copia donc Ă la fois le livre de frĂšre LĂ©on et ses rotuli il y ajouta quelques renseignements oraux {Arbor vit. crue. lib. V, cap. 3 et composa peut-ĂȘtre ainsi le recueil si sou- ĂTLDE CRITIQUE DES SOURCES LXXIII respondants de la Seconde Vie par Celano, on voit que celui-ci les a parfois empruntĂ©s littĂ©ralement Ă frĂšre LĂ©on, mais que la plupart du temps il les a beaucoup Ă©courtĂ©s, a ajoutĂ© çà et lĂ quelques rĂ©flexions et surtout a remaniĂ© le style pour le rendre plus Ă©lĂ©gant. Cette comparaison prouve bien vite aussi que les rĂ©cits de frĂšre LĂ©on sont l'original, et qu'on ne saurait y voir une amplification postĂ©rieure de ceux de Thomas de Celano, comme on pourrait ĂȘtre tentĂ© de le penser au premier abord *. VI. Seconde Vie par Thomas de Celano 2. FremiĂšre Partie. A la suite de la dĂ©cision du chapitre de 1244, on se mit Ă rechercher de tous cĂŽtĂ©s les souvenirs des pre- miers temps de l'Ordre. vent citĂ© par les ConformitĂ©s sous le titre de Legenda Antiqua et reproduit en partie dans le SpĂ©culum. Les numĂ©ros de chapitre, que le SpĂ©culum a gauchement insĂ©rĂ©s, sans remarquer qu'ils Ă©taient en dĂ©saccord avec sa propre division, seraient des vestiges de la division adoptĂ©e par Conrad d'Offida. Il est bien possible qu'aprĂšs l'interdiction de son livre et sa confis- cation au Sacro-Gonvento, frĂšre LĂ©on ait repris dans ses rotuli une grande partie des rĂ©cits dĂ©jĂ faits, si bien que le mĂȘme trait pour- rait, tout en venant de frĂšre LĂ©on, se prĂ©senter sous deux formes diffĂ©rentes suivant qu'il aurait Ă©tĂ© copiĂ© sur le livre ou sur les rotuli. 1. Comparer par exemple 2 Cel. 120 Vocation de Jean le simple, et SpĂ©culum f*^ 37 a. Avec le rĂ©cit de Thomas de Celano, on ne com- prend pas ce qui attire Jean vers saint François ; dans le SpĂ©culum tout s'explique, mais Celano n'a pas osĂ© montrer François allant prĂȘcher avec un balai sur l'Ă©paule pour nettoyer les Ă©glises sales. 2. Elle a Ă©tĂ© publiĂ©e pour la premiĂšre fois Ă Rome, en 1806, par le P. Rinaldi Ă la suite de la PremiĂšre Vie V. plus haut p. LI, note 2 et redonnĂ©e en 1880 par l'abbĂ© Amoni Vita Secunda S. Francisci Assisiensis auctore B. Thoma de Celano ejus disci- LXXIV VIE DE S. FRANĂOIS Devant cette ardeur, oĂč le zĂšle pour la gloire de l'ins- titut franciscain laissait sĂ»rement un peu Ă l'arriĂšre-plan le souci historique, le ministre gĂ©nĂ©ral Crescentius fut obligĂ© de prendre certaines prĂ©cautions. Bien des morceaux qu'il recevait faisaient double emploi, d'autres pouvaient se contredire ; plusieurs, sous couleur de raconter le Saint, n'avaient d'autre but que d'opposer le prĂ©sent au passĂ©. L'idĂ©e de constituer une sorte de commission chargĂ©e d'Ă©tudier et de coordonner tout cela s'imposa bientĂŽt ^ pulo. UomĆ , tipografia dĂ©lia pace. 1880, m-8o, d52 p. Les citations sont faites d'aprĂšs cette derniĂšre Ă©dition que j'ai colla- tionnĂ©e Ă Assise avec le plus important des rares manuscrits connus actuellement Archives du Sacro-Gonvento. N» 686. Man. sur parchemin de la fin du XIII^ siĂšcle, si je ne me trompe, 130 millim. sur 142 ; 102 pages numĂ©rotĂ©es. A part le fait que le livre est divisĂ© en deux parties au heu de trois, les deux derniĂšres n'en formant qu'une, je n'ai pas trouvĂ© de diffĂ©rence notable avec le texte publiĂ© par Amoni ; les chapitres ne sont sĂ©parĂ©s que par un alinĂ©a et une lettre rouge, mais ils ont dans la table qui occupe les sept premiĂšres pages du volume les mĂȘmes titres que dans l'Ă©dition Amoni. Cette Seconde Vie a Ă©chappĂ© aux recherches des Bollandistes. On ne s'explique pas comment ces savants mĂ©connurent la valeur du manuscrit que le P. Theobaldi, archiviste d'Assise, leur avait signalĂ© et dont il leur offrait une copie A. SS. oct. t. II, p. 546 f.. Le P. Suysken s'est jetĂ© ainsi dans d'inextricables diffi- cultĂ©s et s'est exposĂ© Ă ne pas comprendre les listes de biographies de saint François dressĂ©es par les annalistes de l'Ordre ; il se privait en mĂȘme temps d'une des plus abondantes sources de renseigne- ments sur les faits et gestes du Saint. â Le prof. MĂčller {Die AnfĂ nge, p. 175-184 a Ă©tĂ© le premier Ă faire une Ă©tude critique de cette lĂ©gende. Ses conclusions me paraissent Ă©troites et extrĂȘmes. Cf. Analecta fr. t. II, p. XVII-XX. Le R. P. Ehrle indique deux manuscrits, l'un au British MusĂ©um, Harl. 47, l'autre Ă Oxford. Christ CollĂšge. Cod. 202. Zeitschrift 1883, p. 390. 1. Les 3 Soc. prĂ©voient le cas oĂč leur lĂ©gende sera incorporĂ©e Ă d'autres documents quibus {legendis hĆc pauca quĆ scribimus poteritis facere inseri , si vestra discretio viderit esse justum. 3 Soc. prol. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LXXV Quoi de plus naturel que de mettre Ă sa tĂȘte Thomas de Celano. Depuis l'approbation de la premiĂšre lĂ©gende par GrĂ©goire IX, il paraissait un peu l'historiographe officiel de l'Ordre*. Cette maniĂšre de voir concorde bien avec le contenu des dix-sept chapitres que renferme la premiĂšre partie de la seconde lĂ©gende. Elle se prĂ©sente dĂšs l'abord comme une Ćuvre collective. Celano est entourĂ© de compagnons qui l'aident 2. Un examen plus attentif montre qu'elle a pour source principale la LĂ©gende des Trois Compagnons, que les compilateurs remanient, en complĂ©tant quelquefois certains dĂ©tails ; plus souvent, en y pratiquant de vĂ©ritables coupes. Tout ce qui ne concerne pas saint François est impi- toyablement proscrit ; on sent la volontĂ© bien arrĂȘtĂ©e de laisser Ă l'arriĂšre-plan les disciples qui se mettaient si complaisamment au premier^. L'Ćuvre des Trois Compagnons avait Ă©tĂ© terminĂ©e le 11 aoĂ»t 1246. Le 13 juillet 1247 le chapitre de Lyon mettait fin aux pouvoirs de Crescentius. C'est donc entre ces deux dates que se place la composition de la premiĂšre partie de la Seconde Vie de Thomas de Celano *. 1. Une phrase du prologue 2 Gel. montre que l'auteur a reçu une mission tout Ă fait spĂ©ciale Placiiit . . . vobis . . . parvitati nostrĆ injungere, tandis qu'au contraire les 3 Soc. laissent voir que la dĂ©cision capitulaire ne les visait que de fort loin ; Cum de mandato prĆteriti capituli fratres teneantur.. visum est nobis... pauca de multis , . . sanctitati vestrĆ intimare. 3 Soc. prol. 2. Comparer le prol. de 2 Gel. Ă celui de 1 Gel. 3. Longum esset de singulis persequiy qualiter bravium supernĆ vocationis attigerint. 2 Gel, 1, 10. 4. Cette premiĂšre partie correspond exactement Ă la portion de la lĂ©i^'ende des 3 Soc. que Crescentius avait autorisĂ©e. LXXVI VIE DE S. FRANĂOIS VII. Seconde Vie par Thomas de Celano. DeuxiĂšme Partie ^. L'Ă©lection de Jean de Parme 1247-1257, comme successeur de Crescentius, fut une victoire des zĂ©la- teurs. Cet homme, dans la table de travail duquel les oiseaux venaient faire leur nid 2, devait Ă©tonner le monde par ses vertus. Nul n'est entrĂ© plus avant que lui dans le cĆur de saint François *, nul n'a Ă©tĂ© plus digne de reprendre et de continuer son Ćuvre. Il invita bientĂŽt Celano Ă se remettre au travail ^. Celui-ci fut peut-ĂȘtre seul d'abord, mais peu Ă peu un groupe de collaborateurs se forma de nouveau autour de 1. Je rappelle que le man. 686 d'Assise divise li Seconde Vie seu- lement en deux parties par la rĂ©union des deux derniĂšres. 2. Salimbene ann. 1248. 3. Glassberger ann. 1253. An. fr. t. II, p. 73. Frater Johannes de Parma minister generalis, multiplicatis Utteris prĆcepit fr. ThomĆ de Celano {cod. Ceperano, ut vitam beati Francisci quĆ antiqua Legenda dicitur perficeret, quia solum de ejus conversa- tione et verbis in primo tractatu^ de mandata olim generalis compilato , omissis miraculis fecerat mentionem, et sic secundum tractatum de miraculis sancti Patris compilavit, quem cum epistola quĆ incipit Religiosa vestra sollicitudo eidem gene- rali misit. Ce traitĂ© des miracles est perdu, car on ne peut l'identifier comme le veut M. Miiller {AnfĂ nge p. 177 avec la deuxiĂšme partie en en comptant trois comme l'Ă©dition Amoni de la Seconde Vie 1° l'Ă©- pĂźtre Religiosa vestra sollicitudo ne s'y trouve pas ; 2'^ cette deuxiĂšme partie n'est pas un recueil de miracles, en prenant ce mot dans le sens de guĂ©risons miraculeuses qu'il avait au treiziĂšme siĂšcle. Les vingt-deux chapitres de cette deuxiĂšme partie ont une unitĂ© marquĂ©e ; on pourrait les intituler François prophĂšte, mais non François thaumaturge. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LXXVII lui^ Plus rien dĂ©sormais ne s'opposait Ă ce qu'il fĂźt sur la portion de l'Ćuvre des Trois Compagnons, supprimĂ©e par Crescentius, le travail fait dĂ©jĂ sur celle qui avait Ă©tĂ© approuvĂ©e. La LĂ©gende de frĂšre LĂ©on nous est ainsi parvenue tout entiĂšre remaniĂ©e par Thomas de Celano, Ă©courtĂ©e et dĂ©fraĂźchie, mais encore d'une importance capitale en l'absence de la majeure partie de l'original. Les traits pour lesquels nous possĂ©dons les deux Ă©preuves nous permettent de mesurer l'Ă©tendue de notre perte. On retrouve en effet dans la compilation de Celano tout ce qu'on s'attendait Ă trouver dans les Trois Compagnons les rĂ©cits se rapportent surtout aux deux derniĂšres annĂ©es de la vie de François et beaucoup ont pour théùtre Greccio ou l'un des ermitages de la vallĂ©e de Rieti^*, frĂšre LĂ©on a Ă©tĂ© d'aprĂšs la tradition le hĂ©ros d'un grand nombre de traits qui y sont racontĂ©s^, et toutes les citations que fait Ubertin de Casai du livre de frĂšre LĂ©on j trouvent leurs correspondants ^. Cette deuxiĂšme partie de la Seconde Vie reflĂšte bien les circonstances nouvelles qui l'ont vue naĂźtre. La ques- tion de la PauvretĂ© y domine tout 5; la lutte entre les 1. Dans le prol. 2 Gel. 2 prol. Insignia patrum l'auteur parle au singulier tandis que l'Ă©pilogue est Ă©crit de nouveau au nom d'un groupe de disciples. 2. Greccio, 2 Gel. 2, 5 ; 14; 3, 7 ; 10 ; 103. â Rieti, 2 Gel. 2, 10; 11; 12; 13; 3, 36; 37; 66; 103. 3. S. François lui donne un autographe, 2 Gel. 2, 18. Cf. Fior. 2» consid.; sa tunique 2 Gel. 2. 19; il lui prĂ©dit une famine 2 Gel. 2, 21; Gf. Conform. 49 6. Fr. LĂ©on malade Ă Bologne 2 Gel. 3, 5. 4. On trouvera le texte d'Ubertin de Gasal dans les Archiv. t. III, p. 53, 75, 76, 85, 168, 178 oĂč le R. P. Ebrle indique les passages correspondants de 2 Gel. 5. Elle est le sujet de trente-sept rĂ©cits ! 2 Gel. 3, 1-37, puis viennent des exemples sur l'esprit d'oraison 2 Gel. 3, 38-44, les tentations 2 Gel. 3, 58-64, la vraie joie 2 Gel. 3, 64-79, l'humilitĂ© 2 Gel. 3, 79-87, l'obĂ©issance 2 Gel. 3, 88, 91 etc., etc. LXXVm VIE DE S. FRANĂOIS deux partis de l'Ordre se rĂ©vĂšle Ă chaque page ; les col- laborateurs veulent que chacun des traits racontĂ©s soit une leçon indirecte aux relĂąchĂ©s, auxquels ils opposent les Spirituels ; les papes avaient commentĂ© la RĂšgle dans le sens large ; eux, de leur cĂŽtĂ©, allaient la com- menter dans le sens tout Ă la fois littĂ©ral et spirituel, par les actions et les paroles de son auteur lui-mĂȘme. L'histoire n'intervient donc guĂšre ici que comme le vĂ©hicule d'une thĂšse, ce qui n'enlĂšve rien Ă la valeur historique des renseignements rĂ©pandus au cours de ces pages. Mais tandis que dans la PremiĂšre Vie de Celano et dans la LĂ©gende des Trois Compagnons les faits se succĂ©daient organiquement, ici ils sont juxtaposĂ©s. Aussi, quand on arrive Ă cette lecture, a-t-on le sentiment d'une chute; mĂȘme au point de vue littĂ©raire l'infĂ©rioritĂ© se fait cruellement sentir. Au lieu d'un poĂšme on a devant soi un catalogue, trĂšs habilement fait, il est vrai, mais qui ne saurait essayer de nous Ă©mouvoir. Vill. Indication de quelques documents secondaires. a Vie de saint François ^mr Celano Ă V usage du chĆur» Thomas de Celano fit aussi une courte lĂ©gende Ă Ă l'usage du chĆur; elle est divisĂ©e en neuf leçons et servit pour les brĂ©viaires franciscains jusqu'Ă ce que saint Bonaventure eĂ»t fait sa legenda minor. Celle de Celano se trouve en partie les trois pre- miĂšres leçons, dans le manuscrit 338 d'Assise fol. 52 a â 53 b; elle y est prĂ©cĂ©dĂ©e d'une lettre d'envoi ^Bogasti me, frater BĂ©nĂ©dicte j ut de legenda B. P. N. F, quĆdani exciperem et in novem lectionum seriem ordina- ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LXXIX rem,., etc. B. Franciscus de civitate Assisii ortiis a pueriUbus annis mitritiis extitit insoĂŻenter, » Ce travail n'a aucune importance historique. b Vie de saint François versifiĂ©e. Au nombre des biographies on a parfois comptĂ© un poĂšme en vers hexamĂštres ^ dont le texte a Ă©tĂ© Ă©ditĂ© en 1882 par le regrettĂ© Cristofani^. Ce travail ne fournit pas une seule indication histo- rique nouvelle. C'est la vie de Celano mise en vers et rien de plus ; l'auteur n'a voulu que faire Ćuvre de poĂšte. Il est donc superflu de s'y arrĂȘter^. c Biographie de saisĂźt François par Jean de Ceperano. Une des biographies qui ont disparu, sans doute par suite de la dĂ©cision du chapitre de 1266'% est celle de Jean de Ceperano. La ressemblance de son nom avec celui de Thomas de Celano a provoquĂ© bien des confu- sions^. L'indication la plus prĂ©cieuse que nous ayons sur lui nous est donnĂ©e par Bernard de Besse au com- mencement de son De laudihiis S. Francisci' ^Blenam i. Le Monnier, t. I, p. XI; P. Barnabe, la Portioncule, p. 15. Cf. AnaĂźecta fr., t. II, p. XXI. Zeitschrift fur kath. Theol. VII 1883 p. 397. 2. Il piu antico poema dĂ©lia vita di S. Francesco d'Assisi scritto inanzi aU'anno i230 ora per la prima volta puhblicato et ira- dotto da Antonio Cristofani, Prato, 1882, 1 vol. 8», 288 pp. 3. Notons cependant deux articles des Miscellanea, l'un sur le manuscrit de cette biographie qui se trouve Ă la bibliothĂšque de Versailles, t. IV 1889, p. 34 ss.; l'autre sur l'auteur du poĂšme, t. V 1890, p. 2â4 et 74 ss. 4. Voir plus loin p. LXXXV. 5. V. Glassberger, ann. 1244. AnaĂźecta, t. II, p. 68. Cf. A. SS.,- p. 545 ss. LXXX VIE DE S. FRANĂOIS virtutibus B. Francisci vitam scripsit in Italia exqidsitcB vir eĂŻoguentice fr. Thomas juhente Domino Gregorio papa 7X, et eam qiiĆ incipit Quasi stĂ©lla matutina vir venerdbilis Domimis ut fertur JoanneSj ApostdlicĆ sedis notarius *». Devant un texte si prĂ©cis, le doute sur l'existence du travail de Jean de Ceperano Ă©tait impossible. Le R. P. Denifle a pu jeter une lumiĂšre nouvelle sur cette ques- tion. Dans un manuscrit renfermant la liturgie des FrĂšres PrĂȘcheurs et terminĂ© en 1256, il a trouvĂ© les neuf leçons pour la fĂȘte de saint François prĂ©cĂ©dĂ©es du titre Ex gestis ejus ahbreviatis quce sic incipiunt Quasi stĂ©lla {Zeitsclirift filr hath. Theol. VII p. 710. Gf. Archiv I p. 148. Cet abrĂ©gĂ© du travail de Ceperano ne donne, comme on doit s'y attendre, aucune indication nouvelle; mais peut-ĂȘtre ne faut-il pas dĂ©sespĂ©rer de retrouver l'Ćuvre mĂȘme de l'auteur. d Vie de saint François par frĂšre Julien. C'est sans doute vers 1230 que frĂšre Julien le Teuto- nique, qui avait Ă©tĂ© maĂźtre de chapelle Ă la cour du roi de France, fut chargĂ© de mettre la derniĂšre main Ă l'office de saint François 2. Une pareille Ćuvre ne pouvait Ă©videmment rien avoir d'original, et sa perte est peu sensible. 1. Manuscrit de la Bibl. de Turin, J. VI, 33, f» 95 a. 2. Plenam virtutibus S. Francisci vitam scripsit in Italia . . . frater Thomas ... in Francia vero frater Julianus scientia et sanctitate conspicuus qui etiam nocturnale Sancti officium in littera et cantu posuit prĆter hymnos et aliquas antiphonas quĆ summus ipse Pontifex et aliqui de Cardinalibus in sancti prĆco- nmm ediderunt Commencement du De laudibus de Bernard de Besse. V. ci aprĂšs p. LXXXYIII, Ms. Taur., fo 95 a. Gf. Tord. 53; Conform. 75 b. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LXXXI IX. LĂ©gende de saint Bonaventure. Sous le gĂ©nĂ©ralat de Jean de Parme 1247-1257, les partis franciscains subirent des modifications, Ă la suite desquelles leur opposition devint encore plus Ă©clatante qu'auparavant. Les zĂ©lanti, ayant Ă leur tĂȘte le ministre gĂ©nĂ©ral, adoptĂšrent avec enthousiasme les idĂ©es de Joachim de Flore. Les prĂ©dictions de l'AbbĂ© calabrais rĂ©pondaient trop bien Ă leurs prĂ©occupations intimes pour qu'il en fĂ»t autrement-, il leur semblait voir saint François comme un nouveau Christ inaugurant la troisiĂšme Ăšre du monde. Durant quelques annĂ©es ces rĂȘves Ă©murent l'Europe; la foi des Joachimites Ă©tait si ardente qu'elle s'imposait de vive force*, les sceptiques, comme Salimbene, se disaient que, somme toute, il valait mieux ne pas se laisser prendre au dĂ©pourvu par la grande Ă©chĂ©ance de 1260, et accouraient en foule Ă la cellule d'HyĂšres, pour ĂȘtre initiĂ©s par Hugues de Digne aux mystĂšres des temps nouveaux ; quant au peuple, il attendait tremblant, partagĂ© entre l'espĂ©rance et la terreur. Cependant leurs adversaires ne se tenaient pas pour battus, et le parti des relĂąchĂ©s restait le plus nombreux. D'une puretĂ© angĂ©lique, Jean de Parme croyait Ă la toute -puissance de l'exemple les Ă©vĂ©nements mon- trĂšrent combien il avait tort ; Ă sa sortie de charge les scan- dales n'Ă©taient pas moins criants que dix ans plus tĂŽt*. 1. On en a pour preuve la lettre circulaire. Licet insufflcentiam nos/ram, adressĂ©e par Bonaventure le 23 avril 1257, de suite aprĂšs son Ă©lection, aux provinciaux et aux custodes sur la rĂ©forme de l'Ordre. Texte SpĂ©culum Morin, tract. III, f» 213 a. LXXXII VIE DE S. FRANĂOIS Entre ces deux partis extrĂȘmes, contre lesquels il allait sĂ©vir avec une rigueur Ă©gale, se tenait celui des modĂ©rĂ©s, auquel appartenait saint Bonaventure K Mystique, mais d'un mysticisme rĂ©glĂ© et orthodoxe, il voyait Ă quelles rĂ©volutions courait l'Eglise si le r parti de l'Evangile Ă©ternel eĂ»t triomphĂ© ; sa victoire aurait Ă©tĂ© non pas celle de telle ou telle hĂ©rĂ©sie de dĂ©tail, mais c'eĂ»t Ă©tĂ© Ă bref dĂ©lai la ruine de tout l'Ă©difice ecclĂ©siastique ; il Ă©tait trop perspicace pour ne pas voir, qu'en derniĂšre analyse, la lutte engagĂ©e Ă©tait celle de la conscience individuelle contre l'autoritĂ©. Ceci explique, et lui fait pardonner jusqu'Ă un certain point, ses sĂ©vĂ©ritĂ©s Ă l'Ă©gard de ses contradicteurs; il Ă©tait appuyĂ© par la cour de Rome et par tous ceux qui voulaient faire de l'Ordre Ă la fois une Ă©cole de piĂ©tĂ© et de science. AussitĂŽt Ă©lu GĂ©nĂ©ral, il marcha Ă son double but, avec une persĂ©vĂ©rance qui ne connut jamais les hĂ©sitations, et une volontĂ© dont la fermetĂ© se fait sentir partout. DĂšs le lendemain de sa nomination, il traçait contre le parti des relĂąchĂ©s le programme des rĂ©formes, et en mĂȘme temps provoquait la comparution Ă Citta dĂ©lia Pieve, des frĂšres Joachimites devant un tribunal ecclĂ©siastique, qui les condamna Ă la prison perpĂ©tuelle. Il fallut l'in- tervention personnelle du cardinal Ottobonus, le futur Adrien V, pour que Jean de Parme restĂąt en libertĂ© et pĂ»t se retirer au couvent de Greccio. Le premier chapitre qui se tint sous sa prĂ©sidence, et dans les longues dĂ©cisions duquel on retrouve partout 1. Salimbene, ann. 1248, p. 131. La chronica tribulalionum nous donne un long et dramatique rĂ©cit de ces Ă©vĂ©nements Archiv, t. II, p. 283 ss. nTunc enim sapientia et sanctitas fratris BonaventurĆ eclipsata paluit et obscurata est et ejus mansiuetudo {sic ah agi- tante spiritu in furorem et iram defecil. Ib. p. 283. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LXXXIII sa trace se rassembla Ă Narbonne en 1260. Il y fut chargĂ© de composer une nouvelle vie de saint François*. On comprend facilement Ă quelles prĂ©occupations rĂ©pondait cette dĂ©cision des FrĂšres. Le nombre des lĂ©gendes s'Ă©tait beaucoup accru, car outre celles qui viennent d'ĂȘtre Ă©tudiĂ©es ou indiquĂ©es, il en existait d'autres qui ont entiĂšrement disparu et il Ă©tait Ă©gale- ment difficile Ă ceux qui partaient pour les missions lointaines, de faire un choix ou d'emporter tout. La voie Ă©tait donc toute indiquĂ©e au nouvel historien il devait faire Ćuvre de compilateur et de pacificateur. Il n'y manqua point. Son livre est une vĂ©ritable gerbe, ou plutĂŽt, c'est une meule oĂč l'infatigable auteur a entassĂ©, un peu au hasard, les gerbes de ses prĂ©dĂ©ces- seurs. La plupart du temps il les insĂšre Ă peu prĂšs telles quelles, se bornant Ă les raccourcir et Ă en enlever l'ivraie. Aussi, quand on arrive Ă la fin de ces longues pages, a-t-on de saint François une impression fort vague; on voit qu'il a Ă©tĂ© un saint, un fort grand saint, puisqu'il a accompli une quantitĂ© innombrable de miracles, grands et petits; mais on Ă©prouve un peu la mĂȘme impression qu'en parcourant les galeries des marchands d'objets de piĂ©tĂ©. Toutes ces statues, qu'il s'agisse d'un saint Antoine abbĂ©, d'un saint Dominique, d'une sainte ThĂ©rĂšse ou 1. Bon. 3, 1. A ce mĂȘme chapitre on rassembla les Constitutions de l'Ordre Ă©dictĂ©es par les chapitres prĂ©cĂ©dents ; on leur en ajouta de nouvelles, et on coordonna le tout. Dans la premiĂšre des douze rubriques, le chapitre ordonnait que, sitĂŽt la publication du nou- veau recueil, toutes les anciennes constitutions fussent dĂ©truites. Le texte en a Ă©tĂ© publiĂ© dans le Firmamentum trium Ordinum^ f"7b, et redonnĂ© derniĂšrement par le P. Ehrle Arc/iiu. t. VI 1891 dans sa belle Ă©tude Die Ă ltesten Redactionen der GeneralconstitU" tionen des Franziskanerordens. Cf. SpĂ©culum Morin, f» 195 b, ss. du tract. III. LXXXIV VIE DE S. FRANĂOIS d'un saint Vincent de Paul, ont la mĂȘme expression d'humilitĂ© douceĂątre, d'extase un peu niaise. Ce sont des saints, si vous voulez, des thaumaturges*, ce ne sont pas des hommes; celui qui les a faits, les a faits par mĂ©tier, de procĂ©dĂ©, aussi n'a-t-il rien mis de son cĆur dans ces fronts toujours penchĂ©s, dans ces bouches au sourire blafard. Dieu me garde de dire ou de penser que saint Bonaven- ture ne fĂ»t pas digne d'Ă©crire une vie de saint François, mais les circonstances dirigeaicDt son travail, et on peut bien dire, sans lui faire injure, qu'il est heureux pour François, et surtout pour nous, que nous ayons sur le Poverello d'Assise une autre biographie que celle du SĂ©raphique Docteur. Trois ans aprĂšs, en 1263, il apportait son travail ter- minĂ© au chapitre gĂ©nĂ©ral convoquĂ© Ă Pise sous sa prĂ©si- dence. Il y fut solennellement approuvĂ©*. Pensa-t-on alors qu'il suffirait de la prĂ©sence de la nouvelle lĂ©gende pour faire oublier les anciennes, c'est ce qu'on ne saurait dire-, mais il semble qu'on garda pour cette fois le silence Ă leur Ă©gard. Il n'en fut pas de mĂȘme au chapitre suivant. Celui-ci rĂ©uni Ă Paris prit une dĂ©cision qui devait avoir de dĂ©sastreux rĂ©sultats pour les documents franciscains primitifs. Ce dĂ©cret, Ă©manĂ© d'une assemblĂ©e prĂ©sidĂ©e par Bonaventure en personne, est trop important pour ne pas ĂȘtre rapportĂ© textuellement Item, le Chapitre gĂ©nĂ©ral ordonne par obĂ©issance que toutes les lĂ©gendes du B. François faites jadis soient dĂ©truites. Les frĂšres qui les trouveraient hors de l'Ordre devront tĂącher de les faire disparaĂźtre, puisque la lĂ©gende faite par le GĂ©nĂ©ral 1. On y approuva aussi la Legenda Minor de Bonaventure et qui n'Ă©tait qu'un abrĂ©gĂ© de la Legenda iMajor, arrangĂ© Ă l'usage du chĆur pour la fĂȘte de saint François et son octave. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LXXXV a Ă©tĂ© compilĂ©e sur les renseignements de ceux qui ont accompagnĂ© presque toujours le B. François ; tout ce qu'ils ont pu savoir d'une façon certaine et tout ce qui est prouvĂ© y a Ă©tĂ© soigneusement insĂ©rĂ©. * » Il eĂ»t Ă©tĂ© difficile d'ĂȘtre plus prĂ©cis. On voit avec quelle persĂ©vĂ©- rance Bonaventure poursuivait sa lutte contre les groupes extrĂȘmes. Cette constitution nous explique la disparition presque complĂšte des manuscrits de Celano et des Trois Compagnons, alors que dans certaines collections ceux de la lĂ©gende de Bonaventure se comptent Ă peine. Comme on le voit, Bonaventure avait voulu Ă©crire une sorte de biographie officielle ou canonique; il n'y rĂ©ussit que trop. La plupart des rĂ©cits que nous connaissons dĂ©jĂ ont passĂ© dans son recueil, mais non sans souffrir parfois des dĂ©formations profondes. On ne saurait s'Ă©tonner de le voir glisser, avec plus de discrĂ©tion que Celano dans la PremiĂšre Vie, sur la jeunesse de François, mais on 1. {{Item prĆcipit GĂ©nĂ©rale capitulum per obedientiam quocl omnes legendĆ de B. Francisco olim factĆ deleantur et ubi in- veniri poterant extra ordinem ipsas fratres studeant amovere^ cum illa legenda quĆ facta est per Generalem sit compilata prout ipse habuit ab ore illorum qui cum B. Francisco quasi semper fuerunt et cuncta certitudinaliter sciverint et probata ibi sint posita diligenterm. Ce prĂ©cieux texte a Ă©tĂ© retrouvĂ© et publiĂ© par le P. Rinaldi dans sa prĂ©face au texte de Celano Seraphici Viri Francisci vitĆ duĆ, p. XL Wadding semble en avoir eu connais- sance, du moins indirectement, car il dit Utramque Historiam, longiorem et breviorem, obtulit {Bonaventura triennio post in comitiis Pisanis patribus Ordinis, quas rĂȘver enter cum gratiarum actione, supressis aliis quibusque Legendis, admiserunt » . Ad ann. 1260 n^ 18. Cf. Ehrle, Zeitschrift fur kath, TheoL, t. VII 1883 p. 396. â Communicaverat sanctus Franciscus plurima sociis suis et fratribus antiquis, que oblivioni tradita sunt, tum quia que scripta erant in legenda prima, nova Ă©dita a fratre, Bonaventura deleta et destructa sunt^ ipso jubente. tum quia. . . Chronica tribut. Archiv, t. II, p. 256. LXXXVI VIE DE S. FRANĂOIS regrette de le voir ornementer et matĂ©rialiser quelques- uns des plus jolis traits des lĂ©gendes antĂ©rieures. âąIl ne lui suffit pas que François ait entendu parler le crucifix de Saint-Damien*, il s'arrĂȘte pour bien marquer qu'il l'entendit corporels auribus et qu'il n'y avait per- sonne dans la chapelle Ă ce moment ! Le frĂšre Monaldo au chapitre d'Arles voit apparaĂźtre saint François corpo- reis ociilis. Il abrĂšge souvent ses prĂ©dĂ©cesseurs, mais ce n'est pas pour lui une rĂšgle invariable. ArrivĂ© au rĂ©cit des stigmates, il lui consacre de longues pages ^, ra- conte une sorte de consultation faite par François pour savoir s'il pouvait les cacher et ajoute plusieurs miracles dĂ»s Ă ces plaies sacrĂ©es ; plus loin il y revient encore pour montrer un certain JĂ©rĂŽme, chevalier d'Assise, voulant toucher de ses mains les clous mira- culeux ^. Par contre il est d'une discrĂ©tion significative dĂšs qu'il s'agit des compagnons du Saint. Il ne nomme que trois des onze premiers disciples '^, et ne mentionne pas plus les frĂšres LĂ©on, Ange, Kufin, Masseo, que leur adversaire, frĂšre Elie. Quant aux rĂ©cits que nous trouvons pour la premiĂšre fois dans ce recueil, ils ne font guĂšre regretter les sources inconnues qui auront Ă©tĂ© au service du fameux Docteur; il semble que la guĂ©rison de Morico ramenĂ© Ă la santĂ© par quelques boulettes de pain trempĂ©es dans l'huile de la lampe qui brĂ»lait devant l'autel de la Vierge^, n'a guĂšre d'importance pour la vie de François, pas plus que l'histoire de cette brebis donnĂ©e Ă Jacqueline de Settesoli, Ă©veillant sa maĂźtresse pour lui rappeler 1. Bon. 188-204. 2. Bon. 218. 3. Bernard, Bon. 28; Ăgide, Bon. 29 et Sylvestre, Bon. 30. 4. Bon. 49. ĂTLDE CRITIQUE DES SOURCES LXXXVII l'heure d'aller Ă la messe *. Que penser de cette autre brebis de la Portioncule, qui accourait au chĆur dĂšs qu'elle y entendait la psalmodie des frĂšres, et s'age- nouillait dĂ©votement pour l'Ă©lĂ©vation du Saint-Sacre- ment^? Tous ces traits dont on pourrait grossir la liste^, rĂ©- vĂšlent le travail de la lĂ©gende ; saint François devenait un grand thaumaturge, mais sa physionomie y perdait son originalitĂ©. Le plus grand dĂ©faut de cette Ćuvre est en effet ce vague oĂč l'on reste quant au caractĂšre du Saint. Tandis que, dans Celano, il y a les grandes lignes de l'histoire d'une Ăąme, l'esquisse de ce drame Ă©mouvant d'un homme qui arrive Ă se conquĂ©rir lui-mĂȘme, chez Bonaventure, tout ce travail intĂ©rieur disparaĂźt devant les interventions divines; son cĆur est pour ainsi dire le lieu gĂ©omĂ©trique d'un certain nombre de visions; il est un instrument passif dans les mains de Dieu, et on ne voit vraiment pas pourquoi c'est lui qui a Ă©tĂ© choisi et non un autre. Et pourtant Bonaventure Ă©tait italien; il avait vu l'Ombrie ; il avait dĂ» s'agenouiller et cĂ©lĂ©brer les saints mystĂšres dans la pauvre chapelle de la Portioncule, berceau de la plus noble rĂ©forme religieuse ; il avait conversĂ© avec frĂšre Egide et pu retrouver sur ses lĂšvres un Ă©cho des premiĂšres ardeurs franciscaines mais hĂ©las, rien de cet enivrement n'a passĂ© dans son livre, et s'il faut tout dire, je le trouve bien infĂ©rieur Ă des documents tout Ă fait postĂ©rieurs, aux Fioretti par exemple; car i. Bon. 112. 2. Bon. m. 3. V. Bon. 115; 99; etc. M. Thode a Ă©numĂ©rĂ© les rĂ©cits spĂ©ciaux Ă Bonaventure {Franz von Assisi, p. 535. LXXXVm VIE DE S. FRANĂOIS celles-ci ont saisi, en partie du moinS; l'Ăąme de François ; elles ont senti battre ce cĆur tout plein de sensibilitĂ©, d'admiration, d'indulgence, d'amour, d'indĂ©pendance et d'insouciance. X. De laudibus de Bernard de Besse ^ L'Ćuvre de Bonaventure ne dĂ©couragea pas les bio- graphes. La valeur historique de leurs travaux est Ă peu prĂšs nulle, et nous n'essaierons mĂȘme plus d'en dresser le catalogue. Bernard de Besse, probablement originaire du midi de la France 2, et secrĂ©taire de Bonaventure ^, fit un rĂ©sumĂ© des lĂ©gendes antĂ©rieures cette Ćuvre qui ne nous apporte aucune indication historique importante, n'intĂ©resse guĂšre que par le soin avec lequel l'auteur a notĂ© les localitĂ©s oĂč reposent les frĂšres morts en odeur 1. Manuscrit, I, IV, 33 de la bibliothĂšque de l'UniversitĂ© de Turin. C'est un in-4o sur parchemin de la fin du 14'" siĂšcle. 124 ff. Il ren- ferme d'abord la biographie de saint François par saint Bona- venture et une lĂ©gende de sainte Glaire, puis au f» 95a le De laudibus. Le texte en sera prochainement pubhĂ© dans les Analecta franciscana des RR. PP. Franciscains de Quaracchi, prĂšs de flo- rence. 2. En le lisant, on s'aperçoit bientĂŽt qu'il connaĂźt spĂ©cialement bien les couvents de la province d'Aquitaine, et note avec soin tout ce qui les concerne. 3. Wadding, ann. 1230, n» 7. Plusieurs passages prouvent du moins qu'il accompagna Bonaventure dans ses tournĂ©es .{Hoc enim l'assistance spĂ©ciale defr. Egide in iis cjuĆ adbonum animĆ per- tinent devotus Generalis et Cardinalis predictus . . . nos docuit ». Fo 96 a. â Jamdudum ego per TheutoniĆ partes et FlandriĆ cum Ministro transiens Generali. Ibid. f^ 106 a. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES LXXXIX de saintetĂ©, et raconte une foule de visions tendant toutes Ă prouver rexcellence de l'Ordre*. La publication de ce document prĂ©sentera cependant le grand avantage d'Ă©clairer un peu la difficile question des sources. Plusieurs passages du De laudibus se retrouvent textuellement dans le SpĂ©culum 2; or, comme un coup d'Ćil suffit Ă montrer que le SpĂ©culum n'a pas copiĂ© le De laudibus^ il faut que Bernard de Besse ait eu devant lui sinon le SpĂ©culum, du moins un document du mĂȘme genre. 1 Bernard de Besse est l'auteur de plusieurs autres Ă©crits no- tamment d'un important Catalogus Ministrorum genei^alium publiĂ© d'aprĂšs le mĂȘme manuscrit de Turin par le R. P. Ehrle [Zeitschrift fur kath. TheoL, t. Vil, p. 338â352, avec une fort remarquable introduction critique Ib. p. 323 â 337. Cf. Archiv fur Lia. u. Kirchg., I, p. 145. â BarthĂ©lĂ©my de Pise Ă©crivant ses ConformitĂ©s avait sous les yeux une partie de ses ouvrages, f» 148 b 2; 126a 1 ; mais il appelle l'auteur tantĂŽt Bernardus de Blesa, tantĂŽt Johannes de Blesa. â Voir aussi Marc de Lisbonne, t. II, p. 212 et HaurĂ©au, Notices et extraits^ t. VI, p. 153. 2. Benique primas Francisci Xll discipulos . . . omnes sanctos fuisse audivimus prĂȘter unum qui Ordinem exiens leprosus factus laqueo vel alter Judas interiit, ne Francisco cum Christo vel in discipulis similitudo deficeret. » F'' 96 a. III DOCUMENTS DIPLOMATIQUES Nous rangeons dans cette catĂ©gorie tous les actes ayant un caractĂšre d'authenticitĂ© publique, en particulier ceux qui ont Ă©tĂ© rĂ©digĂ©s par la chancellerie pontificale. Cette source de renseignements oĂč chaque document porte avec lui sa date, est prĂ©cisĂ©ment celle qui a Ă©tĂ© le plus nĂ©gligĂ©e jusqu'ici. I. Donation de TAIverne. U Instmmentum donationis Montis AĂŻverncPj document notariĂ© conservĂ© aux archives de Borgo San-Sepolcro*, ne nous donne pas seulement le nom du gĂ©nĂ©reux ami de saint François et bien des dĂ©tails pittoresques^ mais il fixe avec prĂ©cision une date d'autant plus importante qu'elle tombe dans la pĂ©riode la plus obscure de la vie du Saint. C'est le 8 mai 1213 qu'OrĂŻando dei Catani, comte de Chiusi en Casentin, donna TAlverne Ă frĂšre François. 1. Il a Ă©tĂ© publiĂ© par Sbaralea, Bull. t. IV, p. 156, note h. Cet acte a Ă©tĂ© rĂ©digĂ© le 9 juillet 1274, Ă un moment oĂč les fils d'Orlando aussi bien que les FrĂšres Mineurs voulurent authentiquer la do- natioQ restĂ©e verbale jusqu'alors. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES XCI II. Registres du Cardinal Hugolin. Les documents de la chancellerie pontificale adressĂ©s au cardinal Hugolin, le futur GrĂ©goire IX, et ceux qui Ă©manent de la main de ce dernier, durant ses longs voyages comme lĂ©gat apostolique *, ont une importance de premier ordre. Il serait trop long d'en donner mĂȘme une simple Ă©nu- mĂ©ration. Ceux qui marquent des faits importants se- ront indiquĂ©s avec exactitude dans le cours de ce tra- vail. Qu'il suffise de dire qu'en rapprochant ces deux sĂ©ries de documents et en faisant intervenir la date des bulles papales contresignĂ©es par Hugolin, on arrive Ă suivre presque jour par jour cet homme qui a Ă©tĂ© peut- ĂȘtre, sans en excepter saint François, celui dont la vo- lontĂ© a le plus profondĂ©ment façonnĂ© l'institution fran- ciscaine. On y voit aussi la part prĂ©pondĂ©rante que l'Ordre prit dĂšs l'abord dans les prĂ©occupations du futur souverain pontife, et on arrive Ă une prĂ©cision parfaite pour l'Ă©poque de ses rencontres avec saint François. III. Bulles. Les bulles pontificales concernant les Franciscains ont Ă©tĂ© recueillies et publiĂ©es au siĂšcle dernier par le Conven- 1. Woiv Registri dei Cardinali Ugolino d'Ostia e Ottaviano degli Ubaldini pubblicati a cura di Guido Levi dalV Istituto storico italiano. â Fo7iti per la storia d'Italia, Roma 1890, 1 vol. m-APy XXVIII et 250 p. â Cette Ă©dition est faite d'aprĂšs un manuscrit de la Nationale de Paris Ancien fonds Colbert lat. 5152 A. Il faut en rapprocher un fort beau travail dĂ» aussi Ă M. G. Levi Documenti ad illustrazione del Registro del Gard. Ugolino, dans VArchivio dĂ©lia Societa Romana di sioria patria, t. XII 1889, p. 241-326. XCll VIE DE S. FRANĂOIS tuel Sbaralea ^ Mais on n'en a tirĂ© jusqu'ici Ă peu prĂšs aucun parti pour l'histoire des origines de l'Ordre 2. En voici une liste sommaire ; on trouvera les dĂ©tails dans le cours de l'ouvrage. N'' 1. 18 aoĂ»t 1218. â Bulle Litterce tiiĆ adressĂ©e Ă Hugolin. Le pape lui permet d'accepter des donations de biens-fonds en faveur de femmes fuyant le monde Clarisses et de dĂ©clarer que ces monastĂšres relĂšvent du SiĂšge Apostolique. N^ 2. 11 juin 1219. â Oum dilecti filli. Cette bulle, adressĂ©e d'une maniĂšre gĂ©nĂ©rale Ă tous les prĂ©lats, est une sorte de sauf-conduit pour les FrĂšres Mineurs. 1. Bullarium franciscanum seu Rom. Pontifioum constitutiones epistolĆ diplomata ordinibus 3finorum, Clarissarum et PĆniten- tium concessa, edidit Joh. Hyac. Sbaralea ord. inin. conv. 4 vol. in-fol. Rome t. I 1759, t. II 1761, t. III 1763, t. IV 1708. â Supplementum ab Annibale de Latera ord, min. obs. RomĆ 1780. â Sbaralea eut une tĂąche relativement facile, car de nombreux recueils avaient Ă©tĂ© faits avant le sien ; je n'en, citerai qu'un parmi ceux que j'ai sous les yeux ; il est, comparativement, fort bien fait, et a Ă©chappĂ©, semble-t-il, aux recherches des bibliographes francis- cains Singularissimum eximiumque opus universis mortalibus sacratissimi ordinis seraphici patris nostri Francisci a Domino Jesu mirabili modo approbati necnon a quam^pluribus nostri Redemptoris sanctissimis vicariis romanis ponlificibus multipha- rie declarati notitiam habere cupientibus profecto per necessarium â SpĂ©culum Minorum . . . per Martinum Morin . . . Rouen 1509. C'est un in-S^ ayant ses folios numĂ©rotĂ©s, imprimĂ© avec un soin remarquable. Il contient outre les bulles, les principales disserta- tions sur la RĂšgle, Ă©laborĂ©es au treiziĂšme siĂšcle, et un Memoriale ordinis P» partie, f^ 60-82. sorte de catalogue des ministres gĂ©nĂ©- raux qui eĂ»t Ă©vitĂ© bien des erreurs aux historiens, s'il eĂ»t Ă©tĂ© connu. 2. Les Bollandistes eux-mĂȘmes ont complĂštement nĂ©gligĂ© ces sources d'indications, croyant, sur un passige mal interprĂ©tĂ©, que l'Ordre n'avait obtenu aucune bulle avant l'approbation solennelle par Honorius III le 29 novembre 1223. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES XCIII N° 3. 19 dĂ©cembre 1219. â Sacrosancta romana. Pri- vilĂšges concĂ©dĂ©s aux SĆurs Clarisses de Monticelli prĂšs Florence. N° 4. 29 mai 1220. â Pro dilectis. Le pape prie les prĂ©lats de France de faire bon accueil aux FrĂšres Mi- neurs. N° 5. 22 septembre 1220. â Gum secundum. Hono- rius III prescrit un an de noviciat avant l'entrĂ©e dans l'Ordre. N° 6. 9 dĂ©cembre 1220. â Constihitus in prĆsentia. Cette bulle concerne un prĂȘtre de Constantinople qui avait fait vĆu d'entrer dans l'Ordre. Comme il y est question de rater Lucas Magister fratrum Minonim de partihus BomaniĆ, on a lĂ un tĂ©moignage indirect, et d'autant plus prĂ©cieux, sur l'Ă©poque Ă laquelle l'Ordre s'Ă©tablit en Orient. N° 7. 13 fĂ©vrier 1221. â Nouvelle bulle pour le mĂȘme prĂȘtre. No 8. 16 dĂ©cembre 1221. â Significatum est nobis, Honorius III recommande Ă l'Ă©vĂȘque de Rimini de pro- tĂ©ger les FrĂšres de la PĂ©nitence Tiers Ordre. N° 9. 22 mars 1222 *. â Devotionis vestrce. ConcĂšde aux Franciscains de cĂ©lĂ©brer les offices en temps d'interdit sous certaines conditions. N° 10. 29 mars 1222. â Ex x>arte TJniversitatis. Mis- sion donnĂ©e aux Dominicains, aux Franciscains et aux frĂšres de la Milice de Saint Jacques Ă Lisbonne. N°^ 11, 12 et 13. 19 septembre 1222. â Sacrosancta 1. Et non pas 29 mars comme le veut Sbaralea.. L'original que j'ai eu sous les yeux aux archives d'Assise porte en effet Datum Anagnie XI Kal. aprilis pontificatus nostri anno sexto. XCIV VIE DE S. FRANĂOIS Romana. PrivilĂšges pour les monastĂšres Clarisses de Lucques, Sienne et PĂ©rouse. N° 14. 29 novembre 1223. â Solet annuere. Appro- bation solennelle de la RĂšgle qui est insĂ©rĂ©e dans la bulle. N° 15. 18 dĂ©cembre 1223. â Fratrum Minorum, Con- cerne les apostats de l'Ordre. N° 16. 1^'" dĂ©cembre 1224. â Cum illorum. Autorisa- tion donnĂ©e aux FrĂšres de la PĂ©nitence d'assister aux offices en temps d'interdit, etc. N° 17. 3 dĂ©cembre 1224. â âą Qaia populares tumuUus. â Concession de l'autel portatif. N° 18. 28 aoĂ»t 1225. â In Mis. Honorius rappelle Ă l'Ă©vĂȘque de Paris et Ă l'archevĂȘque de Reims le vrai sens des privilĂšges accordĂ©s aux FrĂšres Mineurs. N° 19. 7 octobre 1225. â Vineae Domini. Cette bulle contient diverses autorisations en faveur des FrĂšres qui vont Ă©vangĂ©liser le Maroc. Cette liste ne renferme que celles des bulles de Sba- ralea qui peuvent directement ou indirectement jeter quelque lumiĂšre sur la vie de saint François et sa crĂ©a- tion. La nomenclature de Sbaralea est sĂ»rement incom- plĂšte et devra ĂȘtre rĂ©visĂ©e quand les Registres d'Hono- rius III auront Ă©tĂ© publiĂ©s intĂ©gralement *. 1. L'abbĂ© Horoy a bien publiĂ© en cinq volumes ce qu'il intitule les OpĂ©ra omnia d'Honorius III, mais il nĂ©glige, sans mot dire, un grand nombre de lettres dont certaines sont signalĂ©es dans le re- cueil si connu de Potthast. L'abbĂ© Pietro Pressuti a entrepris de publier le sommaire de "toutes les bulles de ce pape d'aprĂšs les Re- gistres originaux du Vatican / regesli del Pontefice Onorio 111. Roma t. I, 1884. Le t. I" seul a paru jusqu'ici. IV CHRONIQUEURS DE L'ORDRE I. Chronique de frĂšre Jourdain de Giano ^ NĂ© Ă Giano en Ombrie, dans la contrĂ©e montagneuse qui forme vers le sud l'horizon d'Assise, frĂšre Jourdain fut en 1221 l'un des vingt-six frĂšres qui, sous la con- duite de CĂ©saire de Spire, partirent pour l'Allemagne. Il semble ĂȘtre restĂ© attachĂ© jusqu'Ă sa mort Ă cette province, alors que la plupart des frĂšres, surtout ceux qui exerçaient des charges, Ă©taient transfĂ©rĂ©s, souvent Ă quelques mois de distance, d'un bout Ă l'autre de l'Europe. Il n'est donc pas Ă©tonnant qu'on l'ait frĂ©quem- ment priĂ© de mettre par Ă©crit ses souvenirs. C'est au 1. Chronica fratria Jordani a Giano. Le texte en a Ă©tĂ© publiĂ© pour la premiĂšre fois en 4870 par le D"^ G. Voigt sous le titre t Die DenkwĂ»rdigkeiten des Minoriten Jordanus von Giano, dans les Abhandlungen derphilolog. histor. Cl. der kĂŽnigl. sĂ chsischen Gesellschaft der Wissenschaften p. 421-545. Leipzig chez Hirzel, 1870. On n'en connaĂźt qu'un seul manuscrit qui se trouve Ă la BibliothĂšque royale de Berlin Manuscript. theolog. lat. 4°, n. 196, saec. XIV, foliorum 141. Il a servi de base Ă la seconde Ă©dition AnalectĂ franciscana sive Chronica aliaque documenta ad historiam minorum spectantia. Ad Claras Aquas Quaracchi ex typographia collegii S. BonaventurĆ 1885, t. I, p. 1-19. Sauf indication contraire, je cite toujours cette Ă©dition, oĂč a Ă©tĂ© con- servĂ©e la division en soixante-trois paragraphes introduite par le Dr Voigt. XGVI VIE DE S. FRANĂOIS printemps de 1262 qu'il les dicta au frĂšre Baudoin de Brandebourg. Il dut le faire avec joie, s'y Ă©tant prĂ©parĂ© de longue date. Il raconte avec naĂŻvetĂ© comment, dĂšs 1221, au chapitre gĂ©nĂ©ral de la Portioncule, il allait de groupe en groupe, interrogeant les frĂšres qui partaient pour les missions lointaines sur leur nom, leur pays, afin de pouvoir dire plus tard, surtout s'ils venaient Ă ĂȘtre martyrisĂ©s Je les ai bien connus ! » ^ Sa chronique porte la trace de ces dispositions. Ce qu'il veut raconter, c'est l'introduction et les premiers dĂ©ve- loppements de l'Ordre en Allemagne, et il le fait en Ă©numĂ©rant, avec une complaisance qui a bien sa coquet- terie, le nom d'une foule de frĂšres ^^ et en datant soigneu- sement tous les Ă©vĂ©nements. Ces dĂ©tails fatigants pour un lecteur ordinaire, sont prĂ©cieux pour l'historien ; il y voit la diversitĂ© des milieux dans lesquels se recru- taient les frĂšres, et la rapiditĂ© avec laquelle une poignĂ©e de missionnaires jetĂ©s en pays inconnu savaient rayon- ner, fonder de nouvelles stations et, en cinq ans, couvrir le Tyrol, la Saxe, la BaviĂšre, l'Alsace et les provinces voisines d'un rĂ©seau de monastĂšres. Il est bon^ cela va sans dire, de contrĂŽler les indica- tions chronologiques de Jourdain car il dĂ©bute en priant le lecteur de lui pardonner les erreurs qui ont pu lui Ă©chapper de ce chef; mais un homme qui note ainsi dans sa mĂ©moire ce qu'il veut plus tard raconter ou Ă©crire, n'est pas un tĂ©moin ordinaire. En lisant sa chronique, on croit entendre les souve- nirs d'un vieux soldat, oĂč certains dĂ©tails sans valeur sont saisis et prĂ©sentĂ©s avec une puissance de relief extraordinaire, oĂč le narrateur ne sait pas rĂ©sister Ă la -1. Jord. 81. 2. Il nomme plus de quatre-vingts personnes. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES XCVII tentation de se mettre en scĂšne, au risque parfois d'em- bellir un peu la sĂšche rĂ©alitĂ© ^ Cette chronique fourmille en effet d'anecdotes un peu personnelles, mais fort naĂŻves et bien venues, et qui somme toute, portent en elles-mĂȘmes le tĂ©moignage de leur authenticitĂ©. C'est dĂ©jĂ le parfum des Fioretti qui s'exhale de ces pages pleines de candeur et de virilitĂ© ; nous pouvons suivre les missionnaires Ă©tape par Ă©tape, puis, quand ils sont installĂ©s, pousser la porte du mo- nastĂšre, et lire au fond du cĆur de ces hommes, dont beaucoup sont braves comme des hĂ©ros et simples comme des colombes. Cette chronique parle surtout, il est vrai, de l'Alle- magne, mais les premiers chapitres ont pour l'histoire de saint François une importance qui dĂ©passe mĂȘme celle des biographies. GrĂące Ă Jourdain de Giano, nous sommes dĂ©sormais renseignĂ©s sur les crises que traversa l'institution de François dĂšs 1219 ; il nous fournit la base solidement historique qui semblait faire dĂ©faut aux docu- ments Ă©manĂ©s des Spirituels, et rĂ©habilite leur tĂ©moignage. II. Eccleston ArrivĂ©e des FrĂšres en Angleterre^. Les renseignements que nous avons sur la vie de Thomas d'Eccleston sont fort peu de chose, car il n'a 1 . Il ne me semble pas qu'on puisse regarder comme rigoureuse- ment exacte la relation de l'entrevue de GrĂ©goire IX et de Jour- dain, Jord. 63. 2. Liber de adventu Minorum in Angliam, publiĂ© sous le titre de Monumenta Franciscana {dans la sĂ©rie des RerumBritannica- rum medii JEvi scriptores, Roll sĂ©ries en deux volumes in-S» Le premier par les soins de J. S. Brewer 1858, le second par ceux de R. Hewlett 1882. â Ce texte est reproduit sans l'appareil scientifique dans les Analecta franciscana, t. I, p. 217-257 Cf. English historical Review V 1890 754. Il en a Ă©tĂ© publiĂ© une XCVIII VIE DE S. FRANĂOIS laissĂ© aucune trace dans l'histoire de l'Ordre, pas plus que Simon d'Esseby auquel il dĂ©die son travail. Sans doute originaire du Yorkshire, il semble n'avoir jamais quittĂ© l'Angleterre. Durant vingt-cinq ans, il rassembla les Ă©lĂ©ments de son travail qui embrasse la suite des Ă©vĂ©nements depuis 1224 jusqu'aux environs de l'an 1260. Les derniers faits qu'il raconte, se rapportent tous Ă des annĂ©es trĂšs voisines de cette date. D'une longueur presque double, le travail d'Eccleston est loin d'ĂȘtre aussi intĂ©ressant Ă la lecture que celui de Jourdain. Ce dernier avait vu Ă peu prĂšs tout ce qu'il racontait, de lĂ un brio dans le rĂ©cit qu'on ne saurait retrouver chez un auteur qui Ă©crit surtout sur le tĂ©moi- gnage d'autrui. De plus, tandis que Jourdain suit l'ordre chronologique, Eccleston a rĂ©parti ses rĂ©cits sous une quinzaine de rubriques oĂč. les mĂȘmes personnages reparaissent Ă chaque instant dans un pĂȘle>mĂȘle qui, Ă la- longue, ne laisse pas de devenir fatigant. Enfin il y a dans ce document un fond de particularisme Ă©ton- nant l'auteur ne veut pas seulement prouver que les frĂšres anglais sont des saints, il veut nous montrer que la province d'Angleterre surpasse toutes les autres^ par sa fidĂ©litĂ© Ă la RĂšgle et son courage contre les fauteurs de nouveautĂ©s, en particulier contre frĂšre Elie. Mais ces quelques dĂ©fauts ne doivent pas faire perdre de vue la vraie valeur de ce document. Il est de ceux qu'il faut lire et relire pour en saisir toute la portĂ©e, pour en comprendre tous les dĂ©tails. Il embrasse ce qu'on pourrait appeler la pĂ©riode hĂ©roĂŻque du mouve- Ă©dition critique excellente, mais malheureusement partielle, dans le t. XXYIII Scriptorum des Monumenta GermaniĆ Historica, par M. Liebermann. Hanovre 1888, in-f», p. 560-569. 1. Eccl. 11 ; 13; 14; 15. Cf. Eccl. 14, oĂč l'auteur a soin de dire que fr. Albert de Pise est mort Ă Rome au milieu de frĂšres anglais inter Anglicos ». ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES XCIX ment franciscain anglais, et la raconte avec une extrĂȘme naĂŻvetĂ©. En dehors de toute question historique, il y aurait lĂ de quoi intĂ©resser tous ceux que captive le spectacle des conquĂȘtes morales. Le mardi 10 septembre 1224, les FrĂšres Mineurs abordaient Ă Douvres. Ils Ă©taient neuf un prĂȘtre, un diacre, deux qui n'avaient que les ordres mineurs, cinq laĂŻques. Ils courent Ă CantorbĂ©ry , Ă Londres, Ă Oxford, Ă Cambridge, Ă Lincoln, Ă York, et moins de dix ans aprĂšs, tous ceux qui ont laissĂ© une trace dans l'histoire de la science ou de la saintetĂ© s'Ă©taient joints Ă eux ; qu'il suffise de nommer Adam de Marisco, Richard de Cornouailles, l'Ă©vĂȘque Robert GrossetĂȘte une des figures les plus fiĂšres et les plus pures du moyen Ăąge, et Roger Bacon, ce moine per- sĂ©cutĂ© qui, devançant les temps de quelques siĂšcles, abordait et rĂ©solvait au fond de son cachot les problĂšmes de l'autoritĂ© et de la mĂ©thode, avec une rigueur et une puissance que le XVP siĂšcle aura peine Ă surpasser. Il est impossible que dans un pareil mouvement, les faiblesses et les passions humaines ne se rĂ©vĂšlent çà et lĂ , mais il faut savoir grĂ© Ă notre chroniqueur de ne pas l'avoir cachĂ©. GrĂące Ă lui, nous pouvons oublier un instant l'heure actuelle, revivre dans cette premiĂšre chapelle de Cambridge, si pauvre que le charpentier n'avait mis qu'une journĂ©e Ă la bĂątir, y entendre trois frĂšres chanter matines durant la nuit, et cela avec tant d'ardeur qu'un d'entre eux, â si boiteux que ses deux compagnons devaient le porter, â pleurait de joie Ă chaudes larmes*, c'est qu'en Angleterre, comme en Italie, l'Ă©vangile franciscain Ă©tait un Ă©vangile de paix et de joie. Cependant la laideur morale leur inspirait une pitiĂ© que nous ne connaissons plus il y a peu de traits historiques plus beaux que celui de ce frĂšre Geoffroy de Salisbury C VIE DE S. FRANĂOIS confessant Alexandre de Bissingburn le noble pĂ©nitent accomplissait ce devoir sans attention, ayant l'air de raconter une histoire quelconque; soudain son confesseur fond en larmes, le fait rougir de honte, lui arrache aussi des pleurs et le bouleverse si bien qu'il demande Ă entrer dans l'Ordre. Les morceaux peut-ĂȘtre les plus intĂ©ressants sont ainsi ceux oĂč Thomas nous montre les frĂšres dans l'intimitĂ© ici buvant de la biĂšre aigre, lĂ courant en acheter Ă crĂ©dit, malgrĂ© la RĂšgle, pour l'offrir Ă deux confrĂšres qui ont Ă©tĂ© maltraitĂ©s, ou bien encore se ser- rant autour de frĂšre Salomon, qui vient de rentrer glacĂ© de froid et qu'on ne sait comment rĂ©chauffer, sicut porcis mos est eum comprimendo foveruntj dit le pieux narra- teur ^. Tout cela est entremĂȘlĂ© de rĂȘves, de visions, d'ap- paritions sans nombre 2 qui nous montrent une fois de plus combien les idĂ©es les plus familiĂšres aux esprits religieux du treiziĂšme siĂšcle Ă©taient diffĂ©rentes de celles qui hantent les cerveaux et les cĆurs d'aujourd'hui. Les renseignements donnĂ©s parEccleston n'auront guĂšre Ă intervenir dans ce livre que d'une façon indirecte, mais s'il parle peu de François il parle fort longuement de quelques-uns des hommes qui ont Ă©tĂ© le plus mĂȘlĂ©s Ă sa vie. III. Chronique de fra Salimbene^. Aussi cĂ©lĂšbre que peu connue, cette chronique est d'une utilitĂ© tout Ă fait secondaire en ce qui concerne la 1. Eccl. 4; 12. 2. Eccl. 4; 5; 6; 7; 10; 12; 13; 14; 15. 3. Elle a Ă©tĂ© publiĂ©e, mais avec bien des suppressions, en 1857, Ă Parme. Les Franciscains de Quaracchi en prĂ©parent une nouvelle Ă©dition qui paraĂźtra dans les Analecta franciscana. Cet ouvrage existe en manuscrit au Vatican sous le n» 7260. ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES CI vie de saint François. Son auteur, nĂ© le 9 octobre 1221, n'entra dans l'Ordre qu'en 1238 et Ă©crivit ses mĂ©moires de 1282 â 1287 ; aussi est-ce surtout pour les annĂ©es du milieu du XIIP siĂšcle que son importance est capitale. MalgrĂ© cela, on est Ă©tonnĂ© du peu de place que tient la rayonnante figure du maĂźtre dans ces longues pages, et cela mĂȘme indique, mieux que de longues considĂ©ra- tions, la chute profonde de l'idĂ©e franciscaine. IV. La Chronique des Tribulations par Angelo Clareno^. Cette chronique fut Ă©crite aux environs de 1330 on pourrait donc s'Ă©tonner de la voir paraĂźtre au nombre des sources Ă consulter sur la vie de saint François mort plus d'un siĂšcle auparavant *, mais le tableau que V. Ehrle, Zeitschrift fur kath. Theol, 1883, t. VII, p. 767 et 768. On lira avec intĂ©rĂȘt le travail de M. GlĂ©dat. De fratre Salim- hene et de ejus chronicĆ auctoritate. Paris in-4o. 1877, avec fic- simile. 1. Le R. P. Ehrle l'a publiĂ©e, mais hĂ©las pas intĂ©gralement, dans les Archivjt. II, p. 125-155 texte de la fin de la cinquiĂšme et de la sixiĂšme tribulation ; p. 256-327 texte de la troisiĂšme, de la qua- triĂšme et du commencement de b cinquiĂšme. Il y a joint des introductions et des notes critiques. Pour les parties non publiĂ©es je citerai le texte du manuscrit de la Laurentienne Plut. 20, cod. 7 complĂ©tĂ© le cas Ă©chĂ©ant par la version italienne qui se trouve Ă la bibliothĂšque nationale de Florence MagliabecchinaXXXVII-28. Voir aussi un article du prof. Tocco dans VArchivio storico italiano, t. XVII 1886, p. 12-36 et 243-61 et un de M. Richard BibliothĂšque de l'Ăcole des chartes, 1884, 5 livr,, p. 525. â Cf. Tocco, VEresia nel medio Evo, p. 419 ss. Quant au texte publiĂ© par DĂŽllinger dans ses BeitrĂ ge zur Sektengeschichte des Mittelalters. Munich 1890, 2 vol. in-8o, II. Theil Dokumente, p. 417-427, il ne saurait ĂȘtre d'aucune utilitĂ©. Il ne peut qu'in- duire en erreur, tant il surabonde de fautes grossiĂšres. Des pages entiĂšres y sont omises. en VIE DE s. FR/VNĂOIS Clareno nous y fait des premiers temps de l'Ordre tire son importance du fait qu'il l'a tracĂ© en faisant sans cesse appel Ă des tĂ©moins oculaires, et prĂ©cisĂ©ment Ă ceux dont les ouvrages ont aujourd'hui disparu. Angelo Clareno appelĂ© d'abord Pietro da Fossom- brone i du nom de sa ville natale, et parfois da Cingoli, sans doute Ă cause du petit couvent oĂč il fit profession, appartenait dĂ©jĂ vers 1265 au parti des zĂ©lanti de la Marche d'AncĂŽne. TraquĂ© et persĂ©cutĂ© par ses adver- saires pendant toute sa vie, il mourut en odeur de sain- tetĂ©, le 15 juin 1339, dans le petit ermitage de Santa Maria de Aspro, au diocĂšse de Marsico dans la Basilicate. GrĂące aux documents publiĂ©s, nous pouvons mainte- nant suivre pour ainsi dire jour par jour, non pas seule- ment les circonstances extĂ©rieures de sa vie, mais le travail intĂ©rieur de son Ăąme. Avec lui nous voyons revivre un Franciscain authentique, un de ces hommes qui, tout en voulant rester les fils soumis de l'Ăglise, ne pouvaient se rĂ©soudre Ă laisser s'envoler dans le do- maine du rĂȘve, l'idĂ©al qu'ils avaient saluĂ©. Bien souvent ils cĂŽtoyĂšrent l'hĂ©rĂ©sie âą il y a dans leurs paroles contre les mauvais prĂȘtres et les pontifes indignes une amertume que les sectaires du XVI siĂšcle ne dĂ©passe- ront pas 2. Souvent aussi ils semblent renoncer Ă toute autoritĂ© pour en appeler en dernier ressort au tĂ©moignage intĂ©rieur du Saint-Esprit 3^ et pourtant le protestantisme 1. Archiv, t. III, p. 40G-409. 2. V. Archiv I, p. 557 .. . Et hoc iotum ex rapacitate et mali- gnitate luporum pastorum qui voluerunt esse pastores, sed operi- bus negaverunt deum » et seq. Cf. p. 562. Avaritia et sijmo- niaca heresis absque pallio rĂ©gnĂąt et fere totum invasit ecclesie corpus. 3. Qui excommunicat et hereticat altissimam evangelii paw pertatem, excommunicatus est a Deo et hereticus coram Christo, qui est Ă©ternel et incommutabilis veritas. Arch. I, p. 509. Non ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES CIIĂ aurait tort d'aller se chercher des ancĂȘtres parmi eux. Non, ils voulurent mourir comme ils avaient vĂ©cu, dans la communion de cette Eglise qui Ă©tait pour eux une marĂątre, mais qu'ils aimaient avec cette passion hĂ©roĂŻque que quelques ci-devant nobles mirent en 93 Ă aimer la France, mĂȘme gouvernĂ©e par les Jacobins, et versĂšrent leur sang pour elle. Clareno et ses amis ne croyaient pas seulement que saint François avait Ă©tĂ© un grand saint ; mais, Ă cette conviction qui Ă©tait aussi celle des frĂšres de la commune observance, ils ajoutaient la persuasion que l'Ćuvre du StigmatisĂ© ne pouvait ĂȘtre continuĂ©e que par des hommes atteignant Ă sa stature morale, Ă laquelle on pourrait arriver Ă force de foi et d'amour. Ils furent de ces vio- lents qui ravissent le royaume des cieux; aussi, quand au sortir des frivoles et sĂ©niles prĂ©occupations quoti- diennes, on se trouve en face d'eux, on se sent Ă la fois rapetissĂ© et grandi, car on dĂ©couvre tout Ă coup dans le cĆur humain des puissances inespĂ©rĂ©es et comme des claviers inconnus. Il y a un apĂŽtre de JĂ©sus auquel il est difficile de ne pas penser en lisant la chronique des Tribulations et la correspondance d'Angelo Clareno, c'est saint Jean. Entre les Ă©crits de l'apĂŽtre de l'amour et ceux du Franciscain il y a des conformitĂ©s de style d'autant plus frappantes qu'ils ont Ă©tĂ© rĂ©digĂ©s dans une langue diffĂ©rente. Des deux cĂŽtĂ©s on sent une Ăąme de vieillard, oĂč tout n'est qu'amour, pardon, besoin de saintetĂ©, et est potestas contra Christum Dominum et contra evangelium. » Ib. p. 560. Il termine une de ces lettres par une parole d'un mysticisme plein de sĂ©rĂ©nitĂ© et qui nous fiit descendre au fond du cĆur des frĂšres Spirituels. Totum igitur studium esse dĂ©bet quod unum inseparabiliter simus per Franciscum in Christ o. » Ib. p. 564. CIV VIE DE S. FRANĂOIS qui pourtant parfois vibre tout Ă coup, comme jadis celle du voyant de Patmos, d'indignation, de colĂšre, de pitiĂ©, de terreur et de joie, quand l'avenir se dĂ©couvre et laisse deviner la fin de la grande tribulation. Les Ćuvres de Clareno sont donc, dans le sens le plus Ă©troit du mot, des Ă©crits de parti il s'agit de savoir si l'auteur n'aurait pas sciemment dĂ©naturĂ© les faits ou mutilĂ© les textes. A cette question on peut rĂ©pondre hardiment non. Il commet des erreurs ^, surtout dans les premiĂšres pages, mais elles ne sont pas de celles qui pourraient diminuer notre confiance. En bon Joacliimite, il pensait que l'Ordre aurait Ă tra- verser sept tribulations avant le triomphe dĂ©finitif. Le pontificat de Jean XXII marquait, croyait-il, le com- mencement de la septiĂšme il se recueillit alors pour faire, sur la demande d'un ami, l'histoire des six premiĂšres 2. Son rĂ©cit de la premiĂšre est prĂ©cĂ©dĂ© tout naturellement d'une introduction ayant pour but d'exposer au lecteur, en prenant comme cadre la vie de saint François, l'inten- tion que celui-ci avait eue en composant la RĂšgle et en dictant le Testament. NĂ© entre 1240 et 1250, Clareno eut Ă son service le tĂ©moiguage de plusieurs des premiers disciples 3; il se 4. Par exemple dans la liste des premiers gĂ©nĂ©raux de l'Ordre. 2. La premiĂšre 1219-1226 s'Ă©tend du dĂ©part de saint François pour l'Egypte jusqu'Ă sa mort; la seconde comprend le gĂ©nĂ©ralat de frĂšre Ăiie 1232-1239 ; la troisiĂšme celui de Grescentius 1244- 1248; la quatriĂšme celui de Bonaventure 1257-1274; la cinquiĂšme commence Ă l'Ă©poque du concile de Lyon 1274 et se prolonge jusqu'Ă la mort de l'inquisiteur Thomas d'Aversa 1304. Enfin la sixiĂšme va de 1308 Ă 1323. 3. ISupercrant adhuc multi de sociis h. Francisci. . . et alii non pauci de quibus ego vidi et ab ipsis audivi quĆ narro. » Ms. Laur. cod. 7, pi. XX fo 24 a. Qui passi stmt eam [tribulationem ter- ETUDE CRITIQUE DES SOURCES CV trouva en relations avec Ange de Rieti^, Ăgide ^ et avec ce frĂšre Jean, compagnon d'Ăgide, mentionnĂ© dans le prologue de la LĂ©gende des Trois Compagnons ^. Sa chronique forme donc comme une suite de cette lĂ©gende ; ce sont les noms des membres du petit cĂ©nacle de Greccio qui viennent nous la recommander; c'est aussi la mĂȘme inspiration. Mais Ă©crivant de longues annĂ©es aprĂšs la mort de ces frĂšres, Clareno sentit le besoin de s'appuyer aussi sur les tĂ©moignages Ă©crits; il rappelle Ă plusieurs reprises les quatre lĂ©gendes auxquelles il emprunte une partie de ses rĂ©cits ce sont celles de Jean de Ceperano, de Thomas de Celano, de Bonaventure et de frĂšre LĂ©on^. tiani] socii fundatoris fratres Aegidius et AngĂ©lus^ qui supere- rant me audiente referebant. » Ms. Laur, f» "21 b. Cf. Ms. italien XXXVII, 28. Magliab. f^ iSSb. 1. On ignore la date de sa mort; le 11 aoĂ»t 1253 il assista aux derniers moments de sainte Glaire. 2. Mourut le 23 avril 1261. 3. Queyn {fratrem Jacobum de Massa dirigente me fratre Jo- hanne socio fratris prefati Egidii videre laboravi. Hic enim frater Johannes . . . dixit mihi ...» Arch. II, p. 279. 4. ... Tribulationes preteritas memoravi , ul audivi Ă b illis qui sustinuerunt eas et alicjua commemoravi de hiis que didici in quatuor legendls quas vidi et legiy. Arch. II, p. 135. â Vitam pauperis et humitis viri Dei Francisci trium ordinum fundatoris quatuor solemnes personĆ scripserunt, fratres videlicet scientia et sanctitate prĆolari, Johannes et Thomas de Celano, frater Bona- ventura unus post Beatum Franciscum Generalis Minister et >nr mirĆ simplicitatis et sanctitatis frater LĂ©o, ejusdem sancti Fran- cisci soeius. Has quatuor descriptiones seu historias qui legerit.., Ms. Laurent, pi. XX, c. 7, f^ 1 a. Le traducteur italien crut-il Ă une erreur dans cette Ă©numĂ©ration? Je ne sais, mais il la supprima. Au f" 12 a du manuscrit XXX VII 28 de la Magliabecchina, on lit Incominciano alcune croniche del ordine franciscano, corne la vita del povero e humile servo di Dio Francesco fondatore del minorico ordine fu scripta da San Bonaventura e da quatro altri frati, Queste poche scripture ovveramente hystorie quello il quale dili^ gentemente le leggiera, expeditamente potra cognoscere... la voca-' tione la santita di San Francesco. CVI VIE DE S. FRANĂOIS L'Ćuvre de Bonaventure n'est mentionnĂ©e lĂ que pour mĂ©moire; Clareno ne lui fait aucun emprunt, tandis qu'il cite de longs passages de Jean de Ceperano *, de Thomas de Celano'^ et de frĂšre LĂ©on^. A ceux-ci Clareno demanda pour la vie de saint François des rĂ©cits contenant plusieurs indications nou- velles extrĂȘmement curieuses'''. 1. Ms. Laur. fo4bss. D'autre part on lit dans une lettre de Clareno {Ad hanc {paupertatem perfecte servandam Christus Franciacum vocavit et elegit in hac kora novissima et precepit ei evangelicam assumere regulmn, et a papa Innooentio fuit omni- bus annuntiatum in concilio generalif quod de sua auctoritate et obedientia sanctus Franciscus evangelicam vitarn et regulam as- sumpserat et Chri&to inspirante servare promiser at, sicut sanctus vir fr, LĂ©o scribit et fr. Johannes de Celano. »> Archiv I, p. 559. 2. Audiens cnim semel quorundam fratrum Ă©normes excessus, ut fr. Thomas de Celano scribit, et malum exemplum per eos secularibus dalum. Ms. Laur. f» 13 b. Le passage qui suit se rĂ©fĂšre Ă©videmment Ă 2 Gel. 3, 93 et 112. 3. Et fecerunt de rĂ©gula prima ministri removeri capitulum istud de prohibitionibus sancti evangelii, sicut fraler LĂ©o scribit. Ms. Laur. f'^ 12 b. Cf. Spec. 9a. V. p. 282. Nam cum rediisset de pariibus ultramarinis, minister quidam loquebatur cum eo, ut frater LĂ©o refert, de capitulo paupertatis , f» 13 a, Cf. Spec. 9 a, iS. Franciscus, teste fr. Leone, frĂ©quenter et cum multo studio recitabat fabulam. . . . quod oporlebat finaliter ordinem humiliari et ad sue humilitatis principia confltenda et tenenda reduci ». Archiv. II, p. 129. Il n'y a entre la LĂ©gende des Trois Compagnons telle qu'elle existe aujourd'hui et ces passages aucun point de contact; mais on trouve au contraire les rĂ©cits visĂ©s dans le SpĂ©culum et dans d'autres recueils, oĂč ils sont citĂ©s comme venant de frĂšre LĂ©on. 4. Clareno, par exemple, veut que le cardinal Hugolin ait sou- tenu saint François dĂšs l'approbation de la premiĂšre RĂšgle, de concert uvec le cardinal Jean de Saint-Paul. C'est possible, puis- que Hugolin avait Ă©tĂ© créé cardinal en 1198 V. Cardella Memorie storiche de' Cardinali, 9 vol. in-8'>, Rome 1792-1793, t. 1, 2 p., p. 190 ; de plus on s'expliquerait mieux ainsi le zĂšle avec lequel il protĂ©geait les divers ordres instituĂ©s par saint François, dĂšs 1217. Le chapitre oĂč Clareno raconte comment saint François Ă©crivit ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES CVIl Je me suis particuliĂšrement arrĂȘtĂ© Ă ce document parce que sa valeur me semble n'avoir pas Ă©tĂ© encore apprĂ©ciĂ©e avec Ă©quitĂ©. On est toujours d'un parti; les documents qu'il faut le plus tenir en quarantaine ne sont pas ceux dont la tendance est manifeste, ce sont ceux oĂč elle se dissimule habilement. La vie de saint François et toute une partie de l'his- toire religieuse du treiziĂšme siĂšcle, nous apparaĂźtront sans doute sous un jour bien diffĂ©rent, lorsqu'on pourra Ă©tudier les documents Ă©manĂ©s du parti vainqueur, en les complĂ©tant enfin par ceux du parti vaincu. De mĂȘme que la premiĂšre lĂ©gende de Thomas de Celano est dominĂ©e par le dĂ©sir d'associer Ă©troitement saint François, GrĂ©goire IX et frĂšre Elie, la chronique des Tribulations s'inspire d'un bout Ă l'autre de la pensĂ©e que les troubles de l'Ordre, et pour dire le mot, que l'apostasie a commencĂ© dĂšs 1219. Cette thĂšse vient de trouver dans la Chronique de Jourdain de Giano une Ă©clatante confirmation. V. Les Floretti*. Avec les Fioretti nous entrons dĂ©finitivement dans le domaine de la lĂ©gende. Ce bijou littĂ©raire raconte la la RĂšgle, manifeste le travail de la lĂ©gende, mais il est bien possible qu'il l'ait empruntĂ© tel quel au travail de frĂšre LĂ©on. Il est Ă noter que l'on ne trouve dans ce document aucune allusion Ă l'Indul- gence de la Portioncule. 4. Les manuscrits et les Ă©ditions en sont presque innombrables. M. Luigi Manzoni les a Ă©tudiĂ©s avec un soin qui fait vivement dĂ©- sirer qu'il continue ce difficile travail. Studi sui Fioretti Miscel- lanei 1888, p. 116-119, 150-152, 162-168; 1889, 9-15, 78-84," 132-135. Quand se trouvera-t-il quelqu'un qui voudra et pourra CYIII VIE DE S. FRANĂOIS vie de François, de ses compagnons et de ses disciples, telle qu'elle apparaissait au commencement du quator- ziĂšme siĂšcle Ă l'imagination populaire. Nous n'avons pas Ă nous arrĂȘter Ă la valeur littĂ©raire de ce document, une des productions les plus exquises du moyen Ăąge religieux, mais on peut bien dire qu'au point de vue historique, il ne mĂ©rite pas l'injuste oubli oĂč on l'a laissĂ©. Le courage a manquĂ© Ă la plupart des auteurs pour rĂ©viser la sentence prononcĂ©e contre lui, d'un cĆur bien lĂ©ger cependant, par les successeurs de Bollandus. Comment s'arrĂȘter Ă une Ćuvre que le P. Suysken n'avait mĂȘme pas daignĂ© lire ^ ! Ce qui donne cependant Ă ces rĂ©cits un prix inesti- mable, c'est ce qu'on pourrait appeler, faute de mieux, leur atmosphĂšre. Ils sont lĂ©gendaires, transformĂ©s, exa- gĂ©rĂ©s, faux mĂȘme si l'on veut, mais il y a quelque chose qu'ils nous rendent avec un coloris d'une vivacitĂ© et d'une intensitĂ© qu'on chercherait vainement ailleurs le milieu dans lequel vĂ©cut saint François. Mieux qu'au- cune autre biographie, les Fioretti nous transportent lĂ -bas en Ombrie, et au milieu des montagnes de la Marche d'AncĂŽne, pour nous en faire voir les ermitages, et nous mĂȘler Ă la vie moitiĂ© puĂ©rile et moitiĂ© angĂ©- lique, qui Ă©tait celle de leurs habitants. Il est difficile de se prononcer sur le nom de l'auteur. Son rĂŽle se borne du reste Ă recueillir, dans la tradition Ă©crite et dans la tradition orale, les fleurs de son bou- se charger d'en faire une Ă©dition scientifique? Celles qui ont paru de notre temps dans diverses villes d'Italie sont insignifiantes au point de vue critique. Voir Mazzoni Guido Capitoli inediti dei Fioretti di S. Francesco dans le Propugnatore. Bologne 1888, vol. XXI, p. 396-411. 1. V. A. SS. p. 865 Floretum non legi, nec curandum putavi. » Cf. 553 f. Floretum ad manum non habeo. » ĂTUDE CRITIQUE DES SOURCES CIX quet. La question de savoir s'il Ă©crivit en latin ou en italien a Ă©tĂ© fort discutĂ©e et ne paraĂźt pas encore tran- chĂ©e ce qui est sĂ»r, c'est que si son Ćuvre est antĂ©rieure aux ConformitĂ©s 1, elle est de peu postĂ©rieure Ă la chro- nique des Tribulations, car il serait Ă©trange qu'elle ne fĂźt aucune mention d'Angelo Clareno, si elle avait Ă©tĂ© Ă©crite aprĂšs sa mort. Ce livre est en effet une chronique essentiellement lo- cale 2; l'auteur a voulu dresser un monument Ă la gloire des FxĂšres Mineurs de la Marche d'AncĂŽne. Cette pro- vince, qui est Ă©videmment la sienne, n'a-t-elle pas ressemblĂ© au ciel resplendissant d'Ă©toiles? Les saints frĂšres qui l'ont habitĂ©e ont, comme les astres du ciel, illuminĂ© et ornĂ© l'Ordre de saint François, remplissant le monde de leurs exemples et de leurs enseignements.» Aussi en connaĂźt-il les plus petits villages^, ayant tous Ă quelque distance leur monastĂšre, bien isolĂ©, d'ordi- naire prĂšs d'un torrent, Ă la lisiĂšre d'un bois, et au- dessus de lui, vers les cimes, quelques cellules presque inaccessibles, asiles des frĂšres encore plus Ă©pris que les autres de contemplation et de retraite^. 1. BarthĂ©lĂ©my de Pise les rĂ©digea en 1385; or, certains ma- nuscrits des Fioretti sont antĂ©rieurs. De plus, dans les rĂ©cits que les ConformitĂ©s empruntent aux Fioretti, on sent le travail d'abrĂ©- viation de BarthĂ©lĂ©my. 2. Je ne parle ici que des cinquante-trois chapitres qui forment le vrai recueil des Fioretti. 3. La Province de la Marche d'AncĂŽne comptait sept custodies 1 Ascoh, 2 Camerino, 3 AncĂŽne, 4 Jesi, 5 Fermo, 6 Fano, 7 Fele- tro. Les Fioretti mentionnent au moins six des monastĂšres de la custodie de Fermo Moliano 51, 53, Fallerone, 32, 51, Bruforte et Soffiano 46, 47, Massa 51, Penna 45, Fermo 41, 49, 51. 4. A chaque page sont rappelĂ©s ces bois qui furent Ă l'origine la dĂ©pendance indispensable des monvstĂšres franciscains La selva cKera allora allato a S. M. degli Angeli 3, 10, 15, 16 etc. La selva d'un luogo deserto del val di Spoleto Garceri?4; Selva di Forano 42, di Massa 51, etc. ex VIE DE S. FRANĂOIS Les cliapitres qui concernent saint François et les frĂšres d'Ombrie ne sont lĂ que comme une sorte d'in- troduction; Egide, Masseo, LĂ©on d'un cĂŽtĂ©, sainte Claire de l'autre, viennent tĂ©moigner que l'idĂ©al, Ă laPortion- cule et Ă Saint-Damien, avait bien Ă©tĂ© celui auquel plus tard Jacques de Massa, Pierre de Monticulo, Conrad d'Offida, Jean de Penna, Jean de l'Alverne tĂąchaient d'atteindre. Tandis que la plupart des autres lĂ©gendes nous don- nent la tradition franciscaine des grands couvents, les Fioretti sont Ă peu prĂšs le seul document qui nous la rende telle qu'elle se perpĂ©tuait dans les ermitages et parmi le peuple. A dĂ©faut d'une exactitude de dĂ©tail, les traits qui y sont racontĂ©s contiennent en eux une vĂ©- ritĂ© supĂ©rieure le ton est juste. Voici des paroles qui n'ont jamais Ă©tĂ© prononcĂ©es, des faits qui ne sont pas arrivĂ©s, mais l'Ăąme et le cĆur des premiers Franciscains ont bien Ă©tĂ© tels qu'ils sont ici dĂ©peints. Les Fioretti ont cette vĂ©ritĂ© vivante que donne le pin- ceau. Il manque quelque chose Ă la physionomie du Po- verello quand on oublie sa conversation avec frĂšre LĂ©on sur la joie parfaite, son voyage Ă Sienne avec Masseo, ou mĂȘme la conversion du loup de Gubbio. Il ne faudrait cependant pas exagĂ©rer le cĂŽtĂ© lĂ©gen- daire des Fioretti, il n'y a pas plus de deux ou trois de ces rĂ©cits dont le noyau ne soit historique et facile Ă re- trouver. Le fameux Ă©pisode du loup de Gubbio, qui est sans doute le plus merveilleux de toute la sĂ©rie, n'est, pour parler comme les graveurs, que le troisiĂšme Ă©tat du rĂ©cit des brigands de Monte-Casale *, fondu avec une lĂ©gende de l'Alverne. 1. Le SpĂ©culum 46b, 58b, 455a, nous donne les trois Ă©tats. Cf. FĂźor. 26 et 21, Conform. 119b 2. ETUDE CRITIQUE DES SOURCES CXI Les rĂ©cits se pressent dans ce livre, comme des volĂ©es de souvenirs qui arrivent pĂȘle-mĂȘle, et oĂč des dĂ©tails insignifiants occupent bien plus de place que les plus grands Ă©vĂ©nements notre mĂ©moire est, en effet, une grande enfant, et ce qu'elle retient d'un homme, c'est d'ordinaire un trait, un mot, un geste. L'histoire scienti- fique fait effort pour rĂ©agir, pour marquer la valeur re- lative des faits, amener ce qui est important au premier plan, rejeter ce qui est secondaire, dans la pĂ©nombre. Ne se trompe-t elle pas? Y a-t-il de l'important et du secondaire? Ou plutĂŽt peut-on arriver Ă le marquer? L'imagination populaire a raison ce qu'il faut retenir d'un homme, c'est le regard dans lequel il s'est mis tout entier, c'est un cri du cĆur, c'est un geste qui a exprimĂ© la personnalitĂ©. Tout JĂ©sus n'est-il pas dans les paroles du dernier souper? Et tout saint François, dans son allo- cution Ă frĂšre loup, et son sermon aux oiseaux? Gardons-nous donc bien de mĂ©priser ces documents oĂč les premiers Franciscains se sont racontĂ©s tels qu'ils se voyaient. Ecloses sous le ciel de l'Ombrie, au pied des oliviers de Saint-Damien ou des sapins de la Marche d'AncĂŽne, ces fleurettes sauvages ont un parfum et une originalitĂ© qu'on attendrait en vain de fleurs entourĂ©es des soins d'un savant jardinier. Appendices des Fioretti. Dans le premier de ces appendices, le compilateur a rĂ©parti en cinq chapitres tous les renseignements qu'il a pu recueillir sur les stigmates. Il est facile de com- prendre le succĂšs des Fioretti. Le peuple s'Ă©prit d'amour pour ces rĂ©cits oĂč saint François et ses compa- gnons apparaissaient tout Ă la fois plus humains et" plus divins que dans les autres lĂ©gendes; aussi Ă©prouva- CXII VIE DE S. FRANĂOIS o t-on bien vite le besoin de les complĂ©ter pour en faire une vĂ©ritable biographie *. Le second, intitulĂ© Vie de frĂšre JunipĂšre, n'a qu'un rapport assez indirect avec saint François ; il mĂ©rite cependant d'ĂȘtre Ă©tudiĂ©, car il prĂ©sente le mĂȘme genre d'intĂ©rĂȘt que le recueil principal, auquel il n'est sans doute guĂšre postĂ©rieur. Dans ces quatorze chapitres on trouve les principaux traits de la vie de ce frĂšre, dont les folles et saintes bizarreries dĂ©frayent encore les conversations des monastĂšres ombriens. Ces pages sans prĂ©tention nous dĂ©couvrent une partie de l'Ăąme francis- caine. Les historiens officiels avaient cru devoir garder le silence sur ce frĂšre qui leur paraissait surtout un indiscret personnage, fort encombrant devant les laĂŻques pour le bon renom de l'Ordre. Ils avaient raison Ă leur point de vue, mais il faut savoir grĂ© aux Fioretti de nous avoir conservĂ© cette physionomie si gaie, si modeste et d'une bonhomie parfois si malicieuse. Certainement saint François ressemblait plus Ă JunipĂšre qu'Ă frĂšre Elle ou Ă saint Bonaventure 2. Le troisiĂšme Vie de frĂšre Egide, paraĂźt ĂȘtre en somme le document le plus ancien que nous possĂ©dions sur la vie du fameux extatique. Il est bien possible que ces rĂ©cits proviennent de ce frĂšre Jean auquel en appellent les Trois Compagnons dans leur prologue. 1. Ce dĂ©sir Ă©tait si naturel que le manuscrit de la bibliothĂšque AngĂ©lique renferme plusieurs chapitres additionnels, sur la donation de la Portioncule, l'indulgence du 2 aoĂ»t, la naissance de saint François, etc. V. Amoni, Fioretti, Roma 1889, p. 266, 378â386. Une intĂ©ressante Ă©tude serait de rechercher l'origine de ces docu- ments et d'Ă©tablir leur parentĂ© avec le SpĂ©culum et les Confor-/. mitĂ©s. V. Conform. 281a 1, 121b. Spec. 92â96. 2. JunipĂšre avait Ă©tĂ© reçu dans l'Ordre par saint François. En 1253 il assista Ă la mort de sainte Glaire. A. SS. Aug., t. II, p. 764 d. â Les ConformitĂ©s parlent de lui avec dĂ©tail, f^ 62b. ETUDE CRITIQUE DES SOURCES CXIII On retrouve, en lisant les textes si dĂ©fectueux que nous donnent les Ă©ditions actuelles, la main d'un anno- tateur dont les indications se seront glissĂ©es dans le texte^ 5 mais malgrĂ© cela, cette vie est une des plus im- portantes sources secondaires. Ce frĂšre toujours errant, dont une des principales prĂ©occupations est de vivre de son travail, est une des figures les plus originales et les plus heureuses de l'entourage de saint François, et c'est dans son genre de vie qu'il faut aller chercher le sens vĂ©ritable de quelques-uns des passages de la RĂšgle et prĂ©cisĂ©ment de ceux qui ont eu le plus Ă souffrir des entreprises des exĂ©gĂštes. Le quatriĂšme renferme les sentences favorites de frĂšre Egide ; elles n'ont d'autre importance que de montrer les tendances de l'enseignement franciscain primitif. Ce sont des conseils courts, prĂ©cis, pratiques, imprĂ©gnĂ©s de mysticisme, et dans lesquels cependant le bon sens ne perd jamais ses droits. Le recueil tel qu'il est dans les Fioretti, est sans doute peu postĂ©rieur Ă Egide, car dĂšs 1385 BarthĂ©lĂ©my de Pise en fournit un beaucoup plus long 2. VI. Chronique des XXIV gĂ©nĂ©raux^. On y trouve Ă la suite de la vie de François celle de la plupart de ses compagnons, puis les Ă©vĂ©nements sur- venus sous les vingt-quatre premiers gĂ©nĂ©raux. 1. Les sept premiers chapitres forment un tout. Les trois qui suivent sont sans doute une premiĂšre tentative pour les complĂ©ter. 2. ConformitĂ©s, f» 55b 1â 60a 1. 3. Voir Archiv, t. I, p. 145, un article du R. P. Denifle Zur Quellenkunde der Franziakaner Geschichte, oĂč il indique jusqu'Ă huit manuscrits de ce travail. Cf. Ehrle Zeitschrift, 1883, p. 324, GXIV VIE DE S. FRANĂOIS C'est un travail de compilation assez ordinaire. Les auteurs ont voulu y faire entrer tous les morceaux qu'ils Ă©taient parvenus Ă recueillir, aussi le rĂ©sultat prĂ©sente- t-il un ensemble fort disparate. Une Ă©tude approfondie pourra en ĂȘtre intĂ©ressante et utile, mais elle ne sera possible qu'aprĂšs sa publication. Celle-ci ne saurait tarder Ă deux reprises Ă quinze mois d'intervalle, lorsque j'ai voulu Ă©tudier le manuscrit d'Assise, il se trouvait chez les Franciscains de Quaracchi qui en prĂ©parent l'impression. Il est difficile de ne pas rapprocher l'Ă©poque oĂč ce recueil a Ă©tĂ© clĂŽturĂ© de celle oĂč BarthĂ©lĂ©my de Pise a Ă©crit son fameux ouvrage. Peut-ĂȘtre y a-t-il entre eux des rapports assez Ă©troits. Cette chronique a Ă©tĂ© une des sources auxquelles Glassberger a puisĂ© avec prĂ©dilection. Vil. Les ConformitĂ©s de BarthĂ©lĂ©my de Pise. * Le livre des ConformitĂ©s, auquel frĂšre BarthĂ©lĂ©my de Pise consacra plus de quinze annĂ©es de sa vie 2, semble n'avoir Ă©tĂ© lu que d'une maniĂšre distraite par la plupart note 3. Je n'ai Ă©tudiĂ© que les deux manuscrits de Florence Ric- cardi 279, sur papier, 243 f46 b 1 1. Bernardus de Quinta- vallc, 2. Petrus Chatanii, 3. Egidius, 4. Sabatinus, 5. Moricus, 6. Johannes de Capelia, 7. Philippus Longus, 8. Johannes de San et 0 Constantio, 9. Barbarus, 10. Bernardus de Cleviridante sic, 11. AngĂ©lus Tancredi, 12. Sylvester. Gomme on le voit, dans ces deux derniers documents, il est question de douze disciples, s. FRANĂOIS ET INNOCENT III 103 cultes. La question prit de l'importance, lorsqu'au quatorziĂšme siĂšcle on voulut trouver entre la vie de saint François et celle de JĂ©sus une constante conformitĂ©. Elle est pour nous sans intĂ©rĂȘt. Le profil de deux ou trois de ces frĂšres se dĂ©tache trĂšs nettement dans le tableau des origines de l'Ordre; les autres font songer aux tableaux des maĂźtres ombriens primitifs, oĂč les figures d'arriĂšre-plan ont une grĂące caressante et pudique, mais pas l'ombre de personnalitĂ©. Ces premiers Franciscains eurent toutes les vertus, y compris celle qui nous fait le plus dĂ©faut, celle de con- sentir Ă rester anonymes. Il y a dans l'Ă©glise infĂ©rieure d'Assise une vieille fresque reprĂ©sentant cinq des compagnons de saint François ; au-dessus d'eux se trouve une Madone de Cimabue qu'ils contemplent de toute leur Ăąme ; ce serait plus vrai si au lieu de la Madone il y avait saint Fran- çois on se transforme toujours Ă l'image de ce qu'on admire, aussi ressemblent-ils Ă leur maĂźtre et se res- semblent-ils entre eux^. C'est faire une sorte d'erreur psychologique et se rendre coupable d'infidĂ©litĂ© Ă leur mĂ©moire que de chercher Ă leur donner un nom ; le seul qu'ils auraient dĂ©sirĂ©, c'est celui de leur pĂšre. Son amour a changĂ© leur cĆur et rĂ©pand sur toute leur personne un rayonnement de lumiĂšre et de joie. Ce sont tandis que dans les prĂ©cĂ©dents il n'y en a que onze. Cela suffirait Ă indiquer une thĂšse dogmatique. Cette liste se retrouve exacte- ment dans le SpĂ©culum avec la seule diffĂ©rence que François y Ă©tant compris, Ange de TancrĂšde est le douziĂšme frĂšre et Sylvestre disparaĂźt. Spec. 87 a. 1. D'aprĂšs la tradition, les cinq compagni del Santo ensevelis lĂ ,' au rĂšs de leur maĂźtre, seraient Bernard, Sylvestre, Guillaume anglais Eletto et Valentin ?. 104 VIE DE S. FRANĂOIS lĂ les vrais personnages des Fioretti, ces hommes qui pacifiaient les villes, troublaient les consciences, chan- geaient les cĆurs, conversaient avec les oiseaux, appri- voisaient les loups. C'est vraiment d'eux qu'on peut dire ils n'avaient rien, mais ils possĂ©daient tout Nihil^ habentes, omnia possidentes. Ils quittĂšrent la Portioncule pleins de joie et de con- fiance. François Ă©tait trop absorbĂ© par ses pensĂ©es pour ne pas dĂ©sirer remettre en d'autres mains la direction de la petite troupe Choisissons, dit-il, l'un d'entre nous pour nous guider, et qu'il nous soit comme le vicaire de JĂ©sus-Christ. Partout oĂč il lui plaira de passer nous passerons, et quand il voudra s'arrĂȘter pour coucher quelque part, nous nous y arrĂȘterons.» Ils choisirent frĂšre Bernard, et firent comme François avait dit. Ils allaient pleins de joie et toutes leurs conversations n'avaient pour but que la gloire de Dieu et le salut de leurs Ăąmes. Leur voyage s'accomplit heureusement, partout ils trouvĂšrent de bonnes Ăąmes qui les hĂ©bergeaient, et ils sentaient Ă n'en pas douter que le bon Dieu prenait soin d'eux ^ Les prĂ©occupations de François allaient toutes au but de leur voyage; il y pensait jour et nuit et inter- prĂ©tait naturellement ses rĂȘves dans ce sens. Une fois, il se vit en songe, cheminant sur une route, au bord de laquelle Ă©tait un arbre gigantesque et admi- rablement beau; et voici, pendant qu'il le contemplait, tout Ă©merveillĂ©, il se sentit devenir si grand qu'il en touchait les rameaux, et en mĂȘme temps l'arbre incli- 1. 3 Soc. 46; 1 Gel. 32; Bon. 34. s. FRANĂOIS ET INNOCEx\T III 105 nait jusqu'Ă lui ses branches^. Il se rĂ©veilla plein de joie, sĂ»r du bon accueil que leur rĂ©servait le souverain ponlife. Ses espĂ©rances devaient ĂȘtre un peu déçues Inno- cent III occupait depuis douze ans la chaire de saint Pierre. Jeune encore, Ă©nergique, rĂ©solu, il avait cette surabondance d'autoritĂ© que donne le succĂšs. Venant aprĂšs le faible GĂ©lestin lĂŻl, il avait su en quelques annĂ©es reconquĂ©rir le domaine temporel de l'Ăglise et imposer l'influence papale de façon Ă rĂ©aliser presque les rĂȘves de thĂ©ocratie de GrĂ©goire VII. 11 avait vu le roi Pierre d'Aragon se dĂ©clarer son vassal et venir dĂ©poser sa couronne sur le tombeau des apĂŽtres pour la rece- voir de ses mains. A l'autre bout de l'Europe, Jean sans Terre Ă©tait obligĂ© de recevoir la sienne d'un lĂ©gat, aprĂšs avoir jurĂ© hommage, fĂ©autĂ© et tribut annuel au Saint-SiĂšge. PrĂȘchant l'union aux villes et aux rĂ©pu- bliques de la PĂ©ninsule, faisant Ă©clater le cri ITALĂ A ! ITALIA ! comme un coup de clairon, il Ă©tait le reprĂ©- sentant naturel du rĂ©veil national, et semblait en quelque sorte le suzerain de l'empereur, comme il l'Ă©tait dĂ©jĂ des autres rois. Enfin, par ses efforts pour purifier l'Ăglise, par son indomptable fermetĂ© Ă dĂ©fendre la morale et le droit dans l'affaire d'Ingelburge et dans bien d'autres, il conquĂ©rait une force morale qui, dans ces temps si troublĂ©s, Ă©tait d'autant plus puissante qu'elle Ă©tait plus rare. Mais ce pouvoir incomparable avait ses Ă©cueils. A force de dĂ©fendre les prĂ©rogatives du Saint-SiĂšge, Innocent oublia que l'Ăglise n'existe point pour elle- i. 4 Gel. 33; 3 Soc. 53; Bon. 35. 406 VIE DE s. FRANĂOIS mĂȘme, que la suprĂ©matie n'est qu'un moyen transitoire, et une partie de son pontificat ressemblera Ă ces guerres, lĂ©gitimes au dĂ©but, mais ou le vainqueur continue les ravages et les massacres presque sans savoir pourquoi, uniquement parce qu'il est grisĂ© de sang et de succĂšs. Aussi Rome qui a canonisĂ© le pauvre GĂ©lestin V, a-t-elle refusĂ© cette consĂ©cration suprĂȘme au glorieux Innocent III. Elle a senti, avec un tact exquis, qu'il avait Ă©tĂ© plus roi que prĂȘtre, plus pape que saint. Quand il rĂ©prime les dĂ©sordres ecclĂ©siastiques, c'est moins par amour du bien que par haine du mal ; c'est le juge qui condamne ou menace s'appuyant toujours sur une loi, ce n'est pas le pĂšre qui pleure. Il y a une chose que ce pontife ne comprit pas en son siĂšcle l'Ă©veil de l'amour, de la poĂ©sie, de la libertĂ©. J'ai dit plus haut qu'au commencement du XIĂP siĂšcle le moyen Ăąge eut vingt ans. Innocent III voulut le mener comme s'il n'en avait eu que quinze. PossĂ©dĂ© par son dogme civil et religieux, comme d'autres le sont par leurs doctrines pĂ©dagogiques, il ne devina pas ce qui s'agitait confusĂ©ment au fond des Ăąmes de tendresses inassouvies, de rĂȘves, insensĂ©s peut- ĂȘtre, mais bienfaisants et divins. Ce fut un croyant, quoique quelques phrases des historiens ^ laissent la porte ouverte Ă bien des suppo- sitionSj mais sa religion lui venait plus de la Bible que de l'Ăvangile, et s'il rappelle souvent MoĂŻse le conduc- teur des peuples, rien en lui ne fait songer Ă JĂ©sus le pasteur des Ăąmes. 1. Sainte Lutgarde 1182-1246 le vit plongĂ© dans le Purgatoire jusqu'au jugement dernier. Vie de cette Sainte par Thomas de Ga- timprĂ© dans Surius VitĆ SS. 1618, VI, 215-226. s. FRANĂOIS ET INNOCENT III ^07 Oa ne peut tout avoir une intelligence d'Ă©lite, une volontĂ© de fer^ sont une part assez belle mĂȘme pour un prĂȘtre-dieu ; il lui manqua l'amour. La mort de ce pontife, grand entre les grands, devait ĂȘtre saluĂ©e par des chants d'allĂ©gresse^. La rĂ©ception qu'il fit Ă François, a fourni Ă l'ami de Dante, Ă Giotto, le sujet d'une des pages les plus saisissantes de son Ćuvre ; le pape assis sur son trĂŽne fait un brusque mouvement pour se pencher vers saint François. Il fronce le visage, car il ne comprend pas, et cependant il sent dans cet homme vil et mĂ©prisĂ© â vilis et despectus â une Ă©trange puis- sance; il fait un rĂ©el mais inutile effort pour saisir, et je retrouve tout Ă coup en ce pape, â qui se nourrissait de citron ^, â quelque chose qui rappelle une autre intel- ligence d'Ă©lite, celle d'un thĂ©ocrate aussi, immolĂ© comme lui Ă son Ćuvre Calvin. On pourrait croire que le peintre avait trempĂ© ses lĂšvres dans la coupe du Voyant calabrais et qu'il a voulu symboliser dans l'attitude de ces deux hommes la 1. Vir clari ingeniij magnĆ probitatis et sapientiĆ^ oui nullus secundus tempore suo Rigordus, de gestis Philippi Augusti dans Duchesne, HistoriĂ©e Francorum scriptores coĆfanei, t. V, p. 60. â Nec si'inilem sui scientia, facundia, decretoriim et legum peri- iitia, strenuitate judiciorum nec adhuc visus est habere sequentem. Cf. Mencken, Script, rer. Sax., Leipzig, 1728, t. III, p. 252. Innocentius, qui vere stupor mundi erat et immutator sĆculi. Cotton, Hist. Anglicana, Ă©d. Luard, 1859, p. 107. 2. Cujus finis lĆlitiam potius quam tristitiam generavit sub- jectis. AlbĂ©ric des Trois-Fontaines, Ă©d. Leibnitz, Accessiones his- toricĆ^ t. II, p. 492. 3. Decidit in acutam {febrem quam cum multis diebus fovisset nec a citris, quibus in magna quantitate et ex consuetudine vescebatur. . . minime abstineret. . . ad ultimmn in lethargia pro- lapsus vitam fmivit. AlbĂ©ric des Trois-Fontaines, loc. cit. 108 VIE DE S. FRANĂOIS rencontre des reprĂ©sentanls de deux Ăąges de l'humanitĂ©, celui de la Loi et celui de l'Amour^. Une surprise atteniait les pĂšlerins Ă leur arrivĂ©e Ă Rome ils rencontrĂšrent l'Ă©vĂȘque d'Assise ^ qui fut tout aussi Ă©tonnĂ© qu'eux-mĂȘmes. Ce dĂ©tail est prĂ©cieux, puisqu'il prouve que François n'avait pas entretenu Guido de ses projets. MalgrĂ© cela il leur offrit, dit-on, de les patronner auprĂšs des princes de l'Ăglise. On ne peut s'empĂȘcher de soupçonner que ses recommanda- tions ne lurent peut-ĂȘtre pas trĂšs chaudes. En tout cas, elles n'Ă©pargnĂšrent Ă François et Ă ses compagnons ni une minutieuse enquĂȘte, ni les longs et paternels conseils du cardinal Jean de Saint-Paul ^ sur les difficultĂ©s de la RĂšgle, conseils qui rappellent de fort prĂšs ceux de Guido lui-mĂȘme^. 1. Fresque de la grande nef de l'Ă©glise supĂ©rieure d'Assise. 2. 1 Gel. 32; 3 Soc. 47. 3. De la famille Colonna, il mourut en 1216. Cf. 3 Soc. 61. V. Cardella, Memorie storiche de Cardinali, 9 vol., in-8^, Rome 1792 ss , t. 1, p. 177. Il Ă©tait Ă Rome dans TĂ©tĂ© de 1210, car le 11 aoĂ»t il contresigna la bulle Religiosam vitam, Potlhast 4061. Angelo Glareno raconte l'approbation, d'une maniĂšre plus prĂ©- cise Ă certains Ă©gards Cum vero Summo Pontifici ea quĆ postu- lahat \^FYanciscus\ ardua valde et quasi viderentur iiifirmitati hominum sui temporis, exhortahatur eum, quod aliquem ordinem vel regulam de approbatis assumevet, at ipse se a Chriato missum ad taletn vitam et non aliam postulandam conatanter affĂźrmahs, fixas in sua petitione permansit. Tune dommus Johannes de sancto Paiilo episcopus Sabinensis et do- minus Hugo episcopus Hustiensis Dei spiritu moti assisterunt Sancto Francisco et pro hi^ quĆ petebat coram summo Pontifice et Cardinalibus plura propoauerunt rationabilia et efficacia valde. Tribut. Man. de la Laurentienne, f, Paris 1885; 1° Portrait contemporain par frĂšre Eudes; se trouve Ă Subiaco {loc. cit. p. 30 ; 2^ Portrait datant des environs de 1230 par Giunta Pisano ?; conservĂ© Ă la Portioncule {loc. cit. p. 384; 3*^ enfin, portrait datĂ© de 1235, par Bon. Berlinghieri et conservĂ© Ă Pescia en Toscane {loc. cit. p. 277. En 1886, le prof. Garattoli a Ă©tudiĂ© avec grand soin un portrait qui date Ă peu prĂšs des mĂȘmes annĂ©es, et dont il donne un dessin, conservĂ© aussi depuis quelque temps Ă la Por- tioncule. Miscellanea francescana t. I, p. 44-48. Cf. p. 160, 190 et 1887, p. 32. M. Bonghi a Ă©crit des pages intĂ©ressantes sur l'ico- nographie de saint François {Francesco di Assisi, 1 vol. in-12, Citta di Gastello, Lapi 1884. V. p. 103-113. CHAPITRE XI L'homme intĂ©rieur et le thaumaturge. La tournĂ©e missionnaire, entreprise sur les encou- ragements de sainte Glaire et si poĂ©tiquement inaugurĂ©e par le sermon aux oiseaux de Bevagna, semble avoir Ă©tĂ© pour François un triomphe continuel ^. La lĂ©gende s'empare de lui dĂ©finitivement ; bon grĂ© mal grĂ©, les miracles Ă©clatent sous ses pas ; Ă son insu mĂȘme, les objets qui lui ont servi ont des effets merveilleux ; on sort processionnellement des villages pour aller Ă sa rencontre, et chez le biographe on entend l'Ă©cho de ces fĂȘtes religieuses d'Italie, gaies, populaires, bruyantes, ensoleillĂ©es, qui ressemblent si peu aux fĂȘtes mĂ©ticu- leusement organisĂ©es des peuples septentrionaux. D'Alviano, François vint sans doute Ă Narni, une des plus dĂ©licieuses bourgades de l'Ombrie, en train de se bĂątir une cathĂ©drale au lendemain de la conquĂȘte de ses libertĂ©s communales. Il semble avoir eu pour elle une sorte de prĂ©dilection ainsi que pour les villages environnants ^, 1. 1 Gel, 62. 2. 1 Gel. 66; Cf. Bon. 180; 1 Gel. 57; Gf. Bon. 182; 1 Gel. 69; Bon. 183. AprĂšs la mort de saint François, les Narniates furent les plus empressĂ©s avenir prier sur son tombeau, 1 Gel. 128, 135, 136, 138,141; Bon. 275. l'homme intĂ©rieur et le thaumaturge 209 De lĂ , il paraĂźt s'ĂȘtre engagĂ© dans la vallĂ©e de Rieti, oĂč Greccio, Fonte-Colombo, San-Fabiano, Sant-Eleu- thero, Poggio-Buscone conservent ses traces mieux encore que les environs d'Assise. Thomas de Celano ne nous donne aucun dĂ©tail sur la route suivie, mais s'Ă©tend par contre sur les succĂšs de l'apĂŽtre dans la Marche d'AncĂŽne, et surtout Ă Ascoli. Les gens de ces contrĂ©es se rappelaient-ils encore les appels que François et Ăgide Ă©taient venus leur adresser six ans auparavant 1209, ou faut-il croire qu'ils Ă©taient tout particuliĂšrement prĂ©parĂ©s pour comprendre l'Evan- gile nouveau? Quoi qu'il en soit, nulle part ailleurs on n'avait montrĂ© pareil enthousiasme ; l'effet des prĂ©di- cations fut si grand qu'une trentaine de nĂ©ophytes reçurent immĂ©diatement l'habit. La Marche d'AncĂŽne devait rester la province fran- ciscaine par excellence. C'est lĂ que sont OffĂźda, San- Severino, Macerata, Forano, CingoH, Fermo, Massa et vingt autres ermitages oĂč la pauvretĂ© devait trouver pendant plus d'un siĂšcle ses hĂ©rauts et ses martyrs ; c'est de lĂ que sont sortis Jean de l'Alverne, Jacques de Massa, Conrad d'OffĂźda, Angelo Clareno, et ces lĂ©gions de rĂ©volutionnaires anonymes, de rĂȘveurs, de prophĂštes, qui depuis les frĂšres extirpĂ©s en 1244 par le gĂ©nĂ©ral de l'Ordre, Crescentius de Jesi, ne cessĂšrent de se recruter, et, par leur fiĂšre rĂ©sistance Ă tous les pouvoirs, Ă©cri- virent une des plus belles pages de l'histoire religieuse du moyen Ăąge. Ces succĂšs, qui inondaient de joie l'Ăąme de François, ne provoquaient pas chez lui le plus petit mouvement d'orgueil. Jamais homme n'a eu une plus grande puis- sance sur les cĆurs, parce que jamais prĂ©dicateur ne 210 VIE DE S. FRANĂOIS s'est moins prĂȘchĂ© lui-mĂȘme. Un jour frĂšre Masseo voulut mettre sa modestie Ă l'Ă©preuve Pourquoi toi? Pourquoi toi? Pourquoi toi? rĂ©pĂ©ta-t-il Ă plusieurs reprises, comme s'il avait voulu se railler de François.» â Que veux-tu donc dire, s'Ă©cria enfin celui-ci.» â Je veux dire que tout le monde te suit, chacun dĂ©sire te voir, t'entendre, t'obĂ©ir, et pourtant tu n'es ni beau, ni savant, ni de noble famille. D'oĂč vient donc que ce soit toi que tout le monde veut suivre?» â A l'ouĂŻe de ces paroles, le bienheureux François plein de joie leva les yeux au ciel, et aprĂšs ĂȘtre restĂ© un long moment absorbĂ© dans sa contemplation, il s'age- nouilla, louant et bĂ©nissant Dieu avec une ferveur extraordinaire. Puis se tournant vers Masseo Tu veux savoir pourquoi c'est moi que l'on suit? Tu veux le savoir? C'est que les yeux du TrĂšs-Haut l'ont voulu ainsi ils regardent sans cesse les bons et les mĂ©chants, et comme ces yeux trĂšs saints n'ont aperçu parmi les pĂ©cheurs aucun homme plus petit, ou plus insuffisant ou plus pĂ©cheur que moi, ils m'ont choisi pour accomplir l'Ćuvre merveilleuse que Dieu a entreprise ; il m'a choisi, parce qu'il n'en a pas trouvĂ© de plus vil, et qu'il a voulu ainsi confondre la noblesse et la grandeur, la force, la beautĂ© et la science du monde i.» Cette rĂ©ponse jette un rayon de lumiĂšre sur le cĆur de saint François le message qu'il apporte au monde, c'est encore une fois la bonne nouvelle annoncĂ©e aux pauvres; son but est la reprise de cette Ćuvre messia- nique entrevue par la Vierge de Nazareth dans son Magnificat^ ce chant d'amour et de libertĂ©, dans les 1. Spec. 103a; Fior. 10; Cf. Conform. 50b 1, 175a2. l'homme intĂ©rieur et le thaumaturge 211 soupirs duquel passe la vision d'un Ă©tat social nou- veau. Il vient rappeler que le bonheur de l'homme, la paix de son cĆur, la joie de sa vie, n'est ni dans l'argent, ni dans la science, ni dans la force, mais dans une volontĂ© droite et sincĂšre Paix aux hommes de bonne volontĂ©! Le rĂŽle qu'il avait jouĂ© k Assise dans les dĂ©bats de ses concitoyens, il l'aurait volontiers jouĂ© dans tout le reste de la PĂ©ninsule, car jamais personne n'a rĂȘvĂ© une rĂ©novation sociale plus complĂšte, mais si le but est le mĂȘme que pour beaucoup de rĂ©volutionnaires venus aprĂšs lui, les moyens sont complĂštement difFĂ©rents sa seule arme fut l'amour. L'Ă©vĂ©nement lui a donnĂ© tort. A part les illuminĂ©s de la Marche d'AncĂŽne et les Fraticelli de notre Pro- vence, ses disciples ont Ă l'envi mĂ©connu sa pensĂ©e ^. Qui sait si personne ne se lĂšvera pour reprendre son Ćuvre? La fureur des spĂ©culations vĂ©reuses n'a-t-elle 1. En ce qui concerne 1» la fidĂ©litĂ© Ă la PauvretĂ©; 2° l'inter- diction de modifier la RĂšgle ; 3° l'Ă©gale autoritĂ© du Testament et de la RĂšgle ; 4» la demande de privilĂšges en cour de Rome ; 5° l'Ă©lĂ©- vation des frĂšres Ă de hautes charges ecclĂ©siastiques ; 6" la dĂ©fense absolue de se mettre en opposition avec le clergĂ© sĂ©culier; 7° inter- diction des grandes Ă©glises et des riches couvents. Sur tous ces points et bien d'autres encore l'infidĂ©litĂ© Ă la volontĂ© de François Ă©tait complĂšte dans l'Ordre moins de vingt-cinq ans aprĂšs sa mort. On peut Ă©piloguer sur tout cela; le Saint-SiĂšge, en interprĂ©tant la RĂšgle, a eu le droit canonique pour lui, mais libertin de Casai, en disant qu'elle Ă©tait parfaitement claire et n'avait pas besoin d'inter- prĂ©tation, avait le bon sens de son cĂŽtĂ©, que cela lui suffise ! Et est stupor quare queritur expositio super litteram sic apertam quia nulla est difficultas in regulĆ intelligeĂŻitia {Arbor vitĆ crucifixĆ, Venise, 1485, lib. V, cap 3. Sancius vir Egidius ianto ejulatu cla~ mahat super regulĆ destructionem quamvidebat quod ignoranti- bus viam spiritus quasi videbatur insanus. Jd. Ibid. 212 VIE DE S. FRANĂOIS pas fait assez de victimes! N'y en a-t-il pas beaucoup parmi nous qui s'aperçoivent que le luxe est un trompe l'Ćil? que si la vie est un combat, elle n'est pas une tuerie oĂč des bĂȘtes fĂ©roces se disputent une proie, mais qu'elle est la lutte avec le divin, sous quelque forme qu'il se prĂ©sente, vĂ©ritĂ©, beautĂ© ou amour? Qui sait si ce dix-neuviĂšme siĂšcle agonisant ne se soulĂšvera pas de son suaire pour faire amende honorable et lĂ©guer Ă son successeur une parole de foi virile? Oui, le Messie viendra. Celui qui a Ă©tĂ© annoncĂ© par Joachim de Flore et qui doit inaugurer un nouveau cycle de l'histoire de l'humanitĂ©, paraĂźtra. L'espĂ©rance ne confond point, 11 y a, dans nos Babylones modernes et dans les chaumiĂšres de nos montagnes, trop d'Ăąmes qui soupirent mystĂ©rieusement l'hymne de la grande vigile Borate cĆli desuper et nubespluant Justum^, pour que nous ne soyons pas Ă la veille d'un enfantement divin. Toute origine est mystĂ©rieuse. Gela est vrai de la matiĂšre, mais encore davantage de cette vie supĂ©rieure Ă toutes les autres qui s'appelle la saintetĂ© c'est dans la priĂšre que François trouvait les forces spiri- tuelles qui lui Ă©taient nĂ©cessaires; aussi recherchait-il le silence et la solitude. S'il savait batailler au milieu des hommes pour les gagner Ă la foi, il aimait, suivant la parole de Celano, Ă s'envoler comme l'oiseau, pour aller se faire un nid sur la montagne 2. 1. deux, rĂ©pandez votre rosĂ©e et que les nuĂ©es fassent pleuvoir le Juste. Antienne du temps de l'Avent. 2. In foramibus petrĆ nidificabat. 1 Cel. 71. Sur les priĂšres de François, V. Ibid. 71 et 72 ; 2 Cel. 3, 38-43; Bon. 139-148. Cf. 1 Cel. 6 ; 91 ; 103 ; 3 Soc. 8 ; 12 ; etc. l'homme intĂ©rieur et le thaumaturge 213 Pour les hommes vraiment pieux, la priĂšre des lĂšvres, l'oraison formulĂ©e n'est guĂšre qu'une forme infĂ©rieure de la vraie priĂšre. MĂȘme lorsqu'elle est sincĂšre et atten- tive, et non pas une rĂ©pĂ©tition machinale, elle n'est qu'un prĂ©lude pour les Ă»mes que le matĂ©rialisme reli- gieux n'a pas tuĂ©es. Rien ne ressemble plus Ă la piĂ©tĂ© que l'amour. Les formulaires de priĂšres sont aussi incapables de dire les Ă©motions de l'Ăąme, que des modĂšles de lettres d'amour de dire les transports du cĆur passionnĂ©. Pour la piĂ©tĂ© vraie comme pour l'amour profond, la formule mĂȘme est dĂ©jĂ une sorte de profanation. Prier, c'est parler Ă Dieu, nous Ă©lever Ă lui, pour qu'il descende vers nous, converser avec lui. C'est un acte de recueillement, de rĂ©flexion, qui suppose les efforts de ce qu'il y a en nous de plus personnel. EnvisagĂ©e dans ce sens, la priĂšre est la mĂšre de toutes les libertĂ©s et de tous les affranchissements. Qu'elle soit ou non, un soliloque de l'Ăąme avec elle- mĂȘme, ce soliloque n'en serait pas moins le fond mĂȘme des puissantes individualitĂ©s. Chez saint François comme chez JĂ©sus, elle a ce caractĂšre d'effort qui en fait l'acte moral par excellence. Pour connaĂźtre vĂ©ritablement de pareils hommes, il faudrait pouvoir les accompagner, suivre JĂ©sus sur les sommets oĂč il allait passer les nuits trois privilĂ©giĂ©s, Pierre, Jacques, Jean, l'y suivirent un jour, mais pour dĂ©crire ce qu'ils avaient vu, tout ce qu'un viril sursum corda ajouta au rayonnement et Ă la mystĂ©rieuse gran- deur de celui qu'ils adoraient, ils ont Ă©tĂ© obligĂ©s de recourir Ă la langue des symboles. Il en fut de mĂȘme pour saint François. Pour lui 22 214 VIE DE S. FRANĂOIS comme pour son MaĂźtre, le terme de la priĂšre, c'est la communion avec le PĂšre cĂ©leste, c'est l'accord du divin et de l'humain, ou plutĂŽt, c'est l'homme qui s'efforce de faire l'Ćuvre de Dieu^ ne lui disant pas seulement un Fiat passif, rĂ©signĂ©, impuissant, mais qui se relĂšve vaillamment a Me voici. Seigneur, prĂȘt Ă faire votre volontĂ©. » Il y a d'insondables forces au fond de l'Ăąme humaine, parce qu'au fond il y a Dieu lui-mĂȘme. » Que ce Dieu soit transcendant ou immanent; qu'il soit l'Un, le CrĂ©ateur, le Principe Ă©ternel et immuable ou qu'il soit, comme le disent les docteurs d'outre- Rhin, l'objectivation idĂ©ale de notre moi, lĂ n'est pas la question pour les hĂ©ros de l'humanitĂ©. Le soldat au milieu de la bataille ne philo- sophe pas pour savoir ce qu'il y a de vrai ou de faux dans le sentiment patriotique; il prend ses munitions et se bat au pĂ©ril de sa vie. Les soldats des combats spiri- tuels cherchent de mĂȘme leurs forces dans la priĂšre, dans la rĂ©flexion, la contemplation, l'inspiration tous, poĂštes, artistes, initiateurs, saints, lĂ©gislateurs, pro- phĂštes, conducteurs de peuples, savants, philosophes, c'est Ă cette mĂȘme source qu'ils vont puiser. Mais ce n'est pas sans peine que l'Ăąme s'unit Ă Dieu, ou si l'on aime mieux, qu'elle se trouve elle-mĂȘme. Une priĂšre n'aboutit Ă la communion divine que si elle a commencĂ© par ĂȘtre une lutte. Le patriarche d'IsraĂ«l, couchĂ© prĂšs de BĂ©lhel, l'avait dĂ©jĂ devinĂ©, le Dieu qui passe, ne dit son nom qu'Ă ceux qui l'arrĂȘtent et lui font violence pour le savoir. Il ne bĂ©nit qu'aprĂšs de longues heures de combat. L Evangile a trouvĂ© un mot intraduisible pour nous dire ce caractĂšre des priĂšres de JĂ©sus ; il compare la L HOMME INTĂRIEUR ET LE THAUMATURGE 215 lutte qui prĂ©cĂ©da l'immolation volontaire du Christ, Ă l'agonie Factus in agonia^. On peut dire de sa vie qu'elle a Ă©tĂ© une longue tentation, une lutte, une priĂšre, puisque ces mots n'expriment que des moments diffĂ©- rents de l'activitĂ© spirituelle. Gomme leur MaĂźtre, les disciples et les successeurs du Christ ne peuvent conquĂ©rir leur Ăąme qu'Ă force de persĂ©vĂ©rance. Mais ces paroles, vides de signification pour les conventicules dĂ©vots, ont eu pour les gĂ©nies religieux un sens tragique. Rien de plus faux, historiquement, que les saints qui ornent nos Ă©glises avec leur attitude mignarde, leurs airs contristĂ©s, ce je ne sais quoi d'anĂ©mique, et d'Ă©ma- ciĂ©, on dirait presque d'Ă©masculĂ©, qu'il y a dans tout leur ĂȘtre ; ce sont de pieux sĂ©minaristes Ă©levĂ©s sous la direction de saint Alphonse deLiguori ou de saint Louis de Gonzague, ce ne sont pas des saints, c'est-Ă -dire des violents qui ont forcĂ© les portes du ciel. Nous touchons Ă un des cĂŽtĂ©s les plus dĂ©licats de la vie de François ses relations avec les puissances diabo- liques. Les mĆurs et les idĂ©es ont si profondĂ©ment changĂ©, en ce qui concerne l'existence du diable et ses relations avec les hommes, qu'il est Ă peu prĂšs impossible de se figurer la place Ă©norme que la pensĂ©e des dĂ©mons a occupĂ©e jadis dans les prĂ©occupations des hommes. Les meilleurs esprits du moyen Ăąge ont cru, sans le moindre doute, Ă l'existence de l'Esprit maUn, Ă ses transformations perpĂ©tuelles pour tĂącher de tenter les hommes, et les faire tomber dans ses piĂšges. En plein i. Luc 22, 44. 216 VIE DE S. FRANĂOIS seiziĂšme siĂšcle, Luther, qui avait sapĂ© tant de croyances, ne doute pas plus de l'existence personnelle de Satan que de la sorcellerie, des conjurations ou des posses- sions^. Trouvant dans leur Ăąme tout un arriĂšre-fond de gran- deur et de misĂšre, y entendant Ă©clater parfois les har- monies lointaines d'un appel Ă une vie supĂ©rieure, bientĂŽt dominĂ©es par les clameurs de la brute, nos ancĂȘtres ne pouvaient s'empĂȘcher de chercher l'expli- cation de ce duel; ils la trouvĂšrent dans la lutte des dĂ©mons contre Dieu. Le diable est le prince des dĂ©mons, comme Dieu est le prince des anges; capables de toutes les transforma- tions, ils se livrent, jusqu'Ă la fin des temps, des batailles terribles, qui se termineront par la victoire de Dieu ; mais en attendant chaque homme est, durant toute sa vie, sollicitĂ© par ces deux adversaires, et les plus belles Ăąmes sont naturellement les plus disputĂ©es. C'est ainsi que saint François, avec tout son siĂšcle, expliquait les troubles, les terreurs, les angoisses dont son cĆur Ă©tait parfois assailli, aussi bien que les espĂ©- rances, les consolations et les joies dont il Ă©tait d'ordi- naire inondĂ©. Partout oĂč l'on suit ses pas, les traditions locales ont conservĂ© le souvenir des rudes assauts qu'il eut Ă subir de la part du tentateur. Il est sans doute inutile de rappeler ici ce fait Ă©lĂ©men- 1. FĂ©lix Kuhn, Luther sa vie et son Ćuvre. Paris 4883, 3 vol. in-8^, t. I, p. 128; t. II, p. 9; t. III, p. 257. Benvenuto Gellini n'hĂ©sito pas Ă raconter la visite qu'il fit un jour au GolisĂ©e en compagnie d'un magicien dont les paroles Ă©voquĂšrent des nuĂ©es de diables qui vinrent peupler toute l'enceinte. B. Gellini. La vita scritta da lui medesimo, Ă©d. Bianchi. Florence 1890, in-12, p. 33. l'homme INTERIEUR ET LE THAUMATURGE 217 laire que si, avec le temps, les mĆurs changent, l'homme se modifie aussi singuliĂšrement. Si suivant l'Ă©ducation et le genre de vie, tel ou tel sens peut de- venir d'une acuitĂ© qui confond les habitudes courantes â l'ouĂŻe chez le musicien, le tact chez l'aveugle, etc. â il faut estimer par lĂ , combien certains sens ont pu ĂȘtre plus aiguisĂ©s jadis qu'aujourd'hui. L'illusion visuelle a Ă©tĂ©, il y a quelques siĂšcles, chez les adultes, ce qu'elle est aujourd'hui chez les enfants de nos campagnes les plus reculĂ©es. Une feuille qui tremblote, un rien, un souffle, un bruit inexpliquĂ©, crĂ©e chez eux une image qu'ils voient, et Ă la rĂ©alitĂ© de laquelle ils croient absolu- ment. L'homme est d'une seule piĂšce; l'hypĂ©resthĂ©sie de la volontĂ© suppose celle de la sensibilitĂ© ; l'une est la condition de l'autre, et c'est ce qui rend les hommes des Ă©poques de rĂ©volution tellement plus grands que nature. Il serait inepte, sous prĂ©texte de vĂ©ritĂ©, de vouloir les ramener aux communes mesures de nos sociĂ©tĂ©s contemporaines, car ils ont Ă©tĂ© vĂ©ritablement des demi-dieux pour le bien comme pour le mal. Les lĂ©gendes ne sont pas toujours absurdes. Les hommes de 93 sont encore tout prĂšs de nous, mais c'est pourtant Ă bon droit que la lĂ©gende s'est emparĂ©e d'eux, et c'est pitiĂ© de voir ces hommes, qui dix fois par jour avaient Ă prendre des rĂ©solutions oĂč tout Ă©tait en jeu, leur sort, celui de leurs idĂ©es et parfois celui de la patrie, jugĂ©s comme s'ils avaient Ă©tĂ© de bons bourgeois, ayant le loisir de discuter longuement chaque matin le vĂȘtement Ă mettre ou le menu d'un dĂźner. La plupart du temps, les historiens n'ont aperçu sur eux qu'une partie de la vĂ©ritĂ©, car il n'y a pas eu seulement deux hommes en eux presque tous sont Ă la fois 218 VIE DE S. FRANĂOIS poĂštes, dĂ©magogues, prophĂštes, tyrans, hĂ©ros, martyrs. Ăcrire l'histoire, c'est donc traduire et transposer presque continuellement. Les hommes du treiziĂšme siĂšcle n'ont pas pu se rĂ©soudre Ă ne pas rapporter Ă une cause extĂ©rieure les mouvements intĂ©rieurs de leur Ăąme. Dans ce qui nous apparaĂźt comme le rĂ©sultat de nos rĂ©flexions, eux voyaient celui de l'inspiration; lĂ oĂč nous disons dĂ©sirs, instincts, passions, eux disaient tentation; mais il ne faut pas que ces diffĂ©rences de langage nous fassent nĂ©gliger ou taxer de tromperie une partie de leur vie spirituelle, et nous amĂšnent aux apprĂ©ciations d'un rationalisme Ă©troit et ignorant. Saint François a cru bien des fois se battre avec le diable ; les horribles dĂ©mons de l'enfer Ă©trusque han- taient encore les bois de l'Ombrie et de la Toscane, mais tandis que, pour ses contemporains et quelques-uns de ses disciples, les apparitions, les prodiges, les possessions sont des phĂ©nomĂšnes quotidiens, ils sont pour lui excep- tionnels, et restent tout Ă fait Ă l'arriĂšre-plan. Dans l'iconographie de saint BenoĂźt, comme dans celle de la plupart des saints populaires, le diable occupe une place prĂ©pondĂ©rante ; dans celle de saint François il disparaĂźt si complĂštement que dans la longue sĂ©rie des fresques de Giotto Ă Assise, on ne le voit pas une seule fois^. De mĂȘme tout ce qui est thĂ©urgie et thaumaturgie occupe dans sa vie un rang tout Ă fait secondaire. JĂ©sus dans l'Evangile donne Ă ses apĂŽtres le pouvoir de chasser 1. Sur le diable et François. V. 1 Gel. 68; 72 ; 3 Soc. 12; 2 Gel. 1, 6; 3, 10 ; 53; 58-65. Bon. 59-62. Cf. Eccl. 3 ; 5 ; 13. Fior. 29 ; Spec. 110 b. Pour avoir une idĂ©e du rĂŽle du diable dans la vie des religieux au commencement du treiziĂšme siĂšcle, il faut lire le Dia- logus miraculorum de GĂ©saire de Heisterbach. tA l'homme intĂ©rieur et le TIIiUMATURGE 219 les esprits impurs et de guĂ©rir toute maladie et toute infirmitĂ©^ François a sĂ»rement pris ces paroles qui faisaient partie de sa RĂšgle, au pied de la lettre. Il a cru faire, et il a voulu faire des miracles; mais sa pensĂ©e religieuse Ă©tait trop pure, pour lui laisser considĂ©rer le miracle autrement que comme un moyen tout exceptionnel d'adoucir les souffrances des hommes. Pas une fois, on ne le voit recourir au miracle pour prouver son apostolat ou imposer ses idĂ©es. Son tact l'avertissait que les Ăąmes sont dignes d'ĂȘtre gagnĂ©es par de meilleurs moyens. Cette absence presque com- plĂšte de merveilleux 2 est d'autant plus remarquable qu'elle est en contradiction absolue avec les tendances de son siĂšcle ^. Ouvrez la vie de son disciple saint Antoine de Padoue {f 1231 c'est un fastidieux catalogue de prodiges, de guĂ©risons, de rĂ©surrections. On dirait le prospectus d'un pharmacien inventeur d'une drogue nouvelle, plutĂŽt 4. Matth. 10, 1. 2. Les miracles n'occupent que dix paragraphes 61-70 dans 1 Cel. et sur le nombre, il en est plusieurs qu'on ne peut guĂšre compter comme miracles de François, puisqu'ils ont Ă©tĂ© faits par des objets lui ayant appartenu. 3. Les hĂ©rĂ©tiques profitĂšrent souvent de cette soif de merveil- leux pour duper les catholiques Les cathares de Moncoul fabri- quĂšrent un portrait de la Vierge, oĂč elle Ă©tait reprĂ©sentĂ©e borgne et Ă©dentĂ©e, et dirent que dans son humilitĂ© le Christ avait choisi une femme trĂšs laide pour mĂšre. Ils n'eurent pas de peine Ă pro- voquer quelques guĂ©risons; l'image devint fameuse, fut vĂ©nĂ©rĂ©e un peu partout, et accomplit une foule de miracles jusqu'au jour oĂč les hĂ©rĂ©tiques divulguĂšrent la mystification au grand scandale des fidĂšles. Egbert de SchĂŽnau, Contra Catharos^ serm. I, cap. 2 Patrol. iat. Migne, t. 195. Cf. Heisterbach, loc cit., V, 18. Luc de Tuy, De altĂ©ra Vita, lib. II, 9; III, 9, 18Patrol. Migne, 208. 220 VIE DE S. FRANĂOIS qu'un app3l Ă la converĂŽioa et Ă une vie supĂ©rieure. Gela peut intĂ©resser des malades ou des dĂ©vots, mais ni le cĆur ni la conscience n'y sont saisis. Il faut dire Ă la dĂ©charge d'Antoine de Padoue que ses relations avec François semblent avoir Ă©tĂ© fort peu de chose. Chez les disciples de la premiĂšre heure, qui avaient eu le temps de pĂ©nĂ©trer jusqu'au fond de la pensĂ©e de leur maĂźtre, on retrouve des traces de ce noble dĂ©dain du merveilleux; ils savaient trop bien, ceux-lĂ , que la joie parfaite n'est pas de stupĂ©fier le monde par des prodiges, de rendre la vue aux aveugles, ni mĂȘme de ressusciter des morts de quatre jours, mais qu'elle est dans cet amour qui va jusqu'Ă l'immolation. Mihi ahsit gloriari nisi in cruce Domini^, Aussi frĂšre Ăgide demandait-il en grĂące au bon Dieu de ne pas lui faire faire de miracles; il voyait en eux, comme dans la passion pour la science, un piĂšge oĂč se feraient prendre les orgueilleux, et qui dĂ©tournerait l'Ordre de sa vraie mission 2. Les miracles de saint François sont tous des actes d'amour c'est dans la guĂ©rison des maladies nerveuses, de ces troubles en apparence inexplicables, qui sĂ©- vissent aux Ă©poques de crise, qu'il accomplit les plus nombreux. Ses regards si doux, si compatissants et si puissants aussi, qui semblaient ĂȘtre comme les messa- gers de son cĆur, suffisaient souvent Ă faire oublier toute souffrance Ă ceux qui le voyaient. Le mauvais Ćil est une superstition moins stupide i. A Dieu ne plaise que je me glorifie d'autre chose que de la croix de notre Seigneur JĂ©sus-Ghrist.» Gai. 6, 14. G'est encore au- jourd'hui la devise des FrĂšres Mineurs. 2. Spec. 182 a; 200 a; 232 a. Gf. 199 a. l'homme intĂ©rieur et le thaumaturge 221 peut-ĂȘtre qu'on ne se l'imagine d'ordinaire. JĂ©sus a eu raison de dire qu'il suffĂźt d'un regard pour ĂȘtre adul- tĂšre; mais il y a aussi tel regard, celui de la contem- plative Marie, par exemple, qui vaut tous les sacrifices, parce qu'il les contient tous, parce qu'il nous donne, nous consacre, nous immole. Cette puissance du regard, la civilisation l'Ă©mousse; une partie de l'Ă©ducation mondaine consiste Ă faire mentir nos yeux, Ă les rendre atones, Ă en Ă©teindre les flammes, mais les natures simples et droites ne sauraient renoncer Ă ce langage du cĆur, qui porte la vie et la santĂ© dans ses rayons. » Un frĂšre souffrait des tourments infinis; parfois il se roulait sur le sol, se heurtant Ă tous les obstacles, la bouche Ă©cumante, horrible Ă voir; puis son corps se raidissait, et on le voyait, aprĂšs ĂȘtre restĂ© un instant allongĂ©, se contracter bientĂŽt, se tordre horriblement. Quelquefois mĂȘme gisant par terre, les pieds touchant la tĂȘte il bondissait Ă hauteur d'homme.» François vint le voir et le guĂ©rit ^. Mais ce sont lĂ des exceptions, et la plupart du temps le Saint se dĂ©robait aux instances de ses compagnons, lorsqu'ils lui demandaient des miracles. En rĂ©sumĂ©, si l'on embrasse d'un coup d'Ćil la piĂ©tĂ© de François, on voit qu'elle procĂšde de l'union intime de son Ăąme avec le divin par la priĂšre cette vue intuitive de l'idĂ©al le classe parmi les mystiques. Il a connu en effet l'ivresse et la libertĂ© du mysticisme, mais il ne faut pas oublier tous les cĂŽtĂ©s par lesquels il s'en sĂ©pare, en particulier son ardeur apostolique. 1. 1 Gel. 67. '222 VIE DE s. FRANĂOIS Il y a de plus Ă cette piĂ©tĂ© quelques caractĂšres parti- culiers qu'il est nĂ©cessaire d'indiquer. D'abord la libertĂ© vis-Ă -vis des observances Fran- çois sent tout ce qu'il y a de vide et d'orgueil dans la plupart des dĂ©votions. Il y voit un piĂšge, car l'homme en rĂšgle avec les minuties du code religieux risque d'oublier la loi suprĂȘme de l'amour; de plus le religieux qui s'impose un certain nombre de jeĂ»nes surĂ©roga- toires, se fait admirer par les simples, mais parle plaisir qu'il trouve Ă cette admiration, il fait de son Ćuvre pie un vĂ©ritable pĂ©chĂ©. Aussi, chose Ă©trange, Ă l'encontre des autres fondateurs d'ordres, est-il allĂ© dans les diverses rĂšgles qu'il a faites^ en allĂ©geant les obser- vances '^. On ne peut voir lĂ un simple hasard, puisqu'il eut Ă lutter contre ses disciples pour faire prĂ©valoir sa vo- lontĂ© ; or prĂ©cisĂ©ment ceux qui Ă©taient le plus disposĂ©s Ă se relĂącher du vĆu de pauvretĂ©, Ă©taient les plus dĂ©si- reux d'Ă©taler Ă tous les yeux quelques pratiques dĂ©votieuses. Le pĂ©cheur peut jeĂ»ner, disait alors François, il peut prier, pleurer, se macĂ©rer, mais ce qu'il ne peut pas, c'est ĂȘtre fidĂšle Ă Belle parole qui ne serait pas dĂ©placĂ©e dans la bouche de celui qui est venu prĂȘcher le culte en esprit et en vĂ©ritĂ©, sans temple, sans prĂȘtre, ou plutĂŽt, oĂč tout foyer sera un temple et tout fidĂšle un prĂȘtre. Le formalisme religieux, dans quelque culte que ce 1. Secundum primam rĂ©gulant fratres feria quarta et sexfa, et per licentiam beati Francisci feria secunda et sabbato jeju- nabant. Jord. ii. Cf. cap. 3 et Reg. 1223, cap. 3, oĂč le vendredi est le seul jour de jeĂ»ne conservĂ©. „ L HOMME INTERIEUR ET LE THAUMATURGE 223 soit, prend toujours des allures guindĂ©es et moroses. Les pharisiens de tous les temps, se dĂ©figurent le visage, pour que nul ne puisse ignorer leurs dĂ©votions Fran- çois non seulement ne pouvait souffrir ces simagrĂ©es de la fausse piĂ©tĂ©, mais il mettait la gaietĂ© et la joie au nombre des devoirs religieux. Gomment ĂȘtre triste, quand on a dans le cĆur un trĂ©sor intarissable de vie et de vĂ©ritĂ©, qui ne fait que s'accroĂźtre Ă mesure qu'on y puise? Gomment ĂȘtre triste, quand, malgrĂ© bien des chutes, on ne cesse de pro- gresser? 11 y a pour l'Ăąme pieuse qui grandit et se dĂ©veloppe, une joie analogue Ă celle de l'enfant, si heureux de sentir ses pauvres petits membres se fortifier et lui permettre chaque jour un effort de plus. Aussi le mot de joie est-il peut-ĂȘtre celui qui revient le plus souvent sous la plume des auteurs franciscains^ le maĂźtre alla jusqu'Ă en faire un des prĂ©ceptes de la RĂšgle-. Il Ă©tait trop bon gĂ©nĂ©ral pour ne pas savoir qu'une armĂ©e joyeuse est toujours une armĂ©e victorieuse. Il y a dans l'histoire des premiĂšres missions franciscaines des Ă©clats de rire qui sonnent haut et clair^. Au reste, on s'imagine souvent le moyen Ăąge comme beaucoup plus triste qu'il n'a Ă©tĂ©. On souffrait beau- coup alors, mais l'idĂ©e de douleur n'Ă©tant jamais 1. 1 Gel. 10; 22; 27; 31; 42; 80; 2 Gel. 1, 1 ; 3, 65-68 ; Eccl. 5; 6; Jord. 21 ; Spec. 119 a; Conform. 143 a2. 2. Caveant fratres quod non ostendant se tristes extrinsecus nubilosos et hypocritas ; sed ostendant se gaudentes in Bomino, hilares et convenientes gratiosos. Reg. 1221, cap. 7. Gf. 2 Gel. 3, 08. 3. Eccl., loc. cit. ; Jord., Ăźoc, cit. 224 VIE DE s. FRANĂOIS sĂ©parĂ©e de celle de pĂ©nalitĂ©, la souffrance Ă©tait une expiation ou une Ă©preuve, et la douleur ainsi envisagĂ©e perd son aiguillon; la lumiĂšre et l'espĂ©rance la pĂ©- nĂštrent. François puisait une partie de sa joie dans la com- munion. Il avait pour le sacrement de l'eucharistie ce culte tout imprĂ©gnĂ© d'effusions indicibles, de larmes joyeuses, qui a aidĂ© quelques-unes des plus belles Ăąmes de l'humanitĂ© Ă supporter la fatigue et la chaleur du jour^. La lettre du dogme n'Ă©tait pas arrĂȘtĂ©e au treiziĂšme siĂšcle comme aujourd'hui ; mais ce qu'il y a de beau, de vrai, de puissant, d'Ă©ternel dans le repas mystique instituĂ© par JĂ©sus, Ă©tait alors vivant dans tous les cĆurs. L'eucharistie fut vraiment le viatique des Ăąmes. Gomme autrefois les pĂšlerins d'Emmaiis, aux heures oĂč les ombres du soir descendent, oĂč les tristesses vagues envahissent l'Ăąme, oĂč les fantĂŽmes de la nuit s'Ă©veillent et semblent se dresser derriĂšre chacune de nos pensĂ©es, nos pĂšres voyaient le divin et mystĂ©rieux compagnon venir Ă eux ; ils buvaient ses paroles, sentaient la force descendre dans leur cĆur, tout leur ĂȘtre intĂ©rieur se rĂ©chauffer, et ils murmuraient de nouveau Restez avec nous. Seigneur, car le soir approche et le jour est sur son dĂ©clin. » Souvent ils furent exaucĂ©s. 1. V. Test. ; 1 Gel. 46; 62; 75 ; 2 Gel. 3, 129; Spec. 44 a. CHAPITRE XĂŻĂŻ Chapitre gĂ©nĂ©ral de 1217 '. A partir de la PentecĂŽte de J217, les indications chronologiques sur la vie de François sont assez nom- breuses pour rendre les erreurs presque impossibles. 1. On fixe d'ordinaire soit Ă 1217 soit Ă 1219 le commencement des grandes missions et Tinstitution des ministres provinciaux, mais ces dates prĂ©sentent toutes deux de grosses difficultĂ©s. J'avoue ne rien comprendre Ă la violence avec laquelle les partisans de l'une et de l'autre dĂ©fendent leur opinion. Le texte le plus important est un passage des 3 Soc. 62 Expletis itaque undecim annis ah in- religionis, et muUiplicatis numĂ©ro et meriio fratribus, electi fuerunt ministri, et ynissi cwn aliquot fratribus quasi pcr iiniversas mundi provincias in quibus fides catholica colitur et servaticr. Que dĂ©signe ce terme inceptio religionis? au premier abord on y voit sans hĂ©siter la fondation de l'ordre, qui eut lieu en avril 1209, par la rĂ©ception des premiers frĂšres ; mais en ajoutant onze annĂ©es complĂštes Ă cette date, on tombe Ă l'Ă©tĂ© de 1220. Celle-ci est manifestement trop tardive, car les 3 Soc. disent que les frĂšres partis furent persĂ©cutĂ©s dans la plupart des contrĂ©es d'outre-monts, comme n'ayant aucune lettre pontificale pour les accrĂ©diter or la bulle Cum dilecti porte la date du 11 juin 1219. On est ainsi amenĂ© Ă penser que les onze annĂ©es ne doivent pas ĂȘtre comptĂ©es de la rĂ©ception des premiers frĂšres, mais de la con- version de François, que les auteurs ont bien pu qualifier de incep- tio religionis, en employant peut-ĂȘtre un peu improprement ces mots , or 1206 -j- 11 = 1217. L'emploi de cette expression pour dĂ©signer la conversion n'est pas tout Ă fait sans exemple Glass- berger dit {An. fr., p, 9 Ordinem minorum incepit anno 1206. Ceux qui admettent 1219, sont obligĂ©s comme les BoUandistes par exemple d'attribuer au texte des 3 Soc. une inexactitude, celle 226 VIE DE s. FIIANĂOIS Il n'en est malheureusement pas de mĂȘme pour les dix-huit mois qui prĂ©cĂšdent automne 12 j 5 â Pente- cĂŽte 1217. Pour cette pĂ©riode on en est rĂ©duit Ă des hypothĂšses ou peu s'en faut. Gomme François n'entreprit alors aucune mission Ă l'Ă©tranger, il employa sans doute ce temps Ă Ă©vangĂ©- liser l'Italie centrale et a consolider les bases de son d'avoir comptĂ© onze annĂ©es Ă©coulĂ©es, lĂ oĂč il s'agissait seulement de dix. Il est Ă noter que dms les deux autres indications chrono- logiques donnĂ©es par les 3 Soc. 27 et 62, ils comptent Ă partir de la conversion, c'est-Ă -dire 1206, ainsi que Thomas de Gelano 88, 105, 119, 97, 88, 57, 55, 21. Chose curieuse, les ConformitĂ©s re- produisent le passage des 3 Soc. 118 bl, m^is avec le chmgement Nono anno ah inceptione religionis. Jourdain de Giano ouvre la porte Ă bien des scrupules Anno vero Domini 1219 et anno con- versionis ejus decimo frater Franciscus . . . misit fratres in Franciam, inTheutoniam, in Hungariam, in Hispaniam, Jord. 3. Comme un peu plus loin le mĂȘme auteur fait avec raison concor- der 1219 avec la seiziĂšme annĂ©e de la conversion de François, tout le monde s'accorde Ă reconnaĂźtre que le passage citĂ© a besoin d'une correction ; nous n'avons malheureusement qu'un seul manuscrit de cette chronique. Glassberger, qui en avait sans doute un autre sous les yeux, substitue 1217, mais il a pu tirer cette date de quel- que autre document. Il est Ă noter que frĂšre Jourdain donne comme simultanĂ© le dĂ©part des frĂšres pour l'Allemagne, la Hongrie et la France ; or, pour ce dernier pays, il eut certainement lieu en 1217. De mĂȘme le SpĂ©culum 44 a. La Chronique des XXIV gĂ©nĂ©raux et Marc de Lisbonne Ă©d. Diola, t. T, p. 82 tiennent aussi pour 1217, si bien que sans ĂȘtre dĂ©finiti- vement Ă©tablie , cette date paraĂźt cependant devoir ĂȘtre acceptĂ©e jusqu'Ă nouvel ordre. Partis de prĂ©misses un peu diffĂ©rentes, les savants Ă©diteurs des Analecta arrivent Ă la mĂȘme conclusion t. II, p. XXV-XXXVI. Cf. Evers, Analecta ad Fr. Minorum historiam. Leipzig 1882, in-4o, p. 7 et 11. Ce qui me paraĂźt faire nettement pencher la balance en faveur de 1217, c'est le fait que les frĂšres en mission ont Ă©tĂ© persĂ©cutĂ©s parce qu'ils n'avaient aucune piĂšce de lĂ©gitimation , or en 1219 ils auraient eu la bulle Cum dilecti du 11 juin de cette annĂ©e. Les Bollandistes qui tiennent pour 1219 ont si bien vu l'argument qu'ils ont dĂ» nier l'authenticitĂ© de la bulle ou tout au moins la supposer mal datĂ©e. A. SS., p. 839. CHAPITRE GĂNĂRAL DE 1217 227 institution. Sa prĂ©sence Ă Rome, pendant le concile de Latran 11-30 novembre 1215, est possible, mais n'a laissĂ© aucune trace dans les biographies primitives. Le concile s'occupa certainement de l'Ordre nouveau^, mais ce fut pour lui renouveler Tinvitation dĂ©jĂ faite par le souverain pontife, cinq ans auparavant, de choisir une des rĂšgles dĂ©jĂ approuvĂ©es par l'Ăglise 2. Saint Domi- nique qui Ă©tait alors Ă Rome, pour solliciter la confir- mation de son institut, reçut le mĂȘme avis, et s'y con- forma aussitĂŽt. Le Saint-SiĂšge aurait volontiers concĂ©dĂ© aux FrĂšres Mineurs des constitutions particuliĂšres, s'ils avaient adoptĂ© comme base la rĂšgle de saint BenoĂźt c'est ainsi que les G tarisses, sauf celles de Saint-Damien, tout en conservant leur nom et un cer- tain nombre de leurs coutumes, durent professer la rĂšgle bĂ©nĂ©dictine. MalgrĂ© toutes les sollicitations, François s'obstina Ă garder sa RĂšgle. On est tentĂ© de croire que c'est pour confĂ©rer de ces questions, qu'il se trouvait Ă PĂ©rouse, en juillet 1216, lorsque mourut Innocent IIP. 1. V. A. SS. p. 604. Cf. Angelo Glareno, Tribul. Archiv I, p. 559. A 'papa Innocentio fuit omnibus annuntiatum in concilio gene- rali...., sicut sanctus vir fr. LĂ©o scribit et fr. Johannes de Celano. Ces lignes n'ont peut-ĂȘtre pas la portĂ©e qu'on serait tentĂ© de leur attribuer Ă premiĂšre vue, leur auteur ayant pu confondre consilium et consistorium. Le SpĂ©culum 20b dit Eam {Regulam Inno- centius approbavit et concessit et postea in consistorio omnibus annuntiavit. 2. Ne nimia Religionum diversitas gravem in Ecclesia Iei confusionem inducĂ ty firmiter prohibemus, ne quis de ccetero novam Religionem inveniat sed quicumqu Ă©voluer it ad Religionem converti f unam de approbatis asswtiat, LabbĂ© et Cossart Sacrosancta concilia. Paris 1672. T. XI, col. 165. 3. Eccl. 15 {An. franc, t. I, p. 253..* InMocenfium in cujus obitu fuit presentialiter S. Franciscus. 228 VIE DE s. FRANĂOIS Quoi qu'il en soit, vers cette Ă©poque les chapitres prirent une grande importance. L'Ăglise qui avait assistĂ© avec des sentiments assez mĂ©langĂ©s Ă la fonda- tion de l'Ordre, ne pouvait plus se contenter d'ĂȘtre le simple spectateur d'un si profond mouvement; il fallait l'utiliser. Hugolin Ă©tait merveilleusement prĂ©parĂ© pour cette besogne Jean de Saint-Paul, Ă©vĂȘque de la Sabine, chargĂ© par Innocent III de s'occuper des FrĂšres, Ă©tant mort en 4216, il n'hĂ©sita pas Ă offrir sa protection Ă François qui accepta avec reconnaissance. Cette offre extraordinaire est longuement racontĂ©e par les Trois Compagnons^. Il faut sans doute la fixer Ă TĂ©tĂ© de 1216 2 , immĂ©diatement aprĂšs la mort de Jean de Saint-Paul. Il est bien possible que le 29 mai 1216, ait eu lieu le premier chapitre tenu en prĂ©sence de ce car- dinal. Par une erreur fort commune en histoire, la plupart des auteurs franciscains ont reportĂ© Ă une seule 1. 3 Soc. 61; Cf. An. Perus. A, SS. p. 606 s. 2. Thomas de Celano doit faire erreur lorsqu'il dĂ©clare que François ne connaissait pas le cardinal Hugolin avant la visite qu'il lui fit Ă Florence Ă©tĂ© de 1217 ; Nondum alter alteri erat prĆcipua familiaritate co'iijunctus 1 Gel. 74 et 75. Le biographe francis- cain n'avait pas un but historique; les indications chronologiques sont donnĂ©es par surcroĂźt; ce qu'il recherche c'est Vapiajunc- tura. La tradition a conservĂ© le souvenir d'un chapitre tenu Ă la Portioncule, en prĂ©sence d'Hugolin, pendant un sĂ©jour de la curie Ă PĂ©rouse Spec. 137 b; Fior. 18; Conform, 207a; 3 Soc. 61. Or la curie n'est plus revenue Ă PĂ©rouse entre 1216 et la mort de François. Il faut noter aussi que d'aprĂšs Angelo Clareno, Hugolin aurait Ă©tĂ© dĂšs 1210 Ă cĂŽtĂ© de saint François, pour l'appuyer auprĂšs d'Innocent III. V. plus haut p. CVI. Enfin la bulle Sacrosancta, du 9 dĂ©c. 1219, tĂ©moigne que dĂ©jĂ durant sa lĂ©gation de Florence 12 17 Hugolin s'occupait des Clarisses. CHAPITRE GĂNĂRAL DE 1217 229 date tous les traits Ă©pars concernant les premiĂšres assises solennelles de l'Ordre^ et l'on a appelĂ© cette assemblĂ©e-type Chapitre des nattes. En rĂ©alitĂ©, pendant de longues annĂ©es, toutes les rĂ©unions des FrĂšres Mineurs mĂ©ritĂšrent ce nom^. Se rassemblant au moment des plus fortes chaleurs, ils couchaient Ă la belle Ă©toile ou s'abritaient dans des huttes de roseaux ; ne les plaignons pas rien n^Ă©gale la glorieuse transparence des nuits d'Ă©tĂ© en Ombrie; parfois en Provence on peut en savourer un avant-goĂ»t, mais si aux Baux, sur le rocher des Doms ou Ă la Sainte-Baume, le spectacle est aussi solennel et gran- diose, il lui manque une douceur caressante, des effluves de vie qui lĂ -bas lui donnent un charme ensorcelant. Les habitants des villages et des bourgs des environs venaient en foule Ă ces rendez-vous, Ă la fois pour voir les cĂ©rĂ©monies, assister Ă la prise d'habit de leurs pa- rents ou de leurs amis, Ă©couter les appels du Saint, et fournir aux FrĂšres toutes les provisions dont ils pou- vaient avoir besoin. Tout cela n'est pas sans quelque analogie avec les camp meeting si chers aux AmĂ©ricains quant aux chiffres de quelques milliers d'assistants, donnĂ©s dans les lĂ©gendes et qui ont fourni, mĂȘme Ă un Franciscain, le P. Papini, l'occasion de plaisanteries d'un goĂ»t dou- teux, il n'est peut-ĂȘtre pas aussi Ă©tonnant qu'on pour- rait le croire-. 1. Voir par exemple la description du Chapitre de 1221 par frĂšre Jourdain. Jord. 16. 2. A I ropos du chiffre de 5000 assistants donnĂ© par Bonaventure Bon. 52, le P. Papini s'Ă©crie lo non credo stato capace alcuno di dare ad intenderc al S. Dcttore simil fanfaluca, ne capace 2J 230 VIE DE s. FRANĂOIS Ces premiĂšres rĂ©unions, oĂč accouraient tous les frĂšres, et qui avaient lieu en plein vent, en prĂ©sence de foules venues de fort loin, n'avaient donc rien de commun avec les chapitres gĂ©nĂ©raux postĂ©rieurs, vĂ©ritables conclaves oĂč se rendaient un petit nombre de mandataires, et dont la plupart des travaux, tenus secrets, ne concernaient que les affaires de l'Ordre. Du vivant de François le but de ces assemblĂ©es Ă©tait essentiellement religieux. On s'y rendait non pour parler affaires, ou procĂ©der Ă la nomination du ministre gĂ©- nĂ©ral, mais pour se fortifier dans la communion des joies, des exemples et des douleurs des autres frĂšres^. Les quatre annĂ©es qui suivent la PentecĂŽte de 1216, forment une Ă©tape dans l'Ă©volution du mouvement om- brien celle durant laquelle François lutta pour l'auto- nomie. Il y a ici des nuances passablement dĂ©licates, qui ont Ă©tĂ© mĂ©connues par les Ă©crivains ecclĂ©siastiques aussi bien que par leurs adversaires, car si François tenait Ă ne pas se poser en rĂ©voltĂ©, il ne voulait pas compromettre son indĂ©pendance et sentait, avec une divination exquise, que tous les privilĂšges dont la cour de Rome pourrait le combler ne valaient pas la libertĂ©. lui di crederla. ... la somma il numĂ©ro quinque millia et ultra non Ăš del Santo^ incapace di scrivere una casa tanto itnprobabile e relativamente impossibile. Storia di S. Fr. I, p. 181 et 183. Ce chiffre de cinq mille se trouve indiquĂ© aussi par Eccl. 6. Tout s'explique et devient possible, en admettant la prĂ©sence des FrĂšres de la PĂ©nitence, et il semble bien difficile de la contester puisque dans l'Ordre des HumiliĂ©s qui ressemblait beaucoup Ă celui des FrĂšres Mineurs composĂ© Ă©galement de trois rameaux, approuvĂ© par trois bulles donnĂ©es dĂšs juin 1201, les chapitres gĂ©nĂ©raux tenus annuellement Ă©taient frĂ©quentĂ©s par les frĂšres des trois Ordres. Tiraboschi t. II, p. 144. Cf. ci-dessus p. 181. 1. V. 2 Gel. 3, 121 ; S^ec. 42 b 127 b. CHAPITRE GĂNĂRAL DE 1217 231 HĂ©las, il dut bientĂŽt se rĂ©signer Ă ces liens dorĂ©s, contre lesquels il ne cessa pourtant de protester jusqu'Ă son dernier souffle^ ; mais on se condamnerait Ă ne rien comprendre Ă son Ćuvre, si on fermait les yeux Ă la violence morale que lui fĂźt en cela la papautĂ©. Un coup d'Ćil jetĂ© sur le recueil des bulles adressĂ©es aux Franciscains, suffit Ă montrer avec quelle ardeur il lutta contre les faveurs si avidement recherchĂ©es d'or- dinaire par les ordres monastiques 2. Une foule de traits de la lĂ©gende mettent ce dĂ©dain de François pour les privilĂšges en pleine lumiĂšre. Ses intimes eux-mĂȘmes ne comprenaient pas toujours ses scrupules Ne vois -tu pas, lui dirent-ils un jour, que souvent les Ă©vĂȘques ne nous permettent pas de prĂȘcher, et nous font rester plusieurs jours sans rien faire, avant que nous 1. Prcezipio firmiter per ohedientiam fratribus universis quod uhicunque sunt, non audeant petere aliquam litteram in Curia Romana. Test. B. Fr. 2. La comparaison avec le BuUaire des FrĂšres PrĂȘcheurs est surtout instructive lors de leur premier Gh ipitre Ă N. D. de Prouille en 1216 ils sont une quinzaine; il n'y a donc lĂ , Ă ce mo- ment, absolument rien qui puisse ĂȘtre comparĂ© au mouvement franciscain qui agitait dĂ©jĂ l'Italie presque entiĂšre. Or, tandis que la premiĂšre bulle en faveur des Franciscains porte la date du 11 juin 1219, et l'approbation proprement dite celle du 29 nov. 1223, on voit Honorius III dĂšs la fin de 1216 prodiguer aux Dominicains les marques de son affection 22 dĂ©c. 1216 Religiosam vitam. Cf. Pressuti J regesti, del Pontefice Onorio III ^ Roma 1884. t. I, n» 175 ; mĂȘme date Nos attendentes ibid. n» 176; 21 janvier 1217, gratiarum omnium ibid, n^ 243. V. 284, 1039, 1156, 1208. Il est inutile de continuer cette Ă©numĂ©ration. On pourrait en faire .d'Ă peu prĂšs semblables pour les autres ordres; d'oĂč la conclusion, que si les FrĂšres Mineurs sont seuls oubliĂ©s dans cette pluie de faveurs, c'est qu'ils l'ont bien voulu. Il est vrai que, sitĂŽt aprĂšs la mort de- François, ils rattrapĂšrent le temps perdu. 232 VIE DE s, FRANĂOIS puissions annoncer la parole de Dieu. Il vaudrait mieux obtenir dans ce but un privilĂšge du pape, et ce serait pour le bien des Ăąmes. » C'est par l'humilitĂ© et le respect, leur rĂ©pondit-il vivement, que je veux convertir d'abord les prĂ©lats, car lorsqu'ils nous auront vus humbles et respectueux Ă leur Ă©gard, ce sont eux qui nous prieront de prĂȘcher et de convertir le peuple.... Quant Ă moi je ne demande Ă Dieu aucun privilĂšge, sinon celui de ne point en avoir, d'ĂȘtre plein de respect pour tous les hommes, et de les convertir, comme le veut notre RĂšgle, plus par nos exemples que par nos discours i. » La question de savoir si François avait tort ou raison dans son antipathie pour les privilĂšges de la curie, n'est pas du domaine de l'histoire ; il est Ă©vident que cette attitude ne pouvait se prolonger l'Ăglise ne connaĂźt que des fidĂšles ou des rĂ©voltĂ©s. Mais c'est sou- vent Ă des compromis de ce genre que s'arrĂȘtent les plus nobles cĆurs; ils voudraient que l'avenir sortĂźt du passĂ© sans secousses et sans crise. Le chapitre de 1217 fut marquĂ© par l'organisation dĂ©finitive des missions franciscaines l'Italie et les autres contrĂ©es Ă Ă©vangĂ©liser furent divisĂ©es en un cer- tain nombre de provinces ayant chacune son ministre provincial. DĂšs les premiers jours de son avĂšnement 18 juillet 1216, Honorius III avait cherchĂ© Ă rani- mer le zĂšle populaire pour la croisade. Il ne se conten- tait pas de la prĂȘcher, il en appelait Ă des prophĂ©ties assurant que sous son pontificat la Terre-Sainte serait 1. L'authenticitĂ© de ce passage est mise hors de doute par la cita- tion qu'en fait Ubertin de Gasal, Archiv, III, p. 53. Cf. Spec. 30 a, Conform. 111 b 1; 118 bl ; Ubertin, Arhor vitĆ crue. III, 3. CHAPITRE GĂxNĂRAL DE 1217 233 reconquise^. Le renouveau de ferveur qui s'ensuivit et se rĂ©percuta jusqu'en Allemagne, eut sur les FrĂšres Mineurs une profonde influence. Cette fois François, peut-ĂȘtre par humilitĂ©, ne se mit pas Ă la tĂȘte des frĂšres chargĂ©s de la mission en Syrie; il leur donna pour conducteur le fameux Ălie, auparavant Ă Florence, oĂč il avait eu l'occasion de montrer ses hautes qualitĂ©s -. Ce frĂšre, qui dĂ©sormais sera au premier plan de cette histoire, sortait des rangs les plus humbles de la sociĂ©tĂ©; on ignore la date et les circonstances de son entrĂ©e dans l'Ordre, ce qui m'a amenĂ© Ă l'hypothĂšse de voir en lui cet ami de la grotte, *qui servit de confident Ă François, un peu avant sa conversion dĂ©finitive. Quoiqu'il en soit, pendant sa jeunesse, il avait gagnĂ© sa vie Ă Assise, en faisant des matelas et en enseignant Ă lire Ă quelques enfants; puis il avait passĂ© un certain temps Ă Bologne comme scriptor, et on le trouve tout Ă coup parmi les FrĂšres Mineurs chargĂ© des plus difficiles missions. Ses adversaires proclament Ă l'envi qu'il fut la plus belle intelligence de tout son siĂšcle; mais on a malheu- reusement beaucoup de peine, dans l'Ă©tat actuel des documents, Ă se prononcer sur ses actes instruit et Ă©nergique, dĂ©sireux de jouer le premier rĂŽle dans l'Ćuvre de la rĂ©formation religieuse, et ayant son plan arrĂȘtĂ© d'avance sur la façon de la rĂ©aliser, il alla droit 1. Burchardi chronicon ann. 1217, loc. cit., p. 377. Voir aussi les bulles indiquĂ©es par Potthast 5575, 5585-92. 2. Avant 1217 la charge de ministre existait -virtuellement, quoi- que son institution dĂ©finitive ne remonte qu'Ă 1217. Fr. Bernard, dans sa mission Ă Bologne par exemple 1212?, exerça bien en quelque sorte la charge de ministre. 234 VIE DE s. FRANĂOIS Ă son but, mi-polilique, mi-religieux. Plein d'admiration et de reconnaissance pour François, il voulait disci- pliner et consolider le mouvement de rĂ©novation. Dans le cĂ©nacle franciscain oĂč LĂ©on, JunipĂšre, Ăgide et tant d'autres reprĂ©sentent l'esprit de libertĂ©, la religion des simples et des humbles, la poĂ©sie ensoleillĂ©e de l'Ombrie, frĂšre Elie reprĂ©sente l'esprit scientifique et ecclĂ©sias- tique, la prudence et la raison. Il eut de grands succĂšs en Syrie, et reçut dans l'Ordre un des disciples les plus chers Ă François, GĂ©saire de Spire, celui qui devait plus tard conquĂ©rir en moins de deux annĂ©es toute l'Allemagne du Sud 1221 â 1223, et qui finit, par sceller de son sang sa fidĂ©litĂ© Ă la stricte observance, qu'il dĂ©fendait contre les entreprises de frĂšre Elie lui-mĂȘme ^. GĂ©saire de Spire offre un brillant exemple de ces Ăąmes en peine, altĂ©rĂ©es d'idĂ©al, si nombreuses au treiziĂšme siĂšcle, qui couraient de tous cĂŽtĂ©s, cherchant d'abord dans la science, puis dans la vie religieuse, de quoi Ă©tancher la soif mystĂ©rieuse qui les tourmentait disciple de l'Ă©colĂątre Gonrad , il s'Ă©tait senti entraĂźnĂ© par le dĂ©sir de rĂ©former l'Eglise; encore laĂŻque, il avait prĂȘchĂ© ses idĂ©es, non sans quelque succĂšs, puis- qu'un certain nombre de dames de Spire commencĂšrent Ă mener une vie nouvelle; mais leurs maris s'Ă©tant fĂąchĂ©s, le prĂ©dicateur, pour Ă©chapper Ă leur vengeance, dut se rĂ©fugier Ă Paris, et partit de lĂ pour l'Orient oĂč il retrouva, dans la prĂ©dication des FrĂšres Mineurs, ses 1. IncarcĂ©rĂ© par ordre d'Ălie, il serait mort Ă la suite des coups qu'on lui donna un jour qu'il s'Ă©tait promenĂ© hors de sa prison. Tribul. 24 a. f CHAPITRE GĂNĂRAL DE 1217 235 aspirations et ses rĂȘves. Cet exemple montre combien Ă©tait gĂ©nĂ©ral l'Ă©tat d'altente des Ăąmes, lorsqu'Ă©clata l'Ăvangile franciscain, et combien les voies lui Ă©taient partout prĂ©parĂ©es. Mais il est temps de revenir au chapitre de 1217 les frĂšres partis pour l'Allemagne , sous la conduite de Jean de Penna, furent loin d'avoir le mĂȘme succĂšs qu'Ălie et ses compagnons; ils ignoraient complĂštement la langue des pays qu'ils allaient Ă©vangĂ©liser. Peut-ĂȘtre François ne s'Ă©tait-il pas rendu compte que si l'italien pouvait suffire, Ă la rigueur, dans tous les pays baignĂ©s par la MĂ©diterranĂ©e, il ne pouvait en ĂȘtre de mĂȘme dans l'Europe centrale^. Le sort du groupe parti pour la Hongrie ne fut pas plus heureux. Bien souvent, il arriva aux missionnaires de se dĂ©pouiller de tous leurs vĂȘtements, et de les donner aux paysans et aux bergers qui les maltraitaient, pour tĂącher de les apaiser ainsi. Mais incapables de com- prendre ce qu'on leur disait, aussi bien que de se faire entendre, ils durent bientĂŽt songer Ă retourner en Italie. Il faut savoir grĂ© aux auteurs franciscains de nous avoir conservĂ© le souvenir de ces Ă©checs, et de n'avoir pas cherchĂ© Ă montrer les frĂšres sachant tout d'un coup toutes les langues par inspiration divine, comme on le raconta si souvent plus tard 2. Ceux qui avaient Ă©tĂ© envoyĂ©s en Espagne eurent aussi bien des persĂ©cutions Ă subir. Ce pays Ă©tait, comme le midi de la France, ravagĂ© par l'hĂ©rĂ©sie; mais elle y Ă©tait rĂ©primĂ©e dĂšs lors avec vigueur. Les Francis- 1. Jord. 5 et 6; 3 Soc. 62. 2. De Jean de de Clareno, d'Antoine de Padoue, etc. 236 VIE DE s. FRANĂOIS cains soupçonnĂ©s d'ĂȘtre de faux catholiques et pour- chassĂ©s en consĂ©quence, trouvĂšrent un refuge auprĂšs de la reine Urraque de Portugal, qui leur perniit de s'Ă©tablir Ă GoĂŻmbre, Guimarrens, Alenquer et Lis- bonne^. François lui-mĂȘme se prĂ©para Ă partir pour la France 2. Notre pays exerçait sur lui un attrait parti- culier, Ă cause de sa ferveur pour le Saint-Sacrement. Peut-ĂȘtre aussi Ă©tait-il poussĂ© Ă son insu vers cette terre Ă laquelle il devait son nom, les songes chevaleresques de son adolescence, tout ce qui dans sa vie Ă©tait poĂ©sie, chant, musique, rĂȘve dĂ©licieux. Un peu de l'Ă©motion dont il Ă©tait pĂ©nĂ©trĂ© au moment d'inaugurer cette nouvelle mission a passĂ© dans les rĂ©cits des biographes ; on y sent un tressaillement Ă la fois doux et angoissant^ le battement de cĆur du brave chevalier qui sort tout Ă©quipĂ© aux premiĂšres lueurs de l'aurore, interroge l'horizon, anxieux de l'inconnu et pourtant dĂ©bordant de joie, car il sait que cette journĂ©e sera consacrĂ©e Ă la justice et Ă l'amour. Le poĂšte italien a nommĂ© pĂšlerinages d'amour les chevauchĂ©es chevaleresques, aussi bien que les voyages entrepris par les rĂȘveurs, les artistes ou les saints Ă ces coins de terre qui miroitent sans cesse devant leur ima- gination et restent leur patrie d'Ă©lection^. C'Ă©tait bien un de ces pĂšlerinages que François entreprenait 1. Marc de Lisbonne, t. I, p. 82 ; Cf. p. 79, t. II, p. 86; Glass- berger, ann. 1217. An. fr. II, p. 9 ss. ; Chron. XXIV gen. iMs. d'Assise, no 328, ÂŁ*> 2 b. 2. Spec. Ubl; Conform. 119 a 2 ; 135 a; 181b 1; 1 Gel. 74 et 75. 3. 2 Cel. 3, 129 Diligebat Franciam... volebat in ea morĂź. CHAPITRE GĂNĂRAL CE 1217 237 Allez, dit- il aux frĂšres qui l'accompagnaient, et marchez deux Ă deux, humbles et doux, gardant le silence jusqu'aprĂšs tierce, priant Dieu en vos cĆurs, Ă©vitant avec soin toute parole vaine ou inutile. Soyez aussi recueillis pendant ce voyage, que si vous Ă©tiez enfermĂ©s dans un ermitage ou dans votre cellule, car partout oĂč nous sommes, partout oĂč nous allons, nous portons notre cellule avec nous frĂšre corps est notre cellule et l'Ăąme est l'ermite qui l'habite, pour y prier le Seigneur et mĂ©diter.» ArrivĂ© Ă Florence, il y trouva le cardinal Hugolin, envoyĂ© par le pape comme lĂ©gat en Toscane, pour y prĂȘcher la croisade et prendre toutes les mesures propres Ă en assurer le succĂšs ^. Il Ă©tait sans doute bien loin de s'attendre Ă l'ac- cueil que lui fit le prĂ©lat. Celui-ci, au lieu de l'en- courager, l'amena Ă renoncer Ă son projet Je ne veux pas, mon frĂšre, que tu ailles au delĂ des monts ; il y a beaucoup de prĂ©lats qui ne demandent qu'Ă te crĂ©er des difficultĂ©s en cour de Rome. Mais moi et les autres cardinaux qui aimons ton Ordre, nous dĂ©si- rons te protĂ©ger et t'aider, Ă la condition, cependant, que tu ne t'Ă©loignes pas de cette province. » Mais, Monseigneur, c'est une grande confusion pour moi d'envoyer mes frĂšres au loin, et de rester pares- seusement ici, sans partager toutes les tribulations qu'ils vont subir. » Pourquoi aussi as-tu envoyĂ© tes frĂšres si loin, et les i. V. Bulle du 23 janv. 1217 Tempus acceptĂ bile, Potthast no 5430 donnĂ©e dans Horoy, t. Il col. 205 ss.; Cf. Pressuti I p. 71. Cette bulle et les suivantes fixent d'une façon certaine TĂ©poque du passage Ă Florence; Potthast 5488, 5487, et page 495. 238 VIE DE s. FRANĂOIS as-tu exposĂ©s ainsi Ă mourir de faim, et Ă toutes sortes de pĂ©rils?» Pensez-vous, rĂ©pliqua François avec chaleur, et comme saisi de l'inspiration prophĂ©tique, que ce soit seulement pour ces pays-ci que Dieu ait suscitĂ© les FrĂšres? En vĂ©ritĂ©, je vous le dis. Dieu les a suscitĂ©s pour le rĂ©veil et le salut de tous les hommes, et ils gagneront des Ăąmes non seulement dans les pays des croyants, mais jusqu'au milieu des InfidĂšles*.» L'Ă©tonnement et radmiration que ces paroles exci- tĂšrent chez Hugolin ne parvinrent pas Ă le faire changer d'avis. Il insista si bien que François reprit le chemin de la Portioncule l'inspiration mĂȘme de son Ćuvre n'Ă©tait pas en jeu. Qui sait si la joie qu'il aurait eue de voir la France ne le confirma pas dans l'idĂ©e qu'il de- vait y renoncer les Ăąmes tourmentĂ©es du besoin de sacrifice ont souvent de ces scrupules; elles refusent les joies les plus licites pour les offrir Ă Dieu. Nous ignorons si c'est de suite aprĂšs cette entrevue ou seulement l'annĂ©e suivante, que François mit frĂšre Pacifique Ă la tĂȘte des missionnaires envoyĂ©s en France-. PoĂšte de talent, Pacifique avait Ă©tĂ© surnommĂ© avant sa conversion, Prince de la poĂ©sie, et couronnĂ© au Ga- pitole par l'empereur. Un jour qu'il Ă©tait allĂ© voir une de ses parentes, religieuse Ă San-Severino, dans la Marche d'AncĂŽne, François arriva aussi Ă ce monastĂšre, et prĂȘcha avec tant de sainte violence que le poĂšte se i. II est superflu de faire remarquer Terreur de texte des Bollan- distes dans la phrase Monuit {Cardinalis Franciscum cĆptum non perficere iter, oĂč le non est omis, A. SS. p. 704, Cf. p. 607 et 835, ce qui a entraĂźnĂ© Suysken Ă plusieurs autres erreurs. 2. Bon. 51. Cf. Glassberger ann. 1217; Spcc. 45 b. CHAPITRE GĂNĂRAL DE 1217 239 sentit transpercĂ© de TĂ©pĂ©e dont parle la Bible, qui pĂ©nĂštre jusque dans les jointures et les moelles et juge les sentiaients et les pensĂ©es du cĆur^. Le lendemain, il prenait l'habit et recevait son symbolique surnom -, Il fut accompagnĂ© en France par frĂšre Agnello de Pise qui, en 1224, devait ĂȘtre mis Ă la tĂȘte de la pre- miĂšre mission en Angleterre ^^. François, en les envoyant, n'avait pu songer que de ce pays qui exerçait sur lui une sorte de fascination allait sortir l'influence qui compromettrait son rĂȘve, que Paris perdrait Assise; ces temps n'Ă©taient pourtant pas bien Ă©loignĂ©s encore quelques annĂ©es, et le Poverello devait voir une partie de sa famille spirituelle oublier l'humilitĂ© de son nom, de ses origines et de ses vĆux, pour courir aprĂšs les Ă©phĂ©mĂšres lauriers Ăźle la science. On se rappelle l'habitude qu'avaient Ă cette Ă©poque les Franciscains d'Ă©lire domicile Ă portĂ©e des grandes villes Pacifique et ses compagnons s'Ă©tablirent Ă Saint- Denis ^. Nous n'avons aucun dĂ©tail sur leur activitĂ©; 1. Heb. 4, 12; 2 Gel. 3, 49; Bon. 50 et 51. 2. FrĂšre Pacifique nous intĂ©resse particuliĂšrement comme pre- mier ministre de l'Ordre en France; les renseignements sur lui surabondent Bon. 79; 2 Gel. 3, 63; Spec. 41. b; Conform. 38 a 1 ; 43 a 1; 71 b; 173 b 1 et 176; 2 Gel. 8, 27; Spec, 38 b ; Cotiform. 181 b; 2 Gel. 3, 76; Fior. 46; Conform. 70 a. Je n'in- dique pas les rĂ©fĂ©rences gĂ©nĂ©rales qu'on trouvera dans la Bio- bibliographie Ghevalier. Les Miscellanea, t. II 1887 p. 158 con- tiennent une colonne fort prĂ©cise et intĂ©ressante sur lui. GrĂ©goire IX parle de lui dans la bulle Magna sicut dicitur du 12 aoĂ»t 1227. Sbaralea, Bull. fr. I. p. 33 Potthast 8007. Thomas de Toscane, socius de saint Bonaventure, le connut et le r.ppelle dans ses Gesla ĂŻmperatorum {Mon, gcrm, hist. script.., t. 22, p. 492. 3. Eccl. 1 ; Conform, 113 b. 1. 4. Vers 1224, les FrĂšres Mineurs voulurent se rapprocher et construisirent prĂšs des murs de Paris dans les terrains appelĂ©s 240 VIE DE s. FRANĂOIS elle fut singuliĂšrement fĂ©conde, puisqu'elle leur permit d'attaquer, peu d'annĂ©es plus tard, l'Angleterre avec un plein succĂšs. François passa l'annĂ©e suivante 1218 Ă des tour- nĂ©es d'Ă©vangĂ©lisation dans la PĂ©ninsule il est natu- rellement impossible de le suivre dans ces voyages, dont l'itinĂ©raire Ă©tait fixĂ© d'aprĂšs ses inspirations journaliĂšres, ou sur des indications aussi fantaisistes que celle qui l'avait jadis dĂ©terminĂ© k aller Ă Sienne. Bologne, ^ l'Al- verne, la vallĂ©e de Rieti, le Sacro-Speco de saint BenoĂźt Ă Subiaco^, GaĂ«te^, Saint-Michel au mont Gargano^ l'ont peut-ĂȘtre reçu Ă cette Ă©poque ; mais les indications sur sa prĂ©sence dans ces endroits, sont trop Ă©parses et trop vagues pour qu'on puisse les faire entrer dans un cadre historique. II est bien possible aussi qu'il ait fait alors un sĂ©jour a Rome ses rapports avec Hugolin ont Ă©tĂ© bien plus Vauvert ou Valvert aujourd'hui jardin du Luxembourg un vaste couvent Eccl. 10 Cf. Top. hist. du vieux Paris par Berty et Tisse- rand, t. IV, p. 70. En 1230 ils reçurent Ă Paris, des BĂ©nĂ©dictins de Saint-Germain-des-PrĂ©s, un certain nombre de maisons in paroc- chia SS. CosmĆ et Damiani infra muros domini rĂ©gis prope portam de Gibardo {Chartularium Universitatis Parisiensis, n° 76. Cf. Topographie historique du vieux Paris RĂ©gion occid. de Vuniv. p. 95; FĂ©libien, Histoire de la ville de Paris, I, p. 115. Enfin saint Louis les installa dans le cĂ©lĂšbre couvent des Gordeliers, dont le rĂ©fectoire existe encore, transformĂ© en musĂ©e Dupuytren. Les Dominicains, arrivĂ©s Ă Paris le 12 sept. 1217, allĂšrent droit au centre de la ville, en l'Ile, prĂšs de l'Ă©vĂȘchĂ©, et le 6 aoĂ»t 1218 s'ins- tallĂšrent au couvent Saint-Jacques. 1. Fior. 27 ; Spec. 148 b; Conform. 71 a et 113 a 2; Bon. 182. 2. Les traces du passage de François y sont nombreuses. Un frĂšre Eudes y peignit son portrait. 3. Bon. 177. 4. V. A. SS., p. 855 et 856. Cf. 2 Gel. 3, 126. CHAPITRE GĂNĂRAL DE 1217 241 frĂ©quents qu'on ne se Timagine d'ordinaire. Il ne faut pas que les rĂ©cits des biographes nous fassent illusion Ă cet Ă©gard c'est une tendance naturelle que celle de rapporter Ă trois ou quatre dates particuliĂšrement frap- pantes tout ce que nous savons d'un homme. Nous oublions des annĂ©es entiĂšres de la vie de ceux que nous avons le mieux connus et le plus aimĂ©s, pour grouper nos souvenirs autour de quelques faits saillants, qui brillent avec d'autant plus d'Ă©clat que l'obscuritĂ© se fait plus complĂšte autour d'eux. Les paroles de JĂ©sus prononcĂ©es dans cent occasions diffĂ©rentes ont fini par se rejoindre pour former un seul discours, le sermon sur la montagne. C'est alors que la critique a besoin d'ĂȘtre dĂ©licate, de mĂȘler Ă la grosse artillerie des argu- ments scientifiques, un peu de divination. Les textes sont sacrĂ©s, mais il ne faut pas en faire des fĂ©tiches ; personne aujourd'hui , malgrĂ© saint Matthieu, ne songe Ă reprĂ©senter JĂ©sus prononçant tout d'une haleine le sermon sur la montagne. De mĂȘme, dans les narrations qui nous sont faites des relations de saint François et d'Hugolin, on se trouve Ă chaque instant enfermĂ© dans des impasses, butĂ© Ă des indica- tions contradictoires, si on veut les faire tenir en deux ou trois rencontres, comme on en est tentĂ© au premier abord. Avec une simple mise au point, ces difficultĂ©s dispa- raissent, et l'on voit chacune des narrations diverses nous apporter des lambeaux qui, en se rejoignant, fournissent un rĂ©cit organique, vivant, psychologiquement vrai. A partir du moment oĂč nous sommes arrivĂ©s, il faut faire Ă Hugolin une place encore plus grande que par le passĂ© la lutte s'ouvre dĂ©finitivement entre l'idĂ©al 942 VIE DE S. FRANĂOIS franciscain, chimĂ©rique peut-ĂȘtre, mais sublime, et la politique ecclĂ©siastique, jusqu'au jour oĂč moitiĂ© par humilitĂ©, moitiĂ© par dĂ©couragement, François, la mort dans l'Ăąme, abdiquera la direction de sa famille spi- rituelle. Hugolin revint Ă Rome Ă la fin de 1217. Durant l'hiver qui suit, on trouve son contre-seing au bas des bulles les plus importantes^; il consacra ce temps Ă Ă©tudier surtout la question des ordres nouveaux, et manda François auprĂšs de lui. On a vu avec quelle franchise il lui avait dĂ©clarĂ©, Ă Florence que beaucoup de prĂ©lats feraient tout pour lui nuire auprĂšs du pape^ ; il est Ă©vident que le succĂšs de l'Ordre, ses allures qui malgrĂ© toutes les protestations contraires faisaient songer Ă l'hĂ©rĂ©sie, l'indĂ©pendance de François qui, sans s'occuper de faire confirmer l'autorisation verbale et toute provisoire accordĂ©e par Innocent III, dispersait ses frĂšres aux quatre coins du monde, tout cela devait effrayer le clergĂ©. Hugolin, qui connaissait mieux que personne l'Om- brie, la Toscane, l'Emilie, la Marche d'AncĂŽne, toutes ces contrĂ©es oĂč la prĂ©dication franciscaine avait eu ses plus beaux succĂšs, avait pu se rendre compte par lui- mĂȘme de la puissance du mouvement nouveau et de l'impĂ©rieuse nĂ©cessitĂ© de le diriger il sentait que le meilleur moyen de faire tomber les prĂ©ventions que le 1. Entre autres celles du 5 dĂ©c. 1217. Potthast 5629; 8 fĂ©vrier, 30 mars, 7 avril 1218. Potthast 5695, 5739, 5747. 2. 1 Gel. 74 0 quanti maxime in principio cum hĆj ageren- tur novellĆ plantationi ordinis insidiabantur ut perderent. Cf. 2 Gel. 1, 16 Videbat Franciscus luporum more sevire quam- plures. CHAPITRE GĂxNĂRAL DE 1217 243 pape et le sacrĂ© collĂšge pouvaient avoir contre François, Ă©tait de le prĂ©senter Ă la curie. Celui-ci fut d'aborJ bien intimidĂ© Ă la pensĂ©e de pro- noncer un discours devant le vicaire de JĂ©sus-Christ, mais sur les instances de son protecteur, il se dĂ©cida, et pour plus de sĂ»retĂ© apprit par cĆur ce qu'il devait dire. Hugolin n'Ă©tait cepen lant pas tout Ă fait rassurĂ© sur l'issue de cette dĂ©marche Thomas de Celano nous le montre dĂ©vorĂ© d'inquiĂ©tude ; il souffrait pour François dont la naĂŻve Ă©loquence pouvait courir bien des risques dans les salles du palais de Latran; il n'Ă©tait pas non plus sans quelques prĂ©occupations plus person- nelles, car l'Ă©chec de son protĂ©gĂ© aurait pu lui nuire beaucoup. Il fut d'autant plus en peine qu'arrivĂ© aux pieds du pontife, François oublia tout ce qu'il devait dire, mais il l'avoua ingĂ©nument, et deman- dant Ă son inspiration un nouveau discours, parla avec tant de chaleur et de simplicitĂ© que l'assemblĂ©e fut subjuguĂ©e ^. Les biographes sont muets sur le rĂ©sultat pratique de cette audience; on ne saurait s'en Ă©tonner ils n'ont d'autre but que l'Ă©dification. Ils Ă©crivaient aprĂšs l'apo- thĂ©ose de leur maĂźtre, et auraient eu mauvaise grĂące Ă 4. 1 Gel. 73 Cf. 2 Gel. 1, 17 ; Spec. 102 a]; 3 Soc. 64; Bon. 78. La fixation de cette scĂšne Ă l'hiver de 1217 â 1218 ne paraĂźt guĂšre pou- \oir ĂȘtre contestĂ©e le rĂ©cit de Jourdain 14 dĂ©termine en effet la date Ă laquelle Hugolin devint officiellement prolecteur de r-Ordre fin de 1220, et il suppose des relations antĂ©rieures entre Honorius, François et Hugolin. On est donc amenĂ© Ă recher- cher une date Ă laquelle ces trois personnages aient pu se ren- contrer Ă et on arrive ainsi Ă 1 1 pĂ©riode qui va de dĂ©c 1217 Ă avril 1218. 2U VIE DE S. FRiVNĂOIS insister sur les difficultĂ©s rencontrĂ©es par lui durant les premiĂšres annĂ©es ^. Le Saint-SiĂšge devait se trouver fort perplexe devant cet homme Ă©trange, dont la foi et l'humilitĂ© s'imposaient, mais auquel on ne pouvait inculquer l'obĂ©issance ecclĂ©- siastique. Saint Dominique se trouvait Ă Rome Ă la mĂȘme Ă©poque 2, et y Ă©tait comblĂ© de faveurs par le pape. On sait qu'Innocent III l'ayant invitĂ© Ă choisir l'une des rĂšgles dĂ©jĂ approuvĂ©es par l'Eglise, il Ă©tait allĂ© retrou- ver ses frĂšres Ă Notre-Dame de Prouille, et aprĂšs en avoir confĂ©rĂ© avec eux, avait adoptĂ© celle de saint Au- gustin; aussi Honorius ne lui mirchanda-t-il pas les privilĂšges. Il ne paraĂźt guĂšre possible qu'Hugolin n'ait pas cherchĂ© Ă influer par lui sur saint François. La curie sentait bien qu'il n'y avait pas en Dominique, dont Tordre comptait Ă peine quelques douzaines de membres, une des puissances morales de l'Ă©poque, mais elle n'avait pas devant lui les sentiments si mĂ©langĂ©s qu'elle Ă©prouvait devant François. RĂ©unir les deux ordres, jeter sur les Ă©paules des Dominicains la robe brune des pauvres d'Assise, et faire 1. Un mot de frĂšre Jourdain permet cependant de hasarder quel- ques conjectures Seigneur, dit François en 1220 Ă Honorius III, vous m'avez donnĂ© beaucoup de pipes, donnez m'en un seul au- quel je puisse m'adresser pour les affaires de mon Ordre. » ^Jord. 14. Multos mihi papas deĂąisti da unum,.. etc. Est-ce que cela ne suggĂšre pas l'idĂ©e que le pontife avait peut- ĂȘtre nommĂ© une commission cardinalice pour s'occuper des FrĂšres Mineurs? Les dĂ©libĂ©rations de celle-ci et les Ă©vĂ©nements qui seront racontĂ©s au chapitre suivant auraient motivĂ© la bulle Cum dVectx du 11 juin 1219 qui ne fut pis une approbation proprement dite, mais un sauf-conduit en faveur des Franciscains. 2. Le 28 fĂ©vrier 1218 il prit possession de Sainte-Sabine. CHAPITRE GENERAL DE 1217 245 ainsi rejaillir sur eux un peu de la popularitĂ© des FrĂšres Mineurs; laisser Ă ces derniers leur nom, leur habit et mĂȘme leur semblant de RĂšgle, mais en la complĂ©tant par celle de saint Augustin, Ă©tait un projet qui devait singuliĂšrement plaire a Hugolin, et qui avec l'humilitĂ© de François pouvait avoir quelques chances de succĂšs. Un jour, Dominique, Ă force de âą pieuse insis- tance avait dĂ©terminĂ© François Ă lui donner sa corde et s'en Ă©tait ceint aussitĂŽt FrĂšre, ajouta-t-il, je souhaiterais vivement que ton ordre et le mien s'unissent pour ne former dans l'Eglise qu'un seul et mĂȘme institut^.» Mais le FrĂšre Mineur voulait rester ce qu'il Ă©tait, et dĂ©clina cette proposition ; il Ă©tait si bien inspirĂ© des besoins de son siĂšcle et de l'Eglise que, moins de trois ans aprĂšs, Dominique Ă©tait amenĂ© par un courant irrĂ©sistible Ă transformer son ordre de chanoines de saint Augustin en un ordre de moines mendiants, dont les constitutions furent calquĂ©es sur celles des Franciscains -, 1. 2 Gel. 3, 87. Le sens littĂ©ral de la phrase est un peu ambigu. Voici le texte Vellem, frater Franciscej unam fieri religionem titam et meam et in Ecclesia pari forma nos vivere ; Spec. 27 b; l'Ă©cho de cette dĂ©marche se retrouve dans Thierry d'Apolda, Vie de S. Dominique A. SS. Augusti, t. I, p. 572 d S. Dominicus in oscula sancta ruens et sinceros amplexus, dixit Tu es socius meus, tu curres pariter mecum, stemus simul, nullus adversarius prĆvalehit. Bernard de Besse dit B. Dominicus tanta B. Fran- cisco devotione cohesit ut optatam ah eo cordam sub inferiori tunica devotissime cingeret, cujus et suam Religionem unam velle fieri diceret, ipsumque pro sanctitate cĆteris sequendum religiosis assereret. Man. de Turin 102 b. 2. Au chapitre tenu Ă Bologne Ă la PentecĂŽte de 1220. La bulle Religiosam vitam PrivilĂšge de N. D. de Prouille du 30 mars 1218 Ă©numĂšre les possessions des Dominicains RipoUi Bull. PrĆd. t. I, p. 6. Horoy, Honorii opĂ©ra, t. II, col. 684. 24 246 VIE DE s. FRANĂOIS Quelques annĂ©es plus tard, les Dominicains prirent pour ainsi dire leur revanche et obligĂšrent les FrĂšres Mineurs Ă faire dans leurs travaux une large part Ă la science. C'est ainsi qu'Ă peine adolescentes, les deux familles religieuses rivalisaient, se pĂ©nĂ©traient, influ- aient l'une sur l'autre, jamais cependant assez pour perdre toute trace de leur origine, rĂ©sumĂ©e pour l'une dans la pauvretĂ© et dans la prĂ©dication laĂŻque, pour l'autre dans la science et dans la prĂ©dication clĂ©ricale. CHAPITRE XIII Saint Dominique et saint François. Mission d'Egypte. ĂtĂ© 1218 â automne 1220. L'art et la poĂ©sie ont eu raison d'associer insĂ©para- blement saint Dominique et saint François la gloire du premier n'est qu'un reflet de celle du second, et c'est en les rapprochant qu'on arrive le mieux Ă caractĂ©riser le eĂ©nie du Poverello. Si François est l'homme de l'inspiration, Domi- nique est celui de l'obĂ©issance au mot d'ordre, et l'on peut dire que sa vie se passa sur les chemins de Rome oĂč il allait sans cesse demander des instruc- tions. Aussi sa lĂ©gende fut-elle bien lente Ă se former^ quoique rien ne l'empĂȘchĂąt de s'Ă©panouir librement ; mais ni le zĂšle de GrĂ©goire IX pour sa mĂ©moire, ni la science de ses disciples n'ont pu faire pour le Marteau des hĂ©rĂ©tiques, ce que l'amour des peuples avait fait pour le PĂšre des pauvres. Sa lĂ©gende a les deux dĂ©fauts qui lassent si rapidement les lecteurs des Ă©crits hagio- graphiques, quand il s'agit de saints dont l'Ăglise a 248 VIE DE s. FRANĂOIS imposĂ© le culte ^ elle est encombrĂ©e d'un surnaturel de mauvais aloi, et de traits empruntĂ©s Ă tort et Ă travers aux lĂ©gendes antĂ©rieures. Le peuple italien, qui avait saluĂ© en François Tange de toutes ses espĂ©rances, et qui se montrait si avide de reliques, ne songea mĂȘme pas Ă relever le cadavre du fondateur de l'Ordre des FrĂšres PrĂȘcheurs, et le laissa attendre douze ans les gloires de la canonisation 2. On a vu plus haut les tentatives du cardinal Hugolin pour rĂ©unir les deux ordres, et les raisons qu'il avait pour cela. Il se rendit au chapitre gĂ©nĂ©ral de la Pente- cĂŽte, rĂ©uni Ă la Portioncule 3 juin 1218, auquel saint Dominique vint assister aussi avec quelques-uns des siens. Le cĂ©rĂ©monial de ces solennitĂ©s semble avoir Ă©tĂ© Ă peu prĂšs toujours le mĂȘme depuis 1216 les FrĂšres Mineurs se rendaient processionnellement Ă la rencontre du cardinal, qui descendait aussitĂŽt de sa monture et leur prodiguait toutes les marques de son affection. Un autel Ă©tait dressĂ© en plein air, auquel il chantait la messe, et François remplissait les fonctions de diacre ^. 1. Une preuve de l'obscuritĂ© dans laquelle resta Dominique, tant que Rome n'eut pas fait son apothĂ©ose, c'est que Jacques de Vitry qui consacre aux FrĂšres PrĂȘcheurs tout un chapitre de son Historia Occidentalis 27, p. 333 ne nomme mĂȘme pas le fondateur. Ceci est d'autant plus significatif qu'Ă quelques pages de distance, le chapitre consacrĂ© aux FrĂšres Mineurs est presque entiĂšrement rempli par la personne de saint François ; aussi ce silence sur saint Dominique a-t-il Ă©tĂ© remarquĂ© et relevĂ© par Moschus, qui n'a pas trouvĂ© de moyen pour l'expliquer. V. Vitam J. de Vitriaco, en tĂȘte de l'Ă©dition de Douai 1597. 2. François mort en 1226 est canonisĂ© en 1228 ; Antoine de Padoue, 1231 et 1233 ; Elisabeth deThuringe, 1231 et 1235, Domi- nique, 1221 et 1234. 3. 3 Soc. 61. ^c s. DOMINIQUE ET S. FRANĂOIS 249 Il est facile de s'imaginer l'Ă©motion qui s'emparait des assistants, lorsqu'Ă©clatait dans ce cadre de paysage ombrien, cet office de la PentecĂŽte, le plus enivrant, le plus apocalyptique de la liturgie catholique l'antienne AllĂ©luia, AllĂ©luia, Emitte Spiritum tuum et creahuntur, et renovabis faciem terrĆ. AllĂ©luia ^, ne renfermait-elle pas tout le rĂȘve franciscain? Mais ce qui Ă©merveilla surtout Dominique, ce fut l'absence de prĂ©occupations matĂ©rielles. François avait recommandĂ© Ă ses frĂšres de ne s'inquiĂ©ter de rien pour le boire ou le manger; il savait par expĂ©rience qu'il pouvait sans crainte s'en remettre Ă l'amour des popu- lations voisines. Cette insouciance avait vivement Ă©tonnĂ© Dominique, qui la trouvait exagĂ©rĂ©e; il put se rassurer, le moment du repas venu, en voyant les habitants de la contrĂ©e, accourus en foule, apporter bien plus de pro- visions qu'il n'en fallait pour les quelques milliers de frĂšres, et tenir Ă honneur de les servir. La joie des Franciscains, la sympathie du peuple pour eux, la pauvretĂ© des huttes de la Portioncule, tout cela l'impressionna vivement ; il en fut si Ă©mu que dans un Ă©lan d'enthousiasme, il annonça sa rĂ©solution d'em- brasser la pauvretĂ© Ă©vangĂ©lique 2. Hugolin, quoique touchĂ©, lui aussi, jusqu'aux larmes^, 1. RĂ©pandez, Seigneur, votre Esprit, et tout sera créé, et vous re- nouvellerez la face de la terre. 2. 2 Gel. 3, 87 ; Spec. 132 b; Conform. 207 a, 112 a; Fior. 18. Les historiens de saint Dominique n'ont pas fait bon accueil Ă ces dĂ©tails, mais un point incontestablement acquis par des documents diplomatiques, c'est qu'en 1218, Dominique, Ă Rome, se faisait don- ner des privilĂšges oĂč les propriĂ©tĂ©s de son Ordre Ă©taient indiquĂ©es, et qu'en 1220 il amenait ses FrĂšres Ă professer la pauvretĂ©. 3. 2 Gel. 3,9; Spec. 17 a. 250 VIE DE s. FRANĂOIS n'oubliait pas ses prĂ©occupations l'Ordre Ă©tait trop nombreux pour ne pas compter un groupe de mĂ©con- tents ; quelques frĂšres qui avant leur conversion avaient Ă©tudiĂ© dans les universitĂ©s, commençaient Ă blĂąmer l'extrĂȘme simplicitĂ© dont on leur faisait un devoir. A des hommes que l'enthousiasme ne soutenait plus, les courts prĂ©ceptes de la RĂšgle paraissaient une charte bien insuffisante pour une vaste association ; aussi se tournaient-ils avec envie vers les monuuientales abbayes des BĂ©nĂ©dictins, des Chanoines rĂ©guliers, des Cisterciens, et vers les antiques lĂ©gislations monastiques. Ils n'eurent pas de peine Ă deviner en Hugolin un puissant alliĂ©, et Ă lui faire part de leurs remarques. Celui-ci crut le moment propice venu, et dans une conversation particuliĂšre, suggĂ©ra Ă François quelques idĂ©es Ne devrait-il pas faire Ă ses disciples, surtout Ă ceux qui Ă©taient instruits, une plus grande part dans les charges? les consulter, s'inspirer de leur avis? n'y aurait-il pas lieu de profiter de l'expĂ©rience des anciens ordres? Quoique tout cela eĂ»t Ă©tĂ© dit comme en passant, et avec tout le tact possible, François se sentit blessĂ© au vif et, entraĂźnant sans rĂ©pondre le cardinal en plein Chapitre Mes FrĂšreS; dit-il avec feu, le Seigneur m'a appelĂ© par la voie de la simplicitĂ© et de l'humilitĂ©. En elles, il m'a montrĂ© la vĂ©ritĂ© pour moi et pour ceux qui veulent me croire et m'imiter ; ne venez donc pas me parler de la RĂšgle de saint BenoĂźt, de saint Augustin, de saint Bernard, ni d'aucune autre, mais seulement de celle que Dieu, dans sa misĂ©ricorde, a voulu me montrer, et dont il m'a dit qu'il voulait, en elle, faire un nouveau pacte avec le monde, et il n'a pas voulu que nous en ayons s. DOMINIQUE ET S. FRANĂOIS 251 aucune autre. Mais par votre science et votre sagesse Dieu vous confondra. Au reste j'ai confiance que Dieu vous chĂątiera; bon grĂ© mal grĂ©, vous serez forcĂ©s de venir Ă rĂ©sipiscence, et il ne vous restera que de la confusion ^» Cette ardeur Ă dĂ©fendre et Ă affirmer ses idĂ©es, Ă©tonna profondĂ©ment Hugolin qui n'ajouta pas une parole. Quant Ă Dominique, ce qu'il venait de voir k la Portioncule fut pour lui une rĂ©vĂ©lation. Il sentait bien que son zĂšle pour l'Ăglise ne pouvait pas grandir, mais il s'apercevait aussi que par quelques change- ments dans ses armes, il pourrait la servir avec beau- coup plus de succĂšs. Hugolin ne fit sans doute que l'encourager dans cette voie, et Dominique, obsĂ©dĂ© de prĂ©occupations nouvelles, prenait, quelques mois aprĂšs, le chemin de l'Espagne. On n'a pas assez remarquĂ© la profondeur de la crise qui se produisit alors en lui ; les Ă©crivains religieux racontent longuement son sĂ©jour dans la grotte de SĂ©govie, mais ils ne voient que les pratiques ascĂ©tiques, les oraisons, les gĂ©nuflexions, et ne songent pas Ă rechercher la cause de tout cela. A partir de cette Ă©poque, on pourrait dire qu'il est sans cesse occupĂ© Ă copier saint François, si ce mot n'avait un sens quelque peu dĂ©plaisant ; arrivĂ© Ă SĂ©govie, il fonde comme les FrĂšres Mineurs un ermitage hors de la ville, perdu dans les rochers qui la dominent, et d'oĂč il descend de temps en temps pour prĂȘcher au peuple. La transformation de sa maniĂšre de vivre fut si Ă©vidente que plusieurs de 1. Spec. 49 a; Trihul. Man. Laur. lla-12 b ; Spec. 183 a; Conform. d35 b 1. 252 VIE DE s. FRANĂOIS ses compagnons s'en Ă©murent, et refusĂšrent de le suivre dans la nouvelle voie. Le sentiment populaire a parfois comme des intui- tions une lĂ©gende se fit autour de cette grotte de SĂ©govie, et l'on raconta que saint Dominique y avait reçu les stigmates. N'y a-t-il pas lĂ un effort inconscient pour traduire, par une image Ă la portĂ©e de tous, ce qui s'Ă©tait vĂ©ritablement passĂ© dans cet antre de la Sierra de Guaderrama^? Saint Dominique arrivait ainsi, lui aussi, Ă la pauvretĂ© Ă©vangĂ©lique ; mais le chemin par lequel il y venait Ă©tait bien diffĂ©rent de celui qui avait Ă©tĂ© suivi par saint François; tandis que ce dernier s'y Ă©tait Ă©levĂ© d'un coup d'aile, y avait vu l'affranchissement dĂ©finitif des prĂ©occupations qui avilissent la vie, saint Dominique ne la considĂ©rait que comme un moyen ; elle Ă©tait pour lui une arme de plus dans l'arsenal de la milice chargĂ©e de dĂ©fendre l'Eglise. Il ne faut pas penser ici Ă un calcul vulgaire ; son admiration pour celui qu'il imitait ainsi et suivait de loin, Ă©tait sincĂšre et profonde, mais on ne copie pas le gĂ©nie. Cette maladie sacrĂ©e, il ne l'avait pas; il a transmis a ses fils spirituels un sang robuste et sain, grĂące auquel ils n'ont pas connu ces accĂšs de fiĂšvre chaude, ces Ă©lans sublimes, ni ces retours subits qui font de l'histoire des Franciscains, l'histoire de la sociĂ©tĂ© la plus tourmentĂ©e qu'il y ait eu sur la terre, et oĂč les chapitres glorieux sont entremĂȘlĂ©s de pages triviales et grotesques, parfois grossiĂšres. Au chapitre de 1218, François eut bien d'autres 1. Les principales sources sont indiquĂ©es A. SS. Augusti, t. I, p. 470 SS. s. DOMINIQUE ET S. FRANĂOIS 253 sujets de tristesse que les murmures d'un groupe de mĂ©contents; les missionnaires envoyĂ©s l'annĂ©e prĂ©cĂ©- dente en Allemagne et en Hongrie, Ă©taient revenus complĂštement dĂ©couragĂ©s. Le rĂ©cit des souffrances qu'ils avaient endurĂ©es produisit un si grand effet que, dĂšs lors, beaucoup de frĂšres ajoutaient Ă leurs priĂšres la formule Seigneur prĂ©servez-nous de l'hĂ©rĂ©sie des Lombards, et de la fĂ©rocitĂ© des Allemands^.» Ceci nous explique comment Hugolin finit par con- vaincre François du devoir qu'il y avait Ă prendre les mesures nĂ©cessaires, pour ne plus exposer les FrĂšres Ă ĂȘtre pourchassĂ©s comme hĂ©rĂ©tiques. Il fut dĂ©cidĂ© qu'a l'issue du prochain chapitre, les missionnaires se muniraient d'un bref papal, qui leur servirait de passe-port ecclĂ©siastique. Voici la traduction de ce document Honorius Ă©vĂȘque, serviteur des serviteurs de Dieu, aux archevĂȘques, Ă©vĂȘques, abbĂ©s, doyens, archidiacres et autres supĂ©rieurs ecclĂ©siastiques, salut et bĂ©nĂ©diction apostolique. Nos chers fils, le frĂšre François et ses compagnons de la vie et de l'Ordre des FrĂšres Mineurs ayant renoncĂ© aux vanitĂ©s de ce monde, pour choisir un genre de vie qui a mĂ©ritĂ© d'ĂȘtre approuvĂ© par l'Eglise romaine, et s'en aller, Ă l'exemple des ApĂŽtres, jetant dans des rĂ©gions diverses la semence de la parole de Dieu, nous vous prions tous et vous exhortons, par ces lettres aposto- liques, de recevoir comme bons catholiques les FrĂšres de la susdite sociĂ©tĂ©, porteurs des prĂ©sentes, lorsqu'ils se prĂ©senteront devant vous, vous avertissant de leur ĂȘtre 1. Jord. 18; 3 Soc. 62. 254 VIE DE s. FRANĂOIS favorables et de les traiter avec bontĂ© pour l'honneur de Dieu et par considĂ©ration pour nous. DonnĂ© Ă Rieti le 3^ jour des ides de juin 11 juin 1219 l'an troisiĂšme de notre pontificat ^ » On voit que tout dans cette bulle avait Ă©tĂ© calculĂ© pour Ă©viter d'Ă©veiller les susceptibilitĂ©s de François. Pour comprendre jusqu'Ă quel point elle diffĂšre des premiĂšres lettres accordĂ©es d'ordinaire aux ordres nouveaux, il faut l'en rapprocher celle qui avait instituĂ© les Dominicains avait Ă©tĂ©, comme les autres, un vĂ©ritable privilĂšge ^ ; ici rien de semblable. L'assemblĂ©e qui s'ouvrit Ă la PentecĂŽte de 1219 26 mai fut d'une extrĂȘme importance^. Elle termina la sĂ©rie de ces chapitres primitifs, oĂč l'inspiration et la fantaisie de François se donnaient libre carriĂšre. Les suivants, prĂ©sidĂ©s par les vicaires, n'ont plus ni la mĂȘme gaietĂ©, ni le mĂȘme charme la clartĂ© crue du grand jour a chassĂ© les teintes diaprĂ©es de l'aurore et les indicibles ardeurs de la nature Ă son rĂ©veil. L'Ă©tĂ© de 1219 Ă©tait l'Ă©poque fixĂ©e par Honorius III pour tenter un nouvel effort en Orient, et diriger vers l'Egypte toutes les forces des CroisĂ©s^. François crut 1. Sbaralea, Bull. fr. t. I, p. 2 ; Potthast 6081 ; Wadding, ann. 1219, 11° 28, indique les ouvrages oĂč on en trouve le texte. Cf. A. SS., p. 839. 2. Le titre en indique assez le contenu Domenico priori S. Ro- mani tolosani ejusque fratribus, eos in protectionem recipit eoriim- que Ordinem cum bonis et privilegiis confirmĂąt. Religiosam vitam 22 dĂ©c. 1216. Pressuli t. I, 175; texte dans Horoy, t. II, col. 141-144. 3. V. A. SS., p. 608 ss., et 838 ss.. 4. V. Bulle, Multi divinĆ du 13 aoĂ»t 1218. Horoy, t. III, col. 12; Potthast 5891. s. DOMINIQUE ET S. FRANĂOIS 255 le moment venu de rĂ©aliser le projet qu'il n'avait pu exĂ©cuter en 12d2. Chose Ă©trange, Hugolin qui, deux ans auparavant, l'avait empĂȘchĂ© d'aller en France, lui laissa libertĂ© entiĂšre pour accomplir cette nouvelle expĂ©dition ^. Quelques auteurs ont pensĂ© que François, ayant trouvĂ© en lui un vrai pro- tecteur, se sentait rassurĂ© pour l'avenir de l'Ordre ; il a dĂ» en effet penser cela^ mais l'histoire des troubles qui Ă©clatĂšrent de suite aprĂšs son dĂ©part, le stupĂ©fiant rĂ©cit du bon accueil fait par la cour de Rome Ă quelques brouillons qui profitĂšrent de son absence pour mettre son Ćuvre en pĂ©ril, suffiraient Ă montrer combien l'Ăglise Ă©tait embarrassĂ©e de lui, et avec quelle ardeur elle souhaitait la transformation de son Ćuvre. On trouvera plus loin le rĂ©cit dĂ©taillĂ© de ces faits. II paraĂźt qu'un Romagnol, frĂšre Christophe, fut nommĂ© Ă ce mĂȘme chapitre, provincial de Gascogne; il y vĂ©cut en Franciscain de la premiĂšre heure, travaillant de ses mains, habitant une Ă©troite cellule de branchages et de terre glaise ^. Ăgide partit pour Tunis avec plusieurs frĂšres, mais une grande dĂ©ception les y attendait les chrĂ©tiens de ce pays, dans la crainte d'ĂȘtre compromis par leur zĂšle 4. La contradiction est si frappante, que les Bollandistes en ont fait le principal argument pour dĂ©fendre l'erreur de leur manus- crit 1 Gel. 75, et prĂ©tendre envers et contre tous que François avait poursuivi son voyage. A. SS. 607. 2. 11 mourut Ă Gahors le 31 oct. 1272. Sa lĂ©gende se trouve dans le M an. Riccardi 279, f» 69 a. Jncipit vita /'. Cristo'phori quam compilavit fr. Bernardus de Bcssa custodiĆ Caturcensis Quasi vas auri solidum. Cf. Marc de Lisbonne, t. II, p. 106-113, t. III, p. 212 et Glassberger, An. fr., t. II, p. 14. 256 VIE DE s. FRANĂOIS missionnaire, les jetĂšrent sur un bateau et les contrai- gnirent Ă repasser la mer^. Si la date de 1219, pour ces deux missions, ne repose guĂšre que sur des conjectures, il n'en est pas de mĂȘme pour le dĂ©part des frĂšres qui se dirigĂšrent vers l'Espagne et le Maroc. Cinq d'entre eux subirent le martyre, le 16 janvier 1220. On a retrouvĂ© rĂ©cemment le rĂ©cit de leurs derniĂšres prĂ©dications et de leur fm tragique, par un tĂ©moin oculaire 2. Ce document est d'autant plus prĂ©cieux qu'il confirme les lignes gĂ©nĂ©rales du rĂ©cit bien plus long fait par Marc de Lisbonne. Il serait hors de propos de le rĂ©sumer ici, puisqu'il ne concerne que fort indirectement la vie de saint François; mais il faut noter que ces acta ont, outre leur valeur historique, une portĂ©e psychologique, il faudrait presque dire patholo- gique, vraiment remarquable jamais la folie du martyre n'a Ă©tĂ© mieux caractĂ©risĂ©e que dans ces longues pages oĂč l'on voit les frĂšres forcer les MahomĂ©tans Ă les pour- suivre et Ă leur faire gagner la palme cĂ©leste. La longa- nimitĂ© que montra d'abord le Miramolin, ainsi que ses coreligionnaires, donne une idĂ©e d'autant plus haute de la civilisation et des qualitĂ©s de ces InfidĂšles, que des sentiments fort diffĂ©rents seraient naturels chez les vaincus des plaines de Tolosa. Il est impossible d'appeler prĂ©dications, les collections de grossiĂšres apostrophes que les missionnaires adres- 1. A. SS. Aprilis t. III, p. 224 ; Conform. 118 b 1 ; 54 a ; Marc de Lisbonne, t. II, p. 1. â FrĂšre Luc avait Ă©tĂ© envoyĂ© Ă Constan- tinople en 1219 au plus tard. V. Constitutus du 9 dĂ©c. 1220 Sba- ralea. Bull, fr., t. I, p. 6; Potthast 6431. 2. C'est Ă M. MĂ» lier {AnfĂ nge, p. 207 que revient l'honneur de cette publication faite d'aprĂšs un manuscrit de la Gottoniana. s. DOMINIQUE ET S. FRANĂOIS 257 saient Ă ceux qu'ils voulaient convertir Ă ce paroxysme, la soif du martyre devient la folie du suicide. Est-ce Ă dire que les frĂšres Bernard, Pierre, Adjutus, Accurse et Othon n'aient pas droit k Tadmiration et au culte dont on les a entourĂ©s? Qui oserait le dire ? Le dĂ©voue- ment n'est-il pas toujours aveugle? Pour qu'un sillon soit fĂ©cond, il y faut du sang, il y faut des larmes, de ces larmes que saint Augustin appelle le sang de l'Ăąme. Ah! c'est une grande duperie que de s'immoler, car le sang d'un seul homme ne saurait sauver ni le monde, ni mĂȘme une nation; mais c'est une duperie plus grande encore que de ne pas s'immoler, car alors on laisse perdre les autres, et on se perd soi-mĂȘme le premier. Recevez donc mon salut, Martyrs du Maroc, vous ne regrettez pas, j'en suis sĂ»r, votre folie, et si jamais quelque raisonnable pĂ©dant, fourvoyĂ© dans les bosquets du paradis, est venu vous dĂ©montrer doctement qu'il aurait mieux valu rester dans votre pays, y faire souche d'une honnĂȘte famille de laboureurs vertueux, je me figure que Miramolin, devenu la-haut voire meilleur ami, aura pris soin de le confondre. Vous fĂ»tes fous, mais d'une folie que j'envie, car vous sentiez que l'essentiel, ici-bas, n'est pas de servir tel ou tel idĂ©al, mais de servir de toute son Ăąme celui qu'on a choisi. Lorsque, quelques mois aprĂšs, le rĂ©cit de cette fin glorieuse arriva Ă Assise, François surprit chez ses compagnons un mouvement d'orgueil et leur en fit de vifs reproches; lui, qui aurait tant enviĂ© le sort des martyrs, se sentait humiliĂ© de n'avoir pas Ă©tĂ© jugĂ© par Dieu digne de le partager. Gomme le rĂ©cit Ă©tait entremĂȘlĂ© de quelques phrases d'Ă©loge Ă l'adresse du 258 VIE DE s. FRANĂOIS fondateur de l'Ordre, il dĂ©fendit d'en continuer la lecture 1. Au lendemain du chapitre, il avait lui-mĂȘme entre- pris une mission du genre de celle qu'il avait confiĂ©e aux frĂšres du Maroc, mais il avait procĂ©dĂ© d'une maniĂšre toute diffĂ©rente on ne retrouve pas chez lui ce zĂšle aveugle qui court Ă la mort avec une sorte de frĂ©nĂ©sie, et fait oublier tout le reste; peut-ĂȘtre sentait-il dĂ©jĂ que l'effort continu vers le mieux, l'immolation de tous les instants Ă la vĂ©ritĂ© est le martyre des forts. Cette expĂ©dition qui dura plus d'un an n'est men- tionnĂ©e qu'en quelques lignes par les biographes 2. Par bonheur, nous avons sur elle une foule d'autres rĂ©cits ; mais ce silence suffirait Ă prouver la sincĂ©ritĂ© des au- teurs franciscains primitifs s'ils avaient voulu faire Ćuvre d'amplification, quel thĂšme plus merveilleux et plus facile auraient-ils pu trouver? François quitta la Portioncule Ă la mi-juin et se dirigea vers AncĂŽne, d'oĂč les CroisĂ©s devaient partir pour l'Egypte, le jour de la Saint-Jean 2i juin. Beaucoup de frĂšres s'Ă©taient joints Ă lui, ce qui n'Ă©tait pas sans inconvĂ©nient pour un voyage par mer, oĂč l'on Ă©tait obligĂ© de s'en remettre Ă la charitĂ© des patrons de bateaux, ou Ă celle des com- pagnons de voyage. On comprend l'embarras de François arrivĂ© Ă AncĂŽne, et obligĂ© d'y abandonner une partie de ceux qui souhaitaient si fort d'aller avec lui. Les ConformitĂ©s racontent Ă ce propos un trait pour lequel on pourrait dĂ©sirer une autoritĂ© plus ancienne, mais qui est bien 1. Jord. 8. 2. 1 Gel. 57 ; Bon. 133-138 ; 154 et 155 ; 2 Gel. 2, 2 ; Conform. 113 b 2 ; 114 a 2 ; Spec, 55 b ; Fior. 24. s. DOMINIQUE ET S. FRANĂOIS 259 dans la maniĂšre de François il conduisit tous ses amis au port et leur exposa ses perplexitĂ©s Les gens du bateau, leur dit-il, refusent de nous prendre tous, et je n'ai guĂšre le courage de faire un choix parmi vous, vous pourriez croire que je ne vous aime pas tous Ă©ga- lement, nous allons donc tĂącher de connaĂźtre la volontĂ© de Dieu. » En mĂȘme temps il appela un enfant qui jouait prĂšs de lĂ , et celui-ci se prĂȘtant avec joie au rĂŽle providentiel qu'on lui demandait, dĂ©signa du doigt les onze frĂšres qui devaient partir^. Nous ignorons l'itinĂ©raire suivi. Un seul souvenir de ce voyage nous est parvenu celui du chĂątiment infligĂ© dans l'Ăźle de Chypre Ă frĂšre Barbaro, qui s'Ă©tait rendu coupable d'une faute que le maĂźtre dĂ©testait par-dessus tout, la mĂ©disance. I Ă©tait implacable pour les lĂąchetĂ©s de langage si coutumiĂšres aux gens pieux, et qui souvent font un enfer des maisons religieuses en apparence les plus paisibles. La vilenie lui parut cette fois d'autant plus grave qu'elle avait Ă©tĂ© dite en prĂ©sence d'un Ă©tranger, un chevalier de la contrĂ©e. Celui-ci eut un instant de stupeur, lorsqu'il entendit François ordonner au coupable de prendre et de manger un crottin d'Ăąne qui Ă©tait lĂ et ajouter Il faut que la bouche qui a distillĂ© le venin de la haine contre mon frĂšre, mange cet excrĂ©ment. » Une telle indignation, aussi bien que l'obĂ©issance du malheureux, le remplirent d'admi- ration 2. Il est bien probable, comme l'a pensĂ© Wadding, que les missionnaires dĂ©barquĂšrent Ă Saint-Jean d'Acre. Ils 1. Conform. 113 b 2. Cf. A. SS., p. 611. 2. 2 Gel. 3,92; Spec. 30 b; Cf. 2 Gel. 3,115; Conform. 142 bl. Cet Ă©pisode pourrait Ă la rigueur se rattacher au retour. 260 VIE DE s. FRANĂOIS y arrivĂšrent vers le milieu de juillet^ C'est sans doute aux environs de cette ville que frĂšre Elie s'Ă©tait Ă©tabli depuis un ou deux ans. François s'y sĂ©para de quelques-uns de ses compagnons qu'il envoya prĂȘcher de divers cĂŽtĂ©s, et lui-mĂȘme, peu de jours aprĂšs, se ren- dit en Egypte, oĂč tous les efforts des CroisĂ©s se concen- traient autour de Damiette. DĂšs l'abord il fut navrĂ© de l'Ă©tat moral de l'armĂ©e chrĂ©tienne. MalgrĂ© la prĂ©sence de nombreux prĂ©lats et du lĂ©gat apostolique, elle Ă©tait dĂ©sorganisĂ©e par l'indis- cipline. Il en fut si affectĂ© que comme on parlait de bataille il crut devoir la dĂ©conseiller, annonçant que les chrĂ©tiens seraient infailliblement battus. On se mo- qua de lui, et le 29 aoĂ»t, les CroisĂ©s ayant attaquĂ© les Sarrasins, essuyĂšrent une terrible dĂ©route 2. Ses prĂ©dications eurent un merveilleux succĂšs. Le terrain Ă©tait, il faut le dire, mieux prĂ©parĂ© que tout autre pour recevoir la semence nouvelle ; non pas certes que la piĂ©tĂ© y fut vivante, mais dans ce ramassis d'hommes, venus lĂ des quatre coins de l'Europe, les inquiets, les voyants, les illuminĂ©s, les altĂ©rĂ©s de justice et de vĂ©ritĂ©, coudoyaient les coquins, les aventuriers, les affamĂ©s d'or et de pillage. Capables de beaucoup de bien ou de beaucoup de mal, au grĂ© d'impulsions mo- mentanĂ©es, dĂ©gagĂ©s de ces liens de la famille, de la propriĂ©tĂ©, des habitudes qui enlacent d'ordinaire la vo- lontĂ© et ne permettent qu'exceptionnellement un complet 1. Avec la maniĂšre de naviguer Ă cette Ă©poque, le voyage exigeait de vingt Ă trente jours. On trouvera le diarium d'une traversĂ©e semblable dans Huillard-BrĂ©holles, Hist. DipL, t. I, 898-901. Cf. Ibid. Introd., p. GGGXXXI. 2. 2 Gel. % 2 ; Bon. 154 et 155 ; Gf. A. SS., p. 612. s. DOMIxNIQLE ET S. FRANĂOIS 261 changement de vie, ceux d'entre eux qui Ă©taient sin- cĂšres et venus lĂ avec de gĂ©nĂ©reuses illusions, Ă©taient pour ainsi dire prĂ©destinĂ©s Ă entrer dans la pacifique armĂ©e des FrĂšres Mineurs. François devait conquĂ©rir dans cette mission les collaborateurs qui assureraient le succĂšs de son Ćuvre dans les pays du nord de l'Europe. Notre compatriote Jacques de Vitry, dans une lettre adressĂ©e quelques jours aprĂšs Ă des amis, raconte ainsi l'impression que lui produisit François Je vous annonce que MaĂźtre Reynier prieur de Saint-Michel est entrĂ© dans l'Ordre des FrĂšres Mineurs, Ordre qui se multiplie beaucoup de tous cĂŽtĂ©s, parce qu'il imite la primitive Eglise et suit en tout la vie des apĂŽtres. Le MaĂźtre de ces FrĂšres s'appelle frĂšre Fran- çois ; il est si aimable qu'il se fait vĂ©nĂ©rer do tous. Ătant venu dans notre armĂ©e, il n'a pas craint d'aller, par zĂšle pour la foi, Ă celle de nos ennemis. Durant de longs jours il a annoncĂ© aux Sarrasins la parole de Dieu, mais avec peu de succĂšs ; alors le Soudan, roi d'Egypte, lui a demandĂ© en secret de supplier Dieu de lui rĂ©vĂ©ler par quelque prodige quelle est la meilleure religion. Colin l'anglais, notre clerc, est entrĂ© dans le mĂȘme Ordre ainsi que deux autres de nos compagnons, Michel et Dom Matthieu, auquel j'avais confiĂ© la cure de la Sainte- Chapelle. Cantor et Henri ont fait de mĂȘme et d'autres encore dont j'oublie le nom*.» Le long et enthousiaste chapitre consacrĂ© aux FrĂšres Mineurs par le mĂȘme auteur, dans son grand ouvrage 1. Jacques de Vitry ne parle ici de François qu'incidemment, au milieu des salutations, ce qui au point de vue critique ne fait qu'aug- menter la valeur de ces paroles. Voir l'Ă©tude des sources p. GXXII. 25 2G2 VIE DE s. FRANĂOIS sur rOccident, est trop dĂ©veloppĂ© pour trouver place ici. C'est un tableau vivant et exact des premiers temps de l'Ordre, oĂč la prĂ©dication de François devant le Soudan est de nouveau racontĂ©e. Il fut tracĂ© Ă une Ă©poque oĂč les FrĂšres n'avaient encore ni monastĂšres ni Ă©glises, et oĂč les chapitres se tenaient une ou deux fois par an; cela nous reporte Ă une date antĂ©rieure Ă 1223 et mĂȘme probablement Ă 1221, Nous avons donc lĂ une contre- Ă©preuve des rĂ©cits de Thomas de Gelano et des Trois Compagnons, et ils y trouvent leur confirmation ponc- tuelle. Pour les entrevues de François et du Soudan, il est prudent de s'en tenir Ă ce que racontent Jacques de Vitry et le Continuateur de Guillaume de Tyr^. Quoique celui-ci ait Ă©crit Ă une Ă©poque relativement tardive entre 1275 et 1295, il a fait Ćuvre d'historien, et travaillĂ© sur des documents authentiques or, pas plus que Jacques de Vitry, il ne connaĂźt l'offre qu'aurait faite François, de passer Ă travers le feu si les prĂȘtres de Mahomet voulaient en faire autant, et d'Ă©tablir par ce prodige la supĂ©rioritĂ© du christianisme. On a vu combien cet appel Ă des signes est peu dans le caractĂšre de saint François. Peut-ĂȘtre ce rĂ©cit, fait par Bonaventure, est-il nĂ© d'un malentendu. Le Soudan, comme un nouveau Pharaon, a pu mettre l'Ă©trange prĂ©dicateur en demeure de prouver sa mission par des miracles. Quoi qu'il en soit, François et son compagnon furent traitĂ©s avec beaucoup d'Ă©gards, chose d'autant plus mĂ©ritoire que les hostilitĂ©s Ă©taient Ă leur comble. De retour au camp des CroisĂ©s, ils y demeurĂšrent 1. Y. plus haut la critique des sources p. GXXIV. s. DOMINIQUE ET S. FRANĂOIS 263 jusqu'aprĂšs la prise de Damiette 5 novembre i2l9. Cette fois les chrĂ©tiens Ă©taient victorieux, mais le cĆur de y homme Ă©vangĂ©lique saigna peut-ĂȘtre plus de cette victoire que de la dĂ©faite du 29 aoĂ»t. L'Ă©pouvantable spectacle de la ville que les vainqueurs trouvĂšrent remplie de monceaux de cadavres, les querelles pour le partage du butin, la vente des malheureux qui n'avaient pas succombĂ© Ă la peste ^, toutes ces scĂšnes de terreur, de cruautĂ©, de convoitise, lui causĂšrent une horreur profonde. La bĂȘte humaine Ă©tait lĂąchĂ©e, la voix de l'apĂŽtre ne pouvait pas plus se faire entendre au milieu de ces clameurs de fauves, que celle d'un sauveteur sur un ocĂ©an dĂ©ferlĂ©. Il partit pour la Syrie ^ et les Saints-Lieux. Combien n'aimerait-on pas pouvoir le suivre dans ce pĂšlerinage, l'accompagner par la pensĂ©e en JudĂ©e et en GalilĂ©e, Ă BethlĂ©hem, Ă Nazareth, Ă GethsĂ©manĂ©. Que lui dit l'Ă©table oĂč naquit le fils de Marie, l'atelier oĂč il tra- vailla, le bois d'olivier oĂč il s'immola ? HĂ©las ! les docu- ments nous abandonnent tout Ă coup complĂštement. Parti de Damiette fort peu de jours aprĂšs la fin du siĂšge 5 novembre 1219, il aurait pu aisĂ©ment se trouver Ă BethlĂ©hem pour NoĂ«l. Mais nous ne savons 1. Tout cela est racontĂ© longuement dans la lettre de Jacques de Vitry. 2. Cil hom qui comença l'ordre des FrĂšres Menors, si ot nom frĂšre François ... vint en l'ost de Damiate, e i fist moult de bien, et demora tant que la ville fut prise. Il vit le mal et le pĂ©chĂ© qui comença Ă croistre entre les gens de l'ost, si li desplot, par quoi il s'en parti, e fu une piĂšce en Surie, et puis s'en rĂąla en son paĂŻs. » Historiens des Croisades, t. II. VEst de Evades Empereur, liv. XXXII, chap. XV. Cf. Sanuto Secrcta fid. crue, lib. III, p. XI, cap. 8 dans Bong'.rs. 264 VIE DE s. FRANĂOIS rien, absolument rien, sinon que son sĂ©jour se prolongea plus longtemps qu'on ne s'y attendait. Des frĂšres qui avaient assistĂ© Ă la Portioncule, au chapitre gĂ©nĂ©ral de 1220 PentecĂŽte, 17 mai eurent le temps de venir en Syrie et d'y trouver encore François^ ; ils ne purent guĂšre y arriver que vers la fin de juin. Qu'avait-il fait pendant ces huit mois? Pourquoi n'Ă©tait-il pas allĂ© prĂ©sider le chapitre? Avait-il Ă©tĂ© malade ^ ? S'Ă©tait-il attardĂ© Ă quelque mission ? Les renseignements que nous avons sont trop peu de chose pour qu'on ose hasarder mĂȘme de simples conjectures. Angelo Glareno raconte que le Soudan d'Egypte, touchĂ© par ses prĂ©dications, ordonna que lui et tous ses frĂšres auraient libre accĂšs au Saint-SĂ©pulcre, sans avoir Ă verser aucun tribut^. BarthĂ©lĂ©my de Pise^ de son cĂŽtĂ©, dit incidemment que François Ă©tant allĂ© prĂȘcher Ă Antioche et dans les envi- rons, les BĂ©nĂ©dictins de l'abbaye de la Montagne-Noire ^\ Ă huit milles de cette ville, se firent en bloc recevoir dans l'Ordre, et rendirent leurs propriĂ©tĂ©s au Patriarche. On voit que ces deux indications sont bien pauvres, bien isolĂ©es. Encore la seconde ne doit-elle ĂȘtre acceptĂ©e que sous bĂ©nĂ©fice d'inventaire. Par contre, nous avons 1. Jord. chron. 11-14. 2. L'Ă©pisode des murmures de fr. LĂ©onard racontĂ© plus loin, donne quelque probabilitĂ© Ă cette hypothĂšse. 3. Trihul. Man. Laur. 9 b. Cf. 10 b. SepuĂŻcro Domini visitato festinat ad Christianorum terram. 4. Sur ce monastĂšre voir une lettre ad familiares de Jacques de Vitry, Ă©crite en 1216 et publiĂ©e en 1847 par le baron Jules de S. GĂ©nois au t. XIII des MĂ©moires de V AcadĂ©mie royale des sciences et des beaux-arts de Bruxelles 1849. Conform. 106 b 2 ; 114 a 2 ; Spec. 184. s. DOMINIQUE ET S. FRANĂOIS 265 les renseignements dĂ©taillĂ©s sur ce qui se passait en Italie durant l'absence de François. La chronique de rĂšre Jourdain, rĂ©cemment retrouvĂ©e et publiĂ©e, jette tout le jour dĂ©sirable sur le complot tramĂ© prĂ©cisĂ©ment par ceux qu'il avait chargĂ©s de le remplacer Ă la Portion- cule ; et cela, sinon de connivence avec Rome et le car- dinal protecteur, du moins sans leur opposition. Ces pĂ©ripĂ©ties avaient bien Ă©tĂ© racontĂ©es par AngeloGlareno, mais l'Ă©motion non dĂ©guisĂ©e que respirent tous ses Ă©crits et leur manque de prĂ©cision, suffisaient Ă les faire tenir en quarantaine par les critiques avisĂ©s. Comment penser que, du vivant mĂȘme de saint François, les vicaires qu'il avait instituĂ©s, profitaient de son Ă©loigne- ment pour bouleverser son Ćuvre? Comment le pape, qui durant cette pĂ©riode fut en sĂ©jour Ă Rieti, puis Ă Viterbe, comment Hugolin qui Ă©tait encore plus prĂšs, Ă PĂ©rouse, n'auraient-ils pas imposĂ© silence aux agi- tateurs ^? Aujourd'hui que tous ces faits reparaissent non plus dans un rĂ©cit oratoire et passionnĂ©, mais datĂ©s, brefs, prĂ©cis, tranchants, avec des allures de notes prises au jour le jour, il faut bien se rendre Ă l'Ă©vidence. Y a-t-il lieu de condamner bruyamment Hugolin et le pape? Je ne le crois pas ils jouĂšrent un rĂŽle qui n'est pas Ă leur honneur, mais leurs intentions Ă©taient Ă©videmment excellentes. Si le fameux aphorisme que la fin justifie les moyens est criminel quand on examine sa propre conduite, il est le premier devoir quand on juge celle des autres voici donc ces Ă©vĂ©nements. DĂšs le 25 juillet, un mois environ aprĂšs le dĂ©part de 1. A. SS. p. 619-620, 848, 851, 638. . 266 VIE DE s. FRANĂOIS François pour la Syrie, Hugolin qui Ă©tait Ă PĂ©rouse, octroyait aux Glarisses de Monticelli Florence, Sienne, PĂ©rouse et Lucques, ce que son ami avait si obstinĂ©- ment refusĂ© pour les FrĂšres, la rĂšgle bĂ©nĂ©dictine^. En mĂȘme temps, saint Dominique, revenu d'Espagne plein d'une ardeur nouvelle Ă la suite de sa retraite dans la grotte de SĂ©govie, et dĂ©cidĂ© Ă adopter pour son Ordre la rĂšgle de la pauvretĂ©, Ă©tait vivement encouragĂ© dans cette voie et comblĂ© de faveurs 2. Honorius III voyait en lui l'homme providentiel du moment, le rĂ©for- mateur de l'Ă©tat monastique ; aussi eut-il pour lui des prĂ©venances inouĂŻes, et alla par exemple jusqu'Ă lui adjoindre un groupe de moines appartenant Ă d'autres ordres, qui Ă©taient destinĂ©s Ă ĂȘtre comme ses lieu- tenants dans les tournĂ©es de prĂ©dications qu'il croirait devoir entreprendre, et Ă faire sous sa direction l'ap- prentissage de la prĂ©dication populaire^. Qu'Hugolin ait Ă©tĂ© l'inspirateur de tout cela, les bulles sont lĂ pour en tĂ©moigner. Diriger les deux ordres nouveaux est si bien alors sa pensĂ©e dominante qu'il Ă©lit domicile en consĂ©quence et qu'on le retrouve sans cesse Ă PĂ©rouse, c'est-Ă -dire Ă trois lieues de la Portioncule, ou Ă Bologne, le boulevard des Domi- nicains. Il devient Ă©vident maintenant que si la fraternitĂ© instituĂ©e par François fut vĂ©ritablement le fruit de ses i. V. Bulle. Sacrosancta du 9 dĂ©c. 1219, cf. celles du 19 sept. 1222 Sbaralea I, p. 3; 11 ss. ; Potthast 6179, 6879 a. b. c. 2. V. Potthast 6155, 6177, 6184, 6199, 6214, 6217, 6218, 6220, 6246. Voir aussi Chartularium Universitatis Par., t. I, p. 487. 3. Bulle Quia qui seminant du 12 mai 1220. RipoUi Bull. PrĆd., 1. 1, p. 10 Potthast 6249. s. DOMINIQUE ET S. FRANĂOIS 207 entrailles, la chair de sa chair, l'Ordre des FrĂšres PrĂȘcheurs Ă©mane de la papautĂ©, et que saint Dominique n'en est guĂšre que le pĂšre putatif. Ce caractĂšre a Ă©tĂ© exprimĂ© d'un mot par un des annalistes contemporains les plus autorisĂ©s, Burchard d'Ursperg {f 1226. Le pape, dĂŻi'ĂŻl, institua etconfirma l'Ordre des PrĂȘcheurs^.» François, s'acheminant vers l'Orient, avait pris pour compagnon spĂ©cial un frĂšre que nous n'avons pas encore rencontrĂ©, Pierre de Gatane ou dei Cattani. Ătait-il originaire de la ville de Catane? Rien ne l'indique d'une façon prĂ©cise. Il semble plus probable qu'il ait appartenu Ă la noble famille dei Cattani bien connue dĂ©jĂ Ă Fran- çois, et dont Orlando, comte de Ghiusi en ]asenlin, qui lui avait donnĂ© l'Alverne, Ă©tait un des membres. Quoi qu'il en soit, on ne peut le confondre avec le frĂšre Pierre qui prit l'habit dĂšs avril 1209, en mĂȘme temps que Bernard de Quintavalle, et qui mourut peu de temps aprĂšs. La tradition, en faisant de ces deux hommes un seul et mĂȘme personnage, n'y Ă©tait pas amenĂ©e seulement I. Mo7t. Germ. hist. Script., t. 23, p. 376. Ce passage est d'une importance extrĂȘme, car il rĂ©sume en quelques lignes la politique ecclĂ©siastique d'Honorius III. AprĂšs avoir parlĂ© des pĂ©rils dont les Hwniliati menaçaient l'Eglise, Burchard ajoute QuĆ volens corri- gere dominus papa ordinem Predicatorum instituit et conflr- mavit. Or, ces Humiliati Ă©taient un Ordre approuvĂ©, mais Burchard, en les mettant au rang des hĂ©rĂ©tiques Ă cĂŽtĂ© des Pauvres de Lyon, exprimait d'un mot les sentiments de la papautĂ© Ă leur Ă©gard ; elle avait pour eux une invincible rĂ©pugnance et ne voulant pas les frapper directement, elle cherchait Ă crĂ©er un dĂ©rivatif. On suivit vis-Ă -vis des FrĂšres Mineurs une tactique semblable, avec le surplus de prĂ©cautions qu'inspirait la saintetĂ© du fondateur et le prodigieux succĂšs de l'Ordre. Tout cela devint inutile lorsqu'en 1221 frĂšre Ălie devint vicaire de François, et surtout lorsqu'aprĂšs la mort de celui-ci, il eut toute la libertĂ© nĂ©cessaire pour diriger l'Ordre suivant les vues d'Hugolin devenu GrĂ©goire IX. 268 VIE DE s. FRANĂOIS par la similitude des noms, mais aussi par le penchant bien naturel d'augmenter le prestige de celui qui, de 1220 â 1221, devait jouer un grand rĂŽle dans la direc- tion de l'Ordre^. Lors de son dĂ©part pour l'Orient, François avait laissĂ© deux vicaires pour le remplacer, les frĂšres Matthieu de Narni et GrĂ©goire de Naples. Le premier Ă©tait spĂ©ciale- ment chargĂ© de rester Ă la Portioncule^ pour admettre les postulants 2. GrĂ©goire de Naples devait au contraire parcourir l'Italie, pour consoler les FrĂšres^. Les deux vicaires commencĂšrent aussitĂŽt Ă tout bou- leverser. On ne s'explique pas comment des hommes encore sous l'impression de leur premiĂšre ferveur pour une rĂšgle qu'ils avaient promis d'observer dans la plĂ©- nitude de leur libertĂ©, auraient pu songer Ă innover, s'ils n'avaient Ă©tĂ© poussĂ©s et soutenus en haut lieu. Mitiger le vĆu de pauvretĂ©, multiplier les obser- 1. 1 Gel. 25; Cf. A. SS., p. 581 ; Pierre de Catane avait le titre de docteur es lois, Jord. 11, ce qui ne cadre absolument pas avec ce qui est racontĂ© de fr. Pierre, 3 Soc. 28 et 29. Cf. Bon. 28 et 29. Spec. 5 b. ; Fior 2; Conform. 47; 52 b2. Petrus vir litteratus erat et nobilis. Jord. 12. 2. Nous ne savons rien d'autre sur lui sinon qu'il eut aprĂšs sa mort le don des miracles. Jord. 11 ; Conform. 62 a 1. 3. Ce n'Ă©tait pas un homme ordinaire; orateur et administrateur remarquable Eccl. 6, il fut ministre de France dĂšs avant 1224, et l'Ă©tait encore en 1240, grĂące au zĂšle avec lequel il avait adoptĂ© les idĂ©es de frĂšre Ălie. Il Ă©tait neveu de GrĂ©goire IX, ce qui ne laisse pas de jeter un jour sur les menĂ©es qui vont ĂȘtre racontĂ©es; aprĂšs avoir Ă©tĂ© emportĂ© par la disgrĂące d'Ălie, et condamnĂ© Ă la prison perpĂ©tuelle, il devint sur la fin de sa vie Ă©vĂȘque de Bayeux. Je note pour les fureteurs qu'Ă la Nationale de Paris se trouve le ma- nuscrit de deux de ses sermons. L'auteur n'y Ă©tant indiquĂ© que comme fr. Gr. min. on ne savait jusqu'ici de qui il s'agissait. Ces sermons ont Ă©tĂ© prĂȘches Ă Paris, le Jeudi et le Samedi saint. Ms. nouv. acq. lat. 338 f^s 148 v», 159. s. DOMINIQUE ET S. FRAxNGOIS 269 vances, tels furent les deux points sur lesquels se porta tout leur effort. En apparence, c'Ă©tait lĂ bien peu de chose, en rĂ©alitĂ© c'Ă©tait beaucoup, car c'Ă©tait une premiĂšre tentative de l'esprit ancien contre Fesprit nouveau. C'Ă©tait l'effort d'hommes faisant de la religion, inconsciemment, je veux le croire, une affaire d'observances et de rite, au lieu d'y voir, comme saint François, la conquĂȘte de cette libertĂ© qui nous affranchit de tout et de tous, et qui dĂ©cide chaque Ăąme Ă obĂ©ir Ă ce je ne sais quoi de divin et de mystĂ©rieux, qu'adorent les fleurs des champs, que bĂ©nissent les oiseaux du ciel, que loue la symphonie des astres et que JĂ©sus de Nazareth appelait Abba c'est-Ă -dire PĂšre. La premiĂšre RĂšgle Ă©tait excessivement simple en ce qui concernait les jeĂ»nes. Les frĂšres devaient faire maigre le mercredi et le vendredi ; ils pouvaient ajouter, mais seulement sur une autorisation spĂ©ciale de Fran- çois, le maigre du lundi et du samedi. Les vicaires et leurs adhĂ©rents compliquĂšrent cela d'une façon Ă©ton- nante. Au chapitre gĂ©nĂ©ral cĂ©lĂ©brĂ© en l'absence de François J7 mai 1220, ils dĂ©cidĂšrent 1° qu'en temps de gras, les frĂšres ne chercheraient pas Ă se procurer de viande, mais que si on leur en offrait spontanĂ©ment, ils la mangeraient; 2** que tous jeĂ»neraient le lundi, outre le mercredi et le samedi; 3° que le lundi et le samedi, on s'abstiendrait de laitage, Ă moins que par hasard les fidĂšles ne vinssent Ă en donner^. Ces tentatives tĂ©moignent aussi d'un effort pour imiter les anciens ordres, qui n'allait pas sans le vague espoir 1 Jord. 11. Cf. Spec. 34 b ; Fior. 4; Conform. 184 a 1. 270 VIE DE S. FRANĂOIS de se substituer Ă eux. FrĂšre Jourdain ne nous a conservĂ© que cette dĂ©cision du chapitre de 1220, mais les expressions dont il se sert montrent assez qu'elle fut loin d'ĂȘtre la seule, et que les mĂ©contents avaient voulu, tout comme les chapitres de Giteaux ou du Mont-Cassin, Ă©dicter de vĂ©ritables constitutions. Ces modifications de la RĂšgle ne passĂšrent cependant pas sans provoquer l'indignation d'une partie du cha- pitre un frĂšre lai s'en fit le messager Ă©mu, et partit pour l'Orient supplier François de revenir au plus tĂŽt prendre les mesures rĂ©clamĂ©es par les circonstances. Il y avait eu aussi d'autres causes de trouble FrĂšre Philippe, zĂ©lateur des Glarisses, s'Ă©tait hĂątĂ© de leur faire octroyer par Hugolin les privilĂšges dont il a Ă©tĂ© dĂ©jĂ question ^. Un certain frĂšre Jean de Conpello^ avait rĂ©uni un grand nombre de lĂ©preux des deux sexes, et Ă©crit une rĂšgle pour fonder avec eux un ordre nouveau. Il s'Ă©tait ensuite prĂ©sentĂ©, avec un cortĂšge de ces malheureux, au souverain pontife, pour obtenir son approbation. Bien d'autres tristes symptĂŽmes s'Ă©taient manifestĂ©s 1. Jord. 12. Cf. Bulle Sacrosancta du 9 dĂ©c. 1219. 2. Jord. 12. Faudrait-il lire peut-ĂȘtre de Campello? Il y a, Ă moitiĂ© chemin entre Foligno et SpolĂšte, une localitĂ© de ce nom. D'autre part, les 3 Soc. 35 indiquent l'entrĂ©e dans l'Ordre d'un Jean de Gapella qui devint dans la lĂ©gende le Judas franciscain. Invenit abusum capelle et ab ipsa denominatus est ab ordinc recedens factus leprosus laqueo ut Judas se suspendit. Conform. 104 a 1. Cf. Bernard de Besse, 96 a ; Spec. 2 ; Fior. 1. Tout cela est bien embrouillĂ©. Peut-ĂȘtre faut-il penser que Jean de Campello mourut bientĂŽt aprĂšs, et que, plus tard, lorsque les rĂ©cits de ces temps troublĂ©s furent oubliĂ©s, quelque frĂšre ingĂ©nieux expliqua la note d'infamie attachĂ©e Ă son souvenir, par une hy{ othĂšse Ă©cha- faudĂ©e sur son nom mĂȘme. s. DOMINIQUE ET S. FRANĂOIS 271 sur lesquels frĂšre Jourdain n'insiste pas; le bruit de la mort de François s'Ă©tait mĂȘme rĂ©pandu, si bien que tout l'Ordre Ă©tait troublĂ©, divisĂ©, et courait les plus grands pĂ©rils. Les sombres pressentiments que François semble avoir eus, Ă©taient donc dĂ©passĂ©s par la rĂ©alitĂ©^. Le mes- sager qui lui apporta ces tristes nouvelles, le trouva en Syrie, probablement Ă Saint- Jean d'Acre. Il s'embarqua aussitĂŽt avec Ălie, Pierre de Galane, CĂ©saire de Spire et quelques autres, pour revenir en Italie, sur un bateau qui faisait voile sur Venise, oĂč il put aisĂ©ment se trouver vers la fin de juillet. 4. Jord. 12, 13 et 14. CHAPITRE XIV La crise de l'Ordre i, Automne 1220. DĂšs son arrivĂ©e Ă Venise, François se renseigna encore plus exactement sur tout ce qui s'Ă©tait passĂ© et convoqua le chapitre gĂ©nĂ©ral Ă la Portioncule pour la Saint-Michel 29 septembre J2202. Son premier soin fut sans doute de rassurer son amie de Saint-Damien un court fragment de lettre qui nous a Ă©tĂ© conservĂ© porte la trace des tristes prĂ©occu- pations dont il Ă©tait rempli Moi, petit frĂšre François, je veux suivre la vie et la pauvretĂ© de JĂ©sus-Christ, notre trĂšs haut Seigneur, et de sa trĂšs sainte MĂšre, et persĂ©vĂ©rer en elle jusqu'Ă la fin ; et je vous supplie toutes et vous exhorte de persĂ©- vĂ©rer toujours dans cette trĂšs sainte vie et pauvretĂ©. Et prenez bien garde de ne vous en Ă©carter jamais sur les conseils ou sur les enseignements de qui que ce soit ^. i. Jord. 14; Tribul.,fo 10. 2. Toute autre date est impossible, puisque François renonça en plein chapitre Ă la direction de l'Ordre, au profit de Pierre de Ga- tane, et que celui-ci mourut le 10 mars 1221. 3. Ce trop court fragment se trouve au § VI de la RĂšgle des Damianites 9 aoĂ»t 1253 SpĂ©culum Morin, Tract. III, 226 b. LA CRISE DE l'ORDRE 273 Il y eut un long cri d'allĂ©gresse Ă travers toute l'Italie quand on connut ce retour; beaucoup de frĂšres zĂ©lĂ©s dĂ©sespĂ©raient dĂ©jĂ , car dans bien des provinces on avait commencĂ© Ă les persĂ©cuter ; aussi, lorsqu'ils apprirent que leur pĂšre spirituel Ă©tait vivant et qu'ils allaient le revoir eurent-ils une immense joie. De Venise, François se dirigea vers Bologne. Ce voyage fut marquĂ© par un incident oĂč se dĂ©note encore une fois sa malicieuse et fine bontĂ©. BrisĂ© par les Ă©motions autant peut-ĂȘtre que par les fatigues, il dut un jour renoncer Ă faire le trajet Ă pied. Il cheminait montĂ© sur un Ăąne, suivi de frĂšre LĂ©onard d'Assise, lorsqu'un regard lui fit deviner ce qui se passait dans le cĆur de son compagnon Mes parents, pensait le frĂšre, se seraient bien gardĂ©s de frayer avec Bernardone, et voilĂ que maintenant je suis obligĂ© de suivre Ă pied son fils. On juge de son Ă©tonnement, lorsqu'il entendit Fran- çois lui dire^ en descendant vivement de sa monture Prends vite ma place, il est fort inconvenant que tu me suives Ă pied, toi qui es issu d'un noble et puis- sant lignage. » Le pauvre LĂ©onard, bien confus, se jeta Ă ses pieds implorant son pardon^. A peine arrivĂ© Ă Bologne, François fut obligĂ© de sĂ©vir contre les relĂąchĂ©s. On se rappelle que l'Ordre ne devait rien possĂ©der, ni directement, ni indirectement. Les monastĂšres donnĂ©s aux FrĂšres ne devenaient pas leur propriĂ©tĂ© ; dĂšs que le propriĂ©taire les dĂ©sirait ou que toute autre personne cherchait Ă s'en emparer, on devait les cĂ©der sans la moindre rĂ©sistance or en ap- 1. 2 Gel. 2, 3 ; Bon. 162 ; Cf. Conform. 184 b 2 et G2 b 1. 274 VIE DE s. FRANĂOIS prochant de Bologne, il apprit la construction d'une maison qu'on appelait dĂ©jĂ la maison des frĂšres. Il en ordonna l'Ă©vacuation immĂ©diate, sans mĂȘme faire excep- tion pour les malades qui s'y trouvaient. Les frĂšres eurent alors recours Ă Hugolin qui Ă©tait prĂ©cisĂ©ment dans cette ville oĂč il venait de consacrer Notre-Dame de Rheno ^ il expliqua longuement Ă François que cette maison n'appartenait pas Ă l'Ordre, lui-mĂȘme s'en Ă©tant dĂ©clarĂ© le propriĂ©taire par des actes publics, et finit par le convaincre 2. La piĂ©tĂ© des Bolonais rĂ©servait a François un ac- cueil enthousiaste dont l'Ă©cho est parvenu jusqu'Ă nous J'Ă©tudiais Ă Bologne, moi Thomas de Spalato, archi- diacre de l'Ă©glise cathĂ©drale de cette ville, lorsqu'en l'an 1220, le jour de l'Assomption, je vis saint François qui prĂȘchait sur la place du Petit-Palais devant presque tous les gens de la citĂ©. Le thĂšme de son discours fut le sui- vant les anges, les hommes, les dĂ©mons. Il en parla avec tant de justesse et d'Ă©loquence que beaucoup de gens instruits qui Ă©taient lĂ , furent remplis d'admiration pour les paroles de cet homme si simple. Il n'avait cepen- dant pas les maniĂšres d'un prĂ©dicateur, ses allures Ă©taient plutĂŽt celles de la conversation le fond de son allocution tendait essentiellement Ă l'abolition des ini- mitiĂ©s et Ă la nĂ©cessitĂ© de conclure de pacifiques alliances. Ses vĂȘtements Ă©taient pauvres \ sa personne n'avait rien qui imposĂąt ; son visage rien de beau ; mais Dieu donna une si grande efficacitĂ© Ă ses paroles qu'il amena Ă la paix et Ă la concorde beaucoup de nobles dont la sauvage fureur ne s'arrĂȘtait pas mĂȘme devant 1. Sigonius OpĂ©ra, t. III, col. 220 ; Cf. Potthast 5516 et 6086. 2. 2 Gel. 3, 4; Spec, Il a ; Tribxil. 13 a ; Cojiform, 169 b 2. LA CRISE DE l'orDRE 275 l'effusion du sang. On eut pour lui une si grande dĂ©vo- tion qu'hommes et femmes couraient en foule aprĂšs lui, et qu'heureux s'estimait celui qui parvenait Ă toucher le bord de son vĂȘtement. » Est-ce alors que le cĂ©lĂšbre Accurse le Glossateur ^, chef de cette fameuse dynastie de jurisconsultes qui durant tout le treiziĂšme siĂšcle illustra l'UniversitĂ© de Bologne, accueillit les FrĂšres Mineurs dans sa villa de la Ricardina, Ă proximitĂ© de la ville 2? Nous ne savons. Il paraĂźt qu'un autre professeur, Nicolas dei Pepoli, entra aussi dans l'Ordre ^. Les Ă©lĂšves ne restaient naturellement pas en arriĂšre, et un certain nombre d'entre eux demandĂšrent l'habit. Tout cela constituait cependant un danger cette citĂ©, qui Ă©tait en Italie comme un autel consacrĂ© Ă la science du droit, allait exercer sur l'Ă©volution de l'Ordre la mĂȘme influence que Paris ; les FrĂšres Mineurs ne pouvaient pas plus s'y soustraire qu'on ne peut se soustraire Ă celle de l'air ambiant. François n'y sĂ©journa cette fois que fort peu de temps. Une antique tradition, dont ses biographies ne nous ont conservĂ© aucune trace, mais qui paraĂźt cependant tout Ă fait vraisemblable, raconte qu'Hugolin le conduisit passer un mois aux Gamaldules dans la retraite habitĂ©e jadis par saint Romuald, au milieu de ces forĂȘts du Gasentin qui sont au nombre des plus belles de l'Eu- rope, Ă quelques heures de marche de l'Alverne, 1. Mort en 1229. Cf. Mazzetti, Eepertorio di tutti i profcssori di Bologna, Bologne 1847, p. 11. 2. Voir Mon. Germ. hist. Script., t. 28, p. 635 et les notes. 3. Wadding, ann. 1220, n» 9. Cf. A. SS., p. 823. 276 VIE DE s. dont la croupe se dresse gigantesque, dominant tout l'horizon. On a vu combien François avait besoin de repos ; nul doute qu'il n'aspirĂąt aussi au recueillement, afin de bien arrĂȘter d'avance sa ligne de conduite au milieu des tristes conjonctures qui avaient provoquĂ© son retour^. Cependant le dĂ©sir de lui procurer un repos bien nĂ©cessaire, n'Ă©tait pour Hugolin qu'un but accessoire. Le moment d'agir avec vigueur lui paraissait venu. On peut se figurer aisĂ©ment ses rĂ©ponses aux plaintes de François Ne l'avait-on pas engagĂ© avec insistance Ă profiter des conseils du passĂ©, de l'expĂ©rience de ces fondateurs d'ordres qui n'ont pas Ă©tĂ© seulement des saints, mais d'habiles conducteurs d'hommes ; Hugolin lui-mĂȘme n'Ă©tait-il pas son meilleur ami, son dĂ©fenseur- nĂ©, et n'avait-il pas dĂ» cependant renoncer Ă cette influence Ă laquelle son amour pour les frĂšres, sa posi- tion dans l'Ăglise et son grand Ăąge lui donnaient cepen- dant tant de titres ? Mais non^ il avait fallu le laisser exposer inutilement ses disciples Ă tous les dan- gers, dans des missions aussi pĂ©rilleuses que sans rĂ©sultats ; et tout cela pourquoi ? Pour le plus futile des points d'honneur, parce que les FrĂšres Mineurs ne vou- laient pas avoir le plus petit privilĂšge. Ils n'Ă©taient pas hĂ©rĂ©tiques, mais ils troublaient l'Ăglise autant que des hĂ©rĂ©tiques. Que de fois ne lui avait-on pas rappelĂ© qu'une grande association a besoin, pour subsister, de rĂšglements prĂ©cis et dĂ©taillĂ©s? Tout cela avait Ă©tĂ© peine perdue ! Certes, son humilitĂ© ne faisait de doute pour personne, mais pourquoi ne pas la manifester, non 1. Sur ce sĂ©jour V. les autoritĂ©s indiquĂ©es par les A. SS., p. 847. LA CRISE DE L ORDRE 277 seulement dans le vĂȘtement et la maniĂšre de vivre, mais dans tous ses actes? Il croyait obĂ©ir Ă Dieu en dĂ©fendant son inspiration, mais l'Ăglise ne parle-t-elle pas au nom de Dieu ? les paroles de ses reprĂ©sentants ne sont-elles pas la parole de JĂ©sus se perpĂ©tuant sur la terre? il voulait ĂȘtre un homme Ă©vangĂ©lique, un homme apostolique, mais le meilleur moyen d'y parve- nir, n'Ă©tait-ce pas d'obĂ©ir au pontife romain ? au suc- cesseur de Pierre ? â Par un excĂšs de condescendance, on l'avait laissĂ© faire, et le rĂ©sultat Ă©tait la plus triste des leçons. Mais la situation n'Ă©tait pas dĂ©sespĂ©rĂ©e, il Ă©tait temps encore d'y apporter remĂšde ; pour cela il n'avait qu'Ă aller se jeter aux pieds du pontife, implorer sa bĂ©nĂ©diction, ses lumiĂšres et ses conseils. De pareils reproches entremĂȘlĂ©s des effusions d'amour et d'admiration de ce prĂ©lat, qui eut Ă un degrĂ© inouĂŻ le pathĂ©tique don des larmes, devaient jeter un trouble profond dans le cĆur dĂ©licat de François. Sa conscience lui rendait bon tĂ©moignage, mais modeste comme le sont les esprits supĂ©rieurs, il n'Ă©tait pas loin de penser qu'il avait eu bien des torts. Ce serait peut-ĂȘtre ici le lieu de rechercher le secret de l'amitiĂ© de ces deux hommes, qui reste si Ă©trange par certains cĂŽtĂ©s. Comment put- elle durer sans ombre jusqu'Ă la mort de saint François, alors que nous trouvons toujours Hugolin comme inspirateur du groupe qui compromet l'idĂ©al franciscain ? La rĂ©ponse Ă cette question est impossible. Le mĂȘme problĂšme se pose pour frĂšre Ălie, sans qu'on aperçoive davantage une rĂ©ponse satisfaisante. Les hommes qui ont le cĆur trĂšs aimant ne sauraient avoir l'intelligence tout Ă fait claire. Souvent ils se sentent fascinĂ©s par ceux qui sont 86 278 VIE DE s. FRANĂOIS le plus diffĂ©rents d'eux-mĂȘmes, et dans la poitrine des- quels ils ne sentent pas ces faiblesses fĂ©minines, ces rĂȘves bizarres, cette pitiĂ© presque maladive des ĂȘtres et des choses, cette soif mystique de la douleur qui est Ă la fois leur bonheur et leur tourment. Le sĂ©jour aux Gamaldules se prolongea jusqu'Ă la mi-septembre, et se termina Ă la satisfaction du cardinal. François Ă©tait dĂ©cidĂ© Ă aller tout droit trouver le pape, alors en sĂ©jour Ă Orvieto, et Ă lui demander Hugolin comme protecteur ofĂŻiciel destinĂ© Ă diriger l'Ordre. Un rĂȘve qu'il avait fait jadis lui revenait en mĂ©moire il avait vu une petite poule noire, qui malgrĂ© ses efforts ne pouvait abriter sous ses ailes toute sa couvĂ©e. La pauvre poule, c'Ă©tait lui; les poussins c'Ă©taient les frĂšres. Ce songe Ă©tait une indication providentielle lui ordonnant de leur chercher une mĂšre, sous les ailes de laquelle tous trouveraient place, et qui les dĂ©fendrait contre les oiseaux de proie. Il le crut du moins ^. Il se rendit Ă Orvieto, sans passer par Assise oĂč il aurait Ă©tĂ© obligĂ© de prendre des mesures quel- conques Ă l'Ă©gard des fauteurs de trouble, tandis qu'il devait s'en remettre purement et simplement au pape. Sa profonde humilitĂ© jointe au sentiment de culpabi- litĂ© qu'Hugolin avait Ă©veillĂ© en lui, suffit-elle Ă expli- quer son attitude devant le pape, ou faut-il croire qu'il eut le vague sentiment d'abdiquer? Qui sait si sa con- science ne lui murmurait pas dĂ©jĂ un reproche et ne lui 1. 2 Gel. 1. -16 ; Spec. 100 a-iOl b. LA GRISE DE l'ORDRE 279 rĂ©vĂ©lait pas l'inanitĂ© de tous les sophismes par lesquels on l'avait enlacĂ©. N'osant se prĂ©senter dans les appartements d'un si grand prince, il resta dehors devant la porte et attendit patiemment que le pape vĂźnt Ă sortir. Quand il sortit, saint François lui fit la rĂ©vĂ©rence et lui dit PĂšre Pape, que Dieu vous donne la paix. » â Que Dieu te bĂ©nisse, mon fils, rĂ©pondit-il ». â Seigneur, lui dit alors saint François, vous ĂȘtes grand et souvent absorbĂ© par de grandes affaires; de pauvres frĂšres ne peuvent pas venir vous trouver et vous parler aussi souvent qu'ils en au- raient besoin ; vous m'avez donnĂ© beaucoup de papes, donnez-m'en un seul auquel je puisse m'adresser quand besoin sera, et qui Ă votre place Ă©coute et discute mes afi'aires et celles de mon Ordre. » â Qui veux-tu donc que je te donne, mon fils?» â L'Ă©vĂȘque d'Ostie ». Et il le lui donna ^. Les confĂ©rences avec Hugolin recommencĂšrent donc; il accorda tout de suite Ă François quelques satisfac- tions le privilĂšge octroyĂ© aux Clarisses fut rapportĂ© ; Jean de Gonpello fut avisĂ© qu'il n'avait rien Ă espĂ©rer de la curie ; enfin on laissait Ă François la libertĂ© de composer lui-mĂȘme la RĂšgle de son Ordre. On ne lui Ă©pargna naturellement pas les conseils Ă ce sujet, mais il fut un point sur lequel la curie ne pouvait* pas attendre, et dont elle exigea l'application immĂ©diate l'obligation pour les postulants d'un an de noviciat. En mĂȘme temps fut lancĂ©e une bulle qui n'Ă©tait pas seulement destinĂ©e Ă publier cette ordonnance, mais surtout Ă marquer d'une façon solennelle le commence- 1. Jord. 14; Cf. 2 Gel. 1, 17; Spec, 102 ; 3 Soc. 63 et 56. 280 VIE DE S. FRANĂOIS ment d'une Ăšre nouvelle dans les rapports de l'Eglise et des Franciscains. La fraternitĂ© des PĂ©nitents ombriens devenait un ordre dans le sens le plus Ă©troit du mot. Honorius Ă©vĂȘque, serviteur des serviteurs de Dieu, Ă frĂšre François et aux autres prieurs ou custodes des FrĂšres Mineurs, salut et bĂ©nĂ©diction apostolique. Dans presque tous les ordres religieux il a Ă©tĂ© prudem- ment ordonnĂ© que ceux qui se prĂ©senteraient pour ob- server la vie rĂ©guliĂšre, feraient un essai d'un certain temps, durant lequel ils seraient, eux aussi, mis Ă rĂ©preuve, afin de ne laisser ni place ni prĂ©texte Ă des dĂ©marches inconsidĂ©rĂ©es. A ces causes, nous vous ordon- nons par les prĂ©sentes de n'admettre personne Ă faire profession avant une annĂ©e de noviciat ; nous dĂ©fendons qu'aprĂšs la profession aucun frĂšre puisse sortir de l'Ordre, ni que personne puisse retenir celui qui en sortirait. Nous dĂ©fendons aussi que sous votre habit on circule çà et lĂ sans obĂ©dience, et que l'on corrompe la puretĂ© de votre pauvretĂ©. Si quelques frĂšres avaient cette audace, vous auriez Ă leur infliger les censures ecclĂ©siastiques jusqu'Ă rĂ©sipiscence ^ 11 faut certes un euphĂ©misme bien caractĂ©risĂ© pour traiter de privilĂšge une pareille bulle. C'Ă©tait en rĂ©alitĂ© la mainmise de la papautĂ© sur les FrĂšres Mineurs. DĂ©sormais, par la force mĂȘme des choses, le maintien de François comme ministre gĂ©nĂ©ral devenait impossible. 1. Cum secundum. L'original est Ă Assise avec Datum apud Urbem Veterem X Kal. Oct. pont, nostri anno quinto 22 sept. 1220. C'est donc Ă tort que Sbaralea et Wadding la font dater de Viterbe, ce qui s'explique d'autant moins que toutes les bulles de cette Ă©poque sont datĂ©es d'Orvieto. Wadding, ann. 1220, 57. Sba- ralea, t. I, p. 6. Potthast 6361. LA CRISE DE L ORDRE 281 Il le sentait lui-mĂȘme. Le cĆur brisĂ©, l'Ăąme malade, il aurait, malgrĂ© tout, trouvĂ© dans la vigueur de son amour ces paroles, ces regards qui jadis tenaient lieu de rĂšgle, de constitutions, et donnaient Ă ses premiers compagnons l'intuition de ce qu'ils devaient faire et la force de l'accomplir; mais maintenant, Ă la tĂȘte de cette famille qu'il retrouvait tout Ă coup si diffĂ©rente de ce qu'elle avait Ă©tĂ© quelques annĂ©es auparavant, il fallait un administrateur, et il s'avouait tristement qu'il ne l'Ă©tait lui-mĂȘme Ă aucun degrĂ© ^. Ah ! dans son for intĂ©rieur, il sentait bien que l'an- cien idĂ©al Ă©tait le vrai, le bon ; mais il chassait ces pensĂ©es comme des tentations de l'orgueil. Les derniers Ă©vĂ©nements n'avaient pas Ă©tĂ© sans entamer quelque peu sa personnalitĂ© morale Ă force d'entendre parler d'obĂ©is- sance, de soumission, d'humilitĂ©, un certain obscur- cissement s'Ă©tait fait dans cette Ăąme si lumineuse; l'ins- piration ne lui arrivait plus avec la mĂȘme certitude qu'autrefois; le prophĂšte se prenait Ă trembler, Ă douter presque de lui-mĂȘme et de sa mission. Il cherchait anxieusement si dans son initiative il n'y aurait pas eu quelque vaine complaisance. Il se reprĂ©sentait par avance le chapitre qui allait s'ouvrir, les attaques, les critiques dont il serait l'objet, et s'efforçait de se persuader que s'il ne les subissait pas avec joie, il ne serait pas un vrai FrĂšre Mineur 2. Les plus belles vertus sont sujettes au scrupule, l'humilitĂ© parfaite plus que toute autre, et c'est ainsi que des hommes excellents, 1. 2 Gel. 3, 118; Ubertin, Arbor, V, 2; Spec. 26; 50; 130 b; CĂ»nform. 136 a 2 ; 143 a 2. 2. 2 Gel. 3, 83 ; Bon. 77. Il faut lire ce rĂ©cit dans les Conform. d'aprĂšs VAntiqua Legenda 142 a 2; 31 a 1 ; Spec. 43 b. 282 VIE DE s. FRANĂOIS pour Ă©viter de s'affirmer, trahissent saintement leurs convictions. Il rĂ©solut donc de remettre la direction de l'Ordre entre les mains de Pierre de Gatane. On voit que cette dĂ©cision n'eut rien de spontanĂ©, et le fait que ce frĂšre, docteur es lois, appartenait Ă la noblesse, accuse bien nettement la transformation de l'institut franciscain. On ignore si Hugolin assista au chapitre du 29 sep- tembre 1220, mais s'il n'y fut pas en personne, il s'y fĂźt sĂ»rement remplacer par quelque prĂ©lat chargĂ© de surveiller les dĂ©bats^. La bulle donnĂ©e huit jours aupa- ravant fut communiquĂ©e aux FrĂšres^ auxquels François annonça aussi qu'il allait Ă©laborer une rĂšgle nouvelle. 11 y eut Ă ce propos des confĂ©rences oĂč seuls les mi- nistres semblent avoir eu voix dĂ©libĂ©rative. On y arrĂȘta en principe les points essentiels de la nouvelle RĂšgle, en laissant Ă François le soin de leur donner Ă loisir la forme convenable. Rien ne rĂ©vĂšle mieux l'Ă©tat de dĂ©mo- ralisation auquel il Ă©tait arrivĂ©, que la dĂ©cision qui fut prise de laisser tomber un des passages essentiels de l'ancienne RĂšgle, un de ses trois fragments fondamen- taux, celui qui commençait par ces mots N'emportez rien avec vous^. De quelle maniĂšre s'y prit-on pour obtenir de François cette concession qu'il eiit regardĂ©e quelque temps au- paravant comme un reniement, comme le refus d'ac- cepter dans son intĂ©gritĂ© le message que JĂ©sus lui avait 1. Tribul, Man. Laur. 42b; man. Magl. 71 b. 2. Luc 9, 1-6. Tribul. 12 b Et fecerunt de rĂ©gula prima ministri rcmovere... Il faut que cela ait eu lieu au chapitre du 29 sept. 1220, puisque la suppression est faite dans la RĂšgle de 1221. LA, CRISE DE L ORDRE 283 adressĂ©? C'est le secret de l'histoire, mais on peut penser qu'il y eut alors dans sa vie une de ces tempĂȘtes morales qui enlĂšvent aux plus forts toutes leurs facultĂ©s, et ne laissent dans les cĆurs meurtris qu'une inĂ©nar- rable souffrance. Quelque chose de ces douleurs a passĂ© dans l'Ă©mou- vant rĂ©cit que les biographes nous ont laissĂ© de son ab- dication. DĂ©sormais, dit-il aux frĂšres, je suis mort pour vous ; mais voici frĂšre Pierre de Catane, auquel vous et moi nous obĂ©irons tous. » Et se prosternant devant lui, il lui promit obĂ©issance et soumission. Les frĂšres ne pou- vaient retenir leurs larmes et leurs gĂ©missements en se voyant en quelque sorte devenir orphelins, mais Fran- çois se leva et joignant les mains, les yeux levĂ©s au ciel Seigneur, dit-il, je vous rends cette famille que vous m'aviez confiĂ©e. Maintenant vous le savez, trĂšs doux JĂ©sus, je n'ai plus la force et les qualitĂ©s pour continuer Ă en prendre soin ; je la confie donc aux ministres. Qu'ils soient responsables devant Vous au jour du jugement, si quelque frĂšre par leur nĂ©gligence ou leur mauvais exemple, ou par un trop dur chĂątiment, venait Ă s'Ă©garer *. Les fonctions de Pierre de Gatane devaient durer fort peu de temps; il mourut le 10 mars 12'21*-. Sur cette pĂ©riode de quelques mois, les renseigne- 1. 2 Gel. 3, 81 ; Spec. 26; Conform, 175 b 1 ; 53 a ; Bon. 76 ; A. SS., p. 620. 2. L'Ă©pitaphe de son tombeau, qui existe encore Ă N. D. des Anges, porte cette date Voir Portioncula^ von P. Barnabas aus- dem Elsass. Rixheim 1884, p. 111. Cf. A. SS., p. 630. 284 VIE DE s. FRANĂOIS ments surabondent rien de plus naturel, puisque Fran- çois resta Ă la Portioncule pour s'acquitter de la tĂąche qui lui avait Ă©tĂ© confiĂ©e, et qu'il y vĂ©cut entourĂ© de frĂšres qui devaient plus tard se rappeler tous les traits dont ils furent tĂ©moins. Quelques-uns rĂ©vĂšlent la lutte dont son Ăąme Ă©tait le théùtre. DĂ©sireux de se montrer soumis, il se trouvait pourtant harcelĂ© du besoin de secouer toutes les chaĂźnes et de s'envoler comme autre- fois, pour ne vivre et ne respirer qu'en Dieu seul. Voici un souvenir bien naĂŻf, mais qui mĂ©riterait, semble-t-il, d'ĂȘtre plus connu ^. Un jour, un novice qui pouvait, mais non sans quelque peine, lire le psautier, obtint du ministre gĂ©nĂ©ral, c'est-Ă -dire du vicaire de saint François, la permission d'en avoir un. Cependant, comme il avait appris que saint François ne voulait pas que les FrĂšres eussent ni la cupiditĂ© de la science, ni celle des livres, il ne voulait avoir son psautier qu'avec son assentiment. Or, saint François Ă©tant venu au monastĂšre oĂč. Ă©tait le novice Mon PĂšre, lui dit-il, ce me serait une grande consolation d'avoir un psautier ; mais quoique le ministre gĂ©nĂ©ral m'y ait autorisĂ©, je ne voudrais pas l'avoir Ă votre insu.» â Regarde l'empereur Charles, lui rĂ©pondit saint François avec feu, Roland et Olivier et tous les Paladins, les valeureux hĂ©ros et les preux chevaliers, c'est en combattant les InfidĂšles, en peinant et en travaillant jusqu'Ă la mort qu'ils ont remportĂ© leurs fameuses victoires ! Les saints martyrs, eux aussi, ont voulu mourir pour la foi du Christ en pleine bataille ! Mais maintenant il y a beaucoup de gens qui prĂ©tendent, 1. Spec. 9 b; Arbcr. V, 3; Conform, 170 a 1 ; 2 Gel. 3, 124. Cf Ubertin, Archiv III, p. 75 et 177. LA CRISE DE l'ORDRE 285 en racontant simplement leurs prouesses, mĂ©riter la gloire et les honneurs. Oui, parmi nous aussi, il y en a beau- coup qui prĂ©tendent, en rĂ©citant et en prĂȘchant les Ćuvres des saints, recevoir gloire et honneur, comme s'ils les avaient faites eux-mĂȘmes ! » Quelques jours aprĂšs, saint François Ă©tait assis devant le feu, et le novice s'approcha de lui pour lui parler de nouveau de son psautier. Quand tu auras ton psautier, lui dit celui-ci, tu voudras avoir un brĂ©- viaire, et quand tu auras un brĂ©viaire, tu t'assiĂ©ras dans une chaire comme un grand prĂ©lat, et tu feras signe Ă ton compagnon Apportez-moi mon brĂ©viaire ! » Saint François avait dit cela avec beaucoup de vivacitĂ©, et prenant de la cendre, il la rĂ©pandit sur la tĂȘte du novice en rĂ©pĂ©tant VoilĂ le brĂ©viaire, voilĂ le brĂ©viaire» Plusieurs jours aprĂšs, saint François Ă©tait Ă la Por- tioncule et se promenait non loin de sa cellule prĂšs de la maison, sur le bord de la route, lorsque ce mĂȘme frĂšre revint l'entretenir de son psautier. Eh bien ! va, lui rĂ©pondit-il, tu n'as qu'Ă faire ce que te dira ton ministre.» AprĂšs ces paroles le novice s'en allait, mais François se mit Ă rĂ©flĂ©chir sur ce qu'il avait dit et tout Ă coup, appelant le frĂšre, il lui cria Attends-moi ! Attends- moi!» Lorsqu'il l'eut rejoint Reviens un peu sur tes pas, je te prie. OĂč Ă©tais-je lorsque je t'ai dit de faire pour le psautier ce que te dirait ton ministre?». Alors s'age- nouillant Ă l'endroit dĂ©signĂ© par le frĂšre, il se prosterna Ă ses pieds Pardon, mon frĂšre, pardon ! car celui qui veut ĂȘtre FrĂšre Mineur ne doit avoir rien d'autre que ses vĂȘtements.» Ce long rĂ©cit n'est pas seulement prĂ©cieux parce qu'il nous montre, jusque dans les plus petites choses, le conflit entre le François des premiĂšres annĂ©es, ne rele- 286 VIE DE s. FRANĂOIS vant que de Dieu et de sa conscience, et le François de 1220 devenu un moine soumis, dans un ordre approuvĂ© par l'Eglise romaine, mais aussi parce que c'est une de ces rares pages oĂč son style se marque avec un rĂ©alisme naĂŻf. Ces allusions aux romans de chevalerie et cette libertĂ© d'allures qui firent une partie de son succĂšs sur les masses, s'Ă©liminĂšrent de sa lĂ©gende avec une in- croyable rapiditĂ©. Ses fils spirituels n'ont peut-ĂȘtre pas eu honte de leur pĂšre Ă cet Ă©gard, mais ils s'attachent tellement Ă relever ses autres qualitĂ©s qu'ils oublient un peu trop le poĂšte, le troubadour, \ejoculator Domini. Des fragments, postĂ©rieurs de plus d'un siĂšcle Ă Thomas de Gelano, qui relatent des traits de ce genre, portent par cela mĂȘme un cachet d'authenticitĂ©. Il est assez difficile de se rendre un compte exact de la part que François prit encore Ă la direction de l'Ordre. Pierre de Gatane, et plus tard frĂšre Ălie, sont qualifiĂ©s tantĂŽt de ministres gĂ©nĂ©raux, tantĂŽt de vicaires, souvent aussi les deux termes se suivent comme dans le rĂ©cit prĂ©cĂ©dent. Il est bien probable que cette confusion dans les mots correspond Ă une confusion Ă©gale dans les faits. Peut-ĂȘtre mĂȘme a-t-elle Ă©tĂ© voulue. AprĂšs le chapitre de septembre 1220, les affaires de l'Ordre passent entre les mains de celui que François avait nommĂ© ministre gĂ©nĂ©ral, tandis que les frĂšres, ainsi que la papautĂ©, ne lui donnaient que le titre de vicaire. Il Ă©tait urgent pour la popularitĂ© des FrĂšres Mineurs que François conservĂąt une apparence d'autoritĂ©, mais la rĂ©alitĂ© du gouvernement lui avait Ă©chappĂ©. La pensĂ©e qu'il avait portĂ©e dans son sein jusqu'en J209, et enfantĂ©e alors dans la douleur, prenait main- tenant son vol, oubliant son berceau, comme ces fils de L V CRISE DE L ORDRE 287 nos entrailles que nous voyons tout Ă coup s'Ă©loigner de nous, sans que nous puissions nous y opposer, car c'est la la vie, mais non sans qu'il se produise en notre cĆur une sorte de dĂ©chirement. Mater dolorosa! Ah! ils reviendront sans doute s'asseoir avec piĂ©tĂ© au foyer paternel, peut-ĂȘtre mĂȘme auront-ils besoin, Ă une heure de dĂ©tresse morale, de venir se blottir comme autrefois dans le giron maternel, mais ces retours fugitifs, enfiĂ©- vrĂ©s, ne feront qu'aviver la blessure des pauvres parents, lorsqu'ils verront repartir d'un pas pressĂ© celui qui porte leur nom, mais ne leur appartient plus. CHAPITRE XV La RĂšgle de 12211. L'hiver de 1220â1221 fut surtout utilisĂ© par Fran- çois pour fixer par Ă©crit sa pensĂ©e. Jusque-lĂ il avait Ă©tĂ© trop homme d'action pour avoir pu songer beaucoup Ă se servir d'autre chose que de la parole vivante, mais dĂšs lors, ses forces Ă©puisĂ©es l'obligeaient de satisfaire, autrement que par des tournĂ©es d'Ă©vangĂ©lisation, son besoin de conquĂ©rir les Ăąmes. On a vu que le chapitre 1. Texte dans Firmamentum 10; Spec. 189; Spec. Morin. Tract. III, 2 b. M. Miiller {An/Ă nge a fait une Ă©tude de la RĂšgle de 1221, qui est un chef-d'Ćuvre de flair exĂ©gĂ©tique. Cependant s'il avait collationnĂ© mĂ©ticuleuseraent les divers textes, il serait arrivĂ© Ă des rĂ©sultats encore plus frappants, grĂące aux variantes qu'il aurait pu constater. Je n'en citerai qu'un exemple Texte adoptĂ© par Omnes fratres ubicunque sunt vel va- dunt, caveant sibi a malo vUu et frequen- lia muĂźierum et nullus cum eis cousilietur solus. Sacerdos honeste loqiiatur cum eis dando penitentiam vel aĂźiud spirituale consilium. Texte du SpĂ©culum 189 ss. Omnes /rates ubicunque sunt et vadunt, caveant se a malo visu et frequentia mu- Ăźierum et nullus cum eis concilietur aut per viam vadat solus aut ad viensam in una paropside comedat // Sacerdos hO' neste loquatur cum eis dando, ., etc. Ce passage suffit Ă montrer la supĂ©rioritĂ© du texte du SpĂ©culum qui s'impose aussi Ă d'autres Ă©gards, mais ce n'est pas ici le lieu d'entrer dans ces dĂ©tails. 11 est Ă©vident que cette phrase oĂč nous voyons les premiers frĂšres partager quelquefois le repas de leurs amies et manger dans leur Ă©cuelle n'est pas une interpolation pos- tĂ©rieure. LX KĂGLE DE 1221 289 du 29 septembre 1220 d'une part, et la bulle Cum se- cundum de l'autre, avaient par avance fixĂ© un certain nombre de points. Pour le reste, libertĂ© complĂšte lui avait Ă©tĂ© donnĂ©e, non pour faire une rĂ©daction dĂ©finitive et immuable, mais pour proposer ses idĂ©es. La rĂ©alitĂ© du pouvoir lĂ©gislatif avait passĂ© entre les mains des ministres ^. Ce que nous appelons la RĂšgle de 1221 n'est donc pas autre chose qu'une proposition de loi, soumise par un gouvernement reprĂ©sentatif Ă son parlement. Le chef du pouvoir la promulguera un jour, si bien modifiĂ©e et bouleversĂ©e que son nom en tĂȘte d'un pareil document ne prĂ©juge que dans une faible mesure, et d'une maniĂšre tout Ă fait indirecte, son opinion personnelle. Jamais homme n'a Ă©tĂ© moins capable que François de faire une rĂšgle. En rĂ©alitĂ©, celle de 1210, et celle qui fut solennellement approuvĂ©e par le pape le 29 novembre 1223, n'avaient guĂšre de commun que le nom. Dans la premiĂšre tout est vivant, libre, spontanĂ©; elle est un point de dĂ©part, une inspiration ; elle se rĂ©sume en deux phrases l'appel de JĂ©sus Ă l'homme Toi, viens et suis-moi^ » l'acte de l'homme ce il quitta tout et le suivit. » A la parole de l'amour divin, l'homme rĂ©pond par le don joyeux de lui-mĂȘme, et cela tout naturellement, par une sorte d'instinct. A ce degrĂ© de mysticisme, toute rĂ©gle- mentation n'est pas seulement inutile, elle est presque une profanation ; elle est tout au moins le symptĂŽme d'un doute. MĂȘme dans les amours terrestres, quand on s'aime vraiment, on ne se demande et on ne se promet rien. 1. Trihul. 12 b ; Spec. 54 b ; Arhor. V, 3 ; Spec. 8 b. 290 VIE DE S. FRANĂOIS La RĂšgle de j223 au contraire, est un contrat synal- lagmatique. Du cĂŽtĂ© divin, l'appel est devenu un ordre ; du cĂŽtĂ© humain, l'Ă©lan d'amour est devenu un acte de soumission, par lequel sera mĂ©ritĂ©e la vie Ă©ternelle. Il y a au fond de tout cela l'antinomie de la loi et de l'amour. Sous le rĂ©gime de la loi, nous sommes les mercenaires de Dieu, astreints Ă un travail pĂ©nible, mais rĂ©munĂ©rĂ© au centuple, et dont le salaire constitue un vĂ©ritable droit. Sous le rĂ©gime de l'amour, nous sommes les fils de Dieu, et ses collaborateurs; nous nous donnons Ă lui, sans calcul, sans espoir; nous suivons JĂ©sus, non parce que cela est bien, mais parce que nous ne pouvons pas faire autrement, parce que nous avons senti qu'il nous a aimĂ©s, et que nous l'aimons Ă notre tour. Une flamme intĂ©rieure nous entraĂźne irrĂ©sistiblement vers lui Et Spiritus et Sponsa dicunt Veni. Il Ă©tait nĂ©cessaire d'insister un peu sur l'antithĂšse de ces deux rĂšgles celle de 1210 seule est vraiment franciscaine. Celle de 1223 est indirectement l'Ćuvre de l'Ăglise, essayant de s'assimiler le mouvement nou- veau qu'elle transforme du mĂȘme coup et fait dĂ©vier complĂštement. Celle de 1221 marque une Ă©tape intermĂ©diaire. C'est la rencontre des deux principes, ou plutĂŽt des deux esprits; ils se rapprochent, ils se cĂŽtoient, mais ne se confondent pas; çà et lĂ il y a mĂ©lange, mais jamais combinaison, si bien que l'on peut sans peine sĂ©parer les divers Ă©lĂ©ments. Cette rencontre mĂȘme est le reflet exact de ce qui se passait dans l'Ăąme de François et de la rapide Ă©volution de l'Ordre. Il s'adjoignit, pour l'aider dans son travail, frĂšre LA RĂGLE DE 1221 291 GĂ©saire de Spire, qui devait lui servir surtout par sa connaissance approfondie des textes sacrĂ©s. Ce qui frappe tout d'abord, quand on jette les yeux sur celte RĂšgle de 12!21, c'est sa longueur extraordi- naire elle ne compte pas moins de dix pages d'in-folio, alors que celle de 1223 n'en aura plus que trois. En- levez-en les passages qui proviennent de la papautĂ© et ceux qui avaient Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s au chapitre prĂ©cĂ©dent par les ministres assemblĂ©s, vous l'aurez diminuĂ©e Ă peine d'une colonne, et il vous reste, non plus une rĂšgle, mais une sĂ©rie d'appels Ă©mus, oii le cĆur du pĂšre parle, non pour ordonner, mais pour convaincre, pour toucher, pour Ă©veiller au fond du cĆur de ses enfants l'instinct de l'amour. Tout cela est chaotique ou mĂȘme contradictoire*, sans aucun ordre, entremĂȘlĂ© de rayons de joie, de san- glots douloureux, d'espĂ©rances et de regrets. Ce sont des stances, oĂč la passion des Ăąmes parcourt tous les tons, passe par toutes les gammes, depuis les plus douces jusqu'aux plus viriles, depuis celles qui sont joyeuses et entraĂźnantes comme un coup de clairon, jusqu'Ă celles qui sont troublantes, Ă©touffĂ©es, comme une voix d'outre-tombe. Par le saint amour qui est Dieu, je prie tous les FrĂšres, tant les ministres que les autres, de mettre de cĂŽtĂ© tout obstacle, tout souci, toute prĂ©occupation, afin qu'ils puissent se consacrer entiĂšrement Ă servir, aimer et honorer le Seigneur Dieu, d'un cĆur pur, d'une intention sincĂšre, ce qu'il demande par -dessus tout. Ayons toujours en nous un tabernacle et une demeure i. Cf. cap. 17 et 21. 292 VIE DE s. FRANĂOIS pour celui qui est le Seigneur Dieu tout-puissant, PĂšre, Fils et Saint-Esprit, qui dit Veillez et priez en tout temps, afin que vous soyez trouvĂ©s dignes d'Ă©chapper Ă toutes ces choses qui arriveront, et de paraĂźtre debout devant le Fils de Thomme. » Tenons donc la vraie voie, la vie et la vĂ©ritĂ© et le saint Ăvangile de Celui qui a daignĂ©, pour nous, quitter son PĂšre, afin de nous manifester son nom, disant PĂšre, j'ai manifestĂ© votre nom Ă ceux que vous m'avez donnĂ©s, et les paroles que vous m'avez donnĂ©es, je les leur ai donnĂ©es. Ils les ont reçues et ils ont connu que je suis venu de vous, et ils ont cru que vous m'avez envoyĂ©. Je vous prie pour eux, non pour le monde, mais pour ceux que vous m'avez donnĂ©s, afin qu'ils soient un, comme nous ne sommes qu'un. Je dis ces choses Ă©tant encore dans le monde, afin qu'ils aient la joie en eux. Je leur ai donnĂ© vos paroles, et le monde les a haĂŻs, parce qu'ils ne sont pas du monde. Je ne vous demande pas de les enlever du monde, mais de les prĂ©server du mal. Sanctifiez-les par la vĂ©ritĂ©, votre parole est la vĂ©ritĂ©. Comme vous m'avez envoyĂ© dans le monde, je les ai aussi envoyĂ©s dans le monde, et je me sanctifie pour eux, afin qu'ils soient eux-mĂȘmes sanctifiĂ©s dans la vĂ©ritĂ©. Et je ne vous prie pas seulement pour eux, mais pour ceux qui, par leurs paroles, croiront en moi, afin qu'ils soient tous unis, et que le monde connaisse que vous m'avez envoyĂ©, et que vous les avez aimĂ©s comme vous m'avez aimĂ©. Je leur ferai connaĂźtre votre nom, afin que l'amour dont vous m'avez aimĂ© soit en eux, et que je sois en eux. » PkiĂȘke ; Dieu tout-puissant, trĂšs haut et souverain. PĂšre saint, Seigneur juste, roi du ciel et de la terre, nous vous LA. RĂGLE DE 1221 293 rendons grĂące Ă cause de vous-jnĂȘme, de ce que, par votre sainte volontĂ©, et par votre Fils unique et votre Saint-Esprit, vous avez créé toutes les choses spiri- tuelles et corporelles, et de ce qu'aprĂšs nous avoir faits Ă votre image et Ă votre ressemblance, vous nous aviez placĂ©s dans le paradis que nous avons perdu par notre pĂ©chĂ©. Et nous vous rendons grĂące de ce que, aprĂšs nous avoir créés par votre Fils, par cet amour qui est vĂŽtre et que vous avez eu pour nous, vous l'avez fait naĂźtre, vrai Dieu et vrai homme, de la glorieuse et bienheureuse Marie, toujours Vierge, et de ce que, par sa croix, son sang et sa mort, vous avez voulu nous racheter, nous pauvres captifs. Et nous vous rendons grĂące de ce que votre Fils doit revenir dans sa glorieuse majestĂ© pour envoyer au feu Ă©ternel les maudits, ceux qui n'ont point fait pĂ©nitence et ne vous ont point connu, et pour dire Ă tous ceux qui vous ont connu et vous ont adorĂ© et vous ont servi dans la pĂ©nitence Venez, vous qui ĂȘtes les bĂ©nis de mon PĂšre, recevez en partage ce royaume qui vous a Ă©tĂ© prĂ©parĂ© dĂšs la fondation du monde. » Et puisque nous, misĂ©rables et pĂ©cheurs, ne sommes pas dignes de vous nommer, nous demandons humblement Ă Notre Seigneur JĂ©sus-Christ, votre Fils bien aimĂ©, en qui vous avez mis votre bon plaisir, qu'il vous rende grĂące pour tout, en mĂȘme temps que le Saint-Esprit, le Paraclet, comme il vous plaira et comme il leur plaira ; nous l'en supplions lui qui peut tout devant vous, et par lequel vous avez fait pour nous de si grandes choses. AllĂ©luia. Et nous prions la glorieuse MĂšre', la bienheureuse Marie toujours Vierge, saint Michel, Gabriel, RaphaĂ«l et tous les chĆurs des Esprits bienheureux, les SĂ©ra- phins, les ChĂ©rubins, les TrĂŽnes, les Dominations, les PrincipautĂ©s et les Puissances, les Vertus et les Anges, 27 294 VIE DE s. FRANĂOIS les Archanges, Jean-Baptiste, Jean Ă©vangĂ©liste, Pierre, Paul, et les saints patriarches, les prophĂštes, les saints Innocents, les ApĂŽtres, les EvangĂ©listes, les Disciples, les Martyrs, les Confesseurs, les Vierges, les bienheu- reux, Elie et Enoch, et tous les saints qui furent, qui seront et qui sont, nous les prions humblement, pour Tambour de vous, de vous rendre grĂące, comme il vous plaĂźt, pour ces choses, Ă vous Dieu souverain, vrai, Ă©ternel et vivant, ainsi qu'Ă votre Fils, notre trĂšs saint Seigneur JĂ©sus-Christ, et Ă l'Esprit Saint, le consolateur, durant les siĂšcles des siĂšcles. Amen. AllĂ©luia. Et nous supplions tous ceux qui veulent servir le Seigneur Dieu, dans le sein de l'Eglise catholique et apostolique, tous les prĂȘtres, les diacres, les sous-diacres, les acolytes et les exorcistes, les lecteurs, les porliers, tous les clercs, tous les religieux et toutes les religieuses ; tous les enfants et les petits, les pauvres et les exilĂ©s, les rois et les princes, les ouvriers et les laboureurs, les serviteurs et les maĂźtres; les vierges, les continents et les mariĂ©s, les laĂŻques hommes et femmes, tous les en- fants, les adolescents, les jeunes gens et les vieillards, les malades et les bien portants, les petits et les grands, les peuples de toute tribu et de toute langue et de toute nation, tous les hommes de quelque partie de la terre que ce soit, qui sont ou qui seront, nous les prions et supplions, nous tous FrĂšres Mineurs, serviteurs inutiles, que tous ensemble, d'un commun accord nous persĂ©vĂ©- rions dans la vraie foi et dans la pĂ©nitence^ car en dehors de cela personne ne peut ĂȘtre sauvĂ©. Aimons tous, de tout notre cĆur, de toute notre Ăąme, de toute notre pensĂ©e, de toute notre force, de toute notre intelligence, de toute notre vigueur, de tout notre effort, de toute notre affection, de toutes nos entrailles, de tous nos dĂ©sirs et de. toutes nos volontĂ©s, le Seigneur LA RĂGLE DE 1221 295 Dieu qui nous a donnĂ© tout son corps, toute son Ăąme, toute sa vie, et nous les donne encore Ă tous, chaque jour. Il nous a créés, il nous a sauvĂ©s par sa seule misĂ©ri- corde il a Ă©tĂ© et il est encore plein de bontĂ© pour nous, pour nous mĂ©chants et misĂ©rables, pourris et fĂ©tides, in- grats, ignorants, mauvais. Ne dĂ©sirons donc rien d'autre, ne veuillons rien d'autre, que rien d'autre ne nous plaise ou n'ait d'attrait pour nous, sinon le CrĂ©ateur, le RĂ©- dempteur, le Sauveur, seul et vrai Dieu, qui est plein de bien, qui est tout bien, qui est le vrai et le souverain bien, qui seul est bon, pieux et dĂ©bonnaire, suave et doux, qui seul est saint, juste, vrai, droit, qui seul a la bĂ©nignitĂ©, l'innocence et la puretĂ©; de qui, par qui et en qui est tout le pardon, toute la grĂące, toute la gloire de tous les pĂ©nitents, de tous les justes et de tous les saints qui se rĂ©jouissent dans le ciel. Que plus rien donc n'empĂȘche, que plus rien ne sĂ©pare, que plus rien ne retarde, et que tous, tant que nous sommes, en tout lieu, Ă toute heure, en tout temps, chaque jour et sans cesse, nous croyions vĂ©ritablement et humblement. Ayons dans le cĆur, aimons, adorons, servons, louons, bĂ©nissons, glorifions, exaltons, magni- fions, remercions le Dieu trĂšs haut, souverain, Ă©ternel, TrinitĂ© et UnitĂ©, PĂšre et Fils et Saint-Esprit, CrĂ©ateur de tous et de ceux qui croient et espĂšrent en lui, et de ceux qui l'aiment. Il est sans commencement et sans fin, immuable et invisible, inexprimable, ineffable, incomprĂ©- hensible, insaisissable, bĂ©ni, louĂ©, glorieux, exaltĂ©, sublime, trĂšs haut, suave, aimable, dĂ©lectable et toujours digne d'ĂȘtre dĂ©sirĂ© par- dessus tout dans tous les siĂšcles des siĂšcles. Amen. Ces naĂŻves rĂ©pĂ©titions n'ont-elles pas un charme mystĂ©rieux qui s'insinue dĂ©licieuSiement jusqu'au fond 296 VIE DE s. FRANĂOIS du cĆur? N'y a-t-il pas lĂ une sorte de sacrement dont les paroles ne sont que le vĂ©hicule grossier? François se rĂ©fugie en Dieu, comme l'enfant va se jeter dans le sein de sa mĂšre et dans l'incohĂ©rence de sa faiblesse et de sa joie, lui balbutie tous les mots qu'il sait, et par lesquels il ne veut que rĂ©pĂ©ter l'Ă©ternel je suis Ă toi» de l'amour et de la foi. Il y a lĂ aussi quelque chose qui rappelle, non seule- ment par les citations, mais surtout par l'inspiration mĂȘme de la pensĂ©e, ce qu'on a nommĂ© la priĂšre sacer- dotale du Christ. L'apĂŽtre de la pauvretĂ© y apparaĂźt comme soulevĂ© entre ciel et terre par la violence de son amour, consacrĂ© sacrificateur d'un culte nouveau par l'onction intĂ©rieure et irrĂ©sistible de l'Esprit. Il n'immole pas, comme le prĂȘtre du passĂ©, il s'immole, et porte dans son cĆur toutes les douleurs de l'humanitĂ©. Autant ces paroles sont belles au point de vue mys- tique, autant elles correspondent peu Ă ce qu'on attend d'une rĂšgle; elles n'en ont ni la prĂ©cision, ni les formes brĂšves et impĂ©ratives. Les transformations qu'elles allaient subir, pour devenir le code de 1223, Ă©taient donc fatales, Ă©tant donnĂ© l'intervention dĂ©finitive de l'Eglise de Rome pour diriger le mouvement franciscain. Il est probable que ce projet de rĂšgle, tel que nous l'avons aujourd'hui, est celui qui a Ă©tĂ© distribuĂ© au chapitre de la PentecĂŽte de 1221. Les variantes, parfois capitales, que l'on trouve entre les divers textes, peuvent n'ĂȘtre que la trace de corrections proposĂ©es par les ministres provinciaux. Une fois admise l'idĂ©e de considĂ©rer ce document comme un projet, on est bien vite amenĂ© Ă penser qu'il avait dĂ©jĂ subi une premiĂšre rĂ©vision rapide, une sorte d'Ă©lagage, oii l'autoritĂ© LA IIĂGLE DE 1221 297 ecclĂ©siastique aura fait disparaĂźtre les dispositions en contradiction flagrante avec ses projets sur l'Ordre. Si l'on se demande qui a pu faire ces retranchements, un nom vient aussitĂŽt aux lĂšvres, celui d'Hugolin. Il en critiqua les proportions exagĂ©rĂ©es, le manque d'unitĂ© et de prĂ©cision. Plus tard, on raconta que François avait vu en songe une multitude de frĂšres affamĂ©s venir Ă lui, sans qu'il fĂ»t capable de les rassasier, parce qu'il ne trouvait autour de lui que d'innombrables miettes de pain qui se perdaient entre ses doigts. Alors une voix vint du ciel lui disant François, de toutes ces miettes fais une hostie avec laquelle tu nourriras ces affamĂ©s^.» Il n'est guĂšre hasardĂ© de penser que c'est lĂ l'Ă©cho imagĂ© des confĂ©rences qui eurent lieu alors entre François et le cardinal ; celui-ci put lui suggĂ©rer, par cette comparaison, les dĂ©fauts essentiels de son projet. Tout cela se passa sans doute pendant le sĂ©jour de François Ă Rome, au commencement de J22i. Avant d'y arriver, il faut jeter un coup d'Ćil sur les analogies d'inspiration et mĂȘme de style, qui unissent la RĂšgle de 1221 Ă une autre des Ćuvres de saint Fran- çois, celle qui est connue sous le titre d'Admonitions^, C'est une sĂ©rie d'avis spirituels sur la vie religieuse, intimement unis, pour le fond et pour la forme, Ă l'Ćuvre qui vient d'ĂȘtre examinĂ©e. Le son de voix 1. 2 Gel. 3, 136. 2. Voir ci-dessus p. XXXIX, texte dans le Firmamcntum 19 ss. ; SpĂ©culum Morin, tract. III, 214 a ss. ; Cf. Conform. 137 ss. 298 VIE DE s, FRANĂOIS y est si parfaitement le mĂȘme qu'on est tentĂ© d'y voir des lambeaux du projet original, retranchĂ©s comme Ă©tant des longueurs, peu Ă leur place dans une rĂšgle. Quoi qu'il en soit de cette hypothĂšse, nous retrouvons dans les Admonitions toutes les prĂ©occupations dont l'Ăąme de François Ă©tait assaillie Ă cette heure incertaine et troublĂ©e. Quelques-uns de ces avis ressemblent Ă des fragments de journal intime. On l'y voit chercher, avec la naĂŻvetĂ© de l'humilitĂ© parfaite, des raisons pour se soumettre, pour renoncer Ă ses idĂ©es, sans qu'il puisse y parvenir tout Ă fait. Il s'y rĂ©pĂšte Ă lui-mĂȘme les exhortations qu'on lui faisait; on y sent l'effort pour comprendre et admirer le moine idĂ©al qu'Hugohn et l'Ăglise lui proposaient en exemple. Le Seigneur dit dans l'Evangile Celui qui ne renoncera pas Ă tout ce qu'il possĂšde, ne peut ĂȘtre mon disciple. Et celui qui aura sauvĂ© sa vie la perdra.» On renonce Ă tout ce qu'on possĂšde, et on perd sa vie quand on se remet entiĂšrement entre les mains de son supĂ©- rieur pour lui obĂ©ir.... Et quand l'infĂ©rieur voit des choses qui seraient meilleures ou plus utiles pour son Ăąme que celles que le supĂ©rieur lui ordonne, qu'il fasse Ă Dieu le sacrifice de sa volontĂ©. » On pourrait croire, en lisant cela, que François va se ranger du cĂŽtĂ© de ceux pour lesquels la soumission Ă l'autoritĂ© ecclĂ©siastique est l'essence mĂȘme de la religion. Mais non; ici mĂȘme son vrai sentiment ne parvient pas a s'effacer, il entremĂȘle ses paroles de parenthĂšses et d'incidentes bien timides, mais qui rĂ©vĂšlent le fond de sa pensĂ©e et finissent toujours par dĂ©signer la LA RĂGLE DE 1221 299 conscience individuelle comme juge en dernier res- sorte Tout ceci dit assez comment il faut se reprĂ©senter les instants oĂč son Ăąme blessĂ©e soupira aprĂšs l'obĂ©issance passive, dont la formule perinde ac cadaver. remonte paraĂźt-il bien au delĂ de la Compagnie de JĂ©sus. Ce furent les instants de dĂ©faillance oĂč l'inspiration se taisait. Un jour il Ă©tait assis avec ses compagnons, lorsqu'il se mit Ă gĂ©mir et Ă dire Il y a Ă peine un religieux sur toute la terre qui obĂ©isse parfaitement Ă son supĂ©- rieur. » Ses compagnons trĂšs Ă©tonnĂ©s lui dirent Expli- quez-nous donc, PĂšrC; quelle est la parfaite et souve- raine obĂ©issance.» Alors comparant celui qui obĂ©it Ă un cadavre, il rĂ©pondit Prenez un corps mort, et posez- le oĂč vous voudrez, il ne fera aucune rĂ©sistance ; quand il sera Ă une place, il ne murmurera pas ; quand vous l'en enlĂšverez, il ne rĂ©clamera pas; mettez-le sur une chaire, il ne regarde pas au-dessus, mais au-dessous de lui ; enveloppez le de pourpre, il en pĂąlira double- ment 2. » Ce soupir vers l'obĂ©issance cadavĂ©rique tĂ©moigne de quels ravages son Ăąme avait Ă©tĂ© dĂ©solĂ©e; c'est, dans le domaine moral, l'analogue de l'appel au nĂ©ant des grandes douleurs physiques. 1. Cum facit subditus voluntatem {prĆlati dummodo hene- facit vera obedientia est. Admon. Illy Conform. 139 a 2. â Si vero prĆlatus subdito aliquid contra animam prĆnpiat licet ei non obediat tamen ipsum non dimittat. Ibid. â Nullus tenetur ad obedientiam in eo ubi committitur delictum vel peccatum. Epist. 11. 2. 2 Gel. 3, 83 ; Spec. 29 b ; Conform. 176 b 1 ; Bon. 77. 300 VIE DE S. FRANĂOIS Il est du reste absolument isolĂ©. Partout ailleurs l'obĂ©issance franciscaine est l'obĂ©issance vivante, active, joyeuse^. Il allait jusqu'au bout dans cette voie et considĂ©- rait comme saintes les rĂ©voltes dictĂ©es par la con- science. Un jour, dans les derniĂšres annĂ©es de sa vie, un frĂšre d'Allemagne vint le voir, et aprĂšs s'ĂȘtre longuement entretenu avec âą lui de la pure obĂ©issance Je te demande une grĂące, lui dit-il, c'est que, si les FrĂšres venaient Ă ne plus vivre selon la RĂšgle, tu me permettes de me sĂ©parer d'eux, seul ou avec quelques autres, pour l'observer dans sa plĂ©nitude. » A ces mots, François eut une grande joie Sache, dit-il, que le Christ autorise aussi bien que moi ce que tu viens de demander, » et lui imposant les mains ; Tu es prĂȘtre pour l'Ă©ternitĂ©, ajouta-t-il, selon l'ordre de Melchi- sĂ©dech ! » ^ Nous avons un souvenir encore plus touchant de sa sollicitude Ă sauvegarder l'indĂ©pendance spirituelle de ses disciples c'est un billet a frĂšre LĂ©on^. Celui-ci, trĂšs alarmĂ© du nouvel esprit qui rĂ©gnait dans l'Ordre, s'en Ă©tait ouvert Ă son maĂźtre, et lui avait sans doute de- mandĂ© Ă peu prĂšs la mĂȘme autorisation que le frĂšre d'Allemagne. AprĂšs un entretien oĂč il lui avait rĂ©pondu 1. Per caritatem spiritus voluntarii serviant et obediant invicem. Et hĆc est vera et sancta obedientia. Reg. 1221, V. 2. Tribut. Man. Laur. 14 b ; Spec. 125 a ; Conform. 107 b 1 ; 184 bl. 3. Wadding le donne {epist. XVI d'aprĂšs l'autographe conservĂ© dans le trĂ©sor des Conventuels de SpolĂšte. L'authenticitĂ© de ce morceau est Ă©vidente. LA RĂGLE DE 1221 301 de vive voix, François, pour ne laisser subsister aucune espĂšce de doute ou d'hĂ©sitation dans l'esprit de celui qu'il avait surnommĂ© sa petite brebis du bon DieUj pecorella di Dio, lui Ă©crivit encore FrĂšre LĂ©oD, ton frĂšre François te souhaite paix et salut. Je te rĂ©ponds oui, mon fils, comme une mĂšre Ă son enfant. Ce mot rĂ©sume tout ce que nous avons dit en cheminant, ainsi que tous mes conseils. Si tu as besoin de venir me trouver pour me demander conseil, je suis d'avis que tu le fasses. Quelle que soit la maniĂšre dont tu penses pouvoir plaire au Seigneur Dieu, suivre ses traces, et vivre dans la pauvretĂ©, faites-le *, Dieu vous bĂ©nira, et je vous j autorise. Et s'il Ă©tait nĂ©cessaire, pour ton Ăąme ou pour ta consolation, que tu vinsses me voir ou si tu le dĂ©sirais, mon LĂ©on, viens. A toi dans le Christ. Nous voilĂ , certes, bien loin du cadavre de tout Ă l'heure. Il serait superflu de nous arrĂȘter aux autres admoni- tions. Ce sont pour la plupart des rĂ©flexions inspirĂ©es par les circonstances. Les conseils sur l'humilitĂ© y re- viennent, avec une frĂ©quence qu'expliquent Ă la fois les prĂ©occupations personnelles de l'auteur et la nĂ©cessitĂ© de rappeler Ă ses frĂšres l'essence mĂȘme de leur pro- fession. Le sĂ©jour de saint François Ă Rome, lorsqu'il alla, dans les premiers mois de 1221, prĂ©senter son projet Ă 1. Ce jiluriel qui a Ă©tonnĂ© Wadding montre bien que frĂšre LĂ©on avait parlĂ© au nom d'un groupe. 302 VIE DE s. FRANĂOIS Hugolin, fut marquĂ© par un nouvel effort de ce dernier pour le rapprocher de saint Dominique ^. Le cardinal Ă©tait alors Ă l'apogĂ©e de ses succĂšs. Tout lui avait rĂ©ussi. Sa voix n'Ă©tait pas toute-puissante seu- lement dans les affaires de l'Ăglise, mais aussi dans celles de l'Empire. FrĂ©dĂ©ric II qui avait l'air de cher- cher sa voie, et dans les pensĂ©es duquel germaient des rĂȘves de rĂ©formation religieuse et le dĂ©sir de mettre son pouvoir au service de la vĂ©ritĂ©, le traitait en ami, et parlait de lui avec une admiration sans bornes 2. Dans ses rĂ©flexions sur les remĂšdes Ă apporter aux maux de la chrĂ©tientĂ©, le cardinal en vint Ă penser que l'un des plus efficaces serait la substitution d'Ă©vĂȘques pris dans les deux ordres nouveaux Ă l'Ă©piscopat fĂ©odal, recrutĂ© presque toujours sur place, dans des familles oĂč les dignitĂ©s ecclĂ©siastiques Ă©taient, pour ainsi dire, hĂ©rĂ©di- taires. De pareils Ă©vĂȘques manquaient d'ordinaire des deux qualitĂ©s essentielles d'un bon prĂ©lat, aux yeux d'Hugolin le zĂšle religieux et le zĂšle ecclĂ©siastique. 1. Cette date, pour de nouveaux rapports entre eux, ne paraĂźt pas pouvoir ĂȘtre contestĂ©e, quoiqu'elle n'ait jamais Ă©tĂ© proposĂ©e ; il s'agit, en effet, de trouver une Ă©]oque oĂč ils aient pu se rencontrer tous les trois Ă Rome 2 G2I. 3, 86 ; Spec. 27 a, entre le 22 dĂ©c. 1216 approbation des Dominicains, et le 6 aoĂ»t 1221 mort de Do- minique. Il ne reste que deux pĂ©riodes possibles les premiers mois de 1218 Potthast 5739 et 5747 et l'hiver de 1220-1221. A tout autre moment, l'un des trois interlocuteurs se trouve loin de Rome. On sait au contraire qu'Hugolin Ă©tait Ă Rome dans l'hiver de 1220-1221 lluillard-BrĂ©holles, Hist. dipl. Il, p. 48, 123, 142. Cf. Potthast 6589. â Pour Dominique V. A. SS. Aug. t. I, p. 503. â La date la plus tardive s'impose, car Hugolin ne pouvait offrir des prĂ©latures aux FrĂšres Mineurs avant leur approbation explicite 11 juin 1219 ; et cette offre n'avait de sens vis-Ă -vis des Domini- cains qu'aprĂšs l'essor dĂ©finitif de leur Ordre. 2. Voir les lettres impĂ©riales du 10 fĂ©vrier 1221 Huillard- BrĂ©holles, t. II, p. 122-127. LV RĂGLE DE 1221 303 Il pensait donc que les FrĂšres PrĂȘcheurs et les FrĂšres Mineurs n'auraient pas seulement les vertus qui man- quaient aux autres, mais qu'ils seraient entre les mains de la papautĂ©, une hiĂ©rarchie fortement centralisĂ©e, vrai- ment catholique, toute dĂ©vouĂ©e aux intĂ©rĂȘts gĂ©nĂ©raux de l'Ăglise. Les difficultĂ©s que l'on aurait du cĂŽtĂ© des chapitres qui Ă©lisaient les Ă©voques, ainsi que du cĂŽtĂ© du haut clergĂ© sĂ©culier, seraient balancĂ©es par l'enthou- siasme du peuple pour des pasteurs dont la pauvretĂ© rappellerait la primitive Eglise. A la fin des entreliens qu'il eut avec François et Dominique, il leur communiqua quelques-unes de ces idĂ©es, et leur demanda leur avis sur l'Ă©lĂ©vation de leurs frĂšres aux prĂ©latures. Il y eut une pieuse contestation entre les deux saints pour savoir lequel rĂ©pondrait le premier. Enfin Domi- nique dit simplement qu'il prĂ©fĂ©rait voir ses compagnons rester tels qu'ils Ă©taient. Son tour venu, François montra que le nom mĂȘme de son institut rendait la chose impossible Si mes frĂšres ont Ă©tĂ© appelĂ©s Minores, dit-il, ce n'est pas pour devenir Majores, Si vous voulez qu'ils fructifient dans l'Eglise de Dieu, laissez-les, et maintenez-les dans l'Ă©tat dans lequel Dieu les a appelĂ©s. Je vous prie, mon PĂšre, ne faites pas que leur pauvretĂ© leur devienne un motif d'orgueil, et ne les Ă©levez pas Ă des prĂ©latures qui les porteraient Ă l'insolence vis-Ă -vis des autres^.» La politique ecclĂ©siastique suivie par les papes devait rendre cet avis des deux fondateurs tout Ă fait inutile 2. 1. 2 Gel. 3, 86; Bon. 78; Spec. 27 b. 2. V. K. Eubel Die BischOfe^ Cardinale und Pupstc, aus dem Minoritenorden bis 1305. In-8", 1889. 304 VIE DE s. FRANĂOIS François et Dominique se sĂ©parĂšrent pour ne plus se revoir. Le MaĂźtre des FrĂšres PrĂȘcheurs se mit peu de temps aprĂšs en route pour Bologne oĂč il succomba le 6 aoĂ»t suivant, et François regagna la Portioncule oĂč Pierre de Gatane venait de mourir 10 mars 1221. ]1 le remplaça Ă la tĂȘte de l'Ordre par frĂšre Elie. Hugolin n'Ă©tait sans doute pas Ă©tranger Ă ce choix. EmpĂȘchĂ© par ses fonctions de lĂ©gat, il ne put se rendre au chapitre de la PentecĂŽte 30 mai 1221 ^. Il y fut remplacĂ© par le cardinal Reynerio^, qui vint accompagnĂ© par plusieurs Ă©vĂȘques et par des moines de divers ordres^. Il s'y trouva environ trois mille frĂšres, mais l'empressement des gens des environs Ă apporter des provisions fut si grand, qu'aprĂšs sept jours de session, il fallut en rester encore deux, pour consommer tout ce qui avait Ă©tĂ© donnĂ©. Les sĂ©ances furent prĂ©si- dĂ©es par frĂšre Ălie, aux pieds duquel Ă©tait assis Fran- çois qui le tirait par la tunique quand il avait quelque chose Ă faire dire aux frĂšres. FrĂšre Jourdain de Giano, qui Ă©tait au nombre des assistants, nous a gardĂ© le souvenir de tous ces dĂ©tails et du dĂ©part d'un groupe de frĂšres pour l'Allemagne. Ils furent placĂ©s sous la direction de GĂ©saire de Spire, dont la mission rĂ©ussit au delĂ de toute attente. Dix- huit mois aprĂšs, lorsqu'il revint en Italie, dĂ©vorĂ© du dĂ©sir de revoir saint François, les villes de Wurzbourg, 1. 11 Ă©tait dans l'Italie du Nord. V. Begistri Doc. 17-28. 2. Reynerius , cardinal-diacre du titre de s! M. in Cosmedin, Ă©vĂȘque de Viterbe Cf. Innocent III, OpĂ©ra, Ă©d. Migne, I, col GCXIII 1 Gel. 125. Il avait Ă©tĂ© nommĂ© le 3 aoĂ»t 1220 recteur du duchĂ© de SpolĂšte. Potthast 6319. 3. Jord. 16. La prĂ©sence de Dominique Ă un chapitre prĂ©cĂ©dent avait donc Ă©tĂ© toute naturelle. LA RĂGLE DE 1221 305 Mayence, Worms, Spire, Strasbourg, Cologne, Salz- bourg, Ratisbonne Ă©taient devenues des centres francis- cains, d'oĂč les idĂ©es nouvelles rayonnaient sur toute l'Allemagne mĂ©ridionale. C'est aussi Ă l'annĂ©e 1221 que l'on rattache d'or- dinaire la fondation du Tiers Ordre ou troisiĂšme Ordre, appelĂ© d'ordinaire FraternitĂ© de la PĂ©nitence dans les plus anciens documents ; mais on a vu plus haut que cette date est beaucoup trop rĂ©cente, ou plutĂŽt qu'il n'y a pas Ă fixer de date, car ce qu'on a appelĂ© plus tard, d'une maniĂšre tout arbi- traire, le troisiĂšme Ordre, est Ă©videmment contempo- rain du premier^. François et ses compagnons ont voulu ĂȘtre les apĂŽtres de leur temps, mais pas plus que les apĂŽtres de JĂ©sus, ils n'ont souhaitĂ© que tous les hommes entrassent dans leur association, forcĂ©ment un peu restreinte, et qui, suivant la parole Ă©vangĂ©lique, devait ĂȘtre le levain du reste de l'humanitĂ©. En consĂ©quence, leur vie Ă©tait la vie apostolique suivie au pied de la lettre. 1. Cette maniĂšre de voir concorde de tout point avec le tĂ©moi- gnage de 1 Gel. 36 et 37 qui montre le Tiers Ordre naissant tout naturellement de l'enthousiasme qu'excitĂšrent les prĂ©dications de François, de suite aprĂšs le retour de Rome 1210 ; Cf. Aucior vit. sec. A. SS., p. 593 b. Riendans les autres documents ne le con- tredit, tout au contraire. V. 3 Soc. 60. Cf. Anon. Perus. A. SS., p. 600; Bon 25 ; 46. Cf. A. SS., p. 631-634. La premiĂšre bulle qui concerne les FrĂšres de la PĂ©nitence sans les nommer est du 16 dĂ©c. 1221, Significatum est. Si elle les vise rĂ©ellement, comme le pense Sbaralea, et tous ceux qui s'en sont occupĂ©s jusqu'Ă M. MĂčUer inclusivement, â mais ce qui pourrait, semble-t-il, ĂȘtre contestĂ©, â c'est que dĂšs 1221, ils en auraient appelĂ© au pape contre les podestats de Faenza et des citĂ©s voisines. Ceci suppose Ă©videm- ment une association qui n'est pas nĂ©e de la veille. Sbaralea, Bull, fr., I, p. 8; Horoy, t. IV, col. 49; Potthast 6736. 306 VIE DE s. FRANĂOIS mais l'idĂ©al qu'ils prĂȘchaient Ă©tait la vie Ă©vangĂ©lique, que JĂ©sus avait annoncĂ©e. Pas plus que JĂ©sus, saint François n'a condamnĂ© la famille ou la propriĂ©tĂ© ; il a simplement vu en elles des liens dont V apĂŽtre, mais l'apĂŽtre seul, doit ĂȘtre dĂ©gagĂ©. Si bientĂŽt des esprits maladifs ont cru interprĂ©ter sa pensĂ©e en faisant de l'union des sexes un mal, et de tout ce qui constitue l'activitĂ© physique de l'homme, une chute ; si des dĂ©sĂ©quilibrĂ©s se sont autorisĂ©s de son nom, pour Ă©chapper Ă tous les devoirs; si des Ă©poux se sont imposĂ© le ridicule martyre de la virginitĂ© du lit conju- gal, il ne faut vraiment pas l'en rendre responsable. Ces traces d'ascĂ©tisme contre nature proviennent de l'influence des idĂ©es dualistes des Cathares, et non du poĂšte inspirĂ© qui a chantĂ© la nature et sa fĂ©conditĂ©, qui faisait aux colombes des nids, oĂč il les invitait Ă se multiplier sous le regard de Dieu, et qui imposait Ă ses frĂšres le travail manuel comme un devoir sacrĂ©. Les bases de la corporation des FrĂšres et des SĆurs de la PĂ©nitence furent trĂšs simples François n'apportait pas au monde une nouvelle doctrine; la nouveautĂ© de son message Ă©tait tout entiĂšre dans son amour, dans son appel direct Ă la vie Ă©vangĂ©lique, Ă un idĂ©al de vigueur morale, de travail et d'amour. Il s'est naturellement bien vile trouvĂ© des hommes qui n'ont pas compris cette vraie et simple beautĂ©; ils sont tombĂ©s dans les pratiques et les dĂ©votions, ont imitĂ© par le dehors la vie des cloĂźtres dans lesquels, pour une cause ou pour une autre, ils ne pouvaient se retirer; mais il serait injuste de se reprĂ©senter d'aprĂšs eux les FrĂšres de la PĂ©nitence. Reçurent-ils une RĂšgle de saint François? On ne LV RĂGLE DE 1221 307 saurait le dire. Celle qui leur fut donnĂ©e ^ en 1289 par le pape Nicolas IV, est simplement la refonte et Tamalgame de toutes les rĂšgles de confrĂ©ries laĂŻques qui existaient Ă la fm du treiziĂšme siĂšcle. L'attribution de ce document Ă saint François n'est autre chose que l'ajustement dans l'Ă©difice nouveau de quel- ques pierres vĂ©nĂ©rĂ©es d'une construction ancienne. C'est une affaire de façade et d'ornementation, rien de plus. MalgrĂ© cette absence d'une rĂšgle Ă©manant de François lui-mĂȘme, on peut voir claitenient ce que devait ĂȘtre, dans sa pensĂ©e, cette association. L'Ăvangile, avec ses conseils et ses exemples, devait en ĂȘtre la vĂ©ritable RĂšgle. La grande nouveautĂ© visĂ©e par le Tiers Ordre fut la concorde celte fraternitĂ© Ă©tait une union de paix, et apportait Ă l'Europe Ă©tonnĂ©e une nouvelle trĂȘve de Dieu. Que le refus absolu de porter les armes ^ ait Ă©tĂ© un idĂ©al tout chimĂ©rique et Ă©phĂ©mĂšre, les documents sont lĂ pour le prouver, mais il est dĂ©jĂ bien beau d'avoir eu la puis- sance de le susciter pour quelques annĂ©es. La seconde obligation essentielle des FrĂšres de la PĂ©nitence semble avoir Ă©tĂ© celle de rĂ©duire le plus pos- sible leurs besoins, et tout en conservant leur fortune. 1. BuUe Supra montem du 17 aoĂ»t 1289. Potthast 23044. M. MĂčller a fait sur les origines de cette bulle une Ă©tude lumineuse, qui peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e, dans les points essentiels, comme dĂ©fini- tive {AvfĂ nge, p. 117-171. Par cette bulle, Nicolas IV, â ministre gĂ©nĂ©ral des FrĂšres Mineurs avant de devenir pape, â chercha Ă atti- rer entre les mains de son Ordre la direction de toutes les asso- ciations laĂŻques pieuses Tiers Ordre de saint Dominique, des "Gaudentes, des HumiliĂ©s, etc.. Il voulut aussi par lĂ donner un essor plus grand Ă ces confrĂ©ries qui dĂ©pendaient directement de la cour de Rome, et augmenter leur puissance en les unifiant. 2. Y. Bulle Significatum est dn 16 dĂ©c. 1221. Cf. Supra mon- tenif cap. VII. 308 VIE DE s. FRANĂOIS de distribuer aux pauvres, Ă intervalles rĂ©guliers, la part de revenu restĂ©e disponible, aprĂšs s'ĂȘtre contentĂ© du strict nĂ©cessaire^. Accomplir avec joie les devoirs de son Ă©tat; donner aux moindres actions une inspiration sainte ; retrouver dans les infiniment petits de l'existence, en apparence la plus banale, les parcelles d'une Ćuvre divine; rester pur de toute prĂ©occupation avilissante; user des choses comme ne les possĂ©dant pas, comme les serviteurs de la parabole qui auront bientĂŽt Ă rendre compte des talents qui leur ont Ă©tĂ© confiĂ©s; fermer son cĆur Ă la haine, et l'ouvrir tout grand aux pauvres, aux malades, Ă tous les abandonnĂ©s, tels Ă©taient les autres devoirs essentiels des FrĂšres et des SĆurs de la PĂ©nitence. Pour les jeter dans cette voie royale de libertĂ©, d'amour, de responsabilitĂ©, François faisait quelquefois appel aux terreurs de l'enfer et aux joies du paradis, mais l'amour intĂ©ressĂ© Ă©tait si peu dans sa nature, que ces considĂ©rations et d'autres du mĂȘme genre occupent une place tout Ă fait secondaire dans les pages qui nous sont restĂ©es de lui, comme aussi dans ses biographies. La vie Ă©vangĂ©lique, pour lui, est naturelle Ă l'Ăąme. Quiconque la connaĂźtra, la prĂ©fĂ©rera; elle n'a pas plus besoin d'ĂȘtre prouvĂ©e que le grand air et la lumiĂšre. Il suffit d'y conduire les prisonniers, pour leur ĂŽter toute envie de retourner dans les cachots de l'avarice, de la haine ou de la futilitĂ©. François et ses vrais disciples font donc la pĂ©nible ascension des grandes cimes, uniquement, mais irrĂ©- 1. La RĂšgle du Tiers Ordre des HumiliĂ©s, qui date de 1201 con- tient une clause semblable. Tiraboschi, t. II, p. 132. LA RĂGLE DE 1221 309 sistiblenient poussĂ©s par la voĂźk intĂ©rieure. Le seul se- cours Ă©tranger qu'ils acceptent, c'est le souvenir de JĂ©sus les prĂ©cĂ©dant sur les hauteurs et revivant mystĂ©rieuse- ment sous leurs yeux par le sacrement de l'Eucharistie. La lettre Ă tous les chrĂ©tiens oĂč ces idĂ©es dĂ©bordent, nous est un vivant souvenir des allocutions de saint François aux Tertiaires. Pour nous reprĂ©senter ces derniers sous une forme tout Ă fait concrĂšte, nous pouvons recourir Ă la lĂ©gende du B. Lucchesiodont la tradition a fait le premier FrĂšre de la PĂ©nitence^. Originaire d'une petite ville de Toscane, il la quitta pour se soustraire ^ des haines politiques, et vint s'Ă©ta- blir Ă Poggibonsi, non loin de Sienne, oĂč il continua a faire le commerce des grains. DĂ©jĂ riche, il ne lui fut pas difficile d'accaparer les blĂ©s pour les revendre en temps de disette, et rĂ©aliser d'Ă©normes bĂ©nĂ©fices. Mais bientĂŽt, bouleversĂ© par les prĂ©dications de François, il rentra en lui-mĂȘme, distribua tout son superflu aux pauvres, et ne garda que sa maison avec un petit jardin et un Ăąne. On le vit dĂšs lors, s'adonner Ă la culture de ce coin dĂ©terre, et faire de sa maison une sorte d'hĂŽtellerie, oĂč les pauvres et les malades affluaient ; non seulement il les accueillait, mais il allait Ă leur recherche jusque dans les Maremmes infectĂ©es par la malaria, et revenait 1. Dans les A. SS. Aprilis t. II, p. 600-616. Orlando de Ghiusi reçut aussi l'habit des mains de François. V. Instrument um etc. ci-dessus p. XG. La FraternitĂ© franciscaine, sous l'influence des autres tiers ordres, perdit rapidement ses caractĂšres spĂ©cifiques. Quant Ă cette appellation de troisiĂšme ordre, elle a eu sĂ»rement Ă l'origine un sens hiĂ©rarchique, auquel s'est superposĂ© peu Ă peu un sens chronologique. Toutes ces questions deviennent singuliĂšrement plus claires quand on les rapproche de ce qu'on sait sur les HumiliĂ©s. 28 310 VIE DE S. FRANĂOIS souvent avec un malade Ă califourchon sur les Ă©paules, et prĂ©cĂ©dĂ© de son Ăąne chargĂ© d'un fardeau semblable. Les ressources du jardin Ă©tant forcĂ©ment trĂšs limitĂ©es^ lorsqu'il n'y avait plus moyen de faire autrement, Lucchesio prenait une besace et s'en allait mendier de porte en porte, mais la plupart du temps c'Ă©tait inutile, car les pauvres, le voyant si laborieux et si bon, Ă©taient plus contents des quelques maigres lĂ©gumes qu'il man- geait avec eux que du plus copieux repas. Devant leur bienfaiteur si joyeux dans son dĂ©nĂ»ment, ils oubliaient leur misĂšre, et les murmures habituels de ces malheu- reux se transformaient en paroles d'admiration et de reconnaissance. La conversion n'avait pas tuĂ© en lui les liens de la famille Bona Donna, sa femme, Ă©tait devenue le meil- leur des collaborateurs, et lorsqu'en 1260, il la vit s'Ă©teindre peu Ă peu, sa douleur fut trop forte pour ĂȘtre supportĂ©e Tu sais, chĂšre compagne, lui dit-il au moment oĂč elle venait de recevoir les derniers sacre- ments, combien nous nous sommes aimĂ©s pendant que nous servions Dieu ensemble, pourquoi ne resterions- nous pas unis pour nous en aller aux joies ineffables ? Attends-moi. Je veux recevoir, moi aussi, les sacrements et m'en aller au ciel avec toi. » Il dit et rappela le prĂȘtre pour ĂȘtre administrĂ©, puis aprĂšs avoir tenu dans ses mains celles de sa compagne qui agonisait, et l'avoir rĂ©confortĂ©e par de douces paroles, lorsqu'il vit que son Ăąme s'Ă©tait envolĂ©e, il lit sur lui le signe de la croix, s'Ă©tendit, et appelant avec amour JĂ©sus, Marie et saint François, il s'endormit pour l'Ă©ternitĂ©. CHAPITRE XVI Les FrĂšres Mineurs et la science. Automne 1221 â dĂ©cembre 1223. A partir du chapitre de 1221 , l'Ă©volution de l'Ordre se prĂ©cipite avec une rapiditĂ© contre laquelle plus rien ne devait avoir la force de rĂ©agir. La crĂ©ation des ministres fit faire un pas Ă©norme de ce cĂŽtĂ© ceux-ci en vinrent, par la force mĂȘme des choses, Ă avoir une rĂ©sidence lorsqu'on commande, on veut avoir ses subordonnĂ©s sous la main, savoir Ă chaque instant oĂč ils sont; les FrĂšres ne pouvaient donc continuer Ă se passer de couvents proprement dits. Ce changement devait en amener bien d'autres jusque-lĂ on n'avait pas eu d'Ă©glises. Sans Ă©glises, les FrĂšres n'Ă©taient que des prĂ©dicateurs, et leur but ne pouvait ĂȘtre que parfaitement dĂ©sintĂ©ressĂ©, ils Ă©taient, comme l'avait voulu François, les auxiliaires bĂ©nĂ©voles du clergĂ©. Avec des Ă©glises, ils devaient fatalement aspirer Ă y prĂȘcher d'abord et Ă y attirer la foule, puis Ă les Ă©riger en quelque sorte en contre-paroisses^. 1. Tout cela s'est fait avec une prodigieuse rapiditĂ©. Les dimen- sions de la basilique d'Assise, dont les plans ont Ă©tĂ© faits dĂšs 1228, ne permettent pas de la considĂ©rer comme une chapelle con- ventuelle, pas plus que Santa-Croce de Florence, San-Francesco de 312 VIE DE S. FRANĂOIS La bulle du 22 mars 1222^ nous montre la papautĂ© activant de toutes ses forces ces transformations. Le pontife accorde Ă frĂšre François et aux autres frĂšres le privilĂšge de pouvoir cĂ©lĂ©brer dans leurs Ă©glises les saints mystĂšres en temps d'interdit, k la condition, naturellement, de ne pas sonner les cloches, de fermer les portes, et de faire sortir au prĂ©alable les gens frappĂ©s d'excommunication. Par une Ă©tonnante inconsĂ©quence, la bulle elle-mĂȘme porte le tĂ©moignage de son inutilitĂ©, du moins pour le moment oĂč elle fut donnĂ©e Nous vous accordons, dit-elle, de pouvoir cĂ©lĂ©brer en temps d'interdit dans vos Ă©glises, si vous venez Ă en avoir, » VoilĂ donc une nouvelle preuve que l'Ordre n'en avait point encore en 4222; mais on n'aura pas de peine Ă voir prĂ©cisĂ©ment dans ce document une invitation pressante Ă changer de maniĂšre de faire et Ă ne pas laisser ce privilĂšge sans objet. Un autre document de la mĂȘme Ă©poque manifeste des Sienne ou la basilique Sant-Antonio Ă Padoue, monuments com- mencĂ©s entre 1230 et 1240. DĂšs avant 1245, une partie de l'Ă©pisco- pat jeta un cri d'alarme dans lequel il ne parle de rien moins que de fermer la porte des Ă©glises sĂ©culiĂšres devenues inutiles. 11 se plaint avec une incroyable amertume que les FrĂšres Mineurs et PrĂȘcheurs aient absolument supplantĂ© le clergĂ© paroissial On trouve cette lettre, adressĂ©e Ă la fois Ă FrĂ©dĂ©ric II et au concile de Lyon, dans Pierre de la Vigne EpistolĆ, Baie, 1740, 2 vol. t. 1, p. 220â 222. Il serait bien Ă dĂ©sirer qu'on en donnĂąt un texte critique Voir aussi la satire, contre les deux ordres nouveaux, rimĂ©e vers 4242 par Pierre de la Vigne, et dont, malgrĂ© les exagĂ©rations possibles, la plupart des traits n'ont pas pu ĂȘtre inventĂ©s E. du MĂ©ril PoĂ©siea pop. lat. p. 153â177 Paris, in 8°, 1847. 1. Et non du 29 comme le veut Sbaralea {Bull. fr. t. I, n. 10; Horoy, t. IV col. 129; l'original encore aux archives d'Assise porte Datum Anagnic ii Kalendas Aprilis pontificatus nostri anno sexto. LES FRERES MINEURS ET LA SCIENCE 313 prĂ©occupations analogues, mais s'exerçant d'un tout autre cĂŽtĂ©. Par la bulle Ex parte du 29 mars 1222, Honorius III chargeait conjointement les prieurs des PrĂȘcheurs et des Mineurs de Lisbonne d'une mission singuliĂšrement dĂ©licate il leur donnait ses pleins pou- voirs pour agir contre l'Ă©vĂȘque et le clergĂ© de cette ville, qui exigeaient que les fidĂšles leur laissassent par testament le tiers de leurs biens, et refusaient aux rĂ©- calcitrants la sĂ©pulture ecclĂ©siastique ^. Le fait que le pape donnait aux frĂšres le soin de choi- sir eux-mĂȘmes les mesures Ă prendre, prouve combien on Ă©tait pressĂ© Ă Rome d'oublier le but dans lequel ils avaient Ă©tĂ© créés, pour les transformer en chargĂ©s d'af- faires du Saint-SiĂšge. Jl n'est donc pas besoin de faire remarquer que la mention du nom de François, en tĂȘte de la premiĂšre de ces deux bulles, n'a aucune portĂ©e. On ne se reprĂ©sente pas le Poverello allant demander un privilĂšge pour des circonstances qui n'existaient pas encore! On devine ici l'influence d'Hugolin^ qui avait trouvĂ©, dans la personne d^Ălie, le FrĂšre Mineur selon son cĆur. 1. Polthast 6809; Horoy, t. IV coL 129. Voir aussi la bulle Ecce venit Deus du 14 juillet 1227 L. Auvray Registres de GrĂ©goire IX n. 129 Cf. 153. Polthast 8027 et 8028, 8189. 2. Il avait terminĂ© sa mission de lĂ©gat en Lombardie, vers la fin de septembre 1221 V. son Registre. Cf. BĂŽhmer, Acta imp. sel. doc. 951. Au printemps de 1222, on le retrouve sans cesse aux cĂŽtĂ©s du pape Ă Anagni, Veroli, Alatri Potthast 6807, 6812, 6849. Le Saint- SiĂšge avait encore alors une prĂ©dilection marquĂ©e pour les PrĂȘ- cheurs le privilĂšge essentiellement banal de pouvoir cĂ©lĂ©brer les offices en tem[ s d'interdit leur avait Ă©tĂ© accordĂ© le 7 mars 1222, mais au lieu de la formule ordinaire en pareil cas, on fit une rĂ©- daction tout exprĂšs pour eux, avec un bel Ă©loge. Ripolli, Bull. PrĆd., t. I, p. 15. 314 VIE DE S. FRANĂOIS Que faisait donc François pendant ce temps? On l'ignore, mais l'absence mĂȘme de renseignements â si nombreux pour la pĂ©riode qui a prĂ©cĂ©dĂ©, comme pour celle qui suit â nous dit assez qu'il quitta la Portioncule pour s'en aller dans la solitude et vivre dans ces ermitages de l'Ombrie qui eurent toujours pour lui un si puissant attrait ^. Il n'est presque pas une colline de l'Italie centrale qui n'ait conservĂ© quel- que souvenir de son passage. Entre Florence et Rome, on marcherait difficilement une demi-journĂ©e dans les montagnes, sans rencontrer, sur les sommets, des cabanes portant son nom ou celui d'un de ses disciples. Il y eut un moment oĂč elles furent habitĂ©es et oii, dans des huttes de branchages, Ăgide, Masseo, Bernard, Sylvestre, JunipĂšre, et bien d'autres dont l'histoire tait le nom, reçurent la visite de leur pĂšre spirituel venant les consoler 2. Ils lui rendaient amour pour amour et consolation pour consolation. Sa pauvre Ăąme en avait grand besoin, car dans ses longues nuits d'insomnie, il lui arrivait parfois d'entendre au fond de son cĆur de bien Ă©tranges voix; la fatigue et les regrets le gagnaient, et regar- dant en arriĂšre, il se prenait Ă douter de lui-mĂȘme, de sa Dame la PauvretĂ© et de tout. Entre Chiusi et Radicofani, Ă une heure dĂ©marche du village de Sartiano, quelques frĂšres avaient arrangĂ© un abri qui leur servait d'ermitage, et prĂ©parĂ© pour 1. 2 Gel. 3, 93. Subtrahebat se a consortio fratrum. 2. Il va sans dire que les traditions locales, dans ce cas, ne doivent ĂȘtre acceptĂ©es qu'avec la plus grande rĂ©serve dans le dĂ©tail, mais dans Tensemble elles sont sĂ»rement vraies. La gĂ©ographie de la vie de saint François est encore Ă faire. LES FRĂRES MINEURS ET LA SCIENCE 315 François une petite cabane un peu Ă l'Ă©cart. C'est lĂ qu'il passa une des nuits les plus douloureuses de sa vie. Assailli par la pensĂ©e qu'il exagĂ©rait l'ascĂ©tisme et ne comptait pas assez sur la bontĂ© de Dieu, il en vint tout Ă coup Ă regretter l'emploi de son existence. Le tableau de ce qu'il aurait pu ĂȘtre, de la vie de famille tranquille et heureuse, qui aurait pu ĂȘtre la sienne^ se prĂ©senta Ă lui sous des couleurs si vives, qu'il se sen- tait faiblir. ArmĂ© de sa corde, il avait beau se donner la discipline jusqu'Ă se blesser, la vision ne s'Ă©vanouis- sait pas. On Ă©tait en plein hiver une Ă©paisse couche de neige couvrait le sol ; il se jeta dehors sans vĂȘtement et, pre- nant la neige Ă pleines mains, se mit Ă faire un cor- tĂšge de personnages. Regarde, dit-il alors, celle-ci est ta femme, puis derriĂšre elle, viennent deux fils et deux filles, suivis du serviteur et de la domestique portant tout le bagage. » Cette naĂŻve image de la tyrannie des soucis matĂ©riels qu'il avait bannis dissipa enfin la tentation^. Faut-il rattacher Ă la mĂȘme Ă©poque un autre trait de la lĂ©gende qui se passe aussi Ă Sartiano? Rien ne l'indique. Un jour, un frĂšre auquel il demanda ce D'oĂč viens-tu?» rĂ©pondit ce Je reviens de ta cellule. » Cette simple parole en fut assez pour que le farouche amant de la PauvretĂ© n'y voulĂ»t plus rentrer. Les renards ont des taniĂšres, aimait-il Ă rĂ©pĂ©ter, et les oiseaux du ciel ont leurs nids, mais le Fils de l'homme n'a pas eu un lieu oĂč reposer sa tĂȘte. Quand le Seigneur s'en alla prier et jeĂ»ner dans le dĂ©sert quarante jours et quarante nuits, 1. 2 CeL 3, 59 ; Bon. 60; Conform. 122 b 2. 316 VIE DE S. FRANĂOIS il ne s'y fit faire ni cellule, ni maison, mais s'abrita sous un pan de rocher^. » Il ne faudrait donc pas croire, comme on l'a fait, qu'avec le temps, François ait changĂ© de point de vue. Quelques Ă©crivains ecclĂ©siastiques ont pensĂ© que puis- qu'il voulait la multiplication de son Ordre, il en a acceptĂ© par lĂ mĂȘme la transformation. L'idĂ©e est spĂ©cieuse, mais on n'en est pas rĂ©duit Ă cet Ă©gard Ă des conjectures Ă peu prĂšs tout ce qui se fait dans rOrdre depuis i221, se fait tantĂŽt Ă linsu de François, tantĂŽt contre son grĂ©. Si l'on Ă©tait tentĂ© d'en douter, on n'aurait qu'Ă jeter un coup d'Ćil sur le ma- nifeste le plus solennel et aussi le plus adĂ©quat de sa* pensĂ©e, son Testament. On l'y voit dĂ©livrĂ© de toutes les suggestions qui avaient fait flĂ©chir l'expression de ses idĂ©es, se redresser courageusement pour rappeler l'idĂ©al primitif, et l'opposer Ă toutes les concessions arrachĂ©es Ă sa faiblesse. Le Testament n'est pas un appendice Ă la RĂšgle de 4223, il en est presque la rĂ©vocation. Mais on se tromperait en y voyant la premiĂšre tentative faite pour rĂ©agir. Les cinq derniĂšres annĂ©es de sa vie ne furent qu'un effort incessant pour protester par son exemple et par ses paroles. En 1222, il adressa aux frĂšres de Bologne une lettre remplie des plus tristes pressentiments. Dans cette ville oĂč les Dominicains, comblĂ©s de prĂ©venances, Ă©taient en train de se faire une grande situation dans l'enseignement, les FrĂšres Mineurs Ă©taient plus tentĂ©s que partout ailleurs d'abandonner la voie de la simplicitĂ© et de la pauvretĂ©. d. 2 Gel. 3, 5 ; Spec. 12 a; Conform. 169 b 2. LES FRĂRES MINEURS ET LA SCIENCE 317 Les avertissements de François avaient revĂȘtu des couleurs si sombres et si menaçantes, qu'aprĂšs le fa- meux tremblement de terre du 23 dĂ©cembre 1222, qui jeta l'Ă©pouvante dans toute l'Italie septentrionale, on n'hĂ©sita pas Ă croire qu'il avait prĂ©dit la catastrophe ^. Il en avait prĂ©dit une, qui pour ĂȘtre toute morale n'en Ă©tait pas moins horrible, et dont la vision lui arrachait les plus amĂšres imprĂ©cations Seigneur JĂ©sus, vous avez jadis choisi vos apĂŽtres au nombre de douze, et si Tun d'eux vous a trahi, les autres, restant unis Ă vous, ont prĂȘchĂ© le saint Evangile, remplis d'une seule et mĂȘme inspiration; et voici que maintenant, vous rappelant les jours d'autrefois, vous avez suscitĂ© la Religion des FrĂšres, afin de soutenir la foi et afin que par eux le mystĂšre de votre Evangile s'accomplisse. Qui les remplacera si, au lieu d'accomplir leur mission et d'ĂȘtre pour tous de lumineux exemples, on les voit s'abandonner aux Ćuvres des tĂ©nĂšbres? Ah! que par vous. Seigneur, et par toute la cour cĂ©leste et par moi, votre indigne serviteur, soient maudits ceux qui par leur mauvais exemple renversent et dĂ©truisent tout ce que vous avez fait au commencement, et ce que vous ne cessez de faire par les saints frĂšres de cet Ordre 2. » Ce passage de Thomas de Gelano, c'est-Ă -dire du plus modĂ©rĂ© des biographes, montre Ă quel diapason de vĂ©hĂ©- mence et d'indignation a pu s'Ă©lever le doux François. MalgrĂ© les efforts bien naturels, faits pour jeter un 1. Ecd. 6. V. le texte de Liebermann. Mon, Germ. hist. Script., t. 28, p. 663. 2. 2 Gel. 3, 93 ; Bon. 104 et 105 Conform. 101 a 2. 318 VIE DE S. FRANĂOIS voile discret sur ces angoisses du fondateur concernant l'avenir de sa famille spirituelle, on en retrouve Ă chaque pas la trace Le temps viendra, dit-il un jour, oĂč notre Ordre aura si bien perdu tout bon renom que ses membres auront honte de se montrer au grand jour ^. » Il avait vu en songe une statue dont la tĂȘte Ă©tait d'or pur, la poitrine et les bras d'argent, le ventre de cristal, les jambes de fer. Il pensa que c'Ă©tait un prĂ©sage de l'avenir rĂ©servĂ© Ă son institut 2. Il trouvait ses fils atteints de deux maladies, infidĂšles Ă la fois Ă la pauvretĂ© et Ă l'humilitĂ© ; mais peut-ĂȘtre redoutait-il plus pour eux le dĂ©mon de la science que la tentation des richesses. Que pensait-il de la science? Il est vraisemblable qu'il n'a jamais examinĂ© la question au point de vue gĂ©nĂ©ral, mais il n'avait pas de peine Ă voir qu'il y aurait toujours assez d'Ă©lĂšves dans les universitĂ©s, et que si l'effort scientifique est un culte rendu Ă Dieu, les adorateurs de cette catĂ©gorie ne risquaient pas de lui manquer; mais il avait beau regarder de tous cĂŽtĂ©s, il ne trouvait personne pour accomplir la mission d'humi- litĂ© et d'amour rĂ©servĂ©e Ă son Ordre, si les frĂšres venaient Ă lui ĂȘtre infidĂšles. Aussi y a-t-il dans son angoisse quelque chose de plus que la douleur de voir ses espĂ©rances confondues. La dĂ©route d'une armĂ©e n'est rien Ă cĂŽtĂ© de la dĂ©route d'une idĂ©e ; et en lui une idĂ©e s'Ă©tait incarnĂ©e, celle de 1. 2 Gel. 3, 93 ; Spec. 49 b ; 182 a ; Conform. 182 a 1 ; TribuL f-Sa; 2 Gel. 3, 98; 113; 115; 1 Gel. 28; 50; 96; 103; 104; 108; 111; 118. 2. 2 Gel. 3, 27; Spec. 38 b; Conform. 181 b 1 ; Trihiil 7 b; Gf. Spec. 220 b; Conform. 103 b. LES FRERES MINEURS ET SCIENCE 319 la paix et du bonheur rendus Ă rhumanitĂ©, par la libertĂ© reconquise sur les entraves matĂ©rielles et par l'amour. Par un ineffable mystĂšre, il se sentait l'Homme de son siĂšcle, celui dans le sein duquel se rĂ©sumaient les efforts, les dĂ©sirs, les aspirations des peuples; avec lui, en lui, par lui, l'humanitĂ© voulait se renouveler et, pour parler avec l'Ăvangile, naĂźtre de nouveau. C'est lĂ que gĂźt sa vĂ©ritable beautĂ©. Par lĂ , bien plus que par de vaines conformitĂ©s extĂ©rieures et factices, il est un Christ. Lui aussi porte les douleurs du monde, et si Ton veut aller jusqu'au fond de son Ăąme, il faut, pour lui comme pour JĂ©sus, donner Ă ce mot de douleurs sa signification la plus Ă©tendue. Par leur pitiĂ©, ils ont portĂ© les souf- frances physiques de l'humanitĂ©, mais ce qui les accable, ce sont des douleurs bien autrement angoissantes celles de Tenfantement du divin. Ils souffrent, parce qu'en eux le Verbe se fait chair, et Ă GethsĂ©manĂ© comme sous les oliviers de Greccio, ils agonisent parce que les leurs ne les ont point reçus. » Oui, saint François a senti l'incessant travail de trans- formation qui s'accomplit au sein de l'humanitĂ© marchant vers sa destination divine, et il s'est offert, hostie vivante, pour qu'en lui eĂ»t lieu la mystĂ©rieuse palingĂ©nĂ©sie. Comprend-on maintenant sa douleur? Il tremble pour le mystĂšre de l'Ăvangile. Il y a chez lui quelque chose qui rappelle le spasme de la vie lorsqu'elle aperçoit la mort, spasme d'autant plus douloureux qu'il s'agit ici de vie morale. Ceci explique comment l'homme qui courait aprĂšs les brigands, pour en faire ses disciples, a pu ĂȘtre impi- toyable pour des collaborateurs, sans doute bien inten- 320 VIE DE s. FRVNGOIS lionnes, mais qui, par un zĂšle indiscret, oubliaient leur vocation et auraient transformĂ© l'Ordre en un institut scientifique. Sous prĂ©texte de mettre la science au service de Dieu et delĂ religion, l'Eglise a excitĂ© le pire des vices, l'or- gueil. C'est son titre de gloire, suivant les uns, mais ce sera son suprĂȘme opprobre. Faut-il renoncer, dit-elle, Ă enlever cette arme aux adversaires de la foi ? Mais vous figurez- vous JĂ©sus allant se mettre Ă l'Ă©cole des rabbins sous prĂ©texte d'apprendre Ă leur rĂ©pondre, Ă©nervant sa pensĂ©e parles subtilitĂ©s de leur dialectique et les fantasmagories de leur exĂ©gĂšse? Il aurait peut-ĂȘtre Ă©tĂ© un grand docteur, mais serait-il devenu le Sauveur du monde? Vous sentez bien que non. Quand on entend les prĂ©dicateurs s'extasier sur la diffusion merveilleuse de l'Ăvangile, prĂȘchĂ© par douze pauvres pĂȘcheurs de GalilĂ©e, ne pourrait-on pas leur faire remarquer que le miracle est Ă la fois plus et moins stupĂ©fiant qu'ils ne disent. Plus â car sur les douze, plusieurs retournĂšrent sur les bords du lac enchanteur, et, oublieux du filet mystique, s'ils se rappelĂšrent le CrucifiĂ©, ce fut pour le regretter et non pour le res- susciter en continuant son Ćuvre aux quatre coins du monde ; moins â car si aujourd'hui mĂȘme, dans ces journĂ©es mourantes du dix-neuviĂšme siĂšcle, des prĂ©di- cateurs s'en allaient ivres d'amour, s'immolant pour tous et pour chacun, comme jadis le MaĂźtre, le miracle se renouvellerait. Mais non, la thĂ©ologie a tuĂ© la religion. Les clergĂ©s rĂ©pĂštent Ă satiĂ©tĂ© qu'il ne faut pas les confondre, qu'im- porte, si dans la pratique on ne les distingue pas. LES FRĂRES MIxXELRS ET LA SCIENCE 321 Jamais la science n'a Ă©lĂ© l'objet de plus de convoi- lises qu'au treiziĂšme siĂšcle. L'Empire et l'Eglise lui demandaient anxieusement des arguments pour dĂ©fendre leurs prĂ©tentions rĂ©ciproques. Innocent III envoie Ă l'UniversitĂ© de Bologne la collection de ses DĂ©crĂ©tales et la comble de faveurs. FrĂ©dĂ©ric II fonde celle de Naples, et les Patarins eux-mĂȘmes envoient leurs fils Ă©tudier Ă Paris, depuis la Toscane et la Lombardie. On se rappelle le succĂšs des prĂ©dications de François Ă Bologne^, en aoĂ»t 1220 ; Ă cette mĂȘme Ă©poque il avait vivement rĂ©primandĂ© Pierre Stacia, le ministre provin- cial qui Ă©tait docteur es lois, non seulement pour avoir installĂ© les FrĂšres dans une maison qui avait l'air de leur appartenir, mais il l'avait surtout blĂąmĂ© d'y avoir organisĂ© une sorte de collĂšge. Il paraĂźt que le ministre ne tint pas compte de ces reproches. Lorsque François apprit son endurcissement, il le maudit avec une effrayante vĂ©hĂ©mence ; son indignation Ă©tait si grande que plus tard, Ă l'Ă©poque de sa mort, les nombreux amis de Pierre Stacia vinrent le supplier de rĂ©voquer sa malĂ©diction, mais tous leurs efforts furent inutiles-. 1. Les successeurs de François furent Ă peu prĂšs sans exception des Ă©lĂšves de Bologne Pierre de Catane Ă©tait docteur es lois ainsi que Jean Parenti Jord. 51. â Ălie avait Ă©tĂ© scriptor Ă Bologne. â Albert de Pise y avait Ă©tĂ© ministre Eccl. 6. â Aymon y avait Ă©tĂ© lecteur Eccl. 6. â Grescentius fit des ouvrages de jurisprudence. Conform. 421 b 1 etc. etc. 2. Ce nom ne saurait ĂȘtre garanti il s'appelle Johannes de Las- chaccia, dans un passage des ConformitĂ©s {\0^ a 1 ; Pietro Schiaccia dans le man. italien des Tribulations f* 75 a ; Petrus Stacia dans le man. de la Laurentienne 13 b; Cf. Archiv, II, p. 258. Tribut. 13 b ; Spec. 184 b. Ce rĂ©cit a subi dans d'autres endroits beau- coup d'amplifications Spec. 126 a ; Conform. 104 b 1. 322 VIE DE s. FRiNGOIS Devant cette attitude du fondateur, il est bien diffi- cile de croire Ă l'authenticitĂ© du billet qui aurait Ă©tĂ© adressĂ© Ă Antoine de Padoue. A mon trĂšs cher Antoine, frĂšre François, salut en Christ. Il me plaĂźt que vous interprĂȘtiez aux frĂšres les saintes lettres et la thĂ©ologie, de telle sorte cependant conformĂ©ment Ă notre RĂšgle que, ni chez vous ni chez les autres, ne s'Ă©teigne l'esprit de la sainte oraison, ce que je dĂ©sire vivement. Salut. » Faut-il voir lĂ autre chose qu'une pieuse supercherie, pour attĂ©nuer les dĂ©clarations si nettes et si nombreuses de François contre la science? Il est difficile de se figurer la rivalitĂ© qu'il y avait, dĂšs cette Ă©poque, entre Dominicains et Franciscains, pour tĂącher d'attirer dans leur ordre respectif les maĂźtres les plus illustres. On organisait de petites intrigues oĂč les dĂ©votes avaient leur rĂŽle, pour amener tel ou tel docteur fameux Ă prendre l'habit ^. Si le but de saint François eut Ă©tĂ© scientifique, les frĂšres de Bologne, de Paris et d'Oxford n'auraient pas pu faire mieux 2. Le courant Ă©tait si fort que les anciens ordres furent entraĂźnĂ©s bon grĂ© mal grĂ© une vingtaine d'annĂ©es plus tard, les Cisterciens voulurent eux aussi devenir lĂ©gistes, thĂ©ologiens, dĂ©crĂ©talistes et le reste. Peut-ĂȘtre François n'avait-il pas aperçu dĂšs l'abord la gravitĂ© du danger, mais l'illusion n'Ă©tait plus possible, 1. V. Eccl, 3 ; Histoire de l'entrĂ©e dans l'Ordre d'Adam d'Oxford. Cf. Chartiilarium Univ. Par., t. I, n»* 47 et 49. 2. Toute la chronique d'Eccleston en est le vivant tĂ©moignage. LES FRĂRES MINEURS ET LA SCIENCE 323 et par la suite il se montra, comme on l'a vu, d'une implacable fermetĂ©. Si plus tard on a travesti sa pensĂ©e, il a fallu aux coupables, â les papes et la plupart des premiers ministres gĂ©nĂ©raux, â des tours de prestidigi- tation exĂ©gĂ©tique qui ne sont pas a leur honneur Supposez, disait-il, que vous ayez assez de subtilitĂ© et de science pour tout savoir, que vous connaissiez toutes les langues, le cours des astres et tout le reste, qu'y a-t-il lĂ pour vous enorgueillir? Un seul dĂ©mon en sait plus lĂ -dessus que tous les hommes de la terre rĂ©unis^. Mais il y a une chose dont le dĂ©mon est in- capable et qui est la gloire de l'homme ĂȘtre fidĂšle Ă Dieu 2. On manque d'indications prĂ©cises sur les chapitres de d222 et 1223. Les modifications apportĂ©es au projet de J22i y furent discutĂ©es par les ministres^, et arrĂȘtĂ©es dĂ©finitivement ensuite par le cardinal Hugo- lin. Celui-ci eut Ă ce sujet de longues confĂ©rences avec 1. Admonitio \, Cf. Conform. 141 a. Rapprocher les Constitutiones antiquĆ {SpĂ©culum^ Morin, III, fo 495 b-206 de la RĂšgle. DĂšs les premiers chapitres la contradic- tion saute aux yeux Ordinaynus quod nullus recipiatur in ordine nostro nisi sit talis clericus qui sit competenter instructus in grammatica vel logica\ aut nisi sit talis laicus de cujus ingressu esset valde celebris et edificatio in populo et in clerc. Nous voilĂ certes bien loin de l'esprit de celui qui avait dit Et quicumque venerit amicus vel aduersarius fuv vel latro bĂ©nigne recipiatur. RĂšgle de 1221, cap. VII. Voir aussi l'Exposition de la RĂšgle de Bo- naventure. SpĂ©culum Morin, III, f» 21-40. 2. Sur l'attitude de François vis-Ă -vis de la science. Voir Tribut. Laur. 14 b; Spec. 184 a; 2 Gel. 3, 8; 48; 100; 116; 119; 120-124. Le chapitre Bon. 152 n'exprime naturellement que les vues de Bona- venture. Voir surtout RĂšgle de 1221, cap. XVII; de 1223 cap. X. 3. Spec. 7 b Fecit Franciscus regulam quam papa Honorius conflrmavit cum bulla, de qua rĂ©gula multa fuerunt extrada per ministros contra voluntatem b. Francisai. Cf. 2 Gel. 3, 136. 32i VIE DE S. FRANĂOIS François, dont il nous a lui-mĂȘme conservĂ© le sou- venir^. Elles eurent pour rĂ©sultat la RĂšgle de 1223. Il se forma bientĂŽt autour de l'origine de ce document toute une poussĂ©e de rĂ©cits merveilleux qu'il serait oiseux d'examiner par le menu ; ce qu'il faut en retenir, c'est le souvenir qu'ils gardent des luttes soutenues par François contre les ministres pour le maintien de son idĂ©al. Avant d'aller Ă Rome demander l'approbation dĂ©fini- tive, il s'Ă©tait longuement recueilli dans la solitude de Monte-Colombo, prĂšs de Rieti. Cette colline fut bientĂŽt reprĂ©sentĂ©e comme un nouveau SinaĂŻ, et les disciples dĂ©peignirent leur maĂźtre recevant lĂ -haut, des mains de JĂ©sus mĂȘme, un autre DĂ©calogue-. Angelo Clareno, un des narrateurs les plus complai- sants de ces traditions, se charge lui-mĂȘme d'en indi- quer le peu de valeur il nous montre Honorius IIĂ modifiant au dernier moment un passage essentiel du projet^. J'ai dĂ©jĂ caractĂ©risĂ© assez exactement cette RĂšgle pour n'avoir plus besoin d'y revenir ici. Elle fut approuvĂ©e le 25 novembre .1223^. Plusieurs souvenirs semblent devoir ĂȘtre rattachĂ©s Ă ce dernier voyage de François Ă Rome. Un jour, le cardinal Hu- golin, dont il avait acceptĂ© l'hospitalitĂ©, fut bien Ă©tonnĂ©^ ainsi que ses convives, en s'apercevant de son absence i. Bulle Quo elongati du 28 sept. 1230 Sbaralea, t. I, p. 56. 2. Bon. 55 et 56; [3 Soc. 62]; Spec. 76; 124 a; Tribul. Laur. 17 b-19 b; Ubertin, Arbor 7. 5; Conform. 88 a 2. 3. TribHl., Laur. 19 a; Archiv, t. III, p. 601. Cf. A. SS.â p. 638 e. 4 Potthast 7108. L'Ćuvre de cette bulle fut complĂ©tĂ©e par celle du 18 dĂ©c. 1223 L'original du Sacro-Convento porte Datiim La- terani XV Kal. jan., Fratrum Minorum Potthast 7123. LES FRĂRES MINEURS ET LA SCIENCE 325 au moment oĂč l'on se mettait Ă table, mais ils le virent bientĂŽt arriver, chargĂ© d'une provision de morceaux de pain bis qu'il distribua tout joyeux Ă la noble assis- tance. Son hĂŽte, un peu confus, ayant essayĂ© de lui faire quelques reproches aprĂšs le repas, François lui expliqua qu'il ne devait pas oublier pour un somptueux festin le pain de l'aumĂŽne dont il se nourrissait tous les jours, et qu'il voulait aussi montrer Ă ses frĂšres, que la table la plus riche ne vaut pas, pour les pauvres spirituels, cette table du Seigneur^. On a vu que, durant les premiĂšres annĂ©es, les FrĂšres Mineurs avaient l'habitude de gagner leur vie en s'en- gageant comme domestiques. Quelques-uns avaient continuĂ©, mais en bien petit nombre. Peu Ă peu, de ce cĂŽtĂ© aussi, tout s'Ă©tait transformĂ©. Sous couleur de ser- vir, les frĂšres entraient chez les plus hauts personnages de la cour pontificale et devenaient leurs hommes de confiance au lieu d'ĂȘtre soumis Ă tous, comme dit la RĂšgle de 1221, ils Ă©taient au-dessus de tous. Perdant complĂštement de vue la vie apostolique, ils devenaient des courtisans d'un genre spĂ©cial ; leur carac- tĂšre, moitiĂ© ecclĂ©siastique, moitiĂ© laĂŻque, les rendait capables de remplir une foule de missions dĂ©licates, et de jouer un rĂŽle dans les intrigues variĂ©es pour lesquelles ont toujours semblĂ© vivre la plupart des prĂ©lats romains 2. Pour protester, François n'avait qu'une arme, son exemple. Un jour, raconte le SpĂ©culum, le B. François vint Ă Rome pour voir l'Ă©vĂȘque d'Ostie Hugolin, et aprĂšs 1. 2 CeL 3, 19 ; Bon. 95; Spec. 18 b. ; Conform. 171 a 1. 2. 2 CeL 3, 61 et 62. Cf. EccL 6 le souvenir de Rod. de Rosa. 29 326 VIE DE s. FRANĂOIS ĂȘtre restĂ© quelque temps chez lui, il rendit aussi visite au cardinal LĂ©on qui avait pour lui une grande dĂ©votion. On Ă©tait en hiver ; le froid, le vent, la pluie, ren- daient tout voyage impossible, aussi le cardinal le pria- t-il de passer quelques jours dans sa maison et d'y prendre sa nourriture, comme les autres pauvres qui ve- naient manger chez lui Je te donnerai, ajouta-t-il, un bon gĂźte bien Ă l'Ă©cart, oĂč tu pourras, si tu le veux, prier et manger.» Alors frĂšre Ange, l'un des douze premiers disciples, qui demeurait chez le cardinal, dit Ă François Il y a prĂšs d'ici, une grande tour Ă©cartĂ©e et tranquille, tu y seras comme dans un ermitage. » Fran- çois alla la voir, et elle lui plut. Alors revenant vers le cardinal Monseigneur, lui dit-il, il est possible que je passe quelques jours chez vous. » Celui-ci fut bien joyeux, et frĂšre Ange alla prĂ©parer la tour pour le B. François et pour son compagnon. Mais dĂšs la'premiĂšre nuit, quand il voulut dormir, les dĂ©mons arrivĂšrent pour le frapper. Appelant alors son compagnon FrĂšre, lui dit il, les dĂ©mons sont venus me frapper avec violence ; reste prĂšs de moi, je te prie, car j'ai peur seul ici.» Il tremblait de tous ses membres, comme quelqu'un qui a la fiĂšvre. Ils passĂšrent la nuit tous les deux sans dormir Les dĂ©mons sont chargĂ©s des chĂątiments de Dieu, disait François ; comme un podestat envoie son bourreau pour punir le criminel, ainsi Dieu envoie les dĂ©mons, qui sont en cela ses ministres Pourquoi me les a-t-il envoyĂ©s? En voici la raison peut-ĂȘtre le car- dinal a voulu ĂȘtre bon pour moi, et j'ai vraiment grand besoin de repos, mais les frĂšres qui vont par le monde, souffrant de la faim et de mille tribulations, ainsi que tous les autres qui sont dans des ermitages ou dans de pauvres maisons, lorsqu'ils apprendront mon sĂ©jour chez 4 LES FRERES MLNEURS ET LA SCIENCE 327 un cardinal auront un motif de murmure Nous endu- rons toutes les privations, diront-ils, tandis que lui a tout ce qu'il peut dĂ©sirer; je dois pourtant leur donner le bon exemple; lĂ est ma vraie mission » De grand matin, il quitta donc la tour et, ayant tout racontĂ© au cardinal, prit congĂ© de lui pour retourner Ă l'ermitage de Monte-Colombo prĂšs de Rieti On me croit un saint homme, lui dit-il, et voilĂ qu'il a fallu les dĂ©mons pour me jeter hors de prison *.» Ce rĂ©cit, malgrĂ© ses couleurs Ă©tranges, montre assez combien il avait l'instinct de l'indĂ©pendance. Comparer l'hospitalitĂ© d'un cardinal Ă un emprisonnement ! Il ne croyait pas si bien dire, et caractĂ©riser d'un mot toute l'histoire des rapports de l'Eglise et de son Ordre. L'alouette n'Ă©tait pas morte; malgrĂ© le froid et la bise, elle prit gaiement son vol vers le val de Rieti. On Ă©tait Ă la mi-dĂ©cembre. Un ardent dĂ©sir de cĂ©- lĂ©brer au naturel les souvenirs de NoĂ«l s'Ă©tait emparĂ© de François. Il s'en ouvrit Ă un de ses amis, le chevalier Jean de Greccio, qui se chargea de prĂ©parer le nĂ©ces- saire. Imiter JĂ©sus a Ă©tĂ© de tout temps le centre mĂȘme de la vie chrĂ©tienne ; mais il faut ĂȘtre singuliĂšrement spiri- tualiste pour pouvoir se contenter de l'imitation intĂ©- rieure. Pour la plupart des hommes celle-ci a besoin d'ĂȘtre prĂ©cĂ©dĂ©e et soutenue par l'imitation extĂ©rieure. C'est bien l'esprit qui vivifie; mais au pays des anges seulement, on peut dire que la chair ne sert de rien. Pour le moyen Ăąge, une fĂȘte religieuse Ă©tait avant tout une reprĂ©sentation, plus ou moins fidĂšle, du souvenir 1 1. S/3CC. 47 b ss. ; 2 Gel. 3, 61 ; Bon. 84 et 85. 328 VIE DE s. FRANĂOIS qu'elle rappelait de lĂ les santons de la Provence^ les processions du Palmesel, les cĂ©nacles du Jeudi saint, les chemins de croix du Vendredi saint, le drame de la RĂ©surrection le jour de PĂąques, et les Ă©toupes enflammĂ©es de la PentecĂŽte. François Ă©tait trop italien pour ne pas aimer ces fĂȘtes oĂč tout ce qu'on voit parle de Dieu et de son amour. Les populations des environs de Greccio furent donc convoquĂ©es ainsi que les frĂšres des monastĂšres voisins. Au soir de la vigile de NoĂ«l, on vit sur tous les sen- tiers les fidĂšles se hĂąter vers l'ermitage, des torches Ă la main, et faisant retentir les forĂȘts de leurs joyeux cantiques. Tous Ă©taient dans la joie, François plus que per- sonne le chevalier avait prĂ©parĂ© une crĂšche avec de la paille, et amenĂ© un bĆuf et un Ăąne qui de leur haleine semblaient vouloir rĂ©chauffer le pauvre bambino tout transi de froid. Le Saint, Ă cette vue, sentait des larmes de pitiĂ© inonder son visage ; il n'Ă©tait plus Ă Greccio, son cĆur Ă©tait Ă BethlĂ©hem. Enfin on se mit Ă chanter matines, puis la messe commença oĂč, comme diacre, François lut l'Evangile. Le simple rĂ©cit de la lĂ©gende sacrĂ©e, dit par une voix si douce et si ardente, touchait dĂ©jĂ les cĆurs, mais quand il prĂȘcha, son Ă©motion gagna bien vite l'audi- toire sa voix avait une tendresse si indicible que les assistants oubliaient tout, eux aussi, pour revivre les sentiments des bergers de la JudĂ©e qui allĂšrent jadis adorer le Dieu fait homme, naissant dans une Ă©table ^. Au dĂ©clin du treiziĂšme siĂšcle, l'auteur du Stabat Mater 1. 1 Gel. 84-87; Bon. 149. LES FRĂRES MINEURS ET LA SCIENCE 329 dolorosa, Jacopone de Todi, ce franciscain de gĂ©nie qui passa dans les cachots une partie de sa vie, composa, inspirĂ© par le souvenir de Greccio, un autre Stabat, celui de la joie, Stabat Mater speciosa. Cette hymne de Marie, prĂšs de la crĂšche, n'est pas moins belle que celle de Marie au pied de la croix. Le sentiment y est encore plus intime, et Ton ne s'explique guĂšre son oubli que par un injuste caprice de la destinĂ©e. Stabat Mater speciosa Juxta fĆnum gaudiosa, Dum jacebat parvulus. Quse gaudebat et ridebat Exsultabat cum videbat Nati partum inclyti. Fac me vere congaudere, Jesulino cohserere Donec ego vixero * . 1. Ce petit poĂšme a Ă©tĂ© publiĂ© intĂ©gralement par M. Ozanam dans le t. V de ses Ćuvres, p. 184. CHAPITRE XVII Les Stig mates, 1224. La vallĂ©e supĂ©rieure de TArno forme, au centre mĂȘme de l'Italie, un pays Ă part, le Gasentin, qui durant des siĂšcles a vĂ©cu de sa vie propre, un peu comme une Ăźle au milieu de l'OcĂ©an. Le fleuve en sort au sud par un Ă©troit dĂ©filĂ©, et de tous les autres cĂŽtĂ©s l'Apennin l'enserre d'une ceinture de montagnes inaccessibles^. Cette plaine, d'une dizaine de lieues de diamĂštre, est Ă©gayĂ©e de jolis villages, bien campĂ©s sur des monti- cules, au pied desquels coule la riviĂšre voici Bibbiena, Poppi, Tantique Romena chantĂ©e par Dante, les Camal- dules, et lĂ -haut sur une crĂȘte Chiusi, jadis la capitale du pays, avec les ruines du chĂąteau du comle Orlando. La population est aimable et fine les montagnes l'ont tenue Ă l'abri des guerres, et l'on n'aperçoit de tous cĂŽtĂ©s que des symptĂŽmes de travail, d'aisance, de douce gaietĂ©. On pourrait se croire Ă chaque instant trans- portĂ© dans quelque vallĂ©e du Vivarais ou de la Provence. 1. Les cols qui conduisent dans le Gasentin sont tous Ă environ 1000 mĂštres d'altitude. Jusqu'Ă ces derniĂšres annĂ©es il n'y avait aucune route proprement dite. LES STIGMATES 331 Sur les bords de l'Arno la vĂ©gĂ©tation est toute mĂ©ri- dionale l'olivier et le mĂ»rier se marient avec la vigne. Sur les premiĂšres pentes sont des champs de blĂ© cou- pĂ©s par des prairies ; puis viennent les chĂątaigniers et les chĂȘnes ; plus haut encore, le pin, l'Ă©picĂ©a, le mĂ©lĂšze, et enQn le rocher nu. Parmi toutes les cimes, il en est une qui attire parti- culiĂšrement l'attention ; au lieu d'avoir un sommet arrondi et comme comprimĂ©, elle se dresse svelte, fiĂšre, isolĂ©e, c'est l'Alverne^. On dirait une immense pierre tombĂ©e du ciel ; c'est en effet un bloc erratique, posĂ© lĂ un peu comme une arche de NoĂ© pĂ©trifiĂ©e au sommet du mont Ararat. La masse basaltique, taillĂ©e Ă pic de tous cĂŽtĂ©s, porte Ă son sommet un plateau plantĂ© de pins et de hĂȘtres gigan- tesques, accessible par un seul sentier 2. Telle Ă©tait la solitude qu'Orlando avait donnĂ©e Ă François, et Ă laquelle celui-ci Ă©tait venu demander dĂ©jĂ bien des fois le repos et le recueillement. Assis sur les quelques pierres de la Penna^, il n'en- tendait plus que le bruissement du vent dans les arbres; mais dans les splendeurs de l'aurore ou du couchant, il pouvait apercevoir la plupart des contrĂ©es sur les- 1. En France, le mont Aiguille, une des sept merveilles du Dau- phinĂ©, prĂ©sente le mĂȘme aspect et la mĂȘme formation gĂ©ologique. Sainte-Odile rappelle aussi l'Alverne mais en beaucoup plus petit. 2. Le sommet est Ă 1269 mĂštres d'altitade. En italien on l'ap- pelle la Verna^ en latin Alvernus. L'Ă©tymologie qui a exercĂ© la saga- citĂ© des savants paraĂźt ĂȘtre fort simple, le verbe vernare, employĂ© par Dante, signifie faire froid, geler. 3. Nom du point le plus Ă©levĂ© du plateau. A trois quarts d'heure Ă peine du monastĂšre, et non Ă deux heures et demie comme le croient ces bons anachorĂštes. Ceci soit dit au x^rofit des touristes... et deg pĂšlerins. 332 VIE DE s. FRANĂOIS quelles il avait jetĂ© la semence de l'Ăvangile la Romagne et la Marche d'AncĂŽne, qui se perdent Ă l'ho- rizon dans les flots de l'Adriatique ; l'Ombrie et plus loin la Toscane, qui disparaissent dans ceux de la MĂ©diterranĂ©e. L'impression lĂ -haut n'est pas Ă©crasante comme celle que Ton a dans les Alpes quelque chose d'infiniment doux et calmant vous envahit ; vous ĂȘtes assez Ă©levĂ© pour juger les hommes de haut, vous ne l'ĂȘtes pas assez pour oublier leur existence. Outre les grands horizons, François y trouvait d'autres sujets d'enchantement; dans cette forĂȘt, une des plus belles de TEurope, vivent des lĂ©gions d'oiseaux qui, n'ayant jamais Ă©tĂ© traquĂ©s, sont d'une Ă©tonnante familiaritĂ©^. De subtils parfums montent du sol, oĂč au milieu des bourraches et des lichens, s'Ă©pa- nouissent en nombre fantastique de dĂ©licieux et frĂȘles cyclamens. Il voulut y retourner aprĂšs le chapitre de 1224. Cette rĂ©union tenue au commencement de juin fut la derniĂšre Ă laquelle il assista. La nouvelle RĂšgle y fut remise aux ministres, et la mission d'Angleterre dĂ©cidĂ©e. C'est dans les premiĂšres journĂ©es d'aoĂ»t que Fran- çois s'achemina vers TAlverne. Il n'avait avec lui que quelques frĂšres, Masseo, Ange et LĂ©on. Le premier avait Ă©tĂ© chargĂ© de diriger la petite troupe et de 1. La forĂȘt a Ă©tĂ© conservĂ©e comme une relique, Alexandre IV fulmina l'excommunication contre quiconque abattrait les sapins de l'Alverne. Quant aux oiseaux, il suffit d'avoir passĂ© une journĂ©e au monastĂšre pour ĂȘtre Ă©merveillĂ© de leur nombre et de leurs variĂ©tĂ©s. M. G. BĂ©ni, a entrepris Ă Stia en Gasentin une collec- tion ornithologique qui comprend dĂ©jĂ plus de 550 variĂ©tĂ©s. LES STIGMATES 333 lui Ă©viter toute autre prĂ©occupation que celle de la priĂšre ^. Oq Ă©tait en route depuis deux jours, lorsqu'il fallut s'enquĂ©rir d'un Ăąne pour François, trop affaibli pour continuer le chemin Ă pied. Les frĂšres, en demandant ce service, n'avaient pas cachĂ© le nom de leur maĂźtre ; aussi le paysan auquel ils s'Ă©taient adressĂ©s se mit-il en devoir de conduire lui- mĂȘme sa bĂȘte. AprĂšs un certain temps de marche Est-il vrai, dit-il, que vous soyez frĂšre François d'Assise?» â Eh bien ! ajouta-t-il, sur sa rĂ©ponse affir- mative, appliquez-vous Ă ĂȘtre aussi bon que les gens le disent, afin qu'ils ne soient pas trompĂ©s dans leur attente, c'est un conseil que je vous donne.» AussitĂŽt François descendit de sa monture et, se prosternant devant lui, le remercia avec effusion 2. Cependant les heures les plus chaudes de la journĂ©e Ă©taient venues. Le paysan, excĂ©dĂ© de fatigue, oubliait peu Ă peu sa surprise et sa joie pour cheminer Ă cĂŽtĂ© d'un saint, on n'en ressent pas moins les ardeurs de la soif. Il commençait Ă regretter son obligeance, lorsque François lui dĂ©signa du doigt une source inconnue jus- qu'alors et qu'on n'a plus revue ^. Ils arrivĂšrent enfin au pied du dernier escarpement. Avant de le gravir, on s'arrĂȘta pour se reposer un peu sous un grand chĂȘne, et aussitĂŽt des bandes d'oiseaux accoururent tĂ©moigner leur joie par leurs chants et leurs battements d'ailes. Voltigeant autour de François, 1. i Gel. 91; Bon. 188; Fior. I consid. 2. Fior. I consid. \ Conform. 176 b. 1. 3. 2 Gel. 2, 15 ; Bon. 100 ; Fior. I consid. 33i VIE DE s. FRANĂOIS ils se posaient sur sa tĂȘte, sur ses Ă©paules ou sur ses bras. Je vois, dit-il tout joyeux Ă ses compagnons, qu'il plaĂźt Ă notre Seigneur JĂ©sus-Christ que nous habi- tions sur ce mont solitaire, puisque nos frĂšres et nos sĆurs les oiseaux ont manifestĂ© une si grande allĂ©gresse de notre venue . ^» Cette montagne a Ă©tĂ© tout Ă la fois son Thabor et son Calvaire ; il ne faut donc pas s'Ă©tonner que les lĂ©gendes aient fleuri ici, encore plus nombreuses que pour toutes les autres Ă©poques de sa vie; la plupart d'entre elles ont le charme exquis des fleurettes rosĂ©es et odorantes pudiquement blotties aux pieds des sapins de l'Alverne. Les soirĂ©es d'Ă©tĂ© ont lĂ -haut une beautĂ© sans pa- reille ; la nature, comme Ă©touffĂ©e par les ardeurs du soleil, semble respirer de nouveau. Dans les arbres, derriĂšre les rochers, sur le gazon, mille voix s'Ă©veillent et s'harmonisent doucement avec le murmure des grands bois, mais parmi toutes ces voix, il n'en est aucune qui s'impose ou force l'attention, c'est une mĂ©lodie, dont vous jouissez sans l'entendre. Vous laissez votre regard errer sur l'horizon que l'astre disparu illumine, pen- dant de longues heures, de teintes hiĂ©ratiques, et les cimes des Apennins, tout irisĂ©es de lumiĂšre, font des- cendre dans votre Ăąme ce que le poĂšte franciscain appe- lait la nostalgie des collines Ă©ternelles 2. François la ressentait plus que personne. DĂšs le soir de leur arrivĂ©e, assis sur un tertre, au milieu de ses frĂšres, il leur fĂźt ses recommandations pour le sĂ©jour. Le recueillement de la nature aurait suffi Ă jeter dans i. Bon. 118; Fior. I consid. 2. Gel. 100. LES STIGxMATES 335 les cĆurs des germes de tristesse, et la voix du maĂźtre s'Ă©tait harmonisĂ©e avec l'Ă©motion des derniĂšres lueurs du jour il leur parla de sa mort prochaine, avec ces regrets de l'ouvrier surpris par l'ombre du soir avant l'achĂšvement de sa tache, avec ces soupirs du pĂšre qui tremble pour l'avenir de ses enfants^. Pour lui, il voulait dĂ©sormais se prĂ©parer Ă la mort par la priĂšre et la contemplation ; aussi leur demanda- t-il de le prĂ©server absolument des importuns. Orlando ^ qui s'Ă©tait dĂ©jĂ rendu auprĂšs d'eux pour leur souhaiter la bienvenue et leur offrir ses services, avait, sur sa demande, fait arranger Ă la hĂąte une hutte de bran- chages au pied d'un grand hĂȘtre. C'est lĂ qu'il voulait se tenir, Ă un jet de pierre des cellules habitĂ©es par ses compagnons. FrĂšre LĂ©on Ă©tait chargĂ© de lui apporter chaque jour ce dont il aurait besoin. Il s'y retira aussitĂŽt aprĂšs cette conversation mĂ©mo- rable, mais quelques jours plus tard, gĂȘnĂ© sans doute par la pieuse curiositĂ© des frĂšres qui Ă©piaient tous ses mouvements, il s'enfonça plus avant dans les bois, et y commença, le jour de l'Assomption, le carĂȘme qu'il voulait cĂ©lĂ©brer en l'honneur de l'archange Saint Michel et de la milice cĂ©leste. Le gĂ©nie a sa pudeur comme Tamour. Le poĂšte, l'artiste, le saint, ont besoin d'ĂȘtre seuls quand l'Esprit vient les agiter. Tout effort de pensĂ©e, d'imagination ou de volontĂ© est une priĂšre on ne prie pas en public. Malheur Ă l'homme qui n'a pas au fond du cĆur 1. Fior, II y consid. 2. Les ruines du chĂąteau de Chiusi sont Ă trois quarts d'heure de l'Alverne. 336 VIE DE s. FRANĂOIS quelques-uns de ces secrets qui ne se disent pas, parce qu'ils ne peuvent se dire, et parce que, les dirait-on, ils ne pourraient se comprendre. Segretum meum miiii ! JĂ©sus l'avait bien senti les enivrements du Thabor sont courts; ils ne doivent pas se raconter. Devant ces mystĂšres de l'Ăąme, les matĂ©rialistes et les dĂ©vots se rencontrent souvent, et s'accordent Ă rĂ©cla- mer de la prĂ©cision dans les choses qui en supportent le moins. Le croyant demande dans quel coin de TAlverne François reçut les stigmates ; si le sĂ©raphin qui lui apparut Ă©tait JĂ©sus ou un esprit cĂ©leste; ce qu'il lui dit en les lui imprimant ^, et il ne comprend pas plus cette heure, oĂč François se pĂąma de douleur et d'amour, que le matĂ©rialiste, qui demande Ă voir de ses yeux et Ă toucher de ses mains la plaie bĂ©ante. TĂąchons d'Ă©viter ces excĂšs. Ăcoutons ce que les docu- ments donnent, et ne cherchons point Ă leur faire vio- lence, pour leur arracher ce qu'ils ne racontent point, ce qu'ils ne peuvent raconter. Ils nous montrent François tourmentĂ© pour l'avenir de rOrdre, et par un immense besoin de faire de nou- veaux progrĂšs spirituels. Il Ă©tait dĂ©vorĂ© par la fiĂšvre des saints, ce besoin d'immolation qui arrachait Ă sainte ThĂ©rĂšse le cri pas- sionnĂ© ou souffrir, ou mourir!» Il se reprochait amĂšrement de n'avoir pas Ă©tĂ© trouvĂ© digne du martyre 1. Fior, IV et V consid. Ces deux considĂ©rations paraissent ĂȘtre le rĂ©sultat d'un remaniement opĂ©rĂ© sur un document primitif. Celui-ci comprenait sans doute les trois premiĂšres que le continua- teur aura interpolĂ©es et allongĂ©es. Cf. Conform. 231 a 1. Spec. 91 b, 92 a, 97; A. SS., p. 863 ss. LES STIGMATES 337 et de n'avoir pu se donner pour Celui qui s'est donnĂ© pour nous. Nous touchons ici Ă un des Ă©lĂ©ments les plus puissants et les plus mystĂ©rieux de la vie chrĂ©tienne. On peut fort bien ne pas le comprendre, il ne faut pas pour cela le nier. Il est la racine du vrai mysticisme^. La grande nouveautĂ©, apportĂ©e par JĂ©sus au monde, a Ă©tĂ© que se sentant en parfaite union avec le PĂšre cĂ©leste, il a appelĂ© tous les hommes Ă s'unir Ă lui, et par lui Ă Dieu Je suis le cep et vous ĂȘtes les sarments celui qui demeure en moi et en qui je demeure porte beaucoup de fruits, car hors de moi vous ne pouvez rien faire. » Le Christ n'a pas seulement prĂȘchĂ© cette union, il en a donnĂ© la sensation. Au soir de sa derniĂšre journĂ©e, il en a instituĂ© le sacrement, et il n'est peut-ĂȘtre pas de secte pour nier que la communion soit tout Ă la fois le symbole, le principe et la fin de la vie religieuse. Depuis dix-huit siĂšcles, les chrĂ©tiens opposĂ©s sur tout le reste, ne peuvent s'empĂȘcher de regarder tous vers celui qui, dans la chambre haute, a instituĂ© le rite des temps nouveaux La veille de sa mort, il prit le pain, il le rompit et le leur distribua en disant Prenez et mangez, car CECI est mon corps. » 1. Dans le langage courant, on comprend souvent sous le nom de mysticisme, toutes les tendances, parfois peu chrĂ©tiennes, qui font prĂ©dominer dans la vie religieuse les Ă©lĂ©ments vagues, poĂ©tiques, les Ă©lans du cĆur. Le mot de mystiques ne devrait s'appliquer qu'Ă ceux des chrĂ©tiens pour lesquels les relations immĂ©diates avec JĂ©sus forment le fond delĂ vie religieuse. Dans ce sens, saint Paul dont le systĂšme thĂ©ologico-philosophique est un des plus puissants efforts de l'esprit humain pour expliquer le pĂ©chĂ© et la rĂ©demption est en mĂȘme temps le prince des mystiques. 338 VIE DE s. FRANĂOIS JĂ©sus, en prĂ©sentant l'union avec lui comme le fond mĂȘme de la vie nouvelle^, eut soin de marquer Ă ses frĂšres que cette union Ă©tait avant tout la participation Ă ses travaux, Ă ses luttes et Ă ses souffrances; Que celui qui veut ĂȘtre mon disciple se charge de sa croix et me suive. » Saint Paul entra si bien Ă cet Ă©gard dans la pensĂ©e du MaĂźtre, qu'il poussait, quelques annĂ©es aprĂšs, ce cri d'un mysticisme qui n'a jamais Ă©tĂ© atteint J'ai Ă©tĂ© crucifiĂ© avec Christ et je vis... ou plutĂŽt ce n'est plus moi qui vis, c'est Christ qui vit en moi. » Cette parole n'est pas chez lui une exclamation isolĂ©e, c'est le centre mĂȘme de sa conscience religieuse, et il ira jusqu'Ă dire, au risque de scandaliser bien des chrĂ©tiens J'achĂšve en ma chair ce qui manque aux souffrances du Christ pour son corps qui est l'Ăglise. » Peut-ĂȘtre n'Ă©tait-il pas inutile d'entrer dans ces dĂ©- tails, pour montrer jusqu'Ă quel point François, durant les derniĂšres annĂ©es de sa vie, oii il renouvelle dans son corps la passion du Christ, se rattache Ă la tradition apostolique. Dans les solitudes de l'Alverne, comme autrefois Ă Saint-Damien, JĂ©sus se prĂ©sentait Ă lui sous sa figure de crucifiĂ©, d'homme de douleur^. Que ces effusions nous aient Ă©tĂ© rapportĂ©es sous une forme poĂ©tique et inexacte, il n'y a lĂ rien de surpre- 1. Il n'a pas voulu instituer une religion, car il sentait la vanitĂ© des observances et des dogmes. Les apĂŽtres continuĂšrent Ă frĂ©- quenter le temple juif Actes 11,46; III, 1; V, 25; XXI, 26. lia voulu inoculer au monde une vie nouvelle. 2. 2 Gel. 3, 29. Cf. 1 Gel. 115; 3 Soc. 13 et 14; 2 Gel. 1, 6; 2 Gel. 3, 123; 131; Bon. 57; 124; 203; 204; 224; 225; 309; 310 et 311. Conform. 229 b. ss. LES STIGMATES 339 nant, c'est le contraire qui devrait Ă©tonner. Il y a dans le paroxysme de l'amour divin, des ineffabilia que loin de pouvoir raconter ou faire comprendre, l'on peut Ă peine se rappeler h soi-mĂȘme. François se trouva Ă l'Alverne encore plus absorbĂ© que de coutume par son ardent dĂ©sir de souffrir pour JĂ©sus et avec lui. Ses journĂ©es se passaient, partagĂ©es entre les exercices de piĂ©tĂ© dans l'humble sanctuaire bĂąti sur la montagne, et la mĂ©ditation au milieu des forĂȘts. Il lui arrivait mĂȘme d'oublier TĂ©glise, et de rester plusieurs journĂ©es, seul, dans quelque antre de rocher, Ă repasser dans son cĆur les souvenirs de Gol- gotha. D'autres fois, il demeurait de longues heures au pied de l'autel, lisant et relisant l'Evangile et suppliant Dieu de lui montrer la voie qu'il devait suivre^. Le livre s'ouvrait presque toujours au rĂ©cit de la Passion, et cette simple coĂŻncidence, bien explicable pourtant, suffisait dĂ©jĂ Ă le troubler. La vision du CrucifiĂ© s'emparait d'autant mieux de toutes ses facultĂ©s, qu'on approchait de l'Exaltation de la Sainte-Croix 14 septembre, fĂȘte aujourd'hui relĂ©guĂ©e Ă l'arriĂšre- plan, mais cĂ©lĂ©brĂ©e au treiziĂšme siĂšcle avec une ardeur et un zĂšle bien naturels pour une solennitĂ© que l'on pourrait qualifier de fĂȘte patronale de la croisade. François redoublait ses jeĂ»nes et ses priĂšres, tout transformĂ© en JĂ©sus par amour et par compassion, dit une des lĂ©gendes. Il passa la nuit qui prĂ©cĂ©da la fĂȘte, seul, en oraison, non loin de Termitage. Le matin venu, il eut une vision. Dans les chauds -1. 1 Gel. 91- 94; Bon. 189 et 190. 340 VIE DE s. FRANĂOIS rayons du soleil levant qui, aprĂšs le froid de la nuit, ve- nait ranimer son corps, il distingua tout Ă coup une forme Ă©trange. Un sĂ©raphin, les ailes Ă©ployĂ©es, volait vers lui des confins de l'horizon et l'inondait de voluptĂ©s indicibles. Au centre de la vision apparaissait une croix, et le sĂ©ra- phin Ă©tait clouĂ© sur elle. Quand la vision disparut, il sentit aux dĂ©lices du premier moment se mĂȘler de poignantes douleurs. BouleversĂ© jusqu'au plus profond de son ĂȘtre, il cherchait anxieusement le sens de tout cela, lorsqu'il aperçut sur son corps les stigmates du CrucifiĂ©^. 1. Voir les annotations de frĂšre LĂ©on Ă l'autographe de saint François Introd. p. XLII et 1 Gel. 94, 95; Bon. 191, 192, 193. 3 Soc. 69, 70. Fior. III consid. Cf. Auct. vit. sec A. SS. p. 649. Il est Ă noter que Thomas de Gelano 1 Gel. 95, ainsi que tous les documents primitifs, dĂ©crivent les stigmates comme Ă©tant des excroissances charnues, rappelant, par la forme et la couleur, les clous dont furent percĂ©s les membres de JĂ©sus. Personne ne parle de ces blessures bĂ©antes et sanguinolentes qui ont Ă©tĂ© imaginĂ©es plus tard. Seule, la plaie du cĂŽtĂ© Ă©tait une blessure d'oĂč suintait un peu de sang. Enfin Thomas de Gelano dit qu'aprĂšs la \ision sĂ©ra- phique commencĂšrent Ă apparaĂźtre, cĆperunt apparere signa cĂźavorum. V. appendice Ătude sur les stigmates» CHAPITRE XVIII Le cantique du soleil. Automne 1224 â automne 1225. Le lendemain de la Saint-Michel 30 septembre 1224, François quitta l'Alverne pour se diriger vers la Por- tioncule. Il Ă©tait trop Ă©puisĂ© pour songer Ă faire le trajet Ă pied ; aussi le comte Orlando avait-il mis un cheval Ă sa disposition. On devine l'Ă©motion du StigmatisĂ© disant adieu Ă la montagne sur laquelle s'Ă©tait dĂ©roulĂ© le drame d'amour et de douleur qui avait consommĂ© l'union de son ĂȘtre tout entier avec le CrucifiĂ©. Amor^ amor^ Gesu desideroso, Amor voglio morire. Te abrazando Amor dolce Gesu meo sposo, Amor^ amor, la morte te domando^ Amor, amor, Gesu si pietoso Tu me te dai in te transformato Pensa ch'io vo spasmando Non so 0 io me sia Gesu speranza mia Ormai va^ dormi in amore. 30 342 VIE DE s. FRANĂOIS Ainsi chantait Jacopone de Todi dans l'ivresse des mĂȘmes ardeurs^. S'il faut en croire un document qui vient d'ĂȘtre pu- bliĂ©, frĂšre Masseo, un de ceux qui restĂšrent Ă l'Alverne, aurait consignĂ© par Ă©crit les souvenirs de cette journĂ©e 2. On se mit en route de bon matin. François, aprĂšs avoir fait ses recommandations aux frĂšres, avait eu un regard et une parole pour tout et pour tous; pour les rochers, pour les fleurs, pour les arbres, pour le frĂšre faucon, un privilĂ©giĂ© qui eut toujours l'autorisation d'entrer dans sa cellule et qui, chaque matin, Ă©tait venu, dĂšs les premiĂšres lueurs de l'aurore, lui rappeler l'heure de l'office ^. Puis la petite troupe prit le sentier de Monte-Acuto. ArrivĂ© au col d'oĂč l'on peut jeter un dernier regard sur l'Alverne, François descendit de sa monture et s'age- nouillant par terre, tournĂ© vers lui Adieu, dit-il, montagne de Dieu, montagne sainte, nions coagulatus, mons pinguis, mons in quo bene placitum est Deo habi- tare; adieu, mont Alverne, que Dieu te bĂ©nisse, le PĂšre, le Fils et le Saint-Esprit, reste en paix, jamais plus nous ne nous re verrons. » 1. Trente-sixiĂšme et derniĂšre strophe du cantique Amor de cari- tade Perche rrChai si feritol qu'on trouve dans les recueils des Ćuvres de saint François. 2. Par l'abbĂ© Amoni, Ă la suite de son Ă©dition des Fioretti, Rome, 1 vol in 12, 1889 p. 390 â 392 On ne peut que regretter, une fois de plus, le silence de cet Ă©diteur sur le manuscrit d'oĂč il a tirĂ© ces charmantes pages. Certaines indications semblent s'opposer Ă ce que l'auteur l'ait Ă©crit avant la seconde moitiĂ© du treiziĂšme siĂšcle ; d'autre part on ne voit pas le but qu'aurait poursuivi un faussaire. Une piĂšce apocryphe se dĂ©cĂšle toujours par quelque thĂšse intĂ©res- sĂ©e, or ici le rĂ©cit est d'une enfantine simplicitĂ©. 3. 2. Gel. 3, 104; Bon. 119; Fiov. II consid. LE CANTIQUE DU SOLEIL 343 Cette scĂšne si naĂŻve n'a-t-elle pas une douceur dĂ©li- cieuse et poignante? Ces paroles oii l'italien tout Ă coup ne suffit plus Ă François et oĂč il est obligĂ© de recourir au langage mystique du brĂ©viaire pour exprimer ses sen- timents ont dii vĂ©ritablement ĂȘtre prononcĂ©es par lui^. Quelques minutes aprĂšs, le rocher de l'extase avait disparu. La descente dans la vallĂ©e se fait rapidement. Les frĂšres avaient dĂ©cidĂ© d'aller coucher le soir Ă Monte- Casale, le petit ermitage au-dessus de Borgo San-Sepol- cro. Tous, mĂȘme ceux qui devaient rester Ă l'Alverne, suivaient encore leur maĂźtre. Quant Ă lui, absorbĂ© par le songe intĂ©rieur, il Ă©tait devenu tout Ă fait Ă©tranger Ă ce qui se passait, et ne s'apercevait mĂȘme pas du bruyant enthousiasme qu'excitait son passage dans les villages devenus nombreux aux environs du Tibre. A Borgo San-Sepolcro, on lui fit une vĂ©ritable ovation, sans qu'il revĂźnt Ă lui-mĂȘme; puis, quand on fut dĂ©jĂ bien loin de cette ville, comme s'il se fĂ»t rĂ©veillĂ©, il demanda Ă son compagnon si l'on n'y arriverait pas bientĂŽt 2. La premiĂšre soirĂ©e passĂ©e Ă Monte-Casale fut marquĂ©e par un miracle. François guĂ©rit un frĂšre qui Ă©tait possĂ©dĂ©^. Le lendemain matin, s'Ă©tant dĂ©cidĂ© Ă passer quelques jours dans cet ermitage, il renvoya les frĂšres de l'Alverne et le cheval du comte Orlando. Dans un des villages traversĂ©s la veille, une femme 1. Parti san Francesco per Monte- Acuto prendendo la via di Monte Arcoppe e del Foresto. Ce chemin pour aller de l'Alverne Ă Borgo San-Sepolcro est loin d'ĂȘtre le plus court ou le plus facile, mais au lieu de gagner immĂ©diatement la plaine on reste encore de longues heures sur les cimes. Tout François n'est-ii pas dans ce choix? 2. 2. Gel. 3, 41; Bon. 141; Fior. IV consid. 3. 1 Gel. 63 et 64; Fior. IV consid. 344 VIE DE s. FRANĂOIS Ă©tait depuis plusieurs jours entre la vie et la mort, ne parvenant pas Ă mettre son enfant au monde. Son entourage avait appris le passage du Saint, lors- qu'il Ă©tait dĂ©jĂ beaucoup trop loin pour courir aprĂšs lui. On juge la joie de ces pauvres gens lorsque le bruit se rĂ©pandit qu'il allait repasser. Ils allĂšrent Ă sa ren- contre et furent affreusement déçus en ne trouvant que des frĂšres. Tout Ă coup une idĂ©e leur vint prenant la bride du cheval sanctifiĂ©e par le con- tact des mains de François, ils la portĂšrent Ă la mal- heureuse qui, l'ayant placĂ©e sur son corps, accoucha aussitĂŽt sans aucune souffrance ^. Ce miracle, Ă©tabli par des rĂ©cits tout Ă fait autorisĂ©s, montre assez Ă quel degrĂ© d'enthousiasme on en Ă©tait venu parmi le peuple pour la personne de François. Pour lui, aprĂšs quelques jours passĂ©s Ă Monte-Gasale, il partit avec frĂšre LĂ©on pour Gitta di Gastello. Il y guĂ©rit une femme atteinte de troubles nerveux effrayants, et resta tout un mois Ă prĂȘcher dans cette ville et dans les environs. Lorsqu'il se remit en route, l'hiver Ă©tait presqu'arrivĂ©. Un paysan lui prĂȘta son Ăąne, mais les chemins furent si peu praticables que le soir il fut impossible d'arriver Ă un gĂźte quelconque. Les pauvres voyageurs durent passer la nuit sous un rocher ; l'abri Ă©tait plus que rudimentaire. la neige s'y engouffrait, poussĂ©e par le vent et glaçait le malheureux paysan qui profĂ©rait d'abominables jurons et maudissait François; mais celui-ci parla avec tant de gaietĂ©, qu'il finit par lui faire oublier le froid et sa mauvaise humeur 2. 1. 1 Cel. 70. Fior. IV consid. 2. Bon. 198 et 199. Fior. IV consid. LE CANTIQUE DU SOLEIL 345 Le lendemain, le Saint arriva Ă la Portioncule. Il semble n'y avoir fait qu'une courte apparition et ĂȘtre reparti Ă peu prĂšs aussitĂŽt pour aller Ă©vangĂ©liser le sud de rOmbrie. On ne peut songer Ă le suivre dans cette mission. FrĂšre Ălie l'accompagnait, ne lui cachant plus les inquiĂ©- tudes qu'il avait pour sa vie, tant il le voyait extĂ©nuĂ© ^. Depuis le retour de Syrie aoĂ»t 1220 il n'avait cessĂ© de s'affaiblir, mais son ardeur redoublait de jour en jour. Rien ne l'arrĂȘtait, ni ses souffrances, ni les solli- citations des frĂšres ; montĂ© sur un Ăąne il parcourait parfois trois ou quatre villages en une journĂ©e. Un labeur si excessif amena une infirmitĂ© plus pĂ©nible encore que les prĂ©cĂ©dentes, il fut menacĂ© de perdre la vue 2. Sur ces entrefaites, une sĂ©dition avait contraint Hono- rius III Ă quitter Rome fin avril 1225. AprĂšs quelques semaines passĂ©es Ă Tivoli, il vint se fixer Ă Rieti, oĂč son sĂ©jour devait se prolonger jusqu'Ă la fin de 1226^. L'arrivĂ©e du pape avait amenĂ© dans cette ville, avec la cour pontificale tout entiĂšre, plusieurs mĂ©decins renommĂ©s ; aussi le cardinal Hugolin qui avait suivi le pontife, apprenant la maladie de François, l'appela-t-il Ă Rieti pour l'y faire soigner. Mais malgrĂ© les instances de frĂšre Ălie, celui-ci hĂ©sitait beaucoup Ă se rendre Ă cette invitation^. 11 lui semblait qu'Un malade n'a qu'une chose Ă faire s'en remettre purement et simplement 1. 1 Gel. 109; 69; Bon. 208. Peut-ĂȘtre faut-il rattacher Ă cette tournĂ©e le passage Ă Celano 2 Gel. 3,30. Spec. 22; Bon. 156 et 157. 2. 1 Gel. 97 et 98; 2 Gel. 3, 137; Bon. 205 et 206. 3. Richard de S. Germano ann. 1225. Cf. Potthast 7400 ss. 4. 1 Gel. 98 et 99; 2 Gel. 3, 137 ; Fior. 19. 346 VIE DE s. FRANĂOIS entre les mains du PĂšre cĂ©leste. Qu'est-ce que la souf- france pour une Ăąme qui est fixĂ©e en Dieu ^ ? Elie finit cependant par le convaincre, et le dĂ©part fut dĂ©cidĂ©; mais auparavant François voulait aller prendre congĂ© de sainte Glaire et se reposer un peu auprĂšs d'elle. Il s'arrĂȘta Ă Saint-Damien bien plus longtemps qu'il ne l'avait projetĂ©^ fin juillet â commencement de sep- tembre 1225. Son arrivĂ©e dans le cher monastĂšre avait Ă©tĂ© marquĂ©e par une recrudescence terrible de ses maux. Pendant quinze jours, sa cĂ©citĂ© fut si complĂšte qu'il ne distinguait mĂȘme pas la lumiĂšre. Les soins qu'on lui donnait n'amenaient aucun rĂ©sultat, depuis qu'il passait chaque jour de longues heures Ă pleurer. Larmes de pĂ©nitence, disait-il, mais aussi de regret^. Ah! qu'elles Ă©taient diffĂ©rentes de ces larmes des instants d'inspira- tion et d'Ă©motion qui coulaient sur son visage tout illu- minĂ© de joie. On l'avait vu, dans ces moments, ramasser deux morceaux de bois, et s'accompagnant sur ce violon rustique^ improviser en français des cantiques, oĂč il dĂ©versait le trop plein de son cĆur^. Mais ce rayonnement de gĂ©nie et d'espĂ©rance avait disparu. Rachel pleure ses enfants et ne veut pas ĂȘtre consolĂ©e, car ils ne sont plus. Il y a dans les larmes de François ce mĂȘme quia non sunt pour ses fils spirituels. Mais s'il y a des douleurs irrĂ©mĂ©diables, il n'y en a point qui ne puissent Ă la fois s'exalter et s'adoucir, 1. 2 Gel 3, 110; RĂšgle de 1221 cap. 10. 2. Voir aprĂšs le Cantique du soleil l'indication des sources. 3. 2 Gel. 3, 138. 4. Ce trait a paru si original aux auteurs qu'ils l'ont soulignĂ© d'un ut oculis vidimus 2 Gel. 3, 67 ; Spec. 119 a. LE CANTIQUE DU SOLEIL 347 lorsque nous les endurons tout prĂšs de ceux qui nous aiment. A cet Ă©gard, ses compagnons ne pouvaient lui ĂȘtre d'un grand secours. Les consolations morales ne sont possibles que de pair Ă Ă©gal, ou lorsque deux cĆurs sont unis par une passion mystique si grande qu'ils se com- prennent et se confondent. Ah! si les frĂšres savaient tout ce que je souffre, disait saint François quelques jours avant l'impression des stigmates, de quelle pitiĂ© et de quelle compassion ils seraient Ă©mus! » Mais eux, en voyant celui qui leur avait fait de la gaietĂ© un devoir devenir de plus en plus triste et se tenir Ă l'Ă©cart, s'imaginaient qu'il Ă©tait tourmentĂ© par des tentations diaboliques^. Glaire devina l'inexprimable. A Saint-Damien, son ami revoyait tout le passĂ© ; que de souvenirs revĂ©cus d'un seul coup d'Ćil! Ici, l'olivier auquel, brillant cavalier, il attachait sa monture; lĂ , le banc de pierre, oĂč s'asseyait son ami, le prĂȘtre de la pauvre chapelle; plus loin, la cachette oĂč il s'Ă©tait rĂ©fugiĂ© pour Ă©chapper Ă la colĂšre paternelle, et surtout le sanctuaire avec le crucifix mys- tĂ©rieux de l'heure dĂ©cisive. En ravivant ces images du lointain radieux, François exaspĂ©rait encore sa douleur; mais tout ne parlait pas seulement de mort et de regret. Glaire Ă©tait lĂ , aussi dĂ©ci- dĂ©e, aussi ardente que jamais. TransfigurĂ©e jadis par l'ad- miration, elle l'Ă©tait maintenant par la compassion. Assise aux pieds de celui qu'elle aimait plus qu'on n'aime sur la terre, elle sentait les meurtrissures de son Ăąme et 1. Spec. 123 a; 2 Gel. 3, 58. 348 VIE DE s. FRANĂOIS l'effondrement de son cĆur. Qu'importe aprĂšs Ćla que les sanglots de François aient redoublĂ© au point de le rendre aveugle pendant quinze jours! L'apaisement venait, la vierge consolatrice allait lui rendre la sĂ©rĂ©nitĂ©. Tout d'abord, elle le retint, et se mettant elle-mĂȘme Ă la besogne, lui fit avec des roseaux une grande cellule dans le jardin du monastĂšre, afin qu'il eĂ»t l'entiĂšre libertĂ© de ses mouvements. Comment refuser une hospitalitĂ© si franciscaine? Elle ne le fut que trop; des lĂ©gions de souris et de rats infes- taient ce recoin ; la nuit, ils se promenaient jusque sur le lit de François avec un vacarme infernal, si bien qu*au milieu de ses souffrances, il ne pouvait trouver aucun repos. Mais il oubliait bien vite tout cela auprĂšs de son amie. Une fois de plus elle lui rendait la foi et le cou- rage. Un rayon de soleil, disait-il, suffit Ă dissiper bien des tĂ©nĂšbres ! Cependant l'homme des anciens jours se rĂ©veillait peu Ă peu en lui et parfois les sĆurs entendaient, se mĂȘlant au murmure des pins et des oliviers, l'Ă©cho de cantiques inconnus, qui semblaient venir de la cellule de roseaux. Un jour, il s'Ă©tait assis Ă la table du monastĂšre aprĂšs une longue conversation avec Claire. On avait Ă peine commencĂ© Ă manger, lorsque tout Ă coup il sem- bla ravi en extase. Laudato sia lo Signore ! s'Ă©cria-t-il en revenant Ă lui. Il venait de composer le Cantique du soleil ^. 1. J'ai combinĂ© le rĂ©cit de Celano et celui des ConformitĂ©s. Les dĂ©tails donnĂ©s par ce second document me paraissent absolument dignes de foi. On voit trĂšs bien pourquoi Celano les a omis, et on ne s'expliquerait pas comment ils auraient Ă©tĂ© inventĂ©s tardivement. 2 Cel. 3, 138; Conform. 42 b 2 ; 119 b 1 ; 184 b 2 ; 239 a 2; Spec. 123 a ss ; Fior. 19. LE CANTIQUE DU SOLEIL 349 Texte^ INCIPIUNT LAUDES CREATURARUM QUAS FECIT BEATUS FRANCISCUS AD LAUDEM ET HONOREM DEI CUM ESSET INFIRMUS AD SANCTUM DAMIANUM. Altissimu, onnipotente, bon signore, tue so le laude la gloria e l'onore et onne benedictione. Ad te solo, altissimo_, se konfano et nullu homo ene dignu te mentovare. Laudato sie^ mi signore, cum tucte le tue crĂ©ature spetialmente messor lo frate sole, lo quale jorna_, et illumini per lui; Et ellu Ăš bellu e radiante cum grande splendore; de te, altissimOj porta signifĂźcatione. Laudato si, mi signore, per sora luna e le stelle^ in celu 1' ai formate clarite et pretiose et belle. Laudato si, mi signore, per frate vento et per aĂšre et nubilo et sereno et onne tempo, per le quale a le tue crĂ©ature dai sustentamento. Laudato si, mi signore, per sor acqua, la quale Ăš multo utile et humele et pretiosa et casta. Laudato si_, mi signore, per frate focu, per lo quale ennallumini la nocte, ed ello Ăš bello et jucundo et robustoso et forte. 1. D'aprĂšs le manuscrit 338 d'Assise f° 33 a. V. p. XXXVIII. Il a Ă©tĂ© dĂ©jĂ publiĂ© d'aprĂšs ce manuscrit par le P. Panfilo da Magliano Storia compendiosa di San Francesco. Rome 2 vol. in-18, 1874- 1876. Les ConformitĂ©s 202 b 2-203 a 1 en donnent une leçon qui ne s'Ă©carte de celle-ci que par des variantes insignifiantes. Le savant philologue Monaci en a Ă©tabli un texte critique fort remar- quable, dans sa Crestomazia italiana dei primi secoli. Gitta di Castello, fascicule I, 1889 in-8o, p. 29-31. Ce travail tout Ă fait scrupuleux me dispense d'indiquer plus au long les manuscrits ou les Ă©ditions. 350 VIE DE S. FRANĂOIS Laudato si^ mi signore, per sora noslra matre terra, la quale ne sustenta et governa et produce diversi fructi con coloriti flori et herba. Laudato si, mi signore, per quilli ke perdonano per lo tuo et sostengo infirmitate et tribulatione. [amore beati quilli ke sosterrano in pace, ka da te, altissimo, sirano incoronati. Laudato si, mi signore, per sora nostra morte corporale, da la quale nullu homo vivente po skappare ; guai a quilli ke morrano ne le peccata mortali ; beati quilli ke se trovarĂ ne le tue sanctissime voluntati, ka la morte secunda nol farrĂ maie. Laudate et benedicete mi signore et rengratiate et serviteli cum grande humilitate. LK CANTIQUE DU SOLEIL 351 TRADUCTION JUXTALINEAIRE â TrĂšs-haut, tout-puissant, bon Seigneur, VĂŽtres sont les louanges^ la gloire et l'honneur et toute bĂ©nĂ©- A vous seul, TrĂšs-Haut, elles sont dues [diction et aucun homme n'est digne de vous nommer. â Soyez louĂ©, Seigneur, avec toutes vos crĂ©atures spĂ©cialement monseigneur frĂšre soleil qui donne le jour et par lui vous montrez votre lumiĂšre. Il est beau et rayonnant avec grande splendeur, de vous, TrĂšs-Haut, il est le symbole. â Soyez louĂ©. Seigneur, pour sĆur lune et les Ă©toiles, dans le ciel vous les avez formĂ©es claires, prĂ©cieuses et belles. â Soyez louĂ©. Seigneur, pour frĂšre vent et pour l'air et le nuage, pour le ciel pur et pour tout temps par lequel vous donnez Ă vos crĂ©atures la vie et le soutien. â Soyez louĂ©, Seigneur, pour sĆur eau laquelle est si utile, humble, prĂ©cieuse et chaste â Soyez louĂ©. Seigneur, pour frĂšre feu par lequel vous illuminez la nuit, il est beau et gai , courageux et fort. â Soyez louĂ©. Seigneur, pour sĆur notre mĂšre la terre qui nous soutient et nous nourrit et produit divers fruits avec les fleurs aux mille couleurs et [l'herbe. â Louez et bĂ©nissez le Seigneur et rendez-lui grĂąces et servez-le avec grande humilitĂ© *, 1. V. p. 378 et 381 les deux derniĂšres strophes de ce cantique Cf. Ozanam, PoĂštes franscicains, Paris, 1882, p. 77 et 361. Les Miscellanea t. II 1887, p. 190; t. III 1888, p. 3, reproduisent sept textes de ce document Cf. t. IV 1889, p. 87 ss. 352 VIE DE s. FRANĂOIS La joie de François Ă©tait revenue, aussi grande qu'autrefois. Pendant toute une semaine, il oublia le brĂ©viaire et passa ses journĂ©es Ă rĂ©pĂ©ter le Cantique du soleil. Durant une nuit d'insomnie, il avait entendu une voix lui dire Si tu avais de la foi, gros comme un grain de moutarde, tu dirais Ă cette montagne, enlĂšve-toi de lĂ , et elle s'enlĂšverait. » Cette montagne n'Ă©tait-elle pas celle de ses souffrances, la tentation du murmure et du dĂ©sespoir? Qu'il soit fait, Seigneur, selon votre pa- role d, avait-il rĂ©pondu de toute son Ăąme, et aussitĂŽt il s'Ă©tait senti comme dĂ©livrĂ©^. ĂŻl dut s'apercevoir bientĂŽt que la montagne n'avait guĂšre changĂ© de place, mais pendant quelques jours il en avait dĂ©tournĂ© les yeux, il avait pu en oublier l'existence. Un moment, il avait eu l'idĂ©e de mander auprĂšs de lui frĂšre Pacifique, le Roi des Vers, pour remanier le cantique ; il aurait voulu lui adjoindre un certain nombre de frĂšres, qui seraient allĂ©s avec lui prĂȘcher de ville en ville. AprĂšs la prĂ©dication, ils auraient chantĂ© l'hymne du soleil, et auraient terminĂ© en disant Ă la foule rassemblĂ©e autour d'eux sur les places publiques Nous sommes les jongleurs de Dieu. Nous dĂ©sirons ĂȘtre rĂ©compensĂ©s pour notre sermon et notre chanson. Notre paiement sera que vous persĂ©vĂ©riez dans la pĂ©ni- tence 2. » G Les serviteurs de Dieu, ajoutait-il, ne sont-ils pas en effet comme des jongleurs destinĂ©s Ă relever les 1. 2. Gel. 3,58; Spec. 123 a. 2. Spec. 124 a. Cf. Miscellanea 1889, IV p. 88. LE CANTIQUE DU SOLEIL 353 cĆurs des hommes et Ă les porter Ă la joie spiri- tuelle?» Le François des anciennes ivresses Ă©tait revenu, le laĂŻque, le poĂšte, l'artiste. Le Cantique des crĂ©atures est fort beau il lui manque pourtant une strophe, mais si elle ne fut pas sur les lĂšvres de saint François elle fut certainement dans son cĆur Soyez louĂ©j Seigneur^ pour sĆur Glaire ; vous l'avez faite silencieuse, active et subtile, et par elle votre lumiĂšre brille dans nos coeurs. CHAPITRE XIX La derniĂšre annĂ©e. Septembre 1225 - fin septembre 122G Que pensa Hugolin lorsqu'on lui raconta que Fran- çois voulait envoyer ses frĂšres transformĂ©s en Jocula- tores Domini, chanter partout le Cantique de frĂšre soleil ? Peut-ĂȘtre ne le sut-il jamais. Son protĂ©gĂ© se dĂ©cida enfin Ă se rendre Ă son invitation et quitta Saint- Damien dans le courant du mois de septembre. Le paysage qui s'offre aux. yeux du voyageur arri- vant d'Assise, lorsqu'il dĂ©bouche tout Ă coup dans la plaine de Rieti, est un des plus beaux de l'Europe. A partir de Terni, le chemin suit le cours sinueux du Velino, passe non loin des fameuses cascades dont on aperçoit les nuages d'Ă©cume, puis s'engage dans des dĂ©filĂ©s au fond desquels le torrent roule avec un fracas Ă©pouvantable, tout embarrassĂ© d'une vĂ©gĂ©tation aussi luxuriante que celle d'une forĂȘt vierge. De tous cĂŽtĂ©s surgissent des parois de rochers perpendiculaires, et Ă leur cime, Ă quelques centaines de mĂštres au-dessus de votre tĂȘte, des forteresses fĂ©odales, entre autres le chĂą- teau de Miranda, plus vertigineux, plus fantastique que ceux que rĂȘva l'imagination de Gustave DorĂ©. AprĂšs quatre heures de marche, le dĂ©filĂ© s'arrĂȘte, et L\ DERNIĂRE ANNĂE 355 l'on se trouve sans transition dans une grande vallĂ©e toute Ă©tincelante de lumiĂšre. Rieti, la seule citĂ© bĂątie dans cette plaine de quel- ques lieues, Ă©merge lĂ -bas, Ă l'autre extrĂ©mitĂ©, avec ses tours et ses clochers, dominĂ©e de collines d'un aspect tout mĂ©ridional, derriĂšre lesquelles se dressent les masses de l'Apennin presque toujours couvert de neige. La route va droit sur cette ville, passant entre des lacs minuscules ; Ă chaque instant s'en dĂ©tachent des chemins conduisant Ă de petits villages que l'on aperçoit bĂątis Ă mi-cĂŽte, au-dessus des terrains cultivĂ©s, h la lisiĂšre des forĂȘts voici Stroncone, Greccio, Cantalice, Poggio-Buscone et dix autres bourgs infimes, qui ont donnĂ© Ă TEglise plus de saints que toute une province de France. Entre les habitants du pays et leurs voisins de TOmbrie proprement dite, la diffĂ©rence est extrĂȘme ils ont tous le type si accusĂ© des paysans de la Sabine et restent encore aujourd'hui tout Ă fait Ă©trangers aux mĆurs nouvelles. On y naĂźt capucin, comme ailleurs on naĂźt militaire, et le voyageur a besoin de quelque attention, pour ne pas traiter de RĂ©vĂ©rend PĂšre tous les hommes qu'il rencontre. François avait souvent parcouru cette contrĂ©e dans tous les sens. Comme sa voisine, la montueuse Marche d'AncĂŽne, elle Ă©tait particuliĂšrement bien prĂ©parĂ©e pour recevoir l'Ă©vangile nouveau. Dans ces ermitages d'une simplicitĂ© invraisemblable, perchĂ©s de tous cĂŽtĂ©s Ă proxi- mitĂ© des villages, sans aucun souci de l'agrĂ©ment matĂ©- riel, mais toujours sur les points oĂč la vue s'Ă©tend sur le plus vaste horizon, devait se perpĂ©tuer une race de FrĂšres Mineurs passionnĂ©s, fiers, obstinĂ©s, presque 356 VIE DE s. FRANĂOIS sauvages, qui n'ont pas compris leur maĂźtre tout entier, qui n'ont pas saisi sa bonhomie exquise, son impuis- sance Ă haĂŻr, ses rĂȘves de rĂ©novation politique et sociale, sa poĂ©sie et sa dĂ©licatesse, mais qui ont compris l'amant de la nature et de la pauvretĂ©^. Ils ont fait plus que de le comprendre, ils ont vĂ©cu de sa vie, et depuis cette fĂȘte de NoĂ«l cĂ©lĂ©brĂ©e dans les bois de Greccio jusqu'Ă aujourd'hui, ils sont restĂ©s les reprĂ©sentants naĂŻfs et populaires de l'Ă©troite Observance. C'est de lĂ que nous est venue avec la LĂ©gende des Trois Compagnons, le portrait le plus vivant et le plus vrai du Poverello, et c'est lĂ , dans une cellule de trois pas de long, que Jean de Parme alla achever ses apocalyptiques visions. La nouvelle de l'arrivĂ©e de François s'Ă©tait trĂšs vite rĂ©pandue, et bien avant qu'il atteignĂźt Rieti, la popula- tion sortait Ă sa rencontre. Pour se dĂ©robar Ă ce bruyant accueil, il alla deman- der l'hospitalitĂ© au prĂȘtre de Saint-Fabien. Cette petite Ă©glise, connue aujourd'hui sous le nom de Notre-Dame de la ForĂȘt, se trouve un peu Ă l'Ă©cart de la route, sur un verdoyant mamelon Ă peu prĂšs Ă une lieue de la citĂ©. Il y fut bien accueilli et dĂ©sira s'y arrĂȘter un peu, si bien que les jours suivants, prĂ©lats et dĂ©vots com- mencĂšrent Ă affluer. On Ă©tait au temps des premiers raisins. Il est facile de deviner l'Ă©moi du prĂȘtre en s'apercevant des ravages que les visiteurs faisaient Ă sa vigne, la source la plus 1. Voici la liste des monastĂšres qui, d'aprĂšs Rodolphe de Tos- signano, acceptĂšrent vers la fin du treiziĂšme siĂšcle les idĂ©es d'An- gelo Clareno Fermo, SpolĂšte, Gamerino, Ascoli, Rieti, Foligno, Nursie, Aquila, Amelia Historiarum seraphicĆ rcligionis libri trĂšs. Venise 1586. 1 vol. in f^, 155 a. LA DERNIERE ANNEE 357 claire de ses revenus, mais il s'exagĂ©rait sans doute les dĂ©gĂąts. François l'entendit un jour exhaler sa mauvaise humeur Mon PĂšre, lui dit-il, il est inutile de vous tourmenter de ce que nous ne pouvons empĂȘcher, mais dites-moi, combien recueillez-vous de vin en moyenne? » â Quatorze mesures, dit le prĂȘtre.» â Eh bien! si vous en avez moins de vingt, je me charge de vous procurer la diffĂ©rence.» Cette promesse rassura le pauvre homme, et lorsque la vendange venue, il recueillit vingt mesures, il n'hĂ©- sita pas Ă croire Ă un miracle^. Cependant François, sur les instances d'Hugolin, avait acceptĂ© l'hospitalitĂ© Ă l'Ă©vĂȘchĂ© de Rieti Thomas de Gelano s'Ă©tend avec complaisance sur les marques de dĂ©votion que ce prince de l'Ăglise lui prodigua. Mal- heureusement tout cela est Ă©crit dans ce style pompeux et confus dont les diplomates et les ecclĂ©siastiques semblent avoir naturellement le secret. François passait de son vivant Ă l'Ă©tat de relique. Autour de lui s'Ă©talait, dans tout son excĂšs^ la manie des amulettes. On se disputait non seulement ses vĂȘtements, mais jusqu'Ă ses cheveux et Ă ses rognures d'ongles 2. Ces dĂ©monstrations purement extĂ©rieures lui rĂ©pu- gnaient-elles? Pensait-il quelquefois au contraste qu'il y avait entre ces honneurs rendus Ă son corps, qu'il avait pittoresquement surnommĂ© frĂšre Ăąne, et la dĂ©route 1. Spec. 129 b; Fior. 19. Dans quelques-uns des rĂ©cits sur celte pĂ©riode on voit jusqu'Ă l'Ă©vidence comment certains faits se sont peu Ă peu transformĂ©s en miracles. Comparer par exemple le mi- racle de Saint-Urb ;in dans Bon. 68, et 1 Gel. 61. Voir aussi 2 Gel. 2, 10; Bon. 158 et 159. 2. 1 Gel. 87 ; 2 Gel. 2, 11; Conform, 148 a 2; Bon. 99. Sur le' sĂ©jour V. 2 Gel. 2, 10; Bon. 158 et 159; 2 Gel. 2, 11; 2, Gel. 3, 36. 31 358 VIE DE s. FRANĂOIS de son idĂ©al? Nous ne savons. S'il a eu des sentiments de ce genre, ceux qui l'entouraient n'Ă©taient pas gens Ă les comprendre, et il serait naĂŻf d'en attendre l'ex- pression sous leur plume. BientĂŽt aprĂšs, il eut une rechute et demanda Ă ĂȘtre transportĂ© Ă Monte-Colombo^, ermitage Ă une heure de la ville, perdu au milieu des arbres et d'un fouillis de rochers. Il s'y Ă©tait retirĂ© dĂ©jĂ plusieurs fois, notamment lors- qu'il prĂ©parait la RĂšgle de 1223. Les mĂ©decins, aprĂšs avoir Ă©puisĂ© l'arsenal thĂ©- rapeutique de l'Ă©poque, dĂ©cidĂšrent de recourir aux cautĂ©risations il s'agissait de promener une tige de fer chauffĂ©e Ă blanc sur son front. Lorsque le pauvre patient vit apporter le rĂ©chaud avec les instruments, il eut un instant de frayeur, mais aussitĂŽt faisant sur le fer incandescent le signe de la croix FrĂšre feu, dit-il, tu es beau entre toutes les crĂ©atures, sois-moi propice en cette heure; tu sais combien je t'ai toujours aimĂ©, sois-moi donc courtois aujourd'hui. » Un instant aprĂšs, lorsque ses compagnons qui n'a- vaient pas eu le courage de rester revinrent 0 gens pusillanimes, leur fit-il en souriant, pourquoi avez- vous fui, je n'ai ressenti aucune douleur. FrĂšre mĂ©decin, si cela est nĂ©cessaire, vous pouvez recommencer. » Cette tentative ne rĂ©ussit pas plus que les autres remĂšdes. On eut beau aviver les plaies du front, en y appliquant des emplĂątres, des collyres, et mĂȘme en y 1. Nom italien actuel du monastĂšre qu'on a appelĂ© aussi Monte- Rainerio et Fonte-Palumho. LA DERNIĂRE ANNEE 359 pratiquant des incisions, le seul rĂ©sultat fut d'accroĂźtre encore les souffrances du malade ^. Un jour, Ă Rieti oĂč on l'avait de nouveau transportĂ©, il pensa qu'un peu de musique allĂ©gerait ses douleurs. Appelant un frĂšre jadis habile Ă pincer de la guitare, il le pria d'en emprunter une, mais celui-ci eut peur du scandale que cela pourrait donner et François se rĂ©signa. Le bon Dieu eut pitiĂ© de lui; la nuit suivante, il en- voya un ange invisible lui donner un concert tel qu'on n'en entend pas sur la terre 2. François en perdait, ajoutent les Fioretti, tout sentiment corporel et, Ă un moment, la mĂ©lodie se fit tellement douce et pĂ©nĂ©trante, que si l'ange eĂ»t donnĂ© un coup d'archet de plus, l'Ăąme du malade aurait quittĂ© son corps ^. Il semble qu'il y eut quelque amĂ©lioration dans son Ă©tat lorsque les mĂ©decins l'abandonnĂšrent on le re- trouve durant les mois de cet hiver J225 â 1226 dans les ermitages les plus Ă©cartĂ©s de la contrĂ©e, car dĂšs qu'il avait un peu de force, il voulait se remettre Ă prĂȘcher. Il alla passer les fĂȘtes de NoĂ«l Ă Poggio Buscone^ oĂč on se rendit en foule de tous les environs pour 1. 1 Gel. 101; 2 Gel. 3, 102; Bon. 67; Spec. 134 a. 2. 2 Gel. 3, 66 ; Bon. 69. 3. Fior. II consid. Gf. Roger Bacon Opus tertium {ap. Mon. Germ. hist. Script, t. 28, p. 577. B. Franciscus jussit fratri cythariste ut dulcius personaret, quatenus mens excitaretur ad harmonias cĆlestes quas pluries audivit. Mira enim musicĆ super omnes scientias et spectanda potestas. 4. Village Ă trois heures de marche au nord de Rieti. La cellule de François y subsiste encore sur la montagne, Ă trois quarts d'heure de la localitĂ©. 360 VIE DE S. FRANĂOIS le voir et l'entendre Vous accourez ici, dit-il, croyant y trouver un grand saint, que penserez-vous quand vous saurez que j'ai fait gras pendant tout l'Avent^? » A Saint-ĂleuthĂšre^, au moment des plus grands froids qui l'Ă©prouvaient beaucoup, il avait cousu sur sa tu- nique et sur celle de son compagnon des morceaux d'Ă©toffe, de façon Ă rendre ces vĂȘtements un peu plus chauds. Un jour son compagnon revint avec une peau de renard dont il voulait, Ă son tour, doubler la tunique de son maĂźtre. François en fut bien joyeux, mais ne permit cet excĂšs de complaisance pour son corps qu'Ă la condition qu'un morceau de la fourrure serait placĂ© ostensiblement sur la poitrine. Tous ces traits, presque insignifiants au premier abord, montrent combien jusque dans les plus petites choses, il dĂ©testait l'hypocrisie. Nous ne le suivrons pas Ă son cher Greccio^, ni mĂȘme Ă l'ermitage de Saint-Urbain, perchĂ© sur une des cimes les plus Ă©levĂ©es de la Sabine^. Les rĂ©cits que nous avons sur la courte apparition qu'il y fit alors, n'apprennent rien de nouveau sur son caractĂšre ou sur l'histoire de 1. 2 Gel. 3, 71. Cf. Spec. 43 a. 2. Chapelle encore debout Ă quelques minutes de Rieti. 2 Gel. 3, 70; Spec. 15 a; 43 a. 3. 2 Gel. 2, 14; Bon. 167 ; 2 Gel. 3, 10; Bon. 58, Spec. 122 b. 4. Wadding, ann. 1213, n. 14, place avec raison Saint-Urbain dans le comtĂ© de Narni. L'Eremo di S. Urbano se trouve Ă une demi-heure du village du mĂȘme nom, sur le mont S. Pancrazio, 1026 m. Ă trois heues au sud de Narni. Le panorama est un des plus beaux de Tltalie centrale. Les Bollandistes se sont laissĂ© induire en erreur par une affirmation intĂ©ressĂ©e, lorsqu'ils placent Saint-Urbain, prĂšs de Jesi p. 623 f. et 024 a. 1 Gel. 61 ; Bon. 68 V. Bulle Cum aliqua du 15 mai 1218 oĂč il est fait mention de- Saint-Urbain. L\ DERNIĂJIE ANNĂE 361 sa vie. Tls montrent seulement que Timagination de son entourage Ă©tait extraordinairement surchauffĂ©e ; les moindres incidents prenaient aussitĂŽt des couleurs miraculeuses^. Les documents ne disent pas comment il se dĂ©cida Ă partir pour Sienne. Dans cette ville se trouvait, paraĂźt-il, un mĂ©decin trĂšs connu comme oculiste. Le traitement prescrit par lui ne rĂ©ussit pas mieux que les autres ; mais avec le retour du printemps, François avait fait un nouvel effort pour rentrer dans la vie active. On le trouve dĂ©crivant le monastĂšre franciscain idĂ©al 2, et un autre jour, expliquant Ă un Dominicain un passage de la Bible. Celui-ci, docteur en thĂ©ologie, avait-il voulu ridicu- liser l'ordre rival, en montrant son fondateur incapable d'interprĂ©ter un verset un peu difficile? Gela paraĂźt fort possible Mon bon pĂšre, lui dit-il, comment comprenez-vous cette parole du prophĂšte EzĂ©chiel Si vous ne dĂ©noncez pas au mĂ©chant son impiĂ©tĂ©, je vous redemanderai son Ăąme. » Je connais bien des hommes que je sais ĂȘtre en Ă©tat de pĂ©chĂ© mortel, et cependant je ne suis pas toujours Ă leur reprocher leurs vices. Suis-je donc responsable de leur Ăąme ? » François s'excusa d'abord, allĂ©guant son ignorance, mais pressĂ© par son interlocuteur, il finit par dire < Oui, le vrai serviteur reprend sans cesse le mĂ©chant, mais il le fait surtout par sa conduite, par la vĂ©ritĂ© qui 1. On peut en dire autant de l'apparition des trois vierges entre Campilia et San-Quirico. 2 Gel. 3, 37 ; Bon, 93. 2. Spec. 12 b; Coiiform 169 a 1. 362 VIE DE s. FRANĂOIS resplendit dans ses paroles, par la lumiĂšre de son exemple, par tout le rayonnement de sa vie^.» Il eut bientĂŽt une rechute tellement grave que les frĂšres crurent sa fin arrivĂ©e. Ils avaient Ă©tĂ© effrayĂ©s surtout par des vomissements de sang qui le mirent dans un Ă©tat de prostration extrĂȘme. FrĂšre Elie accou- rut. A son arrivĂ©e, le malade Ă©prouva une telle amĂ©lio- ration qu'on put acquiescer Ă son dĂ©sir de le ramener en Ombrie. Vers la mi-avril on se mit en route dans la direction de Gortone, C'Ă©tait la voie la plus facile, et le dĂ©licieux ermitage de cette ville Ă©tait un des mieux appropriĂ©s pour qu'il pĂ»t y avoir quelque repos. Il y resta sans doute assez peu de temps; il avait hĂąte de revoir l'horizon de la terre natale, la Portioncule, Saint- Damien, les Garceri, tous ces sentiers et ces hameaux que l'on aperçoit des terrasses d'Assise, et qui lui rappe- laient tant de doux souvenirs. Au lieu d'y aller par le plus court chemin, on fit un long dĂ©tour par Gubbio et Nocera, pour Ă©viter PĂ©rouse, de peur de quelque tentative des habitants pour s'em- parer du Saint. Une relique telle que le corps de Fran- çois n'Ă©tait pas loin de valoir le saint clou ou la sainte lance 2. On se battait pour moins que cela. Ils firent un petit sĂ©jour prĂšs de Nocera, Ă l'ermitage de Bagnara, adossĂ© au Monte-Pennino^. Ses compagnons y furent de nouveau trĂšs inquiets. L'enflure qui s'Ă©tait 1. 2 Gel. 3, 46; Bon. 153; Spec. 31 b ; Ăzech. 33, 9. 2. Deux ans aprĂšs, le roi de France et toute la cour baisa et vĂ©nĂ©ra l'oreiller dont François malade s'Ă©tait servi 1 Gel. 120. 3. Bagnara se trouve prĂšs des sources du Topino, Ă une heure environ Ă l'est de Nocera. Ges deux localitĂ©s dĂ©pendaient alors d'Assise. LX DERNIĂRE ANNĂE 363 manifestĂ©e aux membres infĂ©rieurs gagnait rapidement le haut du corps. Les Assisiates l'apprirent, et voulant parer Ă toutes les Ă©ventualitĂ©s, envoyĂšrent leurs gens d'armes pour protĂ©ger et hĂąter le retour du Saint. Ils s'arrĂȘtĂšrent en ramenant François au hameau de Balciano^ pour y manger, mais ils priĂšrent inutilement les habitants de leur vendre des provisions. Comme ils faisaient part de leur dĂ©convenue aux frĂšres, François qui connaissait ces bons paysans dit Si vous aviez demandĂ© Ă manger sans offrir de payer, vous auriez trouvĂ© tout ce que vous auriez voulu. Il avait raison, car ayant suivi son avis, ils reçurent pour rien tout ce qu'ils dĂ©siraient 2. L'arrivĂ©e du cortĂšge Ă Assise fut saluĂ©e par une joie frĂ©nĂ©tique. Cette fois les compatriotes de François Ă©taient sĂ»rs que leur Saint n'irait pas mourir ailleurs ^. Les mĆurs Ă cet Ă©gard ont trop changĂ© pour que nous comprenions tout Ă fait le bonheur de possĂ©der un corps saint. Ayez le malheur de nommer saint AndrĂ© devant un habitant d'Amalfi, aussitĂŽt vous le voyez se mettre Ă crier Evviva S. AndrĂ©a! Evviva S, AndrĂ©a! puis avec une volubilitĂ© extraordinaire il vous raconte la lĂ©gende du Grande Protettore, ses miracles passĂ©s et prĂ©sents, ceux qu'il pourrait faire, s'il voulait, mais qu'il s'interdit par charitĂ©, parce que saint Janvier de Naples ne pourrait en faire autant. Il s'agite, se dĂ©mĂšne 1. Et non Sarliano; Balciano existe encore, Ă peu prĂšs Ă moitiĂ© chemin entre Nocera et Assise. 2. 2 Gel. 3, 23 ; Bon. 98 ; Spec. 17 b ; Conform. 239 a 2 f . 3. 2 Gel. 3, 33 ; 1 Gel. 105 est encore plus explicite La multi- tude espĂ©rait qu'il mourrait bientĂŽt, et lĂ Ă©tait le sujet de sa joie. » 364 VIE DE s. FRANĂOIS et VOUS secoue, plus enthousiaste de sa relique et plus exaspĂ©rĂ© de votre froideur qu'un soldat de la vieille garde devant un ennemi de l'Empereur. Au XIIP siĂšcle, toute l'Europe en Ă©tait lĂ . On trouvera ici plusieurs traits qu'on pourrait ĂȘtre tentĂ© d'estimer choquants ou mĂȘme ignobles, si on ne faisait effort pour remettre tout cela dans son milieu. François fut installĂ© Ă l'Ă©vĂȘchĂ© ; il aurait prĂ©fĂ©rĂ© ĂȘtre portĂ© Ă la Portioncule, mais les frĂšres durent obĂ©ir aux injonctions de la foule, et pour comble de sĂ»retĂ© des gardes furent placĂ©s aux abords du palais. Le sĂ©jour du Saint y fut beaucoup plus long qu'on ne l'avait prĂ©sumĂ©. Peut-ĂȘtre dura-t-il plusieurs mois juillet Ă septembre. Cet agonisant ne se dĂ©cidait pas Ă mourir. Il se rebellait contre la mort au centre de l'Ćuvre, ses prĂ©occupations pour l'avenir de l'Ordre, lointaines quelques jours auparavant, Ă©taient revenues plus angoissantes et plus terribles. Il faut recommencer, pensait-il; crĂ©er une nouvelle famille qui n'oubliera pas l'humilitĂ©, aller servir les lĂ©- preux, et, comme jadis, se mettre toujours non seule- ment en paroles, mais en rĂ©alitĂ©, au-dessous de tous les hommes^. » Sentir s'accomplir l'implacable travail de la destruc- tion, contre lequel les plus soumis ne peuvent s'em- pĂȘcher de protester Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi? pourquoi m'avez-vous abandonnĂ©? » Devoir contempler la dĂ©composition plus redoutable encore de son Ordre. Lui, l'alouette, ĂȘtre guettĂ© par des soldats veillant sur Cel. 103 et 104. L\ DERNIERE ANNEE 365 son cadavre ; il y avait bien lĂ de quoi le rendre mor- tellement triste. Pendant ces derniĂšres semaines, tous ses soupirs ont Ă©tĂ© notĂ©s. La disparition de la plus grande partie de la LĂ©gende des Trois Compagnons, nous prive certaine- ment de quelques touchants rĂ©cits, mais la plupart des traits nous ont Ă©tĂ© cependant conservĂ©s dans des docu- ments de seconde main. Quatre frĂšres avaient Ă©tĂ© spĂ©cialement chargĂ©s de lui prodiguer leurs soins LĂ©on, Ange, Rufin et Masseo. Nous les connaissons dĂ©jĂ ils Ă©taient de ces intimes de la premiĂšre heure qui avaient regardĂ© l'Ă©vangile francis- cain, comme un appel Ă l'amour et Ă la libertĂ©. Aussi commençaient-ils Ă se plaindre de tout et de tous^. Un jour, l'un d'eux dit au malade a PĂšre, vous par- tirez, et vous nous laisserez ; indiquez donc, si vous le connaissez, celui auquel on pourrait en toute sĂ©curitĂ© confier le fardeau du gĂ©nĂ©ralat. » HĂ©las ! François ne le connaissait pas le frĂšre idĂ©al capable d'assumer une pareille tĂąche; mais il profita de la question pour esquisser le portrait du ministre gĂ©nĂ©ral accompli^. Nous avons deux Ă©preuves de ce portrait, celle qui a Ă©tĂ© retouchĂ©e par Gelano, et l'Ă©preuve originale, bien plus courte et plus vague, mais qui nous montre Fran- çois ne voulant pour son successeur qu'une seule arme un inaltĂ©rable amour. C'est probablement cette question qui lui suggĂ©ra l'idĂ©e de laisser pour ses successeurs, les gĂ©nĂ©raux de Gel. 102. Spec. 83 b. '2. 2 Gel. 3, 116; Spec. 67 a. Conform. 143 b 1 et 225 b 2; 2 Gel." 3, 117 ; Spec. 130 a. 366 VIE DE s. FRANĂOIS l'Ordre, une lettre qu'ils se transmettraient, et oii ils trouveraient, non des directions pour des cas particu- liers, mais l'inspiration mĂȘme de leur activitĂ©*. Au RĂ©vĂ©rend PĂšre en Christ N.... Ministre GĂ©nĂ©ral de tout l'Ordre des FrĂšres Mineurs. Que Dieu te garde et te maintienne dans son saint amour. La patience en tout et partout, voilĂ , mon frĂšre, ce que je te recommande essentiellement. Si mĂȘme on te fait de l'opposition, si on te frappe, tu dois en ĂȘtre reconnaissant et dĂ©sirer qu'il en soit ainsi et non autrement. En ceci se manifestera ton amour pour Dieu, et pour moi, son serviteur et le tien, s'il n'est pas un seul frĂšre au monde, qui ayant pĂ©chĂ©, autant qu'on peut pĂ©cher, et venant devant toi, puisse s'en retourner sans avoir reçu ton pardon. Et si lui ne l'implore pas, toi, demande-lui s'il ne le veut pas. Et reviendrait-il encore mille fois devant toi, aime-le plus que moi-mĂȘme, afin de l'amener au bien. Aie tou- jours pitiĂ© de ces frĂšres. Ces paroles indiquent assez comment François avait jadis dirigĂ© l'Ordre ce rĂŽle de pure affection, de tendre dĂ©vouement qu'il rĂȘvait pour les ministres gĂ©nĂ©raux, Ă©tait-il possible Ă la lĂȘte d'une famille Ă©tendant ses ra- meaux sur le monde entier? Il serait tĂ©mĂ©raire de se prononcer, car parmi ses successeurs, les esprits dis- tinguĂ©s et les cĆurs d'Ă©lite n'ont pas manquĂ©; mais, sauf pour Jean de Parme et deux ou trois autres, cet idĂ©al contraste violemment avec la rĂ©alitĂ© saint Bonaventure lui-mĂȘme traĂźnera son maĂźtre et ami, ce mĂȘme Jean de Parme, devant un tribunal ecclĂ©siastique, l'y fera con- 1. Pour le texte V. Conform. 136 b 2 ; 138 b 2; 142 b 1. LA DERNIERE ANNEE 367 damner Ă la prison perpĂ©tuelle, et il faudra l'intervention d'un cardinal Ă©tranger Ă l'Ordre pour faire commuer cette peine ^. Les cris de douleur poussĂ©s par François mourant sur la chute de TOrdre seraient moins poignants s'ils ne se compliquaient du reproche de lĂąchetĂ© qu'il s'adres- sait Ă lui-mĂȘme. Pourquoi avait-il dĂ©sertĂ© son poste, abandonnĂ© la direction de sa famille, sinon par paresse et par Ă©goĂŻsme? Et voilĂ qu'il Ă©tait trop tard pour rĂ©agir, et dans des heures d'affreuse angoisse il se deman- dait si Dieu ne le rendrait pas responsable de cette dĂ©route. Ah ! si je puis encore aller au chapitre gĂ©nĂ©ral, sou- pirait-il, je leur montrerai quelle est ma volontĂ©. » On le vit mĂȘme, brisĂ© par la fiĂšvre, se dresser tout Ă coup dans son lit, criant avec une violence dĂ©ses- pĂ©rĂ©e OĂč sont-ils, ceux qui m'ont ravi mes frĂšres? OĂč sont-ils, ceux qui m'ont volĂ© ma famille?» HĂ©las! les vrais coupables Ă©taient bien plus prĂšs qu'il ne le pensait. Les ministres provinciaux, auxquels il semble avoir surtout songĂ© dans ces paroles, n'Ă©taient que des instruments entre les mains de l'habile frĂšre Elie; et celui-ci, que faisait-il autre chose que mettre son intelligence et son savoir-faire au service du cardinal Hugolin? Bien loin de trouver quelques consolations autour de lui, François Ă©tait sans cesse tourmentĂ© par les confi- dences de ses compagnons qui poussĂ©s par un zĂšle maladroit, avivaient sa douleur au lieu de la calmer 2. 1. Tribul. Archiv, t. II p. 285 ss. 2. 2 Gel. 3, 118. 368 VIE DE s. FRANĂOIS Pardonnez-moi, mon PĂšre, lui dit un jour l'un d'entre eux, mais ce que je veux vous dire, beaucoup l'ont dĂ©jĂ pensĂ© vous savez comment jadis, par la grĂące de Dieu, l'Ordre tout entier marchait dans le sentier de la perfection; pour ce qui regarde la pauvretĂ© et l'amour, comme pour tout le reste, les FrĂšres n'Ă©taient qu'un cĆur et qu'une Ăąme. Mais depuis quelque temps tout cela a bien changĂ© il est vrai qu'on excuse souvent les FrĂšres en disant que l'Ordre s'est trop agrandi pour maintenir les anciennes observances; on va mĂȘme jusqu'Ă prĂ©tendre que les infidĂ©litĂ©s Ă la RĂšgle, telles que la construction do grands monastĂšres, sont une source d'Ă©dification pour le peuple, si bien que la simplicitĂ© et la pauvretĂ© primi- tives ne sont tenues pour rien. Evidemment tous ces abus vous dĂ©plaisent; mais alors, on se demande pourquoi vous les tolĂ©rez?» â Que Dieu te pardonne, mon frĂšre, rĂ©pondit Fran- çois. Pourquoi m'accuser ainsi de choses auxquelles je ne peux rien? Tant que j'ai eu la direction de l'Ordre et que les FrĂšres ont persĂ©vĂ©rĂ© dans leur vocation, j'ar- rivais malgrĂ© ma faiblesse Ă faire le nĂ©cessaire; mais lorsque j'ai vu que, sans souci de mes exhortations ni de mes exemples, ils marchaient dans la voie dont tu as parlĂ©, je les ai confiĂ©s au Seigneur et aux ministres. Il est vrai que lorsque j'ai renoncĂ© Ă leur direction, allĂ©guant pour motif mon incapacitĂ©, s'ils avaient marchĂ© selon mes dĂ©sirs, je n'aurais pas voulu qu'avant ma mort ils eussent un autre ministre que moi malade, alitĂ© mĂȘme, j'aurais trouvĂ© la force de remplir les devoirs de ma charge. Mais cette charge est toute spirituelle, je ne veux pas devenir un bourreau pour frapper et punir comme les gouverneurs politiques *. » 1. Ces paroles sont empruntĂ©es Ă un long fragment citĂ© par liber- tin de Casai, comme venant de frĂšre LĂ©on Arbor vit. crue. lib. V. LA DERNIERE ANNEE 369 Les plaintes de François devenaient si vives et si amĂšres que, pour Ă©viter le scandale, on ne laissa pĂ©nĂ©- trer auprĂšs de lui qu'avec la plus grande prudence^. Le dĂ©sordre Ă©tait partout et chaque journĂ©e apportait son contingent de sujets de tristesse. Le trouble jetĂ© dans les idĂ©es sur la pratique de la RĂšgle Ă©tait extrĂȘme ; les influences occultes, qui avaient agi depuis quelques annĂ©es, Ă©taient parvenues Ă voiler l'idĂ©al franciscain, non seulement pour des frĂšres Ă©loignĂ©s ou nouveaux, mais pour ceux-lĂ mĂȘme qui avaient vĂ©cu dans l'entou- rage du fondateur 2. C'est dans ces circonstances que François dicta la lettre Ă tous les membres de l'Ordre, qui, dans sa pen- sĂ©e, Ă©tait destinĂ©e Ă ĂȘtre lue Ă l'ouverture des chapitres et Ă y perpĂ©tuer sa prĂ©sence spirituelle ^. Il y reste parfaitement fidĂšle Ă lui-mĂȘme ; comme par le passĂ©, il veut entraĂźner les frĂšres, non par des cap. 3. C'est sĂ»rement un morceau de la LĂ©gende des Trois Com- pagnons On le retrouve textuellement dans les Tribulations. Laur. fo 16 b avec quelques phrases en plus Ă lĂ fin. Cf. Conform, 136 a 2; 143a2; 50 a; 130b; 2 Cel. 3, 118. 1. Tribul. Laur. 17 b. 2. Voir par exemple la question de frĂšre Richer sur les livres Ubertin, Loc. cit. Cf. Ai^chiv ĂźlĂź p. 75 et -177; Con- form, 71 b 2. Voir aussi Ubertin, Archiv. III p. 75 et 177 ; Tribul. 13 a; Spec. 9 a; Conform. 170 a 1. 11 est curieux de rap- procher le rĂ©cit tel qu'il se trouve dans ces documents de la version qu'en donne 2 Cel. 3, 8. 3. Man. 338 d'Assise f» 28 a - 31 a avec la rubrique De lictera et ammonitione hcatissimi patris nostri Francisci quam misit fra- tribus ad capitulum quando erat infinnus. Cette lettre a Ă©tĂ© sĂ©- parĂ©e Ă tort en trois par Rodolphe de Tossignano f'' 237, qui a Ă©tĂ© suivi par Wadding Epistolae X, XI, XII. Le texte se trouve, sans cette sotte division, dans le manuscrit citĂ© et dans Firmamentum P 21; Spec. Morin, III, 217 a; Ubertin, Arbor vit. crue. V, 7. 370 VIE DE s. FRANĂOIS reproches, mais eQ fixant leurs regards sur la saintetĂ© parfaite. A tous les vĂ©nĂ©rĂ©s et trĂšs aimĂ©s FrĂšres Mineurs, Ă frĂšre A****, ministre gĂ©nĂ©ral, son Seigneur, et aux autres ministres gĂ©nĂ©raux qui seront aprĂšs lui, et Ă tous les ministres, aux custodes et aux prĂȘtres de cette frater- nitĂ©, humbles en Christ, et Ă tous les frĂšres simples et obĂ©issants, les plus anciens et les plus rĂ©cents, frĂšre François, homme vil et caduc, votre petit serviteur, salut ! Ecoutez, mes Seigneurs, vous qui ĂȘtes mes fils et mes frĂšres, prĂȘtez Foreille Ă mes paroles. Ouvrez vos cĆurs, et obĂ©issez Ă la voix du Fils de Dieu. Gardez de tout votre cĆur ses commandements et observez parfaitement ses conseils. Louez-le, car il est bon, et glorifiez-le par vos Ćuvres. Dieu vous a envoyĂ©s par tout le monde, afin que par la parole et par l'exemple vous rendiez tĂ©moignage de lui, et que vous appreniez Ă tous qu'il est seul tout-puis- sant. PersĂ©vĂ©rez dans la discipline et dans l'obĂ©issance, et tenez ce que vous lui avez promis avec une bonne et ferme volontĂ©. AprĂšs cette entrĂ©e en matiĂšre, François passe aussitĂŽt Ă la recommandation essentielle de sa lettre, celle de Tamour et du respect dus au Sacrement de l'autel; 1. Cette initiale donnĂ©e seulement par le iVIan. d'Assise, n'est pas sans exciter l'Ă©tonnement. Il semble qu'il aurait dĂ» y avoir un simple N***. Cette lettre a pu ĂȘtre ainsi remplacĂ©e par un copiste qui aurait employĂ© l'initiale du ministre gĂ©nĂ©ral en charge au moment oĂč il Ă©crivait. Si cette hypothĂšse a quelque valeur, elle aiderait Ă fixer la date exacte du manuscrit Albert de Pise ministre de 1239â 1240; Aimon de Faversham de 1240â1244. LA DERNIĂRE ANNEE 371 la foi en ce mystĂšre d'amour lui apparaissait en effet comme le salut de l'Ordre. Avait-il tort? Un homme qui croit vĂ©ritablement Ă la prĂ©sence rĂ©elle de THomme-Dieu entre les doigts du prĂȘtre qui Ă©lĂšve l'hostie, pourrait-il ne pas consacrer sa vie Ă ce Dieu et Ă la saintetĂ©? On aura quelque peine Ă le penser. Il est vrai que des lĂ©gions de dĂ©vots professent la foi la plus absolue en ce dogme, et l'on ne voit pas qu'ils en soient moins mauvais ; mais la foi pour eux est d'ordre intellectuel, c'est l'abdication du raisonnement, et en immolant Ă Dieu leur intelligence, ils sont fort heureux de lui offrir un instrument qu'ils prĂ©fĂšrent bien ne pas employer. Pour François, la question se prĂ©sentait tout autre- ment la pensĂ©e qu'il pĂ»t y avoir du mĂ©rite Ă croire ne pouvait mĂȘme pas lui venir Ă l'esprit le fait de la prĂ©- sence rĂ©elle Ă©tait pour lui d'une Ă©vidence presque concrĂšte. Aussi, sa foi en ce mystĂšre Ă©tait-elle un effort de son cĆur, pour que la vie du Dieu, mystĂ©rieusement prĂ©sent sur l'autel, devĂźnt la sĂšve de toutes ses actions. A la transsubstantiation eucharistique opĂ©rĂ©e par les paroles du prĂȘtre, il en ajoutait une autre, celle de son cĆur. Dieu s'offre Ă nous comme Ă ses enfants. C'est pour- quoi, je vous prie, vous tous mes frĂšres, en vous baisant les pieds, et avec tout l'amour dont je suis capable, d'avoir pour le corps et le sang de notre Seigneur JĂ©sus- Christ tout le respect et tout l'honneur que vous pourrez. » Plus loin s'adressant aux prĂȘtres en particulier 372 VIE DE s. FRANĂOIS Ecoutez, mes frĂšres, si la bienheureuse Vierge Marie est honorĂ©e Ă juste titre pour avoir portĂ© JĂ©sus dans son sein, si Jean-Baptiste a tremblĂ© parce qu'il n'osait pas toucher la tĂȘte du Seigneur, si le sĂ©pulcre dans lequel il a reposĂ© un peu de temps est entourĂ© d'un si grand culte, oh! combien saint, pur et digne doit ĂȘtre le prĂȘtre qui touche de ses mains, qui reçoit dans sa bouche et dans son cĆur^ et qui distribue aux autres JĂ©sus vi- vant, glorifiĂ©, celui dont la vue rĂ©jouit les anges! Com- prenez votre dignitĂ©, frĂšres prĂȘtres, et soyez saints, car il est saint. Oh ! quelle grande misĂšre et quelle affreuse infirmitĂ©, si vous l'aviez lĂ prĂ©sent devant vous, et que vous ayez souci de quelque autre chose. Que tout homme soit dans le saisissement, que le monde entier tremble, que le ciel tressaille de joie, lorsque, sur l'autel, entre les mains du prĂȘtre, descend le Christ, le Fils du Dieu vivant. 0 profondeur admirable ! ĂŽ Ă©tonnante faveur ! ĂŽ triomphe de l'humilitĂ©! voilĂ que le maĂźtre de toutes choses. Dieu, et le Fils de Dieu s'humilie pour notre salut, jusqu'Ă se dissimuler sous l'apparence d'un peu de pain. Eegardez, mes frĂšres, cette humilitĂ© de Dieu et rĂ©pandez vos cĆurs devant lui ; humiliez-vous, vous aussi, afin que vous soyez, vous aussi, relevĂ©s par lui. Ne gardez pour vous rien de vous, afin qu'il vous reçoive tout entiers, celui qui se donne Ă vous tout entier. » On voit avec quelle vigueur d'amour, le cĆur de François avait saisi l'idĂ©e de la communion. Il termine par de longs conseils donnĂ©s aux frĂšres, et aprĂšs les avoir conjurĂ©s de garder fidĂšlement leurs pro- messes, tout son mysticisme s'exhale et se rĂ©sume en une priĂšre d'une admirable simplicitĂ©. L'A DERNIĂRE ANNĂE 373 Dieu tout-puissant, Ă©ternel, juste et misĂ©ricordieux, donnez-nous, Ă nous pauvres malheureux, de faire Ă cause de vous ce que nous savons ĂȘtre votre volontĂ©, et de vouloir toujours ce qui vous plaĂźt ; de sorte qu'intĂ©- rieurement purifiĂ©s, illuminĂ©s et enflammĂ©s par le feu de l'Esprit saint, nous puissions suivre les traces de votre Fils bien aimĂ©, notre Seigneur JĂ©sus-Christ.» Qu'est-ce qui sĂ©pare cette priĂšre de l'efTort fait en dehors de toute religion rĂ©vĂ©lĂ©e par les Ăąmes d'Ă©lite pour dĂ©couvrir le devoir? TrĂšs peu de chose en vĂ©ritĂ© les mots sont diffĂ©rents, l'action est la mĂȘme. Cependant la sollicitude de François s'Ă©tendait bien au delĂ des linaites de l'Ordre. Sa plus longue Ă©pĂźtre s'adresse Ă tous les chrĂ©tiens les paroles y ont quelque chose de si vivant, qu'on croit entendre un bruit de voix derriĂšre; et cette voix, d'ordinaire sereine comme celle qui proclama sur la montagne de GalilĂ©e la loi des temps nouveaux, devient ça et lĂ d'une douceur indicible, comme celle qui retentit dans le cĂ©nacle, au soir de la premiĂšre eucharistie. Comme JĂ©sus oubliant la croix qui se dresse dans l'ombre, François oublie ses souffrances, et envahi d'une divine tristesse, il songe Ă cette humanitĂ© pour chaque membre de laquelle il voudrait donner sa vie ; il songe Ă ses fils spirituels, les FrĂšres de la PĂ©nitence, qu'il va laisser sans avoir pu leur faire sentir, comme il l'aurait voulu, l'amour dont il brĂ»le pour eux PĂšre je leur ai donnĂ© les paroles que vous m'aviez donnĂ©es c'est pour eux que je vous prie ! » Tout l'Ăvangile franciscain est dans ces quelques pages, mais pour comprendre la fascinalion qu'il exerça, 374 VIE DE s. FRANĂOIS il faudrait d'abord passer par l'Ăcole du moyen Ăąge, et y entendre les interminables tournois dialecliques par lesquels on fanait les intelligences; il faudrait voir l'Ăglise du XĂIP siĂšcle, rongĂ©e par la simonie et la luxure, et ne parvenant Ă faire quelques inutiles efforts pour enrayer le mal que sous la pression de l'hĂ©rĂ©sie ou de la rĂ©volte. A tous les chrĂ©tiens, religieux, clercs ou laĂŻques tant hommes que femmes, Ă tous ceux qui habitent dans le monde entier, frĂšre François, leur serviteur bien soumis, prĂ©sente ses devoirs et souhaite la vraie paix du ciel et un sincĂšre amour dans le Seigneur. Etant le serviteur de tous les hommes, je suis tenu de les servir et de leur dispenser les salutaires paroles dĂ©mon MaĂźtre. C'est pourquoi, voyant que je suis trop faible et trop malade pour vous visiter chacun en parti- culier, j'ai pris la dĂ©cision de vous adresser mon message par cette lettre et de vous offrir les paroles de notre Seigneur JĂ©sus-Christ qui est le Verbe de Dieu, et celles du Saint-Esprit qui sont esprit et vie. Il serait puĂ©ril de s'attendre ici Ă des idĂ©es nouvelles soit pour le fond, soit pour la forme. Les appels de Fran- çois n'ont de valeur que par le souffle qui les anime. AprĂšs avoir briĂšvement rappelĂ© les grands traits de rĂvangile et recommandĂ© avec insistance la communion, François s'adresse en particulier Ă quelques catĂ©gories d'auditeurs pour leur donner des conseils spĂ©ciaux. Que les podestats, les gouverneurs, et ceux qui sont constituĂ©s en autoritĂ©, exercent leurs fonctions avec mi- sĂ©ricorde, comme ils voudraient ĂȘtre jugĂ©s par Dieu avec misĂ©ricorde.... LA DERNIĂRE ANNĂE 375 Les religieux en particulier qui ont renoncĂ© au monde sont tenus de faire plus et mieux que les simples chrĂ©- tiens, de renoncer Ă ce qui ne leur est pas nĂ©cessaire et d'avoir en haine les vices et les pĂ©chĂ©s du corps.... Ils doivent aimer leurs ennemis, faire du bien Ă ceux qui les haĂŻssent, observer les prĂ©ceptes et les conseils de notre RĂ©dempteur, renoncer Ă eux-mĂȘmes et dompter leur corps. Et aucun religieux n'est tenu Ă l'obĂ©issance, si en obĂ©issant il devait commettre une faute ou an pĂ©chĂ© Ne soyons pas sages et savants selon la chair, mais simples, humbles et purs.... Jamais nous ne devons dĂ©- sirer ĂȘtre au-dessus des autres, mais plutĂŽt ĂȘtre au- dessous, et obĂ©ir Ă tous les hommes. Il termine en montrant la sottise de ceux qui met- tent leur cĆur Ă la possession des biens terrestres, et conclut par le tableau trĂšs rĂ©aliste de la mort du mĂ©chant Son argent, ses titres, sa science, tout ce qu'il croyait possĂ©der, tout cela lui est enlevĂ© ses proches et ses amis, auxquels il a donnĂ© sa fortune, viendront se la partager et finiront en disant Maudit soit-il, car il aurait pu nous donner davantage et il ne l'a pas fait ; il aurait pu acquĂ©rir une plus grande fortune et il n'en a rien fait.» Les vers dĂ©voreront son corps et les dĂ©mons rongeront son Ăąme, et ainsi il perdra son Ăąme et son corps. Moi, frĂšre François, votre petit serviteur, je vous prie et vous conjure par l'amour qui est Dieu , tout prĂȘt Ă vous baiser les pieds, de recevoir avec humilitĂ© et amour ces paroles et toutes les autres de notre Seigneur JĂ©sus-Christ et d'y conformer votre conduite. 376 VIE DE s. FRANĂOIS Et que ceux qui les reçoivent dĂ©votement et qui les comprennent, les transmettent Ă * d'autres. Et s'ils per- sĂ©vĂšrent ainsi jusqu'Ă la fin, qu'ils soient bĂ©nis par le PĂšre, le Fils et le Saint-Esprit, Amen*. Si jamais François a fait une rĂšgle pour le Tiers Ordre, elle a dĂ» ressembler de trĂšs prĂšs Ă cette Ă©pĂźtre, et en attendant qu'on retrouve ce problĂ©matique docu- ment, la lettre indique ce que furent Ă l'origine les associations de FrĂšres de la PĂ©nitence. Dans ces longues pages tout vise au dĂ©veloppement de la vie religieuse et mystique dans le cĆur de chaque chrĂ©tien. Mais dĂ©jĂ au moment oĂč François les dictait, cette hauteur de vue Ă©tait une utopie, et le Tiers Ordre n'Ă©tait guĂšre qu'un bataillon de plus dans les armĂ©es de la papautĂ©. On voit maintenant comment les Ă©pĂźtres qui viennent d'ĂȘtre examinĂ©es procĂšdent en dĂ©finitive d'une seule et mĂȘme inspiration. Qu'il laisse des instructions pour ses successeurs, les ministres gĂ©nĂ©raux, qu'il Ă©crive Ă tous les membres prĂ©sents et futurs de son Ordre, Ă tous les chrĂ©tiens, ou mĂȘme au clergĂ© 2, François n*a qu'un but continuer Ă prĂȘcher mĂȘme aprĂšs sa mort, et peut- 4. Cette Ă©pĂźtre a Ă©tĂ©, elle aussi, maladroitement divisĂ©e en deux lettres distinctes par Rodol]he de Tossignano, Ăź'^ 174 a, qui a Ă©tĂ© suivi par Wadding. Voir man. d'Assise 338, 23 a â 28 a ; Conform. 137 a 1 ss. 2. La lettre au clergĂ© ne fait que rĂ©pĂ©ter les idĂ©es dĂ©jĂ exprimĂ©es sur le culte du saint sacrement. On se rappelle François balayant les Ă©glises et conjurant les prĂȘtres de les tenir propres ; cette Ă©pĂźtre a le mĂȘme but elle se trouve dans le Man. 338 d'Assise, f" 31 b-32 b, avec la' rubrique De reverentia corporis Domini et de munditia altaris ad omnes clericos. Incipit Attendamus omnes Explicit fecerint exemplari. C'est donc la lettre donnĂ©e par Wad- ding, XIII, mais sans l'adresse, ni la salutation. LA DERNIERE ANNEE 377 ĂȘtre aussi, en mettant par Ă©crit son message de paix et d'amour, empĂȘcher qu'il ne soit complĂštement travesti ou mĂ©connu. RattachĂ©es Ă ces heures douloureuses qui les virent naĂźtre, elles forment, un ensemble dont la portĂ©e et la signification s'accentuent singuliĂšrement. C'est lĂ , comme dans la RĂšgle de 1221 et dans le Testament, qu'il faut aller chercher l'esprit franciscain. La nĂ©gligence et surtout les tourmentes qui boule- versĂšrent plus tard l'Ordre, expliquent la disparition de quelques autres documents qui viendraient jeter un rayon de poĂ©sie et de joie sur ces tristes journĂ©es ^ François n'oubliait pas son amie de Saint-Damien. Apprenant combien elle Ă©tait inquiĂšte de le savoir si malade, il voulut la rassurer il se faisait encore des illusions sur son Ă©tat, et lui Ă©crivit pour lui promettre d'aller bientĂŽt la voir. Il ajouta Ă cette assurance quelques conseils affec- tueux, l'invitant, elle et ses compagnes, Ă ne pas exa- gĂ©rer les macĂ©rations. Pour leur donner l'exemple de la gaietĂ©, il joignit Ă sa lettre une laude en langue vul- gaire qu'il avait mise lui-mĂȘme en musique 2. De cette chambre du palais Ă©piscopal oĂč il Ă©tait comme emprisonnĂ©, il venait de remporter un nouveau triomphe, et c'Ă©tait lĂ sans doute ce qui avait inspirĂ© sa joie. L'Ă©vĂȘque d'Assise, l'irritable Guido, toujours en guerre avec quelqu'un, l'Ă©tait cette fois avec le podestat 1. Il ne faut pas dĂ©sespĂ©rer de les retrouver. Les archives des monastĂšres de Clarisses sont d'ordinaire assez rudimentaires, mais conservĂ©es avec un soin pieux. 2. Spec. 117 b; Con/brm. 185 a 1 ; 135 bl. Cf. Test. B. ClartĂ©, A. SS. Aug., t. II, p. 747. 378 VIE DE s. FRANĂOIS de la citĂ© il n'en fallait pas davantage pour jeter un trouble profond dans la vje d'une petite ville. Guido avait excommuniĂ© le podestat, et celui-ci avait fait pro- clamer la dĂ©fense de rien vendre ou rien acheter aux ecclĂ©siastiques ni de faire avec eux aucun contrat. Le diffĂ©rend s'envenimait et personne ne semblait songer Ă s'entremettre pour tenter un rapprochement. On comprend d'autant mieux la douleur de François en voyant tout cela, que son premier effort avait Ă©tĂ© pour ramener la paix dans sa ville natale, et qu'il considĂ©rait le retour de l'Italie Ă l'union et Ă la concorde comme le but essentiel de son apostolat. La guerre dans Assise^ c'Ă©tait l'Ă©croulement dĂ©finitif de son rĂȘve, la voix des Ă©vĂ©nements lui criant brutale- ment Tu as perdu ta vie ! » Cette lie du calice lui fut Ă©pargnĂ©e grĂące Ă une inspi- ration oĂč Ă©clate de nouveau la fantaisie de son caractĂšre. Au Cantique du soleil il ajouta une nouvelle strophe Soyez louĂ©, Seigneur^ pour ceux qui pardonnent par amour et supportent les peines et les tribulations; [pour vous heureux ceux qui persĂ©vĂ©reront dans la paix, par vous, TrĂšs-Haut, ils seront couronnĂ©s. Puis, appelant un frĂšre, il le chargea de prier le gou- verneur de se rendre sur la place du parvis devant l'Ă©vĂȘchĂ© avec tous les notables qu'on pourrait rĂ©unir. Ce magistrat, auquel la lĂ©gende donne le beau rĂŽle dans toute cette affaire, se conforma aussitĂŽt au dĂ©sir du Saint. Quand il arriva et que TĂ©vĂȘque fut sorti de son palais, deux frĂšres s'avancĂšrent et dirent FrĂšre François a LA DERNIĂRE ANNEE 379 fait Ă la louange de Dieu un cantique qu'il vous prie tous d'Ă©couter pieusement,» et ils se mirent aussitĂŽt Ă chanter l'hymne de frĂšre soleil avec sa nouvelle strophe. Le gouverneur les Ă©couta debout dans l'attitude la plus recueillie, pleurant Ă chaudes larmes, car il aimait beaucoup le bienheureux François. Quand le chant fut fini Sachez en vĂ©ritĂ©, dit-il, que je veux pardonner au Seigneur EvĂȘque, que je veux et dois regarder comme mon Seigneur, car si mĂȘme on eĂ»t assassinĂ© mon frĂšre je serais prĂȘt Ă pardonner au meur- trier.» AprĂšs ces paroles il se jeta aux pieds de l'Ă©vĂȘque et lui dit Me voici prĂȘt Ă tout ce que vous voudrez, par amour pour notre Seigneur JĂ©sus-Christ et pour son serviteur François. » Alors l'Ă©vĂȘque lui prenant la main se leva et lui dit Avec ma qualitĂ©, il conviendrait que je sois humble, mais puisque je suis naturellement trop prompt Ă la co- lĂšre, il faut que tu me pardonnes ^ » Celte rĂ©conciliation inattendue fut aussitĂŽt regardĂ©e comme miraculeuse et augmenta encore le culte des Assisiates pour leur concitoyen. L'Ă©tĂ© touchait Ă sa fin. AprĂšs quelques jours d'un rĂ©pit relatif, les souffrances de François devenaient plus fortes que jamais incapable de faire un mouvement, il pensa mĂȘme qu'il devait renoncer Ă son ardent dĂ©sir de revoir encore Saint-Damien et la Portioncule et fit aux frĂšres toutes ses recompiandations pour ce dernier sanctuaire Ne l'abandonnez jamais, leur rĂ©pĂ©tait- L Ce rĂ©cit dans le Spec. 128 b est donnĂ© comme provenant de tĂ©moins oculaires. Cf. Conform. 184 b 1 ; 203 a 1. 380 VIE DE s. FRANĂOIS il, car ce lieu est vraiment sacrĂ©; c'est la maison de Dieu^. » Il lui semblait que si les frĂšres restaient attachĂ©s Ă ce coin de terre, Ă cette chapelle de dix pas de long, a ces huttes couvertes de chaume, ils y trouveraient le souvenir vivant de la pauvretĂ© des premiers temps, et ' ne pourraient s'en Ă©carter beaucoup. Un soir, son Ă©tat empira avec une effrayante rapi- ditĂ©; toute la nuit suivante, il eut des vomissements de sang qui ne laissaient aucun espoir les frĂšres accou- rant, il dicta quelques lignes sous forme de testament, puis leur donna sa bĂ©nĂ©diction Adieu, mes enfants, restez tous dans la crainte de Dieu, demeurez toujours unis au Christ; de grandes Ă©preuves vous sont rĂ©servĂ©es, et la tribulation approche. Heureux ceux qui persĂ©vĂ©re- ront comme ils auront commencĂ©; car il y aura des scandales et des scissions parmi vous. Pour moi, je m'en vais vers le Seigneur et vers mon Dieu. Oui j'ai l'assurance que je vais vers Celui que j'ai servi 2. » Les jours suivants, au grand Ă©tonnement de son en- tourage, il y eut de nouveau une amĂ©lioration; personne ne pouvait comprendre la rĂ©sistance qu'opposait Ă la mort ce corps depuis si longtemps brisĂ© par la souffrance. 1. 1 Cel. 106 Ces recomm ndations sur la Portioncule furent amplifiĂ©es par les Zelanti, lorsque, sous le gĂ©nĂ©ralat de Crescentius Bulle Is qui ecclesiam 6 mars 1245, la basilique d'Assise fut subs- tituĂ©e Ă Notre-Dame des Anges comme mater et eaput de l'Ordre. V. Spec. 32 b; 69 b-71 a; Conform. 144 a 2; 218 a 1; 3 Soc. 56; 2 Cel. 1, 12 et 13; Bon. 24 et 25; voir Ă l'appendice l'Ă©tude sur l'Indulgence du 2 aoĂ»t. 2. Gel. 108. Gomme je l'ai dit, voir plus haut p. LIV le reste du rĂ©cit de Gelano semble nĂ©cessiter quelques rĂ©serves. Gf. Spec. 115 b; Conform. 225 a 2; Bon. 211. LA DERNIĂRE ANNĂE 381 Lui-mĂȘme retrouvait quelque espoir. Un mĂ©decin d'Arezzo, qu'il connaissait beaucoup, Ă©tant venu le visiter Bon ami, lui dit-il, combien penses-tu que j'aie encore Ă vivre? » â Mon pĂšre, rĂ©pondit son interlocuteur pour le ras- surer, tout cela passera, s'il plaĂźt Ă Dieu.» â Je ne suis pas un coucou ^, rĂ©pliqua François souriant et employant une expression populaire, pour avoir peur de la mort. Par la grĂące de l'Esprit saint, je suis si intimement uni Ă Dieu que je suis Ă©galement content de vivre ou de mourir. » â En ce cas, mon pĂšre, au point de vue mĂ©dical, ton mal est incurable, et je ne crois pas que tu puisses aller bien plus loin que les premiers jours de l'au- tomne. » A ces mots, le pauvre malade Ă©tendit les mains comme pour appeler Dieu, et s'Ă©cria avec une indi- cible expression de joie ce SĆur Mort, soyez la bien- venue ! » Puis il se mit Ă chanter et envoya chercher les frĂšres Ange et LĂ©on. A leur arrivĂ©e, ils durent malgrĂ© leur Ă©motion en- tonner le Cantique du soleil. Ils en Ă©taient Ă la doxologie finale lorsque François les arrĂȘtant improvisa le salut Ă la mort Soyez louĂ©, Seigneur_, pour notre sĆur la mort corporelle Ă laquelle aucun homme ne peut Ă©chapper ; malheur Ă ceux qui meurent en Ă©tat de pĂ©chĂ© mortel, heureux ceux qui se trouveront conformes Ă vos trĂšs saintes car la seconde mort ne leur fera aucun mal. [volontĂ©s 1. Non sum cuculus^ en italien cuculo. 382 VIE DE s. FRANĂOIS A partir de ce jour, l'Ă©vĂȘchĂ© ne cessa de retentir du bruit de ses chants. A chaque instant, mĂȘme pendant la nuit, il recommençait lui-mĂȘme le Cantique du soleil ou quelqu'autre de ses compositions prĂ©fĂ©rĂ©es. Puis, quand il Ă©tait fatiguĂ©, il priait Ange et LĂ©on de con- tinuer. Un jour , frĂšre Ălie crut devoir faire quelques remarques Ă ce sujet. Il craignait que les gardes et les gens du voisinage n'en vinssent Ă se scandaliser un saint ne doit-il pas se recueillir devant la mort, l'at- tendre avec crainte et tremblement, au lieu de se laisser aller Ă une gaietĂ© qu'on pourrait mal inter- prĂ©ter ^. Peut-ĂȘtre l'Ă©vĂȘque Guido n'Ă©tait-il pas tout Ă fait Ă©tranger Ă ces reproches ; il ne paraĂźt pas impro- bable que l'encombrement de son palais par les FrĂšres Mineurs durant de longues semaines ait fini par lui donner un peu d'humeur. Mais François ne voulut pas cĂ©der; son union avec Dieu Ă©tait trop douce pour qu'il pĂ»t se rĂ©soudre Ă ne pas la chanter. On se dĂ©cida enfin Ă le transporter Ă la Portioncule. Son dĂ©sir d'expirer prĂšs de l'humble chapelle^ oĂč il avait entendu la voix de Dieu le consacrant apĂŽtre, allait ĂȘtre accompli. Ses compagnons, chargĂ©s de leur prĂ©cieux far- deau, prirent Ă travers les oliviers le sentier de la plaine. De temps en temps le malade, incapable de rien distinguer, demandait oĂč l'on Ă©tait. Quand 1. Spec. i36 b; Fior. IV consid. Il est Ă noter que Guido au lieu d'attendre Ă Assise TĂ©vĂ©nement si prĂ©vu de la mort de François partit pour le mont Gargano, 2 Gel. 3, 142. LA DERNIĂRE ANNĂE 383 ils furent Ă moitiĂ© chemin, Ă l'hĂŽpilal des Gru- cigĂšres oĂč jadis il avait soignĂ© les lĂ©preux et d'oii l'on peut embrasser toutes les maisons de la ville d'un seul regard, il pria qu'on l'assĂźt par terre tournĂ© vers la citĂ©, et Ă©levant la main, il dit adieu Ă la terre natale et la bĂ©nit. CHAPITRE XX Testament et mort de saint François, Fin septembre â 3 octobre 1226. Les derniĂšres journĂ©es de la vie de François sont d'une radieuse beautĂ©. Il alla au-devant de la mort en chantant^, dit Thomas de Gelano pour rĂ©sumer l'im- pression de ceux qui le virent alors. Se retrouver Ă la Portioncule aprĂšs la longue dĂ©ten- tion de l'Ă©vĂȘchĂ©, ne fut pas seulement une joie vĂ©ritable pour son cĆur le grand air au milieu de la forĂȘt dut lui causer un rĂ©el bien-ĂȘtre physique le Cantique des crĂ©atures ne semble-t-il pas fait exprĂšs pour ĂȘtre chantĂ© au soir de ces journĂ©es d'automne si lumineuses et si douces en Ombrie, oĂč toute la nature se recueille pour murmurer, elle aussi, son hymne d'amour au frĂšre soleil? On devine chez François cette disparition presque absolue de la douleur, ce renouveau de vie, qui devance si souvent l'approche de la catastrophe finale. Il en profita pour dicter son Testament 2. 1. Mortem cantando suscepit. 2 Gel. 3, 139. 2. Le texte pris pour base ici est celui du manuscrit 338 d'Assise fo 16a-18a. On le trouve aussi dans Firmamentum, P 19, col. 4; â SpĂ©culum Morin, tract. III, Sa; â Wadding ann. 1226, 35. â TESTAMENT ET MORT DE S. FRANĂOIS 385 C'est Ă ces pages qu'il faut aller demander la note juste pour esquisser la vie de son auteur et se faire une idĂ©e de l'Ordre tel qu'il l'avait rĂȘvĂ©. Dans ce monument d'une incontestable authen- ticitĂ©, et qui est la manifestation la plus solennelle de sa pensĂ©e, le Poverello se rĂ©vĂšle tout entier avec une virginale candeur. Son humilitĂ© y est d'une sincĂ©ritĂ© qui s'impose ; elle est absolue, sans que l'on songe Ă la trouver exagĂ©rĂ©e. Cependant il y parle, dĂšs qu'il s'agit de sa mission, avec une tranquille et sereine assurance. N'est-il pas ambas- sadeur de Dieu ? ne tient-il pas son message du Christ lui-mĂȘme? La genĂšse de sa pensĂ©e s'y montre Ă la fois toute divine et toute personnelle. La conscience indivi- duelle y proclame sa souveraine autoritĂ© Personne ne me montrait ce que je devais faire, mais le ĂrĂšs-Haut lui-mĂȘme m'a rĂ©vĂ©lĂ© que je devais vivre conformĂ©ment au saint Ăvangile. » Quand on a parlĂ© ainsi, la soumission Ă l'Eglise est singuliĂšrement entamĂ©e. On peut l'aimer, l'Ă©couter, la vĂ©nĂ©rer, mais on se sent, peut-ĂȘtre sans oser se l'avouer, supĂ©rieur Ă elle. Vienne une heure de crise, on se trouvera hĂ©rĂ©tique sans le savoir et sans le vouloir. A. SS., p. 663; Amoni, Legenda Trium Sociorum Appendice» p. 110. â Tout dans ce document rĂ©vĂšle son authenticitĂ©, mais on n'en est pas rĂ©duit aux preuves internes. Il est expressĂ©ment citĂ© dans 1 Gel. 17 avant 1230; par les Trois Compagnons 1246, 3 Soc. 11 ; 26; 29; par 2 Cel. 3, 99 1247. Ces preuves seraient plus que suffisantes, mais il en est une autre dont la valeur est en- core plus grande la bulle Quo elongati du 28 sept. 1230 oĂč GrĂ©- goire IX le cite textuellement et dĂ©clare que les frĂšres ne sont pas tenus de l'observer. 386 VIE DE s. FRANĂOIS Eh, oui! s'Ă©crie Angelo Glareno, saint François a promis d'obĂ©ir au pape et a ses successeurs, mais ils ne peuvent et ne doivent rien ordonner qui soit contraire Ă l'Ăąme ou Ă la RĂšgle ^. » Pour lui comme pour tous les Franciscains spirituels, lorsqu'il y a conflit entre ce qu'ordonne la voix intĂ©- rieure de Dieu et ce que veut l'Eglise, il n'y a qu'Ă obĂ©ira la premiĂšre-. Si vous lui dites que l'Ăglise et l'Ordre sont lĂ pour dĂ©finir la signification vĂ©ritable de la RĂšgle, il en appelle au bon sens et Ă cette certitude intĂ©rieure que donne la vue claire de la vĂ©ritĂ©. La RĂšgle, comme aussi l'Ăvangile qu'elle rĂ©sume est au-dessus de tout pouvoir ecclĂ©siastique^ et per- sonne n'a Ă dire le dernier mot dans leur interprĂ©- tation^. Le Testament ne tarda pas Ă avoir une autoritĂ© mo- rale supĂ©rieure Ă celle de la RĂšgle mĂȘme. Jean de Parme, pour expliquer la prĂ©dilection des Joachi mites pour ce document, faisait remarquer qu'aprĂšs l'impression des stigmates le Saint-Esprit avait Ă©tĂ© en François avec plus de plĂ©nitude encore qu'auparavant *. Les innombrables sectes qui ont troublĂ© l'Ăglise au 1. Promittit Franciscus ohedientiam . . . papĆ . . . et successo- ribus . . . qui non possunt nec debent eis prĆcipere aliquid quod sit contra animam et rĂ©gulant. Archiv, 1, p. 563. 2. Quod si quando a quocumque . . . pontifice aliquid . . . man- daretur quod esset contra fldem. . . et caritatem et fructus ejus tune obediet Deo magis quant hominibus. Id. ibid. p. 561. 3. Est [Begula^ et stat et intelligitur super cos . . . Cuni spei fiducia pace fruemur cum eonscientiĆ et Christi spiritus testi- monio certo. Ibid. p. 503 et 565. 4. Archiv, t. II, p. 274. TESTAMENT ET MORT DE S. FRANĂOIS 387 XIIP siĂšcle sentirent-elles que ces deux Ă©crits, â la RĂšgle et le Testament â faits en apparence pour se suivre et s'appuyer, substantiellement identiques comme on disait, procĂ©daient de deux inspirations opposĂ©es? D'une maniĂšre bien confuse sans doute, mais qu'im- porte, guidĂ©es par un instinct trĂšs sĂ»r, elles voyaient dans ces pages le drapeau de la libertĂ©. Elles ne se trompaient pas. Aujourd'hui-mĂȘme les penseurs, les moralistes, les mystiques qui cherchent Ă dĂ©couvrir le sens de la vie, peuvent arriver Ă des solu- tions trĂšs diffĂ©rentes de celle du prophĂšte ombrien, mais la mĂ©thode qu'ils emploient a Ă©tĂ© la sienne, et ils ne sau- raient refuser de saluer en lui un prĂ©curseur du subjec- tivisme religieux. L'Eglise ne s'y est pas trompĂ©e non plus. Elle com- prit tout de suite le souffle qui animait ces pages. Quatre ans aprĂšs, peut-ĂȘtre jour pour jour, le 28 sep- tembre 1230, Hugolin, devenu GrĂ©goire IX, interprĂ©- tait solennellement la RĂšgle, malgrĂ© les prĂ©cautions de François qui avait interdit toute glose ou tout commentaire Ă la RĂšgle et au Testament, et dĂ©clarait que les FrĂšres n'Ă©taient pas tenus Ă l'observation du Testament 2. Que dire de cette bulle oĂč le pape allĂšgue ses relations familiĂšres avec le Saint pour justifier son commentaire, 1. Bulle, Quo elongati Potthast 8620. 2. Ad mandatum illud vos dicimus non teneri ; quod sine consensu Fratrum maxime ministrorum, quos universos tange- bat obligare nequivit nec successorem suum quomodolibet obli- gavit\ cum non habeat imperium, par in parem. Le sophisme est Ă peine spĂ©cieux François n'Ă©tait pas l'Ă©gal de ses succes- seurs , il n'avait pas agi comme ministre gĂ©nĂ©ral mais comme fondateur. 388 VIE DE s. FRANĂOIS et oĂč les passages les plus clairs sont tordus jusqu'Ă en changer complĂštement le sens On demeure stupide, s'Ă©criera Ubertin de Casai, qu'un texte si clair ait besoin de commentaire, car il suffĂźt d'avoir son bon sens et de savoir la grammaire pour le comprendre. » Et ce moine Ă©trange osa ajouter; Il y a un miracle que Dieu lui-mĂȘme ne saurait faire, celui de faire vraies deux choses contradictoires '^ . » Certes, l'Eglise doit ĂȘtre maĂźtresse chez elle; il n'y aurait eu aucun mal Ă ce que GrĂ©goire IX créùt un ordre conforme Ă ses vues et a ses idĂ©es, mais quand on par- court les in-folio de Sbaralea et les milliers de bulles accordĂ©es aux fils spirituels de celui qui avait interdit, de la façon la plus claire et la plus solennelle, de demander aucun privilĂšge en cour de Rome, on ne peut se dĂ©fendre d'une amĂšre tristesse. Ainsi soutenus par la papautĂ©, les frĂšres de la com- mune observance firent durement expier aux zelanti leur attachement aux derniĂšres volontĂ©s de François CĂ©saire de Spire mourut des violences du frĂšre prĂ©posĂ© Ă sa garde 2; le premier disciple, Bernard de Quinta- valle, traquĂ© comme une bĂȘte fauve, passa deux ans dans les forĂȘts de Monte-Sefro, cachĂ© par un bĂ»cheron^; les autres premiers compagnons qui ne parvinrent pas Ă s'enfuir, eurent Ă subir les plus durs traitements. Dans la Marche d'AncĂŽne, foyer des Spirituels, le parti vain- queur sĂ©vit avec une terrible violence. Le Testament fut 1. Arbor vit. crue. lih. V, cap. 3 et 5. Voir ci-dessus p. 211. 2. Tribal. Laur. 25 b; Ărchiv^ 1. 1, p. 532. 3. Au sommet des Apennins, Ă peu prĂšs Ă moitiĂ© chemin entre Gamerino et Nocera Umbria. Tribul. Laur. 26 b. Magl. 135 b. TESTAMENT ET MORT DE S. FRANĂOIS 389 confisquĂ© et dĂ©truit, on alla jusqu'Ă le brĂ»ler sur la tĂȘte d'un frĂšre qui s'obstinait Ă vouloir l'observer ^. TESTAMENT traduction littĂ©rale. Voici de quelle maniĂšre Dieu m'a donnĂ©, Ă moi frĂšre François, de commencer Ă faire pĂ©nitence lorsque je vivais dans le pĂ©chĂ©, il m'Ă©tait trĂšs pĂ©nible de voir des lĂ©preux ; mais Dieu lui-mĂȘme m'amena au milieu d'eux, et j'y restai un peu de temps ^. Quand je les quittai, ce qui m'avait paru amer me devint doux et facile. Peu de temps aprĂšs, je quittai le monde, et Dieu me donna une telle foi en ses Ă©glises que je m'agenouillais avec simplicitĂ©, et je disais Nous vous adorons, Seigneur JĂ©sus-Christ, ici et dans toutes vos Ă©glises qui sont par tout le monde, et nous vous bĂ©nissons de ce que, par votre sainte croix, vous avez rachetĂ© le monde.» En outre, le Seigneur me donna et me donne une si grande foi aux prĂȘtres qui vivent selon la forme de la sainte Eglise romaine, Ă cause de leur caractĂšre sacer- dotal, que mĂȘme s'ils me persĂ©cutaient je veux avoir recours Ă eux. Et quand bien mĂȘme j'aurais toute la sagesse de Salomon, lorsque je trouverai de pauvres prĂȘtres sĂ©culiers, je ne veux prĂȘcher dans leurs paroisses qu'avec leur assentiment. Je veux les respecter, eux comme tous les autres, les aimer et les honorer 1. Declaratio Ubertini, Archiv, III, p. 168. Ce fait ne saurait ĂȘtre rĂ©voquĂ© en doute, puisqu'il est allĂ©guĂ© dans une piĂšce adres- sĂ©e au pape, en rĂ©ponse aux frĂšres relĂąchĂ©s, auxquels elle devait ĂȘtre communiquĂ©e. 2. Feci moram cum illis. Man. 333. La plupart des textes im- primĂ©s donnent misericordimn qui prĂ©sente un sens moins satis- faisant. Cf. Miscellanea t. III 1888 p. 70; 1 Gel. 17; 3 Soc. 11. 33 390 VIE DE s. FRANĂOIS comme mes seigneurs. Je ne veux pas considĂ©rer leurs pĂ©chĂ©s, car en eux je vois le Fils de Dieu, et ils sont mes seigneurs. Je fais cela parce que je ne vois rien, je n'aperçois rien ici-bas corporellement du trĂšs haut Fils de Dieu, sinon son trĂšs saint corps et son sang qu'ils reçoivent et que seuls ils distribuent aux autres. Je veux honorer et vĂ©nĂ©rer par -dessus tout ces trĂšs saints mystĂšres, et les garder prĂ©cieusement. Partout oĂč je trouverai les noms sacrĂ©s de JĂ©sus ou ses paroles en des lieux indĂ©cents, je veux les en ĂŽter, et je prie qu'on les en ĂŽte pour les placer en quelque endroit honnĂȘte. Nous devons honorer et vĂ©nĂ©rer tous les thĂ©ologiens et ceux qui prĂȘchent la trĂšs sainte parole de Dieu, comme nous dispensant l'esprit et la vie. Quand le Seigneur m'eut donnĂ© des frĂšres, personne ne me montrait ce que je devais faire, mais le TrĂšs- Haut lui-mĂȘme me rĂ©vĂ©la que je devais vivre selon le modĂšle du saint Evangile. Je fis Ă©crire une courte et simple formule, et le seigneur pape me la confirma. Ceux qui se prĂ©sentaient pour embrasser ce genre de vie distribuaient aux pauvres tout ce qu'ils pouvaient avoir. Ils se contentaient d'une tunique rapiĂ©cĂ©e en dedans et en dehors avec la corde et les braies, et nous ne voulions rien avoir de plus. Les clercs disaient l'office comme les autres clercs, et les laĂŻques Pater noster. Nous aimions Ă demeurer dans les Ă©glises pauvres et abandonnĂ©es, et nous Ă©tions ignorants et soumis Ă tous. Je travaillais de mes mains et veux continuer, et je veux aussi que tous les autres frĂšres travaillent Ă quel- que mĂ©tier honorable. Que ceux qui n'en ont point en ap- prennent un, non dans le but de recevoir le prix de leur travail, mais pour le bon exemple et pour fuir l'oisivetĂ©. Et quand on ne nous donne pas le prix du travail, ayons TESTAMENT ET MORT DE S. FllANĂOIS 391 recours Ă la table du Seigneur, en demandant l'aumĂŽne de porte en porte. Le Seigneur me rĂ©vĂ©la la salutation que nous devions faire Dieu vous donne la paix. » Que les FrĂšres aient grand soin de ne recevoir les Ă©glises, les habitations, et tout ce qu'on construit pour eux, que si tout est comme il convient Ă la sainte pau- vretĂ© dont nous avons fait vĆu dans la RĂšgle, et qu'ils n'y reçoivent l'hospitalitĂ© que comme des Ă©trangers et des voyageurs. J'interdis absolument, par obĂ©issance, Ă tous les frĂšres, en quelque endroit qu'ils se trouvent de demander aucune bulle en cour de Rome, soit directement, soit indirectement, sous prĂ©texte d'Ă©glise, de couvent, ou sous prĂ©texte de prĂ©dications, ni mĂȘme pour leur pro- tection personnelle. S'ils ne sont pas reçus quelque part, qu'ils aillent ailleurs pour faire pĂ©nitence avec la bĂ©nĂ©- diction de Dieu. Je veux obĂ©ir au ministre gĂ©nĂ©ral de cette fraternitĂ©, et au gardien qu'il lui plaira de me donner. Je veux me mettre entiĂšrement entre ses mains, n'aller nulle part et ne rien faire contre sa volontĂ©, car il est mon seigneur. Quoique je sois simple et malade, je veux cependant toujours avoir un clerc qui me fasse l'office comme il est dit dans la RĂšgle ; que tous les autres frĂšres soient aussi tenus d'obĂ©ir Ă leurs gardiens et de faire l'office suivant la RĂšgle. S'il venait Ă y en avoir qui ne fissent pas l'office selon la RĂšgle et qui voulussent faire tout autre changement, ou bien s'ils n'Ă©taient pas catholiques, que tous les frĂšres, partout oĂč ils se trouvent, soient tenus par obĂ©issance de les prĂ©senter au custode le plus voisin. Que les custodes soient tenus par obĂ©issance de le mettre sous bonne garde, comme un homme qui est dans les liens nuit et jour, de façon Ă ce qu'il ne puisse 392 VIE DE s. FRANĂOIS Ă©chapper de leurs mains, jusqu'Ă ce qu'ils le remettent personnellement entre les mains du ministre. Et que le ministre soit tenu par obĂ©issance de l'envoyer par des frĂšres qui le garderont nuit et jour comme un prison- nier, jusqu'Ă ce qu'ils l'aient remis au seigneur Ă©vĂȘque d'Ostie qui est le seigneur, le protecteur et le correc- teur de toute la FraternitĂ© ^ Et que les frĂšres ne disent pas ceci est une nouvelle RĂšgle; car ceci est un souvenir, un avis, une exhorta- tion, c'est mon testament, que moi petit frĂšre François, je fais pour vous, mes frĂšres bĂ©nis, afin que nous obser- vions plus catholiquement la RĂšgle que nous avons promis au Seigneur de garder. Que le ministre gĂ©nĂ©ral, tous les autres ministres et les custodes soient tenus par obĂ©issance de ne rien ajouter et de ne rien retrancher Ă ces paroles. Qu'ils aient tou- jours cet Ă©crit avec eux, Ă cĂŽtĂ© de la RĂšgle, et que dans tous les chapitres qui seront tenus, en lisant la RĂšgle, on lise aussi ces paroles. J'interdis absolument par obĂ©issance Ă tous les frĂšres, clercs ou laĂŻques, d'introduire des gloses dans la RĂšgle, ou dans ce testament, sous prĂ©texte de l'expliquer. Mais puisque le Seigneur m'a donnĂ© de dire et d'Ă©crire la RĂšgle et ces paroles d'une maniĂšre claire et simple, comprenez-les de mĂȘme, d'une maniĂšre claire et simple, sans commentaire, et mettez-les en pratique jusqu'Ă la fin. Et que quiconque aura observĂ© ces choses soit comblĂ© au ciel des bĂ©nĂ©dictions du PĂšre cĂ©leste, et sur la terre de celles de son Fils bien-aimĂ© et du Saint-Esprit conso- lateur, avec l'assistance de toutes les vertus cĂ©lestes et de tous les saints. 1. On voit qu'il ne s'agit lĂ que de l'hĂ©rĂ©sie. Les frĂšres qui en Ă©taient entachĂ©s devaient ĂȘtre livrĂ©s Ă l'ĂgUse.. TESTAMENT ET MORT DE S. FRANĂOIS 393 Et moi petit frĂšre François, votre serviteur, je vous confirme autant que je puis cette trĂšs sainte bĂ©nĂ©diction. Amen. AprĂšs s'ĂȘtre occupĂ© de ses frĂšres, François songea Ă ses chĂšres sĆurs de Saint-Damien,etfit pour elles aussi un testament. Il ne nous est pas parvenu, et l'on ne saurait s'en Ă©tonner; les frĂšres Spirituels purent s'enfuir et protester du fond de leurs retraites, mais les sĆurs se trou- vaient complĂštement dĂ©sarmĂ©es conlre les entreprises de la commune Observance ^. Dans les derniĂšres paroles qu'il adressa aux Glarisses, aprĂšs leur avoir rappelĂ© de persĂ©vĂ©rer dans la pauvretĂ© et dans l'union, il leur donnait sa bĂ©nĂ©diction^. Puis il les recommanda aux. FrĂšres, suppliant ceux-ci de ne jamais oublier qu'ils Ă©taient les membres d'une seule et mĂȘme famille religieuse^. Ayant ainsi fait son possible pour tous ceux qu'il allait quitter, il songea un instant Ă lui-mĂȘme. Il avait fait connaissance Ă Rome d'une pieuse dame nommĂ©e Jacqueline de Settesoli. Quoique riche, elle Ă©tait simple et bonne, toute dĂ©vouĂ©e aux idĂ©es nou- 1. Urbain IV publia le 18 octobre 1263 Potthast 18680 une RĂšgle pour les Glarisses qui changeait complĂštement le caractĂšre de cet Ordre. Elle avait pour auteur le cardinal-protecteur Jean des Ursins le futur Nicolas III qui par prĂ©caution dĂ©fendit, sous les peines les plus sĂ©vĂšres, aux FrĂšres Mineurs de dissuader les SĆurs de l'accepter. Elle diffĂšre autant de la premiĂšre RĂšgle, dit Ubertin de Casai, que le blanc et le noir, le savoureux et l'insipide! » Arbor vit. crue, lib, V, cap. 6. 2. V. Test, B. ClarĆ; Conform. 185 a 1; Spec. 117. b. 3. 2 Gel. 3. 132. 394 VIE DE s. FRANĂOIS velles ; mĂȘme le cĂŽtĂ© un peu Ă©trange du caractĂšre de François lui plaisait. Il lui avait donnĂ© un agneau qui Ă©tait devenu pour elle un compagnon insĂ©parable ^. Malheureusement tout ce qui la concerne a beaucoup souffert des remaniements postĂ©rieurs de la lĂ©gende. La conduite toute naturelle du Saint avec les femmes a beaucoup embarrassĂ© ses biographes, de lĂ des com- mentaires lourds et entortillĂ©s, accolĂ©s Ă des Ă©pisodes d'une dĂ©licieuse simplicitĂ©. Avant de mourir, François dĂ©sira revoir cette amie qu'il nommait en souriant frĂšre Jacqueline. Il lui fit Ă©crire de venir Ă la Portioncule on devine l'effarouche- ment des narrateurs devant cette peu monastique invi- tation. Mais la bonne dame avait devancĂ© son appel ; au moment oii le messager chargĂ© de la lettre allait partir pour Rome, elle arriva Ă la Portioncule et y resta jusqu'au dernier soupir du Saint 2. Un instant elle avait eu l'idĂ©e de renvoyer sa suite, le malade Ă©tait si calme et si joyeux qu'elle ne pouvait le croire mourant, 1. Bon. 112. 2. Les Bollandistes nient toute cette histoire qu'ils trouvent en opposition avec les prescriptions mĂȘmes de François. A. 664 ss. Mais il est difficile de voir dans quel but l'auraient inventĂ©e des au- teurs qui se donnent beaucoup de peine pour l'expliquer; Spec. 133 a; 137 a; Fior. IV consid. ; Conform. 240 a. J'ai entiĂšrement empruntĂ© mon rĂ©cit Ă Bernard de Besse De laudibus f" 113 b. 11 paraĂźt que Jacqueline s'installa pour le reste de sa vie Ă Assise, pour aller s'Ă©difier auprĂšs des premiers compagnons de François. Spec. 107. b. quelle jolie scĂšne et d'une saveur si franciscaine ! On ignore la date exacte de sa mort. Elle fut ensevelie dans l'Ă©glise infĂ©rieure de la basilique d'Assise, et sur sa tombe fut gravĂ© Hic jacet Jacoba sancta nobilisque romana. V. Fratini, Storia dĂ©lia basilica p. 48. Cf. Jacobilli, Vite dei Santi e Beati delV Vmbria^ Foligno, 3 vol. in 4», 1647 ; t. I. p. 214. TESTAMENT ET MORT DE S. FRANĂOIS 395 mais il l'engagea lui-mĂȘme Ă garder ses gens auprĂšs d'elle. Cette fois il sentait Ă n'en pas douter que sa cap- tivitĂ© allait finir. Il Ă©tait prĂȘt, il avait achevĂ© son Ćuvre. Songea-t-il alors Ă la journĂ©e oĂč, maudit par son pĂšre, il avait renoncĂ© a tout bien terrestre et criĂ© Ă Dieu avec une ineffable confiance Notre PĂšre, qui ĂȘtes aux cieux ! » On ne saurait le dire, mais il voulut finir sa vie par un acte symbolique qui rappelle de bien prĂšs la scĂšne de l'Ă©vĂȘchĂ©. Il se fit dĂ©pouiller de ses vĂȘtements et demanda qu'on retendit par terre, car il voulait mourir entre les bras de sa Dame la PauvretĂ©. D'un coup d'Ćil il embrassa les vingt ans qui s'Ă©taient Ă©coulĂ©s depuis leur union J'ai fait mon devoir, dit-il aux frĂšres, que le Christ maintenant vous enseigne le vĂŽtre ^! » Ceci se passait le jeudi i^"" octobre 2. On le remit sur son lit et, pour se conformer Ă ses dĂ©sirs, on lui chanta de nouveau le Cantique du soleil. Lui-mĂȘme joignait par instant sa voix Ă celle de ses frĂšres^ et revenait avec prĂ©dilection au Psaume 4 42. Voce mea ad Dominum clamavi^. De ma voix je crie Ă l'Ăternel, De ma voix j'implore rĂternel. Je rĂ©pands ma plainte devant lui, Je lui raconte ma dĂ©tresse. 1. 2 Gel. 3, 139; Bon. 209, 210; Conform, 171 b 2. 2. 2 Gel. 3, 139. Cum me videritis . , . sicut me nudius tertius nudum vidistis, 3. 1 Gel. 109 ; 2 Gel. 3, 139. 4. 1 Gel. 109; Bon. 212. 396 VIE DE s. FRANĂOIS Quand mon esprit est abattu au dedans de moi, Toi, tu connais mon sentier. Sur la route oĂč je marche, Ils m'ont tendu un piĂšge. Jette les yeux Ă droite et regarde ! Personne ne me reconnaĂźt, Tout refuge est perdu pour moi Nul ne prend souci de mon Ăąme. Ăternel ! c'est Ă toi que je crie. Je dis Tu es mon refuge, Mon partage sur la terre des vivants^ Sois attentif Ă mes cris ! Car je suis bien malheureux. DĂ©livre-moi de ceux qui me poursuivent ! Car ils sont plus forts que moi. Tire mon Ăąme de sa prison Afin que je cĂ©lĂšbre ton nom. Les justes viendront m'entourer Quand tu m'auras fait du bien. Les visites de la mort sont toujours solennelles, mais la fin des justes est le plus Ă©mouvant sursum corda que l'on puisse ouĂŻr sur la terre. Les heures s'Ă©coulaient et les frĂšres ne le quittaient pas c HĂ©las, bon pĂšre, lui dit l'un d'eux, incapable de se contenir davantage, vos enfants vont vous perdre et rester privĂ©s de la vraie lu- miĂšre qui les Ă©clairait souvenez- vous des orphelins que vous laissez, et leur pardonnant toutes leurs fautes, donnez-leur Ă tous, aux prĂ©sents comme aux absents, la joie de votre sainte bĂ©nĂ©diction. » Voici, dit le mourant. Dieu m'appelle. Je pardonne Ă tous mes frĂšres, prĂ©sents et absents, leurs offenses et leurs fautes, et les en absous selon mon pouvoir. Annonce-le-leur et bĂ©nis-les tous de ma part^. » 1. 1 Gel. d09. Cf. E^ist. EliĆ. TESTAMENT ET MORT DE S. FRANĂOIS 397 Puis croisant les bras, il posa les mains sur ceux qui l'entouraient. Il le fĂźt avec une effusion particuliĂšre pour Bernard de Quintavalle d Je veux, dit-il, et je recommande de tout mon pouvoir, Ă quiconque sera ministre gĂ©nĂ©ral de l'Ordre de l'aimer et de l'honorer comme moi-mĂȘme ; que les provinciaux et tous les frĂšres en agissent avec lui comme avec moi^.» Il p3nsa non seulement aux frĂšres absents, mais aux frĂšres futurs ; l'amour surabondait tellement en lui qu'il lui arracha une plainte le regret de ne pas voir tous ceux qui entreraient dans l'Ordre jusqu'Ă la fin des siĂšcles, pour poser sa main sur leur front, et leur faire sentir ces choses que seul peut dire le regard de celui qui aime en Dieu^. Il avait perdu la notion du temps croyant qu'on Ă©tait encore au jeudi, il voulut prendre un dernier repas avec ses disciples. Du pain fut apportĂ©, il le rompit, le leur donna, et dans la pauvre cabane de la Portioncule, fut cĂ©lĂ©brĂ©e, sans autel et sans prĂȘtre, la GĂšne du Seigneur^. Un frĂšre lut l'Ă©vangile du Jeudi saint Ante diem festum PaschĆ Avant la fĂȘte de PĂąques, JĂ©sus sachant que son heure Ă©tait venue de passer de ce monde au PĂšre, 1. Tribul. Laur. 22 b. Rien ne montre mieux la valeur histo- rique de la Ghroniqne des Tribulations, que de comparer le rĂ©cit qu'elle fait de ces instants avec celui que font les documents sui- vants Conform. 48 b 1; 185 a 2; Fior. 6 ; Spec. 86 a. 2. 2 Gel. 3, 139 ; Spec. 116 b; Conform. 224 b 1. 3. 2 Gel. 3, 139. Une simple comparaison entre ce rĂ©cit dans le SpĂ©culum 116 b et dans les ConformitĂ©s 224 b 1, suffit Ă mon- trer, combien dans certaines de ses parties, le SpĂ©culum, reprĂ©sente un Ă©tat de la lĂ©gende antĂ©rieur Ă 1385. 398 VIE DE s. FUĂąNĂOIS comme il avait aimĂ© les siens qui Ă©taient dans le monde, il les aima aussi jusqu'Ă la fin. » Le soleil venait de dorer de ses derniers rayons la cime des montagnes, le silence se fit autour du mou- rant. Tout allait ĂȘtre consommĂ©. L'ange de la dĂ©livrance pouvait approcher. Le samedi 3 octobre 1226, Ă la nuit tombante, sans douleur, sans combat, il rendit le dernier soupir. Les frĂšres contemplaient encore son visage, espĂ©rant y surprendre quelque trace de vie, lorsque d'innombrables alouettes vinrent s'abattre en chantant sur le chaume de sa cellule^, comme pour saluer l'Ăąme qui venait de s'en- voler, et faire au Petit Pauvre la canonisation dont il Ă©tait le plus digne, la seule sans doute qu'il ait jamais souhaitĂ©e. Le lendemain, dĂšs l'aube, les Assisiates descendaient chercher son corps et lui faire de triomphales funĂ©railles. Par une pieuse pensĂ©e, au lieu d'aller tout droit vers la citĂ©, on fit un dĂ©tour pour passer Ă Saint-Damien, et de cette façon se trouva rĂ©alisĂ©e la promesse faite par François aux sĆurs, quelques semaines auparavant, d'aller les voir encore une fois. Leur douleur fut dĂ©chirante. Ces cĆurs de femmes se rĂ©voltaient contre l'absur- ditĂ© de la mort 2, mais ce jour-lĂ , il n'y eut de larmes 1. Bon. 214. Cette cellule a Ă©tĂ© transformĂ©e en chapelle et se trouve Ă quelques mĂštres de la petite Ă©glise de la Portioncule. Eglise et chapelle sont aujourd'hui abritĂ©es dans la grande basilique de Notre-Dame des Anges. Voir la figure et le plan A. SS., p. 814 ou mieux encore dans P. Barnabas aus dcm Elsass, Portioncula oder Geschichte U. L. F. v. den Engcln. Rixheim 1884, 1 vol. in-S», p. 311 et 312. 2. 1 Gel. 116 et 117; Bon. 219; Conform. 185 a 1. TESTAMENT ET MOllT DE S. FRxiNGOIS 399 qu'Ă Saint-Damien. Les frĂšres oubliaient leur tristesse, en voyant les stigmates, et les habitants d'Assise mani- festaient une indescriptible joie d'avoir enfin leur relique. On la dĂ©posa dans l'Ă©glise Saint-Georges ^. Moins de deux ans aprĂšs, le dimanche 26 juillet 1228, GrĂ©goire IX venait Ă Assise pour prĂ©sider lui-mĂȘme les cĂ©rĂ©monies de la canonisation, et poser le lendemain la premiĂšre pierre de la nouvelle Ă©glise dĂ©diĂ©e au Stig- matisĂ©. BĂątie sous l'inspiration de GrĂ©goire IX et sous la direction de frĂšre Ălie, cette merveilleuse basilique est, elle aussi, un des documents de cette histoire, et peut- ĂȘtre ai-je eu tort de le nĂ©gliger. Allez la contempler fiĂšre, riche, puissante, puis des- cendez Ă la PortioQcuIe, passez Ă Saint-Damien, courez aux Garceri, et vous comprendrez l'abĂźme qui sĂ©parait l'idĂ©al de François, de celui du pontife qui le cano- nisait. 1. Aujourd'hui dans la clĂŽture du couvent Sainte-Claire. V. Mis- cellanea, I, p. 44-48 une Ă©tude fort intĂ©ressante du prof. Carattoli sur la biĂšre de saint François. Cf. Ib. p. 190. APPENDICE Ătude critique sur les stigmates et sur l'indulgence du 2 aoĂ»t. I. Les stigmates. Une dissertation sur la possibilitĂ© des miracles serait ici dĂ©placĂ©e une esquisse historique n'est pas un traitĂ© de philosophie ou de dogmatique. Je dois cependant au lecteur quelques explications pour lui permettre de juger en connaissance de cause ma maniĂšre de voir. Si par miracle on entend soit la suspension ou le ren- versement des lois de la nature, soit l'intervention de la cause premiĂšre dans certains cas particuliers, je ne saurais l'admettre. Dans cette nĂ©gation, les raisons physiques et logiques sont secondaires la vraie raison â qu'on veuille bien ne pas s'Ă©tonner â est toute reli- gieuse le miracle est immoral. L'Ă©galitĂ© de tous devant Dieu est un des postulats de la conscience religieuse, et le miracle, ce bon plaisir de Dieu, ne fait que rabaisser celui-ci au niveau des fantasques tyrans de la terre. Les Ă©glises actuelles, en faisant Ă peu prĂšs toutes de cette notion du miracle, l'essence mĂȘme de la religion et la base de toute foi positive, se rendent involontaire- ment coupables de l'affaissement de virilitĂ© et de mora- 402 VIE DE S. FRANĂOIS litĂ© dont elles se plaignent si vivement. Si Dieu inter- vient ainsi d'une maniĂšre irrĂ©guliĂšre dans les affaires des hommes, ceux-ci ne peuvent que viser Ă devenir des courtisans qui attendent tout de la faveur du souverain. La question change d'aspect, si l'on appelle miracle, comme cela a lieu fort souvent, tout ce qui dĂ©passe l'ex- pĂ©rience courante. Beaucoup d'apologĂštes se plaisent Ă montrer que l'inouĂŻ, l'inexpliquĂ© se rencontrent Ă chaque instant dans la vie. Ils ont raison, et je suis d'accord avec eux, Ă condition qu'ils ne remplacent pas Ă la fin de leur dĂ©monstration cette nouvelle notion du surnaturel par la prĂ©cĂ©dente. C'est ainsi que je suis arrivĂ© Ă conclure Ă la rĂ©alitĂ© es stigmates. Ils pourraient ĂȘtre un fait unique, sans ĂȘtre plus miraculeux que tel autre phĂ©nomĂšne, par exemple la puissance de calcul ou la virtuositĂ© musicale d'un enfant prodige. Il y a dans l'ĂȘtre humain des puissances presque indĂ©- finies, des Ă©nergies merveilleuses; elles sommeillent engourdies chez la plupart des hommes; mais s'Ă©veillant chez quelques-uns, elles en font les prophĂštes, les gĂ©nies et les saints qui montrent Ă l'humanitĂ© sa voie. Nous entrevoyons Ă peine le domaine de la pathologie mentale, tant il est vaste et encore inexplorĂ© ; les savants de demain feront peut-ĂȘtre, sur les confins de la psycho- logie et de la physiologie, des dĂ©couvertes qui amĂšne- ront le bouleversement complet de nos lois et de nos mĆurs. Il reste Ă examiner les stigmates au point de vue purement historique. Or, si sur ce terrain les difficultĂ©s petites et grandes ne manquent pas, les tĂ©moignages I APPENDICE â LES STIGMATES 403 m'ont paru Ă la fois trop nombreux et trop prĂ©cis pour ne pas entraĂźner la conviction. On peut Ă©carter de prime abord le systĂšme de ceux qui ont pensĂ© que frĂšre Elie, par une pieuse supercherie, avait aidĂ© leur apparition. Cette thĂšse pourrait se dĂ©fendre, Ă la rigueur, si ces plaies eussent Ă©tĂ© comme on les reprĂ©sente aujourd'hui, ou comme chez la plupart des stigmatisĂ©es postĂ©rieures, des blessures bĂ©antes, mais tous les tĂ©moignages sont d'accord pour dĂ©crire, sauf au cĂŽtĂ©, des excroissances charnues, noirĂątres, res- semblant Ă des tĂȘtes de clous, et sur le dessus des mains Ă des pointes de clous rabattues Ă coups de marteau. Il n'y eut de suintement sanguinolent qu'au cĂŽtĂ©. D'autre part, la tromperie d'Elie obligerait Ă penser qu'il prit pour complices prĂ©cisĂ©ment les chefs du parti qui lui Ă©tait opposĂ©, LĂ©on, Ange et Rufin. Une pareille ma- ladresse serait bien Ă©tonnante chez un homme aussi avisĂ©. Enfin l'adaptation psychologique entre les circons- tances extĂ©rieures et l'Ă©vĂ©nement lui-mĂȘme est si intime que l'invention de ce cadre serait aussi inexplicable que le fait mĂȘme des stigmates. Ce qui dĂ©cĂšle en effet presque toujours les traits inventĂ©s ou dĂ©naturĂ©s, c'est qu'ils ne s'enchĂąssent pas dans la contexture des Ă©vĂ©ne- ments. Ce sont des hors-d'Ćuvre, des Ă©lĂ©ments pure- ment dĂ©coratifs dont on peut changer la place Ă volontĂ©. Ici rien de semblable, Thomas de Celano est si vĂ©ri- dique et si exact que tout en voyant dans les stigmates un miracle, il nous donne tous les Ă©lĂ©ments nĂ©cessaires pour les expliquer d'une façon diamĂ©tralement opposĂ©e. 1° RĂŽle prĂ©pondĂ©rant de la passion de JĂ©sus dans la conscience de François dĂšs sa conversion 1 Cel. 115, 2 Cel. 1, G; 3, 29; 49; 52. 2^ Son sĂ©jour Ă l'Alverne coĂŻncide avec un redouble- ment d'ardeur mystique. 40i V[E DE S. FRANĂOIS 3'' Il y cĂ©lĂšbre un carĂȘme en l'honneur de l'arcliange Saint Michel. 4° La fĂȘte de l'Exaltation arrive, et la vision du sĂ©ra- phin crucifiĂ© fond ainsi en une seule les deux images dont il Ă©tait obsĂ©dĂ©, les anges et le crucifix 1 Cel. 91 â 96, 112â115. Cette convenance parfaite entre les circonstances et le prodige mĂȘme, constitue une preuve morale dont la va- leur ne saurait ĂȘtre exagĂ©rĂ©e. Il est temps de passer en revue les principaux tĂ©moi- gnages. 1'' FrĂšre Ălie 1226. Au lendemain mĂȘme de la mort de François, frĂšre Elie, en sa qualitĂ© de vicaire, adressait Ă tout l'Ordre des lettres pour annoncer cet Ă©vĂ©nement et prescrire des priĂšres*. AprĂšs avoir Ă©panchĂ© sa douleur et annoncĂ© Ă tous les frĂšres la bĂ©nĂ©diction dont François mourant l'avait chargĂ© pour eux, il ajoute Je vous annonce une grande joie et un miracle tout nouveau. Jamais le 1. Le texte en a Ă©tĂ© publiĂ© en 1620 par SpĆlberch dans son Speculwn vitĆ B. Franeisci. Anvers, 2 tomes in-12, t. II, p. 103- 106, d'aprĂšs Texomplaire adressĂ© Ă frĂšre GrĂ©goire, ministre de France, et conservĂ© alors au couvent des RĂ©collets de Valenciennes. Il a Ă©tĂ© reproduit par Wadding Ann. 1226, n. 44 et les Bollan- distes p. 668 et 669. Cette rĂ©apparition si tardive d'un document capital aurait pu donner lieu Ă des scrupules; ils n'ont plus de raison d'ĂȘtre, depuis la publi- cation de la chronique de Jourdain de Giano qui relate l'envoi de celte lettre Jord. 50. â L'abbĂ© Amoni a publiĂ© aussi ce texte Ă la suite de sa Legenda trium Sociorum, Rome 1880, p. 105-109, mais suivant sa dĂ©plorable habitude, il nĂ©glige d'indiquer oĂč il l'a puisĂ©. C'est d'autant plus regrettable qu'il donne une variante de premier ordre Nam diu an te mortcm au lieu de Non diu, comme le veut le texte de SpĆlberch. La leçon Nam diu paraĂźt prĂ©fĂ©rable au point de vue philologique. APPENDICE â LES STIGMATES 405 monde n'avait vu un signe pareil, sinon dans le Fils de Dieu, qui est le Christ Dieu. Car longtemps avant sa mort; notre FrĂšre et notre PĂšre apparut crucifiĂ©, ayant en son corps cinq plaies qui sont vraiment les stigmates du Christ, car ses mains et ses pieds portaient comme des clous en dessus et en dessous et formant des sortes de cicatrices; quant au cĂŽtĂ©, il Ă©tait comme percĂ© d'un coup de lance, et souvent il en suintait un peu de sang. » 2° FrĂšre LĂ©on. C'est prĂ©cisĂ©ment l'adversaire d'Ălie, qui se trouve ĂȘtre le tĂ©moin naturel non seulement des stigmates, mais des circonstances de leur impression. Ce fait n'est pas sans ajouter une valeur particuliĂšre Ă ses rĂ©cits. On a vu plus haut Introduction p. LXIV le malheu- reux sort d'une partie de la LĂ©gende des frĂšres LĂ©on, Ange et Rufin. Les chapitres qui la terminent aujourd'hui 68 â 73, et dans lesquels se trouve la narration du mi- racle, n'en ont pas fait partie Ă l'origine. Ils sont un rĂ©sumĂ© ajoutĂ© postĂ©rieurement pour donner une fin Ă ce document. Cet appendice n'a donc aucune valeur histo- rique, et on ne peut s'y appuyer, ni comme les auteurs ecclĂ©siastiques pour affirmer le miracle, ni comme M. Hase pour le rĂ©voquer en doute. Par bonheur le tĂ©moignage de frĂšre LĂ©on nous est parvenu malgrĂ© cela. On n'a mĂȘme pas besoin d'aller le chercher dans le SpĂ©culum, les Fioretti, les ConformitĂ©s, oĂč se rencontrent des lambeaux de son Ćuvre, mais on le trouve aussi dans plusieurs autres documents d'une au- toritĂ© incontestable. L'authenticitĂ© de l'autographe de saint François con- servĂ© Ă Assise paraĂźt bien Ă©tablie voir Introduction p. XLII; or, il contient la note suivante de la main de 34 406 VIE DE s. FRANĂOIS frĂšre LĂ©on Le B. François, deux ans avant sa mort, fit un carĂȘme Ă l'Alverne en l'honneur de la B. V. Marie, mĂšre de Dieu et de saint Michel archange de- puis la fĂȘte de l'Assomption de la B. V. M. jusqu'Ă la fĂȘte de Saint-Michel de septembre, et la main de Dieu fut sur lui par la vision et l'allocution du sĂ©raphin et l'im- pression des stigmates en son corps. Il fit les laudes qui sont de l'autre cĂŽtĂ© etc. » D'un autre cĂŽtĂ© Eccleston 13 nous montre frĂšre LĂ©on se plaignant Ă frĂšre Pierre de Theukesbury, ministre d'Angleterre, de ce que la lĂ©gende soit trop laconique sur les Ă©vĂ©nements de l'Alverne, et lui racontant la plupart des traits qui forment le noyau de la narration des Fioretti sur les stigmates. Ces souvenirs sont d'autant plus sĂ»rs, qu'ils furent aussitĂŽt consignĂ©s par Ă©crit par le compagnon de Pierre de Theukesbury, frĂšre Garin de Sedenfeld. Enfin Salimbene, dans sa chronique adann. 1244, est amenĂ© en parlant d'Ezzelino da Romano, Ă l'opposer Ă François ; il se rappelle tout Ă coup les stigmates et dit Jamais aucun homme sur la terre, Ă part lui, n'a eu les cinq plaies du Christ. Son compagnon, frĂšre LĂ©on, qui Ă©tait prĂ©sent lorsqu'on lava son corps avant de l'en- sevelir, m'a racontĂ© qu'il ressemblait exactement Ă un crucifiĂ© descendu de la croix. » 3° Thomas de Celano avant 1230. Il les dĂ©crit plus longuement que frĂšre Elie 1 Cel. 94 et 95, 112. Les dĂ©tails y sont trop prĂ©cis pour ne pas faire songer Ă une leçon apprise par cĆur. Nulle part l'auteur ne s'y pose en tĂ©moin oculaire, et il a cependant l'air de dresser un procĂšs-verbal. Ces objections ne sont pas sans valeur, mais la nou- veautĂ© mĂȘme du miracle dut amener les Franciscains APPENDICE â LES STIGMATES 407 Ă le fixer en une sorte de rĂ©cit canonique et comme stĂ©- rĂ©otypĂ©. 4° Le portrait de François, par Berlinghieri, datĂ© de 1236 1, conservĂ© Ă Pescia province de Lucques; montre les stigmates tels qu'ils sont dĂ©crits dans les documents qui prĂ©cĂšdent. 5° GrĂ©goire IX en 1237. Bulle du 31 mars Confessor Domini, Potthast 10307. Cf. 10315. Il s'Ă©tait produit un mouvement d'opinion dans certains pays contre les stigmates. Le pape invite tous les fidĂšles Ă y ajouter foi. Deux autres bulles du mĂȘme jour, adressĂ©es l'une Ă l'Ă©vĂȘque d'Olmutz, l'autre Ă des Dominicains, les con- damnent avec vigueur parce qu'ils ont rĂ©voquĂ© en doute les stigmates. Potthast 10308 et 10309. 6° Alexandre IV, dans sa bulle Benigna operatio du 29 octobre 1255 Potthast 16077, raconte qu'Ă©tant jadis prĂ©lat domestique du cardinal Hugolin, il connut fami- liĂšrement saint François, et s'appuie sur ces relations pour sa description des stigmates. On doit Ă ce pontife plusieurs autres bulles dĂ©clarant excommuniĂ©s tous ceux qui les nieraient. Elles n'ap- portent Ă la question aucun Ă©lĂ©ment nouveau. 7° Bonaventure 1260 rĂ©pĂšte dans sa lĂ©gende la description de Thomas de Celano Bon. 193. Cf. 1 Cel. 94 et 95, non sans y ajouter des traits nouveaux Bon. 194-200 et 215-218, mais souvent si grossiers et si maladroits qu'ils Ă©veillent invinciblement le doute voir par exemple 201. i. GravĂ© dans Saint François d'Assise. Paris, in-4o, 1885, p. 277. 408 VIE DE s. FRANĂOIS 8*^ Matthieu Paris t 1259. Son tĂ©moignage discordant mĂ©rite Ă peine d'ĂȘtre citĂ© pour mĂ©moire v. Introduction p. CXXV. Pour lui pardonner la fantaisie de ses longues pages sur saint François, on est obligĂ© de penser qu'il devait ses renseignements Ă la relation verbale de quel- que pĂšlerin. Il fait apparaĂźtre les stigmates quinze jours avant la mort du Saint, les montre rĂ©pandant sans cesse du sang ^ la blessure du cĂŽtĂ© si ouverte qu'on voyait le cĆur. Le peuple accourt en foule pour jouir du spectacle, des cardinaux arrivent aussi et tous ensemble Ă©cou- tent les bizarres dĂ©clarations de François {Hisfo7'la major. Edition Wats, Londres. 1 vol. in-fol. 1640. p. 339-342. On pourrait beaucoup allonger cette liste en y ajou- tant un passage de Luc, Ă©vĂȘque de Tuy Lucas Tudensis Ă©crit en 1231 1, oĂč l'auteur s'appuie surtout sur la vie de Thomas de Celano et les tĂ©moignages oraux. â Les paroles de frĂšre Boniface tĂ©moin oculaire, au chapitre de GĂȘnes 1254. Eccl. 13. â Enfin et surtout, il faudrait Ă©tudier les strophes se rapportant aux stigmates dans les proses, hymnes, sĂ©quences, composĂ©es en 1228 par le pape et plusieurs cardinaux pour l'office de saint François ; mais un pa- reil travail, pour ĂȘtre fait avec exactitude, nous entraĂź- nerait fort loin, et les autoritĂ©s dĂ©jĂ citĂ©es suffisent sans doute sans en faire intervenir d'autres ^. 1. Bibliotheca Patrum. Lyon 1677, t. XXV, adv. Albigenses, lib. II, cap. 11. Cf. m, 14 et 15. Reproduit dansles A. SS., p. 652. 2. Voici pour les curieux l'indication de quelques sources Sa- limbene ann. 1250, â Conform. 171 b 2, 235 a 2; Bon. 200; Wad- ding, ann. 1228, no 78; A. SS., p. 800. Le manuscrit 340 du Sacro- Convento contient f» 55 b-56 b quatre de ces hymnes. Cf. Archiv. I, p. 485. APPENDICE â LES STIGMATES 409 Les objections faites contre ces tĂ©moignages se rĂ©- duisent je crois aux suivantes*. a Les funĂ©railles de François eurent lieu avec une prĂ©cipitation surprenante. Mort le samedi soir, on l'en- terre le dimanche matin. h Son corps fut enfermĂ© dans une biĂšre, ce qui est contraire aux habitudes italiennes. c Lors de la translation, le corps arrachĂ© Ă la foule est si bien cachĂ© dans la basilique que durant des siĂšcles on a ignorĂ© sa place exacte. d La bulle de canonisation ne fait pas mention des stigmates. Ă© Ils n'ont pas Ă©tĂ© admis sans conteste, et parmi les nĂ©gateurs se trouvent des Ă©vĂȘques. Aucun de ces arguments ne me paraĂźt dĂ©cisif ; a Au moyen Ăąge, les funĂ©railles ont lieu presque de suite aprĂšs le dĂ©cĂšs Innocent III mort Ă PĂ©rouse le 16 juillet 1216 est enterrĂ© le 17 ; Honorius III meurt le 18 mars 1227 et est enterrĂ© le lendemain. h Il est plus difficile qu'on ne croit de savoir les habitudes de l'Ombrie au treiziĂšme siĂšcle pour les funĂ©railles. Quoi qu'il en soit, on Ă©tait bien obligĂ© de mettre le corps de François dans un cercueil. Celui-ci se trouvant dĂ©jĂ canonisĂ© par le sentiment populaire, son corps Ă©tait dores et dĂ©jĂ une relique pour laquelle il fallait une chĂąsse ; plus que cela, un coffre- fort tel que nous le reprĂ©sentent les scĂšnes secondaires du tableau de Berlinghieri. Sans ces prĂ©cautions, le corps saint eĂ»t Ă©tĂ© en quelques instants rĂ©duit en lam- 1. Voir en particulier Hase, Franz v. Assisi. Leipzig, 1vol. in-S», 1856. Le savant professeur ne consacre pas moins de soixante pages d'impression compacte Ă l'Ă©tude des stigmates, p. 142-202. 410 VIE DE S. FRANĂOIS beaux. Que l'on se rappelle cette fureur qui entraĂźna des dĂ©votes Ă couper les oreilles au cadavre de sainte Elisabeth de Hongrie, et mĂȘme le bout des seins ! [QuĆdam aures illius trimcahant, etiam summitafem ma- millarum ejus quidam praecidehant et pro reliquiis sibi servahant. â Liber de dictis IV ancillaruniy Mencken, t. II, p. 2032]. c La cĂ©rĂ©monie de la translation avait attirĂ© Ă Assise une foule innombrable. Si frĂšre Elie a fait disparaĂźtre le corps 1, il a pu y ĂȘtre amenĂ© par la crainte de quelque coup de main organisĂ© par les habitants de PĂ©rouse, pour dĂ©rober la prĂ©cieuse relique. Avec les mĆurs d'alors, un pareil vol n'avait rien d'extraordinaire. PrĂ©- cisĂ©ment les gens de PĂ©rouse enlevĂšrent, quelques annĂ©es plus tard, Ă Bastia, village dĂ©pendant d'Assise, le corps de Conrad d'Offida qui y accomplissait d'in- nombrables miracles. {Conform. 60 b. 1. Cf. Jord. 50. Des Ă©chauffourĂ©es du mĂȘme genre eurent lieu Ă Padoue, Ă propos des reliques de saint Antoine. Hilaire, Saint Antoine de Padoue, sa lĂ©gende primitive. Montreuil- sur-Mer. 1 -vol. 8^ 1890. p. 30-40. d La bulle de canonisation, comme le sont au reste la plupart des documents de ce genre, n'a aucune prĂ©tention historique. Dans cette rhĂ©torique verbeuse, on appren- drait plutĂŽt l'histoire des Philistins, de Samson, ou mĂȘme de Jacob, que celle de saint François. La canonisation n'est ici qu'un prĂ©texte saisi par le vieux pontife pour revenir Ă ses images favorites. Ce silence ne signifie rien, aprĂšs le tĂ©moignage si ex- plicite donnĂ© par d'autres bulles du mĂȘme pontife en 1. Plus j'y rĂ©flĂ©chis, plus je deviens incapable d'attribuer une valeur quelconque Ă cet argument de la disparition du corps ; car enfin, s'il y avait eu une fraude pieuse d'Ălie, il aurait au contraire Ă©talĂ© ce cadavre. APPENDICE â LES STIGMATES 411 1237, et aprĂšs la part faite aux stigmates dans les chants liturgiques composĂ©s par lui pour l'office de saint Fran- çois dĂšs 1228. e Ces attaques de quelques Ă©vĂȘques n'ont rien d'Ă©ton- nant, ce sont des Ă©pisodes de la lutte du clergĂ© sĂ©culier contre les ordres mendiants. Au moment oĂč ces nĂ©gations se sont produites en 1237, le rĂ©cit de Thomas de Celano Ă©tait officiel et rĂ©- pandu partout*, rien de plus facile alors, une dizaine d'annĂ©es aprĂšs les Ă©vĂ©nements, que de prouver la super- cherie, s'il y en avait eu une, par des tĂ©moignages; or l'Ă©vĂȘque d'Olmtitz et les autres s'appuient toujours et uniquement sur des motifs dogmatiques. Quant aux attaques des Dominicains, il est inutile de rappeler la rivalitĂ© des deux ordres ^ ; dĂšs lors n'est-il pas Ă©trange de voir ces protestations se produire en SilĂ©sie !, et jamais dans l'Italie centrale oĂč, entre autres tĂ©moins oculaires, vivait encore frĂšre LĂ©on f 1271 ? Les tĂ©moignages me paraissent ainsi subsister dans leur intĂ©gritĂ©. On les prĂ©fĂ©rerait plus simples, plus courts-, on voudrait qu'ils nous soient arrivĂ©s sans des dĂ©tails qui Ă©veillent tous les soupçons 2, mais il est bien 1. Voir par exemple 2 Gel. 3, 86, ainsi que l'encyclique de Jean de Parme et de Humbert de Romans en 1255. 2. Les suivants entre beaucoup d'autres François se serait fait faire des braies particuliĂšrement montantes, pour cacher la plaie du cĂŽtĂ© Bon. 201. Au moment de l'apparition qui eut lieu durant la nuit, une si grande clartĂ© inonda le pays que les marchands logĂ©s dans les auberges du Gasentin sellĂšrent leurs bĂȘtes et se mirent en route. Fior. III consid. M. Hase, dans son Ă©tude, est constamment sous le poids de la mauvaise impression produite sur lui par la dĂ©plorable argumen- tation de Bonaventure ; il ne voit les autres tĂ©moignages qu'Ă tra- vers celui-lĂ . Je crois que s'il avait eu devant lui uniquement la premiĂšre vie de Thomas de Celano, il serait arrivĂ© Ă des conclusions bien diffĂ©rentes. 412 VIE DE S. FllANĂOIS rare qu'un tĂ©moin ne cherche pas Ă trop prouver ses affirmations, et Ă les Ă©tayer d'arguments dĂ©testables, mais appropriĂ©s Ă l'auditoire vulgaire auquel ils s'adressent. II. Le pardon du 2 aoĂ»t, dit indulgence de la Portioncule *. Cette question pourrait ĂȘtre nĂ©gligĂ©e elle n'a, somme toute, aucune attache directe avec l'histoire de saint François. 1. Le document le plus important est le manuscrit 344 des ar- chives du Sacre- Gonvento Ă Assise. Liber indulgentiĆ S. MariĆ de Angelis sive de Portiuncula, in quo libro ego fr. Franciscus Bartholi de Assisio posui quidquid potui sollicite invenire in legen- dis antiquis et novis h. Francisci et in aliis dictis sociorum ejus de loco eodem et commendatione ipsius loci et quidquid verita- tis et certitudinis potui invenire de sacra indulgentia prefati loci, quomodo scilicet fuit impetrata et data 6. Francisco de miraculis ipsius indulgeniiĆ, quĆ ipsam dĂ©clarant certam et veram. Bartholi vivait dans la premiĂšre moitiĂ© du XIV^ siĂšcle. Son ouvrage est encore inĂ©dit mais le R. P. LĂ©on Patrem M. 0. en prĂ©pare la publication. Le nom de ce savant religieux donne toute garantie pour l'exactitude de ce difficile travail ; en attendant, on trouvera une description dĂ©taillĂ©e et de longs extraits dans les Miscellanea t. II 1887. La storia del perdono, di Francesco de Bartholi par Don MichĂšle Faloci Pulignani p. 149â153. Cf. Archiv, t. I p. 486. Voir aussi dans les Miscellanea t. 1, 1886 p. 15, une notice bibliographique contenant l'Ă©numĂ©ration dĂ©taillĂ©e de cinquante-huit ouvrages Cf. Ihid. p. 48 et 145. La lĂ©gende elle-mĂȘme se trouve dans le SpĂ©culum 69 b-83 a et les ConformitĂ©s 151 b-157 a. Dans ces deux recueils elle se trouve encore pĂ©niblement enchĂąssĂ©e et ne fait pas corps avec le reste de l'Ćuvre. Dans le dernier, BarthĂ©lĂ©my de Pise a poussĂ© l'exactitude jusqu'Ă copier bout Ă bout tous les documents qu'il avait sous les yeux, et comme ceux-ci proviennent d'Ă©poques diffĂ©rentes, il nous donne ainsi plusieurs phases du dĂ©veloppement de la tradition. L'ouvrage le plus complet est celui du P. Grouwel RĂ©collet His- APPENDICE â LE PARDON DU 2 AOUT 413 Cependant elle occupe une trop large place dans ses biographies modernes, pour qu'il ne faille pas en dire quelques mots on raconte que François Ă©tait une nuit en priĂšre Ă la Portioncule, Ă la fin de juillet 1216, lorsque JĂ©sus et la Vierge lui apparurent avec un cortĂšge d'anges. Il s'enhardit jusqu'Ă solliciter un privilĂšge inouĂŻ, celui de l'indulgence plĂ©niĂšre de tous les pĂ©chĂ©s, pour tous les fidĂšles qui, confessĂ©s et contrits, visiteraient la chapelle. JĂ©sus l'accorda, sur la priĂšre de sa mĂšre, Ă la seule condition que le pape son vicaire la ratifierait. Le lendemain François accompagnĂ© de Masseo partait pour PĂ©rouse et obtenait d'Honorius III l'indulgence demandĂ©e, mais seulement pour la journĂ©e du 2 aoĂ»t. Tel est en quelques lignes le rĂ©sumĂ© de cette lĂ©gende qui est entourĂ©e d'une foule de dĂ©tails merveilleux. La question de la nature et de la valeur des indul- loria critica iS. IndulgentiĆ B. MariĆ Angelorum vulgo de Por- tiuncula . . . contra Libellas aliquos anonymos ac famosos nuper editos. Anvers -1726, 1 vol. in-S» de 5i0 pages. Le BoUandiste Suysken en fait aussi une longue Ă©tude A. SS., p. 879-910, ainsi que le P. Candide Ghalippe RĂ©collet, Vie de saint François d'Assise, 3 vol. in-8°. Paris, 1874 La premiĂšre Ă©dition est de 1720, t. III, p. 190-327. On trouvera dans ces quelques ouvrages ce qui a Ă©tĂ© dit dans tous les autres. Les nombreux Ă©crits dirigĂ©s contre l'Indulgence sont tantĂŽt des amas de grossiĂšretĂ©s, tantĂŽt des traitĂ©s de dogma- tique, je me dispense donc d'en grossir ces pages. Les principaux sont indiquĂ©s par Grouwels et Ghalippe. Parmi les contemporains le R. P. Barnabe d'Alsace Portiuncula odcr Geschichte Unserer lieben Frau von den Engeln Rixheim, un vol. in-S". 1884, reprĂ©sente la tradition de l'Ordre, et M. l'abbĂ© Le Monnier {Histoire de saint François, 2 vol. in-8^, Paris, 1889, l'opinion catholique moyenne des cercles non franciscains. Le meilleur rĂ©sumĂ© est celui du P. Panfilo da Magliano dans sa Storia compendiosa. Il a Ă©tĂ© complĂ©tĂ© et amĂ©liorĂ© dans la traduc- tion allemande Geschichte des h, Franciscus und der Franzis- kaner Ă»bersetzt und bearbeitet von Fr. Quintianus Miiller, t. I, Munich 1883, p. 233-259. 414 VIE DE S. FRANĂOIS gences n'a rien Ă faire ici. La seule qui se pose est la suivante François a-t-il demandĂ© cette indulgence ? Honorius III l'a-t-il accordĂ©e? MĂȘme en rĂ©duisant le rĂ©cit Ă ces simples proportions, on est amenĂ© Ă rĂ©pondre par un non catĂ©gorique. Il serait fastidieux de rappeler mĂȘme briĂšvement les difficultĂ©s, contradictions, impossibilitĂ©s, signalĂ©es maintes fois dĂ©jĂ mĂȘme par des auteurs orthodoxes dans toute cette histoire ; ils ont conclu malgrĂ© cela par l'affirmative Borna locuta est. Les personnes que cela pourrait intĂ©resser trouveront dans la note ci-dessus des indications bibliographiques dĂ©taillĂ©es sur les monuments principaux de cette discus- sion aujourd'hui assoupie. Je me bornerai Ă marquer les impossibilitĂ©s contre lesquelles vient se heurter la tra- dition, elles sont Ă la fois psychologiques et historiques. Les Bollandistes avaient dĂ©jĂ signalĂ© le silence des premiers biographes de François sur cette question. Aujourd'hui que les documents publiĂ©s sont en bien plus grand nombre, il est encore plus Ă©crasant. Ni la PremiĂšre ni la Seconde Vie par Thomas de Celano, ni l'auteur anonyme de la seconde vie donnĂ©e dans les Acta Sanctorum, ni mĂȘme l'Anonyme de PĂ©rouse, les Trois Compagnons ou saint Bonaventure n'en disent un seul mot. Des travaux beaucoup plus tardifs et qui ne pĂšchent pas par excĂšs de scrupules critiques ne la mentionnent pas non plus Bernard de Besse, Jourdain de Giano, Thomas d'Eccleston, la Chronique des Tribulations, les Fioretti et mĂȘme la LĂ©gende dorĂ©e. Cette conspiration du silence de tous les auteurs du treiziĂšme siĂšcle serait le plus grand miracle de l'histoire, si elle n'Ă©tait absurde. On a dit, pour l'expliquer, qu'on avait Ă©vitĂ© de parler APPENDICE â LE PARDON DU 2 AOUT 415 de cette indulgence pour ne pas faire tort Ă celle de la croisade, mais alors pourquoi le pape ordonnait-il Ă sept Ă©vĂȘques de se rendre Ă la Portioncule pour la proclamer en son nom ? La lĂ©gende elle-mĂȘme se charge de nous expliquer comment François refusa toute bulle ou toute attestation Ă©crite de ce privilĂšge, mais cela admis, encore faudrait-il expliquer comment aucune indication Ă ce sujet n'a Ă©tĂ© conservĂ©e dans les papiers d'Honorius III. Et les bulles adressĂ©es aux sept Ă©vĂȘques, comment n'ont-elles pas laissĂ©
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Guy XVI, mariĂ© trois fois, eut onze enfants de Charlotte d'Aragon I I Louis François Catherine d'Anne de Montmorency Anne Il II RenĂ© Claude ou Guy XVII Marguerite Anne dAntoinette de Daillon I I I François Louise Charlotte Guy XVI, eut en outre un enfant naturel, nommĂ© François, lequel fut Ă©voque Ă Dol. 6 LA MAISON DE LAVAL Jean, le second des fds de Guy XIV, nĂ©, comme Guy XV, d'Isabelle de Bretagne, avait vu le jour Ă Redon le 14 fĂ©vrier 1437. A la fin de la trente-troisiĂšme annĂ©e de son Ăąge, le 27 janvier 1470, il Ă©pousa Jeanne du Perrier, qu'il laissa veuve le 14 octobre 1476 et qui ne tarda, guĂšre Ă Ă©pouser en secondes noces Pierre de Rohan, baron de PontchĂąteau. Il avait eu un fils unique, Nicolas, nĂ© vers le 1 er octobre 1476, et qui se trouvait par consĂ©quent dans sa vingt-sixiĂšme annĂ©e quand le dĂ©cĂšs de son oncle, Guy XV, advenu le 28 janvier 1501, fit de lui l'hĂ©ritier du riche patrimoine des Laval. Mais ce patrimoine si considĂ©rable, il ne le reçut pas dans son intĂ©gritĂ©, et force lui fut d'en abandonner l'une des perles les plus prĂ©cieuses. On n'a pas oubliĂ© qu'Ă la fin du XIII e siĂšcle, BĂ©atrix de Gavre, Ă©pouse de Guy IX, avait incorporĂ© aux domaines de son Ă©poux un vaste territoire situĂ© en Flandre, Gavre et ses dĂ©pen- dances. Cet hĂ©ritage lui Ă©tait venu grĂące Ă une disposi- tion de la coutume de Flandre, absolument contraire Ă ce qui Ă©tait rĂ©glĂ© par la coutume du Maine, et qui avait l'inconvĂ©nient de compromettre singuliĂšrement les intĂ©- rĂȘts de la postĂ©ritĂ© des aĂźnĂ©s. La transmission des hĂ©ri- tages avait lieu sans admettre le droit de reprĂ©sentation. C'est ainsi qu'en 1300, lors du dĂ©cĂšs de Rasses VIII de Gavre, il se trouva que, par le prĂ©dĂ©cĂšs de son fils uni- que, appelĂ© Rasses, lui aussi, le dĂ©funt ne laissait qu'un seul hĂ©ritier au premier degrĂ©, BĂ©atrice, Ă©pouse de Guy IX de Laval, dont les droits de fille vivante annu- laient ceux de ses neveux, dont le pĂšre Ă©tait mort et au nom duquel ils ue pouvaient pas intervenir Ă la succession par reprĂ©sentation. BĂ©atrix devint donc dame de Gavre ; et, Ă partir de 1300, la transmission de Gavre fut effec- tuĂ©e, comme celle du patrimoine des Laval, sans que le droit de reprĂ©sentation eut Ă intervenir. Il u'en fut pas de mĂȘme en 1501 c'est par reprĂ©sentation des droits de son pĂšre, Jean de la Roche-Bernard, que Nicolas de Laval fut hĂ©ritier de Guy XV; Gavre, soumis Ă une cou- tume qui n'admettait pas l'usage de ce droit, Ă©chappa Ă ses mains, pour venir dans celles de l'aĂźnĂ© de ceux des fds de Guy XIV qui Ă©taient alors vivants, François de Laval-ChĂąteaubriant. Au dĂ©cĂšs de celui-ci, le 5 janvier 1504, l'aĂźnĂ© de ses fils, Jean de Laval-ChĂąteaubriant, en hĂ©rita Ă son tour ; et, en 1515, dit-on, pour une somme de trente-quatre mille Ă©cus, il la vendit Ă Jac- ques de Luxembourg, dont le fds, nommĂ© Jacques lui aussi, mourut sans autre hĂ©ritier que sa sĆur, Fran- çoise, laquelle, en Ă©pousant Jean d'Egmont, fit passer Gavre dans le patrimoine des d'Egmont 1. Mais, mĂȘme diminuĂ© du fief de Gavre, le patrimoine des Laval restait un hĂ©ritage fort enviable, dont la pos- session devait inĂ©vitablement confĂ©rer une situation extrĂȘmement considĂ©rable en France. Guy XV Ă©tait mort le 28 janvier 1501 ; mais ses obsĂš- ques n'eurent lieu Ă Saint-Tugal que le 15 lĂ©vrier seu- lement. Le Doyen, qui mentionne ce double Ă©vĂ©nement dans ses Annales, ne signale Ă cette occasion aucune intervention du nouveau comte. Il est certain que Nico- las ne pouvait ĂȘtre Ă Laval le 28janvier 1501, lui qui, le 27 janvier 1501, Ă Vierzon, venait de cĂ©lĂ©brer son mariage ; mais, entre le 28 janvier et le 15 fĂ©vrier, Ă©tait-il impossible aux nouveaux Ă©poux de se transporter Ă Laval, afin de rendre les derniers devoirs Ă l'oncle, dont la mort venait de transformer d'une façon si com- plĂšte leur rang dans le monde 2 ? La fiancĂ©e de Nicolas de Laval, se nommait Charlotte d'Aragon, princesse de Tarente, elle Ă©tait l'aĂźnĂ©e des filles de FrĂ©dĂ©ric III d'Aragon, roi de Naples, et d'Anne de Savoie, sa premiĂšre femme, et se trouvait par celle- ci petite fille de Yolande de Franco, troisiĂšme fille de 1. Voir Biographie Nationale Belge, au mot Gavre. 2. Voir au cartulaire, sous le numĂ©ro 2074, une lettre adressĂ©e Ă la reine Jeanne de Laval, traçant un tableau assez sombre de ce qu'Ă©tait en 1493 la situation de Nicolas de Laval. LA MAISON DĂ LAVAL Charles VII. Charlotte n'avait pas eu la vie heureuse vers sa dixiĂšme annĂ©e elle avait perdu sa mĂšre ; et, tandis que son pĂšre contractait une seconde alliance avec Isabelle de Baux 1 , Charlotte, venue en France, Ă©tait placĂ©e prĂšs de Marguerite d'Autriche, fiancĂ©e de Charles VIII, qu'elle ne quitta sans doute qu'en juin 1493, alors que Charles VIII, Ă©poux depuis dix-huit mois dĂ©jĂ d'Anne de Bretagne, se dĂ©cidait Ă restituera Maxi- milien la fille que depuis dix ans celui-ci lui avait con- fiĂ©e pour en faire une reine de France, et qu'on lui ren- dait le cĆur bien gros de se sĂ©parer en mĂȘme temps de la Bourgogne, qui lui appartenait et que pendant le mĂȘme laps de temps on avait administrĂ©e comme une province destinĂ©e Ă reprendre sa place dan3 ie domaine de la Couronne. L'archiduchesse Marguerite une fois hors de France, Charlotte dut Ă sa proche parentĂ© avec la maison de France de trouver Ă la cour un honorable asile, avec le titre de premiĂšre demoiselle de la reine Anne. On la traita en fille de roi et on lui fournit une maison spĂ©cialement montĂ©e Ă ses ordres. La reine ne s'en tint pas lĂ elle lui trouva aussi un Ă©poux dans la personne de Nicolas de Laval, qui, le 27 janvier 1501, le jour de ses noces, Ă©tait simplement l'hĂ©ritier prĂ©somp- tif d'un oncle ĂągĂ© de soixante-six ans; et, qui, le 28 jan- vier, le lendemain de son mariage, se trouvait Ă la tĂȘte de l'une des familles françaises les plus puissantes. Par le contrat de leur mariage, FrĂ©dĂ©ric III s'enga- gea Ă verser Ă son gendre les cent mille livres de la dot de sa fille ; et, tout en exigeant l'engagement pour elle et ses ayants droit de respecter les droits successifs de ses hĂ©ritiers mĂąles, FrĂ©dĂ©ric reconnut pour la postĂ©- ritĂ© de Charlotte le droit d'hĂ©riter Ă son tour, Ă dĂ©faut des mĂąles. 1 C'est en vain qu'on cherche cette Isabelle dans l'Inventaire des Chartes de la Maison de Baux par L. BarthĂ©lĂ©my Marseille, 1882, in-8°. L'alliance n'y est pas mentionnĂ©e. GUY XVI Les historiens locaux se sont beaucoup trop extasiĂ© sur la nature des espĂ©rances que Guy XVI pouvait rai- sonnablement concevoir en Ă©pousant Charlotte d'Aragon. Tout d'abord, en janvier 1501, la couronne que FrĂ©dĂ©- ric III avait solennellement reçue, le 26 juin 1497, n'Ă©- tait plus bien solide sur sa tĂȘte ; et, en fait, dĂšs avant la fin de l'annĂ©e, Ferdinand le Catholique, s'Ă©tant mis d'accord avec Louis XII, l'avait dĂ©pouillĂ© de ses Ă©tats et condamnĂ© Ă implorer la gĂ©nĂ©rositĂ© du roi de France, qui lui avait constituĂ© une rente de trente mille livres sur le duchĂ© d'Anjou ; mais ensuite, lors mĂȘme que la cou- ronne de Naples n'aurait pas Ă©chappĂ© Ă la descendance de FrĂ©dĂ©ric, les espĂ©rances de Charlotte n'en seraient pas moins restĂ©es infimes puisque les droits de ses trois frĂšres du second lit Ferdinand, duc de Calabre, Alphonse et CĂ©sar d'Aragon, et ceux de leur postĂ©ritĂ© devaient toujours primer les siens. Les chances qu'avait Charlotte d'occuper le trĂŽne de Naples Ă©taient nulles ; et, Guy XVI en l'Ă©pousant ne dut pas les faire entrer en ligne de compte. Sans doute, Ă©pouser la fille d'un roi, une petite fille de Charles VII, la favorite de la reine Anne de Bretagne, et compter sur une dot de cent mille livres, Ă©tait bien suffisant Ă ses yeux pour constituer une alliance sortable. Le mariage de Nicolas coĂŻncida donc Ă vingt-quatre heures prĂšs avec le dĂ©cĂšs de Guy XV ; et. si ^e dĂ©cĂšs ne fut pas prĂ©cĂ©dĂ© par une maladie de quelque longueur, il est facile de comprendre comment Nicolas de Laval ne se trouvait pas prĂšs de son oncle le jour de sa mort et ne put lui fermer les yeux ; mais il est difficile d'expli- quer l'absence des jeunes Ă©poux le jour des obsĂšques faites dix-neuf jours plus tard, le 15 fĂ©vrier, et la chose est d'autant plus singuliĂšre que dĂšs le 20 fĂ©vrier Guy XVI et Charlotte d'Aragon Ă©taient Ă Laval et que la nouvelle comtesse y faisait ce jour lĂ son entrĂ©e solennelle, tan- dis que Guy XVI y pĂ©nĂ©trait Ă son tour, mais sans au- 10 LA MAISON DE LAVAL cune cĂ©rĂ©monie. Or Le Doyen, dans ses Annales est si minutieusement exact qu'il est difficile d'admettre qu'il n'eĂ»t pas mentionnĂ© la prĂ©sence des nouveaux seigneurs Ă la cĂ©rĂ©monie du 15 fĂ©vrier. Il faut donc admettre que ceux-ci n'y ont pas pris part. MalgrĂ© le peu de distance qui sĂ©pare Laval de VitrĂ©, ils attendirent jusqu"au 10 mai pour faire leur entrĂ©e solennelle dans cette derniĂšre ville. Charlotte d'Aragon ne vĂ©cut qu'un petit nombre d'an- nĂ©es. En couche de son quatriĂšme enfant, elle mourut Ă VitrĂ©, le 6 octobre 1505. Son corps, ramenĂ© Ă Laval, fut enseveli Ă Saint-Tugal, le 11 octobre, par le cardinal Philippe de Luxembourg. Lo veuvage ds Guy XVI dura tout prĂšs de douze an- nĂ©es ; ses secondes noces eurent lieu le 5 mai 1517. Il Ă©pousait Anne de Montmorency, la seconde des fdles de Guillaume de Montmorency, seigneur de Chantilly, et d'Anne Pot. Il devenait ainsi beau-frĂšre du cĂ©lĂšbre Anne de Montmorency, dont il ne devait pas voir toutes les grandeurs, car MarĂ©chal de France par lettres du 6 aoĂ»t 1522, et Grand MaĂźtre de France le 23 mars 1526, Anne devint connĂ©table, aprĂšs le dĂ©cĂšs de Guy XVI, le 10 fĂ©- vrier 1538, et enfin duc de Montmorency et pair de France en juillet 1551. Les entrĂ©es de la nouvelle comtesse eurent lieu Ă Laval le 4 juin 1517 et Ă VitrĂ© le 18 juin. Huit ans plus tard, Ă Comper le 29 juin 1525, Anne de Montmorency mou- rait en couche elle aussi. AprĂšs avoir eu quatre enfants, elle en laissait trois vivants Claude, qui sous le nom de Guy XVII, devait, en 1531, succĂ©dera son pĂšre; et deux filles, Marguerite et enfin Anne, dont la naissance coĂ»tait la vie Ă sa mĂšre, comme celle de son homonyme, nĂ©e en 1505, avait coĂ»tĂ© la vie Ă Charlotte d'Aragon. Le corps d'Anne de Montmorency fut rapportĂ© Ă Laval et fut inhumĂ© Ă Saint-Tugal, le 23 juillet, par Yves Mayeux, Ă©vĂȘque de Rennes qui, la veille, venait de pro- GUY XVI 11 cĂ©der Ă la consĂ©cration de la chapelle de la maison de Patience. C'est au mariage de Guy XVI avec Anne de Mont- morency qu'on doit de possĂ©der le seul monument qui ait conservĂ© ses traits. L'Ă©glise de Montmorency, construite entre 1523 et 1563, possĂšde douze verriĂšres, exĂ©cutĂ©es entre 1523 et 1533 qui renferment les curieux portraits de Guillaume de Montmorency, de ses enfants et petits-enfants. On trouvera ici, figures 151 et 152 la reproduction photo- graphique de ceux de Guy XVI et d'Anne de Montmo- rency, tels qu'ils figurent aujourd'hui encore dans le vitrail qui leur est consacrĂ©. Guy XVI est reprĂ©sentĂ© agenouillĂ© et vĂȘtu d'une cotte aux armes de Montmorency-Laval ; derriĂšre lui se trouve un personnage, restĂ© pour la plus grande partie hors de notre reproduction, lequel est, non pas saint Nicolas, mais saint JĂ©rĂŽme. Anne, agenouillĂ©e elle aussi, est vĂȘtue d'un surcot armoriĂ© ; elle est accompagnĂ©e de sainte Anne et de la sainte Vierge '; Le second veuvage de Guy XVI dura quatorze mois seulement ; et, dĂšs le 24 aoĂ»t 1526, il convolait en troi- siĂšmes noces. 11 Ă©pousait alors Antoinette de Daillon, fille aĂźnĂ©e de Jacques de Daillon, ceigneur du Lude, et de Jeanne d'Illiers ; elle lui apporta les terres de l'Ile sous BrĂ»lons et de la Cropte et en outre une somme de vingt mille livres. C'est le 21 septembre 1526 qu'Antoinette fit Ă Laval l'entrĂ©e Ă laquelle elle avait droit. La date de cette mĂȘme cĂ©rĂ©monie Ă VitrĂ© ne nous est pas connue. 1. Nos reproductions ne sont pas empruntĂ©es directement aux monuments eux mĂȘmes ; elles ont Ă©tĂ© prises dans le remarquable ouvrage de M. Lucien Magne. L'Ćuvre des Peintres verriers français â VerriĂšres des monuments Ă©levĂ©s par les Montmorency â Paris". Firmin-Didot, 1885. in-4". Nous renvoyons aux pages 54-65 uourtout ce qui est relatif Ă la description de la verriĂšre de Guy XVI dont, au dire de M. Magne, l'exĂ©cution est Ă©tonnante », 12 LA MAISON DE LAVAL Quant Antoinette de Daillon devint veuve le 20 mai 1531, elle ne possĂ©dait plus qu'un seul enfant, sa fdle Charlotte, qui Ă©tait dans sa petite enfance. Le douaire d'Antoinette fut rĂ©glĂ© par un acte qui sans doute existe encore puisqu'il a figurĂ© aux archives de Joursanvault 1 . Antoinette ne survĂ©cut Ă Guy XVI que d'un petit nom- bre d'annĂ©es. L'obituaire de Saint-Serge d'Angers fixe son dĂ©cĂšs au 19 avril 1538 2 . A l'Ă©poque oĂč Antoinette de Daillon Ă©tait comtesse de Laval, c'est-Ă -dire Ă la pĂ©riode Ă©coulĂ©e entre le 24 aoĂ»t 1526 et le 20 mai 1531, appartient une curieuse paix en ivoire dont depuis quelque temps dĂ©jĂ M. Louis de Farcy nous a aidĂ© Ă nous procurer une photogra- phie et qui vient d'ĂȘtre acquise pour le musĂ©e de Laval. On en trouvera ici, figure 153, une photogravure de la dimension de l'original. On y remarque deux bla- sons celui de Guy XVI Ă droite, celui d'Antoinette, parti de Laval et de Daillon, Ă gauche. Il faut mentionner ici un autre curieux monument oĂč a pris place le blason d'Antoinette de Daillon c'est Le charmant Ă©dicule que la tour carrĂ©e du chĂąteau de VitrĂ© porte suspendu Ă son pignon intĂ©rieur, en dedans du chĂą- teau absidioleĂ panscoupĂ©s, percĂ©e d'arcades en plein cintre, soutenues par d'Ă©lĂ©gants pilastres, couronnĂ©e d'un dĂŽme avec lanterne et portĂ©e sur une base Ă nid d'hirondelle, construite en encorbellement; toute la surface de ce petit monument est couverte de sculptures, cais- sons, rinceaux, figurines et arabesques du travail le plus exquis, dans le style le plus fleuri de la Renais- 1. Voir au catalogue analytique des Archives de M . de Joursan- vault le numĂ©ro 2625 indiquĂ© comme contenant des actes datĂ©s depuis 1530 jusqu'Ă 1540. 2. Voir l'Obituaire de Saint-Serge Ă la BibliothĂšque Nationale, dom Ilousseau Xlll 1 , 10066 et français 22319. 136, ainsi que les lettres dans lesquelles François I, le 21 mai 1538, fit Ă Guy XVII don de divers droits qui lui incombaient par suite du dĂ©cĂšs d'Antoinette de Daillon A. N., J 962. 15. MAISON DE LAVAL 151 . â Guy X VI d'aprĂšs un vitrail de Montmorency MAISON DE LAVAL 152. â Anne de Montmorency MAISON DE LAVAL 153. â Paix en ivoire 13 sance ». On y remarque trois blasons que M. Langlois n'a pas reproduits, ce sont sur le pan coupĂ© du centre le blason de Guy XVI Laval- M ont fort ; puis sur le pan coupĂ© de droite, le blason d'Anne de Montmorency parti de Montfort-Lava l et de Montmorency ; enfin sur celui de gauche le blason d'Antoinette de Daillon ; parti de Mont fort et de Daillon 1 . C'est des suites d'un coup de pied de cheval reçu Ă l'issue d'une chasse dans la forĂȘt de la Gravelle que Guy XVI mourut Ă Laval le 20 mai 1531 2 ; il Ă©tait alors dans sa cinquante et uniĂšme annĂ©e. Son corps fut enseveli Ă Saint-Tugal. On connaĂźt tous les dĂ©tails de la pompe extraordinaire dĂ©ployĂ©e lors de ses obsĂš- ques ; ils sont relatĂ©s dans une trĂšs longue piĂšce de vers, laquelle n'est pas l'Ćuvre de Le Doyen, dont le rĂŽle Ă son Ă©gard s'est bornĂ© Ă l'insĂ©rer dans ses Annales. Son vĂ©ritable auteur est Jean Daniel, autrement dit Mitou, organiste de Saint-Maurice Ă Angers 3 . 1. On se proposait de donner ici une photogravure de l'absi- diole de VitrĂ©, mais elle ferait double emploi avec l'excellent dessin, Ă l'Ă©chelle de 0,05 pour 1 mĂštre, qu'un architecte, M. Lan- g'iois, en a donnĂ© Ă la page 203 du tome I du Bulletin de l'Asso- ciation bretonne, oĂč il a pris place sans qu'un mot vint en annon- cer la mise au jour. La description que nous donnons du monu- ment est empruntĂ©e Ă M. de la Borderie, Bretagne contemporaine, p. 100. 2. Cette date, dont on doit la connaissance Ă Le Doyen, est con- firmĂ©e par un curieux document, qui la renferme aussi le man- dement par lequel François I, le 27 juilLt 1534, prescrit le paie- ment de trois mille quatre cent cinquante-deux livres reprĂ©sen- tant pour les cent quarante jours de vie de Guy XVI pendant l'annĂ©e 1531 le prorata de son traitement de neuf mille livres en qualitĂ© de gouverneur de Bretagne. La somme en question devait ĂȘtre payĂ©e Ă Anne de Montmo- rency, tuteur de Guy XVII. Une quittance, dĂ©livrĂ©e par Guyonne de Laval, le 28 septem- 1548, permet aussi d'assigner au dĂ©cĂšs de Guy XVII une date placĂ©e hors de tout conteste 25 mai 1547. 3. Voir Henri Chardon au tome XXII du Bulletin de la SociĂ©tĂ© d'Agriculture, Sciences et Arts de la Sart/ie. Non seulement les vers de Mitou sont insĂ©rĂ©s dans les Annales de Le Doyen, mais ils ont Ă©tĂ© publiĂ©s au tome VI de la Revue de l'Anjou et du Maine. 14 LA MAISON DE LAVAL Du reste les splendeurs de ses obsĂšques furent sans doute proportionnĂ©es Ă celles qu'il ne cessa de dĂ©ployer autour de lui pendant les trente derniĂšres annĂ©es de sa vie. Lieutenant gĂ©nĂ©ral de Bretagne, puis, lors du dĂ©cĂšs du duc d'Alençon, le 27 aoĂ»t 1526, gouverneur en titre, Guy XVI Ă©tait tenu Ă mener un grand Ă©tat et il n'y manqua pas. Il existe de la vie de Guy XVI, de sa mai- son, de son caractĂšre, de sa grande existence un tableau dĂ©veloppĂ© fourni par l'AbrĂ©gĂ© des antiquitez, noblesses et. alliance de l'illustre maison d'Espinay. dont l'au- teur est Jean Legay, sieur de la RougĂ triĂŽre. Ce-manus- crit est malheureureusement une propriĂ©tĂ© privĂ©e et est restĂ© inĂ©dit 1 . On en trouvera du moins ici les quelques traits qui en ont Ă©tĂ© publiĂ©s pa M. de la Borderie. Cet excellent et trĂšs magnifique seigneur, comte de Laval, gouverneur et lieutenant gĂ©nĂ©ral pour le roi François I en la royale duchĂ© de Bretaigne, tenoit une maison somptueuse, opulente, ouverte Ă tous gens de bien, d'honneur et de vertu. Son naturel estoit aifable, honneste et gracieux, recevant un chacun de fort bon visaige, conviant les bons personnages Ă le venir voir, non point seulement en ses villes et chasteaux, mais aussi suivant la cour et aux pays Ă©tranges, oĂč il ne vit jamais assez de courtisans, grands seigneurs et autres Ă sa table, tellement que sa maison sentoit plus son hostel de prince libĂ©ral que de riche seigneur, mĂȘme pour les grands personnages qu'il avoit en son estĂąt de pension- naires, comme les seigneurs de MarcillĂ©, de Lezay, de Bois Dauphin de Tehillac, etc., tous de son conseil, mangeant Ă sa table. Il avoit une trentaine d'autres gentilshommes, servant par quartier, quatre de chacun 6. Il ne nous a pas Ă©tĂ© possible d'obtenir communication de ee manuscrit qui eut Ă©tĂ© si prĂ©cieux pour nous. Son propriĂ©taire, M. Hippolyte de la GrimaudiĂšre, qui le conserve au chĂąteau de la Hamonaye, par ChĂ teaubourg Ille-et- Vilaine 1 , se propose de le divulguer lui-mĂȘme. Nous reproduisons ici tout ce qu'en a fait connaĂźtre, il y a douze ans dĂ©jĂ , M. de la Borderie dans la Revue de Bretagne, p. 128 du second volume de 1888. GUY XVI 15 estĂąt, savoir maistres d'hostel, pannetiers, Ă©cuyers tran- chants, Ă©chansons, Ă©cuyers d'Ă©curie et de cuisine.... Un des gentilshommes de cette trentaine avait le comman- dement et superintendance sur ses fauconniers, qui estoit une belle charge, car sa fauconnerie lui coĂ»toit bien tous les ans de sept Ă huit mille francs.... 11 aymoitfort les gens de robe longue et de savoir pour les loix civiles, et leur donnoit estĂąt et pension jusque dans Paris et Rennes, et ne le vis jamais sans docteur en thĂ©ologie. Il avoit quatre prestres d'ordinaire et deux clercs de chapelle.... De toutes sortes d'officiers que l'on voit chez les princes il y en avoit Ă sa maison, jusques aux trompet- tes, hautbois, saquebutes, luths, organistes et musi- ciens, brodeurs, tapissiers, peintres, tout cela ne man- quoit point. Il achetoit un gentil homme ou autre homme de bon esprit ce qu'ils vouloient. Je lui vis un gentil homme, appelĂ© M. de Vauberger, bon chevalier et fort entendu aux lettres, en telle estime de savoir que Ma- dame la rĂ©gente, mĂšre du roi François, l'importuna de lui bailler, le roi Ă©tant prisonnier. Un bon mĂ©decin, apo- thicaire, cirurgien savant, Ă©toient sous-rachetĂ©s et tenus d'ordinaire en grand Ă©tat; il avoit belle armurieĂ Laval et Ă VitrĂ©, et deux sommeliers d'armurie d'ordinaire. Or il faut que entendiez que, si le comte de Laval Ă©toit bien accompagnĂ© de riches et vertueux gentil- hommes, la dame de son cĂŽtĂ© l'Ă©toit pareillement bien de dames et damoiselles, femmes do la plupart de ces seigneurs susdits et de quelques autres, par exemple une fdle de Broons, de CoĂ«tquen, de Vauclerc, du GuĂ©, de TĂ©hillac, de ChampaignĂ© et tout plein de belles et honnestes damoiselles de moindre maison ; en outre les damoiselles de ses dames et damoiselles mariĂ©es, car celles qui n'avoient damoiselle avoient au moins une femme Ă chaperon de drap.... Je me dĂ©porte de parler d'un nombre de femmes de chambre qui estoient pour la dame de Laval et pour messieurs leurs enfans et de 16 LA MAISON DE LAVAL chambriĂšres des damoiselles et filles. C'estoit une petite cour Ă voir tout ce train ». A ces passages empruntĂ©s textuellement au manus- crit, M. de la Borderie ajoute Jean Legay, aprĂšs beaucoup d'autres dĂ©tails, que je suis forcĂ© d'omettre en ce moment, explique qu'Ă tous les repas, dans la maison du comte de Laval, on servait jusqu'Ă huit tables distinctes 1° la table du comte de Laval et des sei- gneurs les plus distinguĂ©s ; 2° celle de la comtesse et des dames ; 3° celle des enfants du comte de Laval et des gentilshommes et damoiselles chargĂ©s de leur per- sonne ; 4° la table des . damoiselles de second ordre ; 5° celle des secrĂ©taires, gens de conseil, mĂ©decin, musi- ciens ; 6° la table des fauconniers et veneurs ; 7° la table des valets de chambre et serviteurs du comte de Laval ; 8° enfin, celle des serviteurs des seigneurs, gentils- hommes et officiers de sa maison ». 164-155. â Sceau et contre-sceau de Guy XVI, 1507. Le sceau et le contre-sceau de Guy XVI, sont connus par deux empreintes, l'une de 1507, conservĂ©e aux Ar- chives Nationales, l'autre attachĂ©e Ă l'acte du 12 mars 1526, GUY XVI 17 V. S., des archives" de Saiat-Nicolas de VitrĂ©. On en trouvera ici le dessin sous les numĂ©ros 154 et 155. Le contre-sceau a quelques fois Ă©tĂ© plaquĂ© sur papier. Il en existe diverses empreintes adhĂ©rentes Ă des quittances Ă©mises par Guy XVI pendant les derniĂšres annĂ©es de sa vie. On en trouvera le dessin au cartulaire oĂč il sera donnĂ© avec l'acte 2307, datĂ© du 2 juin 1529. Guy XVI de ses trois lits, n'eut pas moins de onze enfants. Charlotte d'Aragon lui donna deux fds Louis et François et deux fdles Catherine et Anne ; Anne de Montmorency, deux fils, RenĂ© et Claude, et deux filles Marguerite et Anne. Enfin les enfants du troisiĂšme lit furent deux fils François et Louis, et une fille, Charlotte. XVII . â Louis. â Le premier nĂ© de Guy XVI et de Charlotte d'Aragon, Louis, naquit Ă VitrĂ© le 22 no- vembre 1502. Une vĂ©cut pas et sa sĂ©pulture eut lieu le 21 mars 1503 ». XVII 2 - â François. â Leur second fils naquit le 30 avril 1503 ; il reçut le nom de François et eut pour parrain le cardinal Philippe de Luxembourg et pour mar- raine madame d'Espinay. Il portait le titre de comte de Montfort et atteignait sa vingtiĂšme annĂ©e, qua d, faisant ses premiĂšres armes, il fut tuĂ© le 27 avril 1522 au siĂšge de la Bicoque. XVII 3 . â Catherine. â Le troisiĂšme enfant, une fille nommĂ©e Catherine, naquit dans le courant de l'an- nĂ©e 1504. Elle avait quatorze ans quand, le 11 novem- bre 1518, elle fut mariĂ©e Ă Claude de Rieux, fils de Jean de Rieux et de sa troisiĂšme femme Isabeau de Brosse. Catherine reçut en dot une rente de trois mille livres. Ils eurent deux filles qu'on retrouvera plus tard Re- nĂ©e et Claude. RenĂ©e, nĂ©e en 1524, avait Ă©pousĂ© dĂšs 1540 Louis de Sainte Maure, marquis de Nesle, lors- 1. Voir Annales de Le Doyen, p. 99 et 101. 18 LA MAISON DE LAVAL que, par le dĂ©cĂšs de son oncle Guy XVII de Laval, ad- venu le 25 mai 1547, elle hĂ©rita de tous les biens des Laval. Elle mourut Ă Laval le 13 dĂ©cembre 1567. Claude de Rieux, sa sĆur, Ă©tait nĂ©e le 8 fĂ©vrier 1525, avait Ă©pousĂ©, le 19 mars 1547, François de Coligny, sei- gneur d'Andelot, et Ă©tait morte le 5 aoĂ»t 1561. C'est son fils aĂźnĂ©, Guy-Paul, qui, le 13 dĂ©cembre 1567, hĂ©rita de sa tante RenĂ©e et est connu sous le nom de Guy XIX de Laval. Catherine Ă©tait morte le 31 dĂ©cembre 1526. XVII 4 . â Anne. â Anne, dont la naissance coĂ»ta la vie Ă Charlotte d'Aragon, naquit Ă VitrĂ© le 23 septembre 1505 ; elle fut baptisĂ©e Ă Notre-Dame de VitrĂ© le 28 sep- tembre et eut pour marraine la reine Anne de Bretagne, venue Ă VitrĂ©, tout exprĂšs pour la tenir sur les fonts. Anne Ă©tait dans sa dix-septiĂšme annĂ©e quand, le 24 fĂ©- vrier 1522, Ă VitrĂ©, elle devint la femme de François de la TrĂ©moĂŻlle, prince de Talmont, Ă qui son grand pĂšre, Louis II de la TrĂ©moĂŻlle, tenait lieu de pĂšre. Guy XVI donnait Ă sa fille une rente de trois mille livres. GrĂące aux diverses publications de M. le duc de la TrĂ©moĂŻlle, l'histoire de sa maison est aujourd'hui connue et il serait inutile d'insister sur la liste des enfants d'Anne de Laval l . Il suffit de se souvenir que son fils aĂźnĂ©, Louis III de la TrĂ©moĂŻlle, eut pour fils Claude, duc de Thouars, et que le fils de celui-ci, Henri, duc de Thouars, le 3 dĂ©cembre 1605, lors du dĂ©cĂšs de Guy XX de Laval, se trouva le plus proche hĂ©ritier du dĂ©funt, prit possession de ses biens que sa descendance conserva jusqu'Ă la RĂ©volution. 1. Il est cependant intĂ©ressant de signaler une lettre Ă©crite au Roi par François de la TrĂ©moĂŻlle en mars 1532 Lettres du XVI e siĂšcle, p. 98. J'ay trois filles que je dĂ©sireroys bi'n avancer en bonnes maisons, en principal l'aisnĂ©e, et leur faire tout mon possible, et Ă quatre fils, dont le derrenier fut sabmedi nĂ© » ; et la note du Cartulaire de Chambon,Y>.83, par laquelle on sait que le 25 janvier 1541, V. S., Anne de Laval accoucha d'un fils, nĂ© pos- thume, lequel eut pour marraine Jacqueline, l'aĂźnĂ©e de ses sĆurs. MAISON DE LAVAL } .V* .->âą' I I 1 IVâ' 159-160. â Inscription et blason de la cloche du Port-Brillet, 1548. Celle-ci doit ĂȘtre lue ainsi je feu faicte en l'an MV XLVIII. Ce texte a Ă©tĂ© constituĂ© Ă l'aide de caractĂšres mobiles ; et le fondeur, au lieu d'employer dans la date l'X de son alphabet, a eu recours Ă un fleuron, qu'on est 24 LA MAISON DE LAVAL tentĂ© de traduire par et, ce qui amĂšnerait Ă lire la date MV C et LVIII et Ă assigner la fonte de la cloche Ă une Ă©poque postĂ©rieure au dĂ©cĂšs de François de Laval. Pour rejeter cette lecture peu probable, il suffĂźt de remarquer qu'entre chacun des mots de sa lĂ©gende le fondeur a pris soin de donner place Ă un blanc et que si il avait voulu imprimer V e et LVIII, il n'aurait sans doute pas man- quĂ© dĂ©placer avant LVIII un blanc Ă©gal Ă celui qui prĂ©- cĂšde et. On trouve Ă©galement le blason de François de Laval sculptĂ© au pignon de la chapelle des forgerons du Port- Brillet, entre les deux lucarnes 1 . En outre, la chapelle de l'abbaye de Paimpont, devenue aujourd'hui Ă©glise pa- roissiale, possĂ©dait une verriĂšre, dont la bordure avait Ă©tĂ© constituĂ©e Ă l'aide d'une sĂ©rie de reproductions des quartiers du blason de François, juxtaposĂ©s de façon Ă servir de cadre Ă un sujet central en forme de lancette; elle Ă©tait en si mauvais Ă©tat que force fut de la rem- placer. M. ChappĂ©e, aux frais de qui le remplacement avait lieu, recueillit chez lui les fragments des vieux verres et parvint ainsi Ă reconstituer un grand blason de François de Laval, surmontĂ© de la croix, de la mĂźtre et du casque, et un certain nombre des quartiers isolĂ©s. François de Laval mourut Ă Laval, au prieurĂ© de Sainte-Catherine, le 1 juillet 1554 2 . 11 laissait une succession qui n'Ă©tait pas sans importance et dans la- quelle figurait entre autre la chĂątellenie d'Olivet, qu'il tenait de la munificence de Guy XVI. GrĂące Ă sa lĂ©gi- timation prononcĂ©e par François I en mars 1540, ce fut sa niĂšce Guyonne do Laval qui fut sa principale hĂ©ritiĂšre, et l'hĂ©ritage de l'Ă©vĂȘque catholique vint grossir le patri- moine de la comtesse protestante. 1. J. ChappĂ©e, Le Port-Brillel. 2. Il est gĂ©nĂ©ralement admis que le dĂ©cĂšs de François de Laval, a eu lieu le 1 juillet 1556. Ce qui nous dĂ©cide Ă choisir la date du 1 aoĂ»t 1554 c'est qu'elle est fournie par l'obituaire de Paimpont et qu'en outre un acte du 31 octobre 1555, indiquĂ© au eartulaire, Ă©tablit qu'il n'existait dĂ©jĂ plus Ă cette derniĂšre date. CARTULAIRE 1501-1531 25 CARTULAIRE DE LAVAL XVI 2141-2360 1501-1531 2141. â 1500, v. s., 20 fĂ©vrier. â EntrĂ©es de Guy XVI et de Charlotte d'Aragon Ă Laval ' Note de Le Doyen dans ses Annales, p. 92. 2142. â 1501, 10 mai. â PremiĂšre entrĂ©e Ă VitrĂ© de Guy XVI et de Charlotte d'Aragon Paris-Jallobert, 5. 2143. â 1501, 24 avril, Laval. â Accord Ă©tabli entre Guy XVI de Laval et Catherine d'Alençon, veuve de Guy XV, fixant le douaire de cette derniĂšre Copie, A. N., P 1365 ', 1406. Sachent tous prĂ©sens et avenir. Comme procĂšs fusses meus et espĂ©rĂ©s Ă mouvoir entre haulte et puissante dame, madame Katherine d'Alençon, veusve de feu hault et puissant prince, monseigneur Guy, en son vivant, conte de Laval et de Mont- fort, viconte de Rennes, sire de VitrĂ©, d'Acquigny et de Montreuil-Bellay, demanderesse, moiennant lectres royaulx par elle impĂ©trĂ©es, d'une part, et hault et puissant seigneur, monseigneur Guy, Ă prĂ©sent conte de Laval, de Montfort, seigneur desdicts lieux, d'autre part. Pour raison de ce que par ladicte dame estoit dit que en faisant, traictant et accordant le mariage de mondict ledict feu seigneur le conte et elle, par le moien, accord, et exprĂšs voulloir du feu roy Loys unziesme de ce nom, et de messei- gneurs les ducs d'Alençon et conte de Laval, pĂšre et mĂšre desdicts seigneur conte de Laval et de ladicte dame, avoit estĂ© par exprĂšs promis et accordĂ©, que si feu mondict seigneur le conte derrenier dĂ©cĂ©dĂ©, alloit de vie Ă trespas avant ladicte dame et sourvesqueust ledict seigneur conte de Laval icelle madicte dame auroit douaire sur les terres et seigneuries de 1 . Le Doyen a insĂ©rĂ© Ă la page 95 de ses Annales le texte d'une chanson composĂ©e pour fĂȘter la bienvenue Ă Laval de Char- lotte d'Aragon. 26 LA MAISON DE LAVAL mondict sieur le conte, selon les coustumes des pays oĂč elles seroient et sont scituĂ©es et assises. Disoit madicte dame Que en l'an MCCCCLXXXV1II, feu mondict seigneur le conte, eut advis et dĂ©libĂ©ration avec messeigneurs ses parens et amis, et les gens de son conseil, avoir voulu et ordonnĂ©, que madicte dame, auroit aprĂšs son dĂ©cĂšs, six mil livres tournois de rente, pour son droit de douaire et pour assignation desdictes six mil livres, avoit baillĂ© et assignĂ© le contĂ© de Laval, avecques les droits dep- pendans d'iceluy, tant de nominacions, prĂ©sentacions que autres disposicions de tous les bĂ©nefĂŻĂźces et offices, tant royaulx que aultres, deppendans dudict contĂ© ; ensemble les droits, prĂ©rogatives et prééminences .deppendans d'iceluy aussi avoit baillĂ© les chasteaulx, chastellenies, terres et seigneu- ries de Montjehan, La Gravelle, Olivet, Basougiers, Sainct Ouen et Vaige, depp endans d udiot con tĂ© ; et les terres et sei- gneuries de Gast, Comper, LohĂ©ac, Comblesac et PlĂ©lan, si- tuĂ©es ou pays de Bretaigne, avecques tous les droicts qui en deppendent ; toutes lesdictes choses lors estimĂ©es Ă ladicte somme de six mil livres tournois ; rĂ©servĂ© Ă madicte dame, Ă avoir douaire sur la succession advenue de Tancarville, et aultres successions, lesquelles estoient lors Ă advenir ; et Ă ce tenir et non venir contre ladicte assignation se obligea feu mondict sieur le conte, par f'oy et serment, soy et ses hĂ©ritiers et successeurs, ensemble tous ses biens et choses. Disoit madicte dame que depuis, feu trĂšs rĂ©vĂ©rend pĂšre en Dieu, monseigneur Pierre de Laval, en son vivant archeve^que et duc de Reims, et premier pĂšr de France, estoit dĂ©ceddĂ© seigneur et possesseur des chasteaulx, chastellenies, terres et seigneuries de Chasteillon, Aulbigny et aultres. Aussi estoit dĂ©cĂ©dĂ©e la feue dame Derval, seurde feu mon- dict seigneur le conte ; parquoy estoit retournĂ© Ă ladicte maison et advenu la somme de huit cens Ă mil livres de rente. Aussi estoit dĂ©cĂ©dĂ©e la feue royne de Cecille, au moien de quoy estoient advenues les seigneuries terres et chastellenies deMellay, Acquigny, Sorel et aultres, tellement que, au moien desdictes successions advenues, estoit ladicte maison augmen- tĂ©e depuis ladicte assignation de dix Ă douze mil livres tour- nois de rente, dont luy en appartenoit le tiers par les coustu- CARTULAJRE 1501-1531 27 mes d'Anjou, du Maine, Bretaigne et Normandie, oĂč sont les- dictes terres et seigneuries situĂ©es et assises. Plus, disoit ladicte dame que par la mort, dĂ©cĂšs et trespas de ladicte feue royne de Cecille. et de ladicte dame Derval, ledict sieur de Laval avoit prins et recueilly plusieurs bagues, joyaulx et autres meubles, vallans cent mil francs ou plus. Et que ladicte royne de Cecille, par son testament et ordon- nance de derniĂšre volontĂ©, avoit voulu lesdicts biens meubles estre convertis en l'acquit de la maison de Laval et autres debtes Ăšsquelles feu mondict sieur le conte dernier dĂ©cĂ©dĂ©, son frĂšre, estoit tenu. Or, disoit madicte dame, qu'il y avoit plusieurs debtes créés durant le mariage de feu mondict seigneur et elle, et en l'acquit desquelles il est tenu pour raison de la communautĂ©, et selon les coustumes des pays. Aussi disoit ladicte dame que lesdicts biens dĂ©voient estre convertis Ăšsdictes debtes. Et pour ce que de ce que dit est, avoit fait faire remons- trance Ă mondict sieur de Laval et Ă son conseil. Et pour avoir raison du dĂ©lay, avoit obtenu lectresroyaulx adressans Ă mes- seigneurs les gens tenans les Requestes du Palais Ă Paris, ausquels estoit mandĂ© et commis contraindre mondict sieur de Laval Ă luy bailler sondict douaire, selon l'assignation Ă elle faicte, par feu mondict sieur le conte. Et davant iceulx, avoit requis lesdicts meubles estre convertis Ăšsdictes debtes, selon l'ordonnance de ladicte feue royne de Cecille. Depuis lequel temps, le Roy nostre sire et la Royne advertis desdicts diffĂ©rens, pour y imposer fin auroient commis trĂšs rĂ©vĂ©rend pĂšre en Dieu, monseigneur le cardinal de Luxem- bourg, Ă©vesqueduMans, lequel, Ă ceste cause, s'estoit trans- portĂ© audict lieu de Laval et davant luy et par son ordonnance de la part de ladicte dame, avoit estĂ© faict remonstrance de ce que dit est et conclud, que le douaire lui fust baillĂ©, selon l'assignation de feu mondict seigneur, avecques la tierce par- tie des successions advenues, et aux fruicts depuis la mort et dĂ©cĂšs de feu mondict sieur le conte de Laval ; et que lesdicts biens meubles, fussent convertis, selon la teneur du testament d2 ladicte feue royne de Secille, et mesmement es debtes communes. De la partie duquel mondict seigneur le conte estoit dit 28 LA MAISON DE LAVAL qu'il ne vouldroit ne entendu dĂ©battre, contredire ni empes- cher que madicte dame n'eust par droit de douaire la tierce partie des terres et seigneuries de feu mondict sieur le conte, sur ce premiĂšrement desduict le chastel dudict lieu de Laval, principal manoir Ă luy appartenant par la coustume du pays du Maine, et le chastel de VitrĂ©, par la coustume du pays de Bretaigne. Mais disoit que Ă entretenir l'assiĂšte et assignation faicte par feu mondict sieur le conte, n'estoit tenu, pour ce que, par la coustume du pays, le principal chastel et manoir ne cheĂšt en douaire ; et, que, en faisant ladicte assignation faire, mondict seigneur le conte, ne povoit charger ledict contĂ© de Laval et descharger ledict pays du Maine, ne povoit demander que le tiers de ce que en est ou Maine et contĂ© de Laval, et, par la coustume du pays de Bretaigne, le tiers de ce qu'il en estoit en Bretaigne. Et que par autant que ladicte assiette et assignation ainsi faicte que dict est par feu mon- dict seigneur le conte, estoit contre la coustume desdicts pays, n'estoit en riens tenu de les tenir et entretenir. Et au regard des biens meubles advenus Ă mondict sieur le conte, par la mort, dĂ©cĂšs et trespas de ladicte feue royne de Cecille, disoit mondict sieur le conte que ladicte royne de Cecille les avoit laissĂ©s pour en faveur et contemplation de mondict feu seigneur le conte et de la maison de Laval tant seullement ; et que n'ust l'intention que madicte dame en riens en amendast, fustetsoit au moien de communaultĂ© ou aultre- ment, disant que ainsi estoit de raison, considĂ©rĂ© que c'estoit en contemplation de feu mondict seigneur le conte et de la maison de Laval. Et en tout cas, disoit que les debtes de ladicte maison de Laval acquictĂ©es et comme devoit estre faict selon la teneur dudict testament n'en povoit riens retourner, car les debtes se montent plus que ne vallent lesdicts meubles. Et touchant les meubles advenus par le dĂ©cĂšs de ladicte feue dame deDerval, disoit mondict seigneur le conte que jamais n'avoient appartenu Ă feu mondict seigneur et n'avoient estĂ© de la communautĂ©, mais appartenoit Ă mondict seigneur seul lement, parce que Ă luy, dĂšs le vivant de feu mondict seigneur le conte dernier dĂ©cĂ©dĂ©, ladicte dame de Derval, sa tante, luy en avoit fait donacion. Et par madicte dame, estoit dict au contraire disant que CARTULAIRE 1501-1531 29 mondict seigneur de Laval ne povoit en riens venir contre l'assignation Ă elle faicte par feu mondict seigneur veu que ad ce s'est obligĂ© aussi ses hĂ©ritiers, biens et choses, ainsi estant tenu de l'entretenir, car il n'y avoit coustume ou pays du Maine et contĂ© de Laval, pour ce qu'elle feist deffendre que le principal manoir ne peust estre comprins ou donnĂ©. Et touchant les meubles de ladicte feu royne de Secille, disoit qu'ils estoient advenus durant la vie de feu mondict seigneur, etla communautĂ© ; parquoy dĂ©voient estre convertis es comn-unes debtes. Et sur ce, tant de la part de madicte dame, que de mondict seigneur de Laval, estoient dictes, proposĂ©es et allĂ©guĂ©es plusieurs faicts, causes et raisons, au moien desquels diffĂ©- rens, pouroient lesdicts seigneur et dame, cheoir et tourner en plusieurs diffĂ©rens procĂšs ; pour et ausquels obvier, de la part mondict seigneur le cardinal, ont estĂ© faicts certains ar- ticles pour imposer fin ausdicts diffĂ©rens. Lesquels articles veus, lesdictes parties, dĂ©sirant obĂ©ir au voulloir du Roy et de la Royne et ordonnance de mondict sieur le cardinal, pour le bien de paix, procĂšs Ă©viter, nourir, avoir et entretenir l'amour et alliance ; lesdicts seigneur et dame, personnelle- ment establis en droit par devant nous, es cours royal du Mans et de la court de Rennes et de chascune d'icelles l'une jurisdiction non empeschant l'aultre, soubmectans eulx leurs hĂ©ritiers avecques tous et chascuns leurs biens et choses, meubles et immeubles prĂ©sens et avenir es povoirs, ressorts et jurisdicions desdictes courts et de chascuns d'icelles, quant Ă tenir et accomplir tout ce que s'ensuit, ont voulu et entendu, de par privĂ© et simple transaction et appoinctement veullent, consentent et accordent les articles baillĂ©s par mondict sei- gneur le cardinal, sortir leur plain et entier effect et desquels la teneur s'ensuit Madame la douairiĂšre aura cinq mil livres tournois de rente do douaire, pour tout son tiers, tant de feu son mary que des successions collatĂ©rales escheues, dont elle pourroit faire demande, sauf le douaire qui luy pourroit appartenir de feue madame de Tancarville, surMontereul Bellay, le ligement et procĂšs vuydĂ©, en remboursant les mises faictes par feu mondict seigneur de Laval prorata sur ledict douaire, qui lui pourroit appartenir, selon la coustume du pays ; et luy en 30 LA MAISON DE LAVAL sera faict asiete, tant de la contĂ© de Laval, que en Bretaigne, savoir est les chĂ steaulx, chastellenies, terres et seigneu- ries de Mont Jehan, Courbeveille , La Gravelle et Basougiers, qui est en France, et en BretafgnĂ©TLohĂ©ac, GaĂ«l, Comper, TintĂ©niac comprins Montmuran, BrĂ©al, Comblesac et PlĂ©- lan. Et pour autant qu'elle demeurera et rĂ©sidera es maisons de Montjehan, Petit Montjehan et Comper, elle aura du boys pour son chauffaige es forests de sur les lieux, c'est as- savo ; r de Concise et BrĂšcĂ©lion. aussi pour rĂ©parer et bastir Ăšsdicts lieux. Et davantaige aura la maison du petit Montje- han. Aussi aura son droit de douaire qui luy appartient en la terre et seigneurie du Gavre et autres terres et seigneuries estans en Flandres et Hesnault., Et les bĂ©nĂ©ffices estans en ceste ville fondĂ©s, mondict sieur de Laval et madicte dame la douairiĂšre les confĂ©reront alternativement, exceptĂ© que les doyennĂ©, chanterie et hospital de Sainct Julien demoureront Ă mondict seigneur, et ne seront point du tour. Au seurplus, tout le meuble de la roynedeCecille,acquests et consquets, le meuble de madame Derval et de la maison de Tancarville avecques la moitiĂ© du meublement comiiun de mondict feu mondict sieur de Laval et ladicte douairiĂšre, sera tout Ă mondict sieur de Laval, en payant toutes et chascunes les debtes et acquests contenus es testamens de ladicte feue royne de Cecille et de feu mondict sieur de Laval. Et la moi- tiĂ© desdicts biens communs de feu mondict sieur de Laval et de madicte dame la douairiĂšre, demeureront Ă icelle dame, exempte de toutes debtes. Et que mondict seigneur de Laval, paiera aux crĂ©diteurs des debtes piteuses prĂ©sentement deux mil frans, et dedans la my Aoust deux autres mil, et Ă nous deux autres mil, lesquels six mil francs, seront mis es mains de deux tels personnaiges qui seront advisĂ©s par mondict sei- gneur de Laval et madicte dame la douairiĂšre, pour aux per- sonnes et lieux oĂč ils verront plus convenablement et chari- tablement estre distribuĂ©s. Et le reste, au temps qu'il plaira au Boy et Ă la Boyne l'ordonner et dĂ©clarer. Item, touchant les articles et aultres choses servans pour la tencion et deffense des chĂ steaulx et places, ensemble autres amesnagemens et utencilles de boys, aussi lesbestesdesmes- taieries demeureront es lieux oĂč elles sont et Ă ceulx qui au- ront lesdicts lieux, sans qu'ils chĂ©ent en dĂ©partement. CARTULAIRE 1501-1531 31 Item, en ce que est certaines terres et seigneuries de ma- dicte dame la douairiĂšre, qui ont este vendues ou engagĂ©es durant le mariage de feu mondict sieur de Laval, son mary et elle, monseigneur de Laval sera tenu les acquiter ou rem- bourser Ă madicte dame, si par la coustume des pays oĂč les- dictes choses sont assises, il est tenu de ainsi le faire. Et partant, mondict sieur de Laval et madicte dame la douairiĂšre, demeureront quictes l'un vers l'autre de toutes actions et demandes qu'ils s'en pourroient faire et demander Ă cause des choses dessusdictes, fors que s'il est trouvĂ© parlec- tres vallables, que mondict seigneur de Laval, soit tenu en deux mil cinq cens escus pour raison d'Averton, il les paiera. Item, que si par cy aprĂšs quelque question ou diffĂ©rent se mouvoit entre mondit seigneur de Laval et madicte daine la douairiĂšre, pour et Ă l'occasion de la dĂ©claracion ou interprĂ©- tacion de l'escript cy davant contenu, chascun d'eulx avant en commancĂ© procĂšs envoyera devers mondict seigneur le cardinal de Luxembourg, qui a traictĂ© et appointĂ© ledict es- cript, pour en avoir la dĂ©claration ou interprĂ©tation de son intention, comme faict les a couchĂ©es. Ausquels articles et choses contenus en iceulx, tenir, gar- der, entretenir et accomplir de point en point, d'article en article et sans en aucune maniĂšre venir encontre, se sont les- dicts seigneur et dame de Laval, eulx, leurs hĂ©ritiers, succes- seurs et biens, choses prĂ©sens et avenir, sans jamais venir encontre en quelque maniĂšre que ce soit, soit par opposition, appellation ne aultrement. Et pour ce, et en approuvant le contenu Ăšsdits articles, ont voulu lesdictes parties que chascun d'eulx respectivement joysse, c'est assavoir madicte dame, desdictes terres et seigneuries dessus dĂ©clarĂ©es par douaire et usuffruict ; et mondict seigneur le conte, des autres terres et seigneuries, droiz, prĂ©rogatives, dignitĂ©s, prĂ©hĂ©minences, appartenances et deppendancesĂ cause de chascune d'icelles ; et que madicte dame en prenne d'elle mesmes ou par procu- reurs possession rĂ©elle et actuelle, soit en prĂ©sence ou absence et en prenne les fruicts, revenus et esmolumens, depuis la mort, dĂ©cĂšs et trespas de feu mondict seigneur le conte de Laval, sa vie durant, comme dict est seullement. Et ad ce que dict est se sont obligĂ©s et obligent lesdictes parties et chascune dicelles, eulx, leurs hoirs, bien et choses, 32 LA MAISON DE LAVAL meubles et immeubles prĂ©sens et avenir ; renonçans par da- vant nous, quanta cest faict, Ă toutes excepcions, dĂ©cepcions de dol, de mal, de fraude, de dĂ©cevance et Ă tout aultre et bĂ©- nĂ©fice de droit escript et non escript; Ă toutes coustumes vieil- les et nouvelles Ă cest fait contraires ; gĂ©nĂ©rallementĂ toutes et chascunes les choses qui tant de fait de droit que de cous- tume, leur pourroient servir et valloir avenir contre la forme et teneur de ces prĂ©sentes, soit en toutou en partie. Et de ce que dit est, tenir, garder et accomplir de point sn point et d'article en article, et que encontre ne viendront par appleigement, contrappleigement, opposition, appellation ne aultrement, se sont astraincts les dictes parties par les foy et serment de leur corps sur ce, par chascun d'iceulx seigneur et dame, donnant en nostre main, dont nous les avons jugĂ©s et condempnĂ©s Ă leurs requeste par le jugement et condemp- nacion de nosdictes courts. Ce fut fait, donnĂ© et jugĂ© Ă tenir ou chastel et manoir dudict lieu de Laval, es prĂ©sences de rĂ©vĂ©rend pĂšre en Dieu, Guillau- me, Ă©vesque de Nantes, messire Jehan du Bouschet, docteur es droit ; nobles personnes RenĂ© de Laval, seigneur du Boisdaulphin, Georges d'Orenge, seigneur de la FeillĂ©e ; Guyon de Fontenailles, seigneur de VĂŽsins ; messire Jehan Callouet, chantre de Cornouaille, docteur es droit ; monsieur Loys Tiercelin, lieutenant pour le Roy, nostre sire, en sa sĂ©neschaussĂ©e du Maine; Raoul Querlavoine, advocat du Roy au Mans ; messire Nicolle Adam, docteur es drois ; Jehan Ferrault, licentiĂ© es drois; Guillaume Genault, licenciĂ© es loix ; Alain Marec, sĂ©neschal de Rennes ; messire Guillaume Le Bigot, docteur es droits ; maistres Yves Brullon, procureur de Rennes ; Guillaume GĂ©douin, procureur gĂ©nĂ©ral de Bre- taigne ; Abel de Seillons, procureur d'Anjou; Nicolle Racine, Pierre Chouart, Jehan RĂ©gnier, Bertran DĂ©charnĂ©, Geffroy Viel, licenciĂ©s es loix, et plusieurs aultres tesmoings ad ce requis et appelles, le vingt quatriesme jour d'avril l'an MDI. Et ce fait Ăšsquels jour et an que dessus sont comparus les dictes parties dessus nommĂ©s, par nostre dicte court de Ren- nes, par davant nous, notaires cydessoubs signĂ©s, se soub- mectans au povoir et jurisdiction de notredicte court, et ont jurĂ© y fournir et obĂ©ir Ă droit. Lesquels et chascun ont estĂ© confessans del'appoinctement â â CARTULAIRE 1501-1531 33 et transaction cydessubs, selon les lectrescy dessus escriptes, quelles ils ont eu et ont agrĂ©ables, et promis icelle tenir sur hypothĂšque et obligation d'eulx, leurs hĂ©ritiers et de tous et chascuns leurs biens, meubles et hĂ©ritaiges prĂ©sens et avenir ; renonceans et ont renoncĂ© lesdictes parties et chascune Ă jamais, contre la teneur et effect de cestes prĂ©sentes non venir, quĂ©rir, demander, ne avoir terme de particulier jour, juge y mander ne dire et prouver Ă tous plĂ©gemens, arrests, monitoires, inhibicions, suspenses Ă dire ne allĂ©guer aucune surprinse ou dĂ©cepte, et Ă toutes autres exceptions et empes- chemens, que la teneur, effect et substance de cestes, pour- roient empescher ne retarder en aucune maniĂšre. Et nous, de leurs plaisirs et assentemens et par leurs ser- mens sur ce faicts, les y avons condempnĂ©s et condempnons. DonnĂ© tesmoing de ce les scaulx establis aux contracts de nostredicte court de Rennes. Ce fut fait audict chastel de Laval, le jour et an que dessus dict. Quant Ă la court du Mans Bonnet, du Plesseys. Quant Ă la court de Rennes de la Chappelle, Le Roux. 2144. â 1501, vers le 24 avril. â Note indiquant l'avan- tage qu'il y a pour les deux parties Ă respecter l'accord Ă©tabli entre elles au sujet du douaire de Catherine d'AlençonfA. N., P. 1365\ 1406. Et n'a cause monseigneur le comte de Laval, de prĂ©sent, se plaindre de faire l'acquict des debtes de feu monsieur le conte de Laval, son oncle, parce que [ce que] madame la com- tesse de Laval, la douayriĂšre, a quictĂ© pour en faire l'acquit, se monte beaucoup plus que ne sont les dictes debtes scavoir a quictĂ© les meubles de la feueroyne de Sicille tant bagues, Joyaulx, or, argent que aultres choses, qui bien povoient valloir soixante mil livres et plus. Item, a quictĂ© madicte dame la contesse la douairiĂšre tous les acquests et conquests de la dicte feue royne de Sicille, savoir d'Acquigny, de Mellay et de Sorel, avecques quinze mil escus pour l'acquest de Beaufort, qui peut bien valloir le tout par estimation la somme de soixante mil livres. Item, a quictĂ© madicte dame tous les meubles de la maison 34 LA MAISON DE LAVAL de Tancarville, qui sont encores devers les exĂ©cuteurs, qui puent bien valloir, le testament acomply des dicts seigneur et dame dudict lieu de Tancarville, trente mil livres. Aussi a quictĂ© madicte dame la contesse la douairiĂšre, tous les meubles, bagues, joyaulx et acquests de madame de Der- val, qui peuvent valoir dix mil livres et plus. Et n'est demourĂ© Ă madicte dame la contesse la douairiĂšre, que la moitiĂ© des meubles communs de mondict feu monsieur le conte, son mary, et elle, savoir la moitiĂ© des meubles de la maison de Chasteaubriant, qui apartenoient Ă feu monsieur le conte de Laval, pĂšre de monsieur le conte, dernier tres- passĂ©, et la moictiĂ© de toutes les debtes et actions, tant du revenu des dictes terres que autres debtes que on lui povoit devoir jusques au temps de son trespas. Et nonobstant toutes ces choses, quictĂ©es par madicte dame la contesse douairiĂšre, on luy veult empescher qu'elle ne jouisse des meubles qu'elle a rĂ©servĂ© Ă elle. Plaise Ă monseigneur et Ă madame, escripre Ă leurs gens du conseil Ă Paris, qu'ils s'enquiĂšrent avecques ceulx qui mainent la cause de madicte dame la contesse, pour savoir TestĂąt en quoy est la dicte cause et pour la faire tirer en avant, savoir Ă maistre Guillaume, son procureur, Ă mon- sieur Dixliommes advocat, Ă maistres Robert Hectort et Jacques Olivier, conseillers, et maistre Guillaume Morlaye, son solliciteur. 2145. â 1501, v. s., 2 fĂ©vrier, â Aveu rendu par François de Laval-ChĂ teaubriant pour Pire Arch. de la Loire-InfĂ©r., B, 426. 2146. â 1502, 20 octobre. â Lettre par laquelle la reine Anne de Bretagne recommande au Pape Françoise de Rieux, dame de ChĂąteaubriant, qui faisait le voyage de Rome, avec une suite de quarante personnes ' note, B. N., français, 22331, 239. 2147. â 1502, 22 novembre et 1502, v. s., 21 mars, VitrĂ©. â Naissance et sĂ©pulture de Louis de Laval, premier nĂ© de 1. Cette dame mourut le 30 octobre 1532 GoudĂ©, ChĂąteaubriant, 77. CARTULAIRE 1501-1531 35 Guy XVI notes de Le Doyen dans ses Annales, p. 99 et 101. 2148. â 1502, 6 dĂ©cembre. â Minute de l'aveu fait par Guy XVI au roi pour Montfort sur Meu. A. N., T. 1051, 19, 214. 2149. â 1503, 30 avril. â Naissance de François de Laval, second enfant de Guy XVI nott, de Le Doyen dans ses An- nales, p. 101. 2150. â 1501-1505, 16 mai, Laval. â Lettre Ă©crite par Guy XVI Ă la reine Anne de Bretagne copie, B. N., français, 2707, 354, d'aprĂšs original de Saint-PĂ©tersbourg. A la rot/ne, ma souveraine dame. Madame, je me recommande Ă vostre bonne grĂące tant et ci trĂšs humblement que faire puis. Madame, il vous a plu me mander par Tiercelin, vostre pa- netier, que allasse devers vous ; ce que je suis dĂ©libĂ©rĂ© de faire et toutes autres choses qu'il vous plaira me commander; et m'en fusse parti incontinent si ce n'eust estĂ© que j'estois Ă mon voyage de Saint-Michel, ouquel voustre dit panetier m'a trouvĂ© et moy estant icy de retour ay trouvĂ© quelque affaire, qui est cause d'avoir tardĂ© mon partement. Parquoy vous supplie trĂšs humblement qu'il vous plaise m'avoir pour excusĂ© si incontinent ne suis allĂ© devers vous ; mais j'espĂšre d'y faire la plus grande diligence qu'il me sera possible. Madame, ce temps pendant plaise vous me commander vos bons plaisirs pour les accomplir o l'aide de Dieu, auquel je prie, Madame, qu'il vous donne trĂšs bonne vie et longue. A Laval le xvi e jour de may. Vostre trĂšs humble et obĂ©issant sujet et serviteur. Guy de Laval. 2151. â 1501-1505, 17 mai, Laval. â Lettre Ă©crite par Charlotte d'Aragon Ă la reine Anne de Bretagne copie, B. N., français, 2707, 355, d'aprĂšs original de Saint-PĂ©tersbourg. A la reyne, ma souveraine dame. Madame, je me recommande Ă vostre bonne grĂące tant et si trĂšs humblement comme je puis. 36 LA MAISON DE LAVAL Madame, j'ay receu les lettres qu'il vous a plu m'escrire par Tiercelin, vostre pannetier, par lequel ay estĂ© bien joyeuse d'avoir sceu de vos nouvelles, et touchant ce qu'il vous a plu nous escrire Ă monsieur de Laval et Ă moy d'aller par devers vous, Madame, nous sommes toujours prests d'obĂ©ir Ă ce qu'il vous plaira nous commander, mais je voudrois bien qu'il vous plust considĂ©rer TestĂąt en quoy je suis, qui est d'estre g'rosse, qui a Ă©tĂ© cause de n'avoir pu faire grande diligence en mon voyage du Mont-Saint-Michel, oĂč vostre dit pannetier m'a trou- vĂ©e. Et aussi, Madame, qu'on nous a dit, depuis que sommes icy de retour, que vostre voyage de Paris estoit rompu, com- bien que je suis tousjours preste de faire et accomplir ce qu'il vous plaira me commander en vous supliant trĂšs humblement m'avoir tousjours en vostre bonne grĂące en priant Dieu, Madame, qu'il vous donne trĂšs bonne vie et longue. Escrit Ă Laval, le xvn e jour de may. Vostre trĂšs humble et trĂšs obĂ©issante sujette et servante. Charlotte d'Aragon 1 . 2152. â 1503, aoĂ»t, Tournus. â Lettres par lesquelles Louis XII ratifie la donation mutuelle de tous leurs biens que s'Ă©taient faite Guy XVI et Charlotte d'Aragon copie partielle, dom Fonteneau, XXVI; B. N., latin, 18401, 565. 2153. â 1503. â Acte par lequel Louis XII confie Ă Arthur du Pan, seigneur de la Haye du Pan, la garde de Jean de Laval-ChĂąteaubriant et de Pierre, son frĂšre, quant Ă la terre de Beaumanoir, situĂ©e en Normandie copie, B. N., français, 5085, 18. 2154. â 1503. - Accord entre Guy XVI et Henry d'Epi- nay, par lequel ce dernier rĂšgle d'anciennes dettes de sa fa- mille note B. N., français, 22331, 466. Henry, sire d'Espinay, de la RiviĂšre.... disoit que l'an 1471 feu François de Laval, qui pour lors s'appeloit sire de Mont- fort, o l'autoritĂ© du comte de Laval, son pĂšre, avoit vendu Ă 1. En mai 1501 Charlotte Ă©tait enceinte de Louis, nĂ© Ă VitrĂ© le 22 novembre 1501 ; en mai 1505, elle Ă©tait enceinte d'Anne, nĂ©e Ă VitrĂ© le 23 septembre. Dans l'intervalle, le 30 avril 1503, elle donna le jour Ă François, tuĂ© au siĂšge de la Bicoque en 1522, et Ă Catherine, dont probablement elle Ă©tait enceinte en mai 1504. CARTULAIRE 1501-1531 W Jacques d'Espinay,Ă©vĂȘque de Rennes, cinq cents livres de rente sur les terres de Saint Ouen des Toits, de la Gravelle et Olivet pour cinq mille escus d'or au pri^.oLe-ymg'l d o uK cixu s onze deniers et qu'en 1448, Robert d'Espinay, bisayeul dudit sire d'Espinay, avoit preste Ă Guy. comte de Laval, huict cent quinze escus d'or avec six plats et douze escuelles d'argent, pesant quarante-sept marcs, cinq onces, six gros ; et que dempuis Richard, sire d'Espinay, fils et hĂ©ritier dudit Robert, et ayeul dudit Henry, en avoit fait demande ; que depuis trente ans, Guy, sire d'Espinay, pĂšre dudit Henry, avoit eu procĂšs avec dĂ©funt Guy, comte de Laval, et dame Catherine d'Alençon, sa femme, touchant l'usage dudit Guy es forĂȘt de . la Guerche.... Accord Guy, comte de Laval, baille au dit sire d'Espinay trois cents livres de rente en fond et fief noble, dus sur la terre de Combour, Ă luy eschus par le dĂ©cĂšs de dame HĂ©lĂšne de Laval, et s'oblige Ă deux mille deux cents livres, 1503. 2155. â 1504, 31 dĂ©cembre. â Aven de Guy XVI au roi pour VitrĂ©, ChĂ tillon, MarcillĂ©. ChevrĂ©, AubignĂ©, MĂ©ziĂšres et le Pertre note, R, N., français, 22331, 449. 2156. â âą 1504. â Lettres par lesquelles Louis XII prescrit Ă Guy XVI de se rendre aux Etats de Rretagne. pour y de- mander un fouage extraordinaire Arch. de la Loire-InfĂ©- rieure, E., 128. 2157. â 1505, 20 avril. â Pierre de Laval-LouĂ© est sei- gneur de Renais, Mausabert et de Fayette note, R. seau,XUV,8066. 2158. â 1505, mai, 12-17, Laval. â Tenue du chapitre gĂ©nĂ©ral des Cordeliers Ă Laval note de Le Doyen dans ses Annales, p. 105. 2159. â 1505, 2 juin. - Rachat par Catherine d'Alençon, comtesse de Laval, de la prĂ©vĂŽtĂ© du Sonnois et de Peray note, R. N., Baluze, 54, 331. 2100. - 1505, 6 juillet. â Testament de Catherine d'Alen- çon, comtesse de Laval Copie, R. N., français, 26281, 168. 2161. â 1505, 18 juillet, Montjean lĂšs Reaulieu. â DĂ©cĂšs de Catherine d'Alençon Note de Le Doyen dans ses Annales, p. 110. 38 LA MAISON DE LAVAL 2162. â 1505, 4 septembre, Morlaix. â Contrat de ma- riage de Jean de Laval-ChĂąteaubriant avec Françoise de Foix, fille aĂźnĂ©e de Jean de Foix et de Jeanne de Lescun, sei- gneur et dame de Lautrec ; la reine Anne, tant en son nom qu'au nom de Jean de Foix, assigne Ă la fiancĂ©e vingt mille livres et lui garantit une seconde somme de dix mille livres en liquidation de ses droits dans les successions de ses pĂšre et mĂšre* Note, B. N., français, 22331, 240. 2163. â 1505, 6 octobre, VitrĂ©. â Note de Jean de Gen- nes relative Ă la naissance d'Anne de Laval, Ă son baptĂȘme, auquel elle a la reine Anne pour marraine, et au dĂ©cĂšs de Charlotte d'Aragon ImprimĂ©, Paris-Jallobert, p. 5. Le vi° jour d'octobre l'an mdv, madame de Laval trespassa en la tour neuffve du chasteau de VitrĂ©, et trespassa environ neuff heures du soir. Et y estoit mondit seigneur le conte de Laval, son espoux, et y avoit quatorze jours que ladite dame estoit accouchĂ©e d'une fille, que la reine de France et duchesse de Bretagne avoit nommĂ© en l'esglise Nostre-Dame de VitrĂ©, le xxvm e jour de septembre deroin passĂ©. La dite dame estoit accouchĂ©e le xxm e de septembre. 2164. â 1505, 20 octobre. â Aveu rendu ^ar Jean de Laval-ChĂąteaubriant pour Beaumanoir Arch. de la Loire- InfĂ©rieure, B. 2165. â 1505. â Vente de trente-sept livres de rente faite au chapitre de Nantes par Guy XVI Note, B. N., fran- çais, 22319, 158. 2166. â 1506, 6 mai. â DĂ©nombrement de la terre d'Au- nay rendu Ă Nicolas de Coesmes, seigneur de LucĂ©, en qua- litĂ© de seigneur de MarignĂ©,par RenĂ© de Laval Bois-Dauphin Original, B. N., français, 25241. 1. Cette note, en donnant la date exacte du mariage de Jean de Laval-ChĂąteaubriant, montre une fois de plus le danger qu'il y a Ă attacher une foi aveugle Ă nos vieux historiens. En 1854, dans la Revue des Provinces de l'Ouest p. 176, en publiant l'acte de baptĂȘme du 19 mars 1508 d'Anne de Laval-ChĂąteaubriant, on faisait remarquer que du Paz [Histoire gĂ©nĂ©alogique, p. 36, pla- çant en 1509 l'alliance de Jean de Laval-CnĂąteaubriant, il fallait bien admettre que leur fdle Anne Ă©tait nĂ©e hors mariage et avait Ă©tĂ© lĂ©gitimĂ©e par ses pĂšre et mĂšre. En fait, du Paz s'est trompĂ© de quatre ans sur l'Ă©poque de l'alliance en question et Anne n'est pas nĂ©e hors mariage. CARTULAIRE 1501-1531 39 2167. â 1506, 17 juin, VitrĂ©. â Mandement par lequel Guy XVI ordonne Ă François Boudard de faire porter un tier- celet Ă l'Ă©vĂȘque de LĂ©on et de faire venir Ă VitrĂ© deux bons lutteurs ImprimĂ©, Reçue de Bretagne, 1888 2 , 470, d'aprĂšs les titres de Quintin. De par le conte de Laval, de Montfort et de Quintin. Françoys Boudart, soubz-garde de noz forestz de Quintin, incontinent ces lectres veues, despeschez ung homme pour aller devers l'Ă©vesque de LĂ©on 1 luy porter ung tiercelet que j'ay fait bailler Ă ce porteur avecques mes lectres que je luy envoyĂ©. Au seurplus faictes venir incontinent devers nous dom MahĂ© le Baher, le bon luteur, et qu'il amaine avec luy le meilleur luteur qu'il pourra trouver ou pays. Et gardez qu'il n'y ait faulte. DonnĂ© Ă VitrĂ© le xvn e jour de juing mdvi. Si ledit dom MahĂ© ne pouvoit trouver luteur qui voulzist venir avecques luy faicte qu'il viengne tout seul, mais qu'il n'y ayt faulte. R. Estienne. 2168. â i 506, v. s., 3 fĂ©vrier. -Aveu rendu par Guy XVI, comte de Montfort, pour BrĂ©al Arch. de la Loire-InfĂ©rieure, 2169. â1507,21 juillet. - Guy XVI donne Ă RenĂ© de Laval-Bois-Dauphin la mission dĂ©faire en son nom hommage pour la Roche d'IrĂ© Note, B. N., français, 22331, 277. 2170.â 1507, 1 novembre, Ă 1512, 1 er novembre.â Compte des recettes et dĂ©penses de l'abbaye d'Etival en Charnie rendu Ă l'abbesse Jeanne de Laval Archives de la Sarthe, H., 1418. 2171. â 1507, 14 dĂ©cembre. â Aveu au duchĂ© d'Anjou pour CandĂ© par Jean de Laval-ChĂąteaubriant No te, B. N., français, 22331. 263. 2172. â 1507, v. s., 19 mars, Saint-Jean-de-BerĂ©. âActe de baptĂȘme d'Anne de Laval-ChĂąteaubriant, iille de Jean de 1. Jean de Kermavan. 40 LA MAISON DE LAVAL Laval et de Françoise de Foix ImprimĂ©, Revue des Provin- ces de l'Ouest, 1854, p. 176 et Revue de Bretagne 1869 2 , 219. Anno MDVII, dĂ©cima nona marcii [baptisata fuit] supra sacros fontes existentes in capella existanli in Castro Castri Brientii nobilis damissella Anna, filia nobilis et potentissim domini domini temporalis Castri Brientii ac nobilissime da- misselle Francisse de Foyes, ejus socie seu diiecte'. [Nata erat xi a edjusdem menais] Patrinus ejus fuit nobilis vir Petrus, dominug temporalis de Rolian 2 , matrine vero Gilleta de Coasnon, domina d'Assi- s-nĂ©, et Francisca de la BouexiĂšre. 2173. â 1508, 11 juin. â Aveu rendu Ă Thouars pour Lu- zais, dit Beaumont, par Pierre de Laval, Ă cause de Philippa deBeaumont,safemmeNote, LaTrĂ©tnoĂŻlle, Fiefsde Thouars, 131. 2174. â 1508, 11 juin. â Aveu Ă Thouars, pour la baron- nie deBressuire, par Pierre de Laval, Ă cause de Philippa de Beaumont, sa emme Note, La TrĂ©moĂŻlle, Fiefs de Thouars, p. 12. 2175. _ 1508, 7 septembre, Angers. â ProcĂšs-verbal de la rĂ©daction des coutumes du pays et duchĂ© d'Anjou ImprimĂ©, Nouveau Cousluinier gĂ©nĂ©ral, 4 vol. in-folio, 1724, t. iv, p. 585. Parmi les comparants, on remarque Le seigneur de Laval, seigneur de la Roche-d'IrĂ©, reprĂ©- sentĂ© par maĂźtre Pierre Loriot, son sĂ©nĂ©chal audit lieu de la Roche-d'IrĂ©. François de Laval-Bois-Dauphin en personne. Jean de Laval, seigneur de Chanzeaux, reprĂ©sentĂ© par maĂźtre Pierre Jarry, son procureur. 2176. â 1508, 7 octobre, Le Mans. â ProcĂšs-verbal faict Ă la correction et promulgation des coustumes du pays et 1. On a vu par notre numĂ©ro 2162 que le mariage de Jean de Laval-ChĂąteaubriant, bien loin d'avoir eu lieu en 1509, comme l'af- lirmeduPaz [Hist. gĂ©nĂ©alogique, p. 36 remontait au 4 septembre 1505. L'emploi des mots ejus socie seu diiecte est ici motivĂ© par le dĂ©sir qu'on a eu de signaler la situation irrĂ©guliĂšre des Ă©poux, qui, parents au troisiĂšme degrĂ©, s'Ă©taient mariĂ©s sans dispense. 2. Sans cloute Pierre de Rohan, seigneur de GiĂ©, marĂ©chal de France Note de M. de laBorderie. cautuuure 1501-1531 41 comtĂ© du Maine, on ensuivant le commandement du Roy, no'stre sire ImprimĂ©, Nouveau Coustumier gĂ©nĂ©ral, 4, in- folio, 1724, t. iv, 520 On remarque parmi ceux qui comparaissent par procureur Jeanne de Laval, abbesse d'Elival-en-Charnie ; Guy, comte de Laval, comparant par François de la Pommerais, conseil- ler et contrĂŽleur des finances dudit comte, et maĂźtre RenĂ© Hennier, licenciĂ© en loix, son procureur. 2177. â 1508. â Procuration donnĂ©e par Guy XVI, pour vendre en son nom une rente de quatre-vingt-cinq livres au chapitre de Rennes Note, B. N., français, 22319, 158. 2178. â 1509, 25 novembre. â Aveu Ă Thouars pour Pom- mereux, en AntoignĂ©, par Jean de Laval Note, La TrĂ©moĂŻlle, Fiefs de Thouars, 198, 2179. â 1509. â ProcĂšs entre Guy XVI et Georges d'Orenge, Ă©cuyer, seigneur de la FeuillĂ©e A. N., x ,B 147, 354 ; indiquĂ© par M. l'abbĂ© Angot. 2180. â 1509. â Accord entre Guy XVI et son frĂšre, Christophe de Rohan, procureur de Pierre de Rohan, son pĂšre, pour la succession de Jeanne du Perrier, Ă©pouse de ce dernier Note, B. N., français, 22331, 709. 2181. â 1509. â Accord entre Guy XVI et Pierre de Rohan, second mari de Jeanne du Perrier, sa mĂšre, afin de fixer dans la succession de celle-ci la part de Christophe et Suzanne de Rohan, ses frĂšre et sĆur utĂ©rins Note, B. N.. français. 22319, 141. 2182. â 1509, v. s., 26 janvier. â Lettres par lesquelles le procureur de Guy XVI, s'engage Ă restituer avant le jour de NoĂ«l 1510 toutes les lettres Ă lui confiĂ©es et portant dĂ©char- ges au nom du comte de Laval des sommes reçues par lui en qualitĂ© d'hĂ©ritier de la reine Jeanne de Laval B. N., Lorraine, 26, 58. 2183. â 1510, 9 novembre. â Icte par lequel Gilles de Laval MaillĂ© reconnaĂźt devoir Ă Antoine de Loubes la somme de dix sept cents Ă©cus soleil et trois cents Ă©cus d'or couronnĂ©s, empruntĂ©e par lui pour payer au roi le rachat de la terre du Bois-Preuilly, au nom de Françoise de MaillĂ©, son Ă©pouse Copie, B. N., Dont Housseau, IX, 4160. 42 LA MAISON DE LAVAL 2184. â 1510, novembre. â Accord entre Jean de Rieux et Jean de Laval ChĂąteaubriant, par lequel celui-ci rĂšgle avec son grand pĂšre les droits de Françoise de Rieux, sa mĂšre, laquelle Ă©tait unique hĂ©ritiĂšre de Françoise Raguenel, dite de Malestroit, sa mĂšre, premiĂšre Ă©pouse do Jean de Rieux Note, R. N., français, 22331, 240. 2185. - 1510. â Acte par lequel Guy XVI, vend Ă Philippe de Montauban, pour sept mille livres de biens dans la chĂątellenie d'AubignĂ© Note, R. N., 22319, 153. 2186. â 1511, 16 juin, Rressuire. â Acte par lequel Pierre de Laval-LouĂ© constate que François de Reaumont, seigneur des Dorides, lui a fait foi et hommage pour les GalardiĂšres, assises en la ville de Rressuire Note du Catalogue Ernest Dumont d'octobre 1898, numĂ©ro 90. 2187. â 1511, 8 dĂ©cembre. â Aveu rendu Ă Pierre de Laval-Rressuire par Olivier Rerthonneau, pour Puymorin Note 1392 du Catalogue 105 de la librairie Ernest Dumont. 2188. â 1511, v. s., 27 mars. â Aveu fait par François Philippe Ă Françoise de Laval, veuve d'Edmond de Rueil, ayant le bail de Louis de Rueil, son fils Note, R. N., Dom Housseau, IX, 4164. 2189. â 1512, 3 juin, Lavai. â Lettres par lesquelles Guy XVI amortit l'emplacement de l'Ă©glise Saint-VĂ©nĂŽrand ImprimĂ©, de la ReauluĂŽre, Le Doyen, p. 353. 2190. â 1512. â Rulle par laquelle le'pape Alexandre VI absout François de Laval et Françoise de Rieux d'avoir contractĂ© mariage Ă un degrĂ© prohibĂ© Note R. N., français, 22331, 239. 2191. â 1512, v. s., 7 janvier, Le Mans. â Lettres par lesquelles le cardinal Philippe de Luxembourg autorise pour deux ans la cĂ©lĂ©bration de la messe dans la partie alors construite de l'Ă©glise Saint-VĂ©nĂ©rand de la ReauluĂšre, Le Doyen, p. 354. 2192. â 1512, v. s., 27 fĂ©vrier. â AssemblĂ©e tenue Ă VitrĂ© afin d'Ă©lire les trois personnes chargĂ©es d'exercer la charge de trĂ©sorier pendant chacune des trois annĂ©es suivantes ImprimĂ©, Paris-Jallobert, 5. CARTULAIRE 1501-1531 43 2193. â 1513. 26 juin. â Vente faite par RenĂ© de Laval- Bois-Dauphin et RenĂ©e de Saint-Mars, sa femme, Ă Jacques deBrizay B. N., français, 28153, 133. 2194. â 1513, 15 septembre. â Lettres par lesquelles Louis XII charge divers personnages â parmi lesquels Guy XVI â de demander un fouage aux Etats de Bre*agne Archives de la ville AA., 19. 2195. â 1513, v. s., 19 fĂ©vrier. â RĂ©cit des funĂ©railles d'Anne de Bretagne, composĂ© par le hĂ©raut d'armes Breta- gne et dĂ©diĂ© par lui Ă Guy XVI ; Guy XVI. ainsi que ses cou- sins RenĂ© de PĂ©nthiĂšvre et de Laigle, Jean de Laval- ChĂąteaubriant et Pierre de Laval-Montafilant, prirent part Ă toutes les cĂ©rĂ©monies ImprimĂ©, Paris, 1858, in-16. 2196. â 1514, 1 er mai, Laval. - Acte par lequel Guy XVI, confie Ă François PĂ©rou l'office de contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral de sa maison 1 ImprimĂ©, Bulletin de la SociĂ©tĂ© d'Agriculture de la Sarthe, XXXV, 178. 2197. â 1514, 21 aoĂ»t. â Charte par laquelle Pierre de Laval, seigneur de LouĂ© et de Bressuire, nomme un boucher jurĂ© pour la ville de Bressuire Original, Catalogue des Livres... Ă prix marquĂ©s... Ernest Dumont, 30 janvier 1899, n° 361. 2198. â 1514, 27 novembre. â Aveu rendu Ă Françoise de Laval, veuve d'Edmond de Bueil et bail de Louis de Bueil Note, B. N., Dom Housseau, XII 1 , 6271. 2199. â 1514, v. s., 25 janvier. â Ordre observĂ© Ă l'entrĂ©e de François I er Ă Paris ; Ă la suite des princes du sang marchaient plusieurs princes et grand seigneurs parmi eux le comte de Laval. ImprimĂ© Godefroy, CĂ©rĂ©monial français, 1649, in-folio, t. I, p. 274. .... Leditcomte de Laval avoit son acoustrement d'un costĂ© de drap d'or frisĂ© et l'autre costĂ© d'argent traict Ă escailles, 1. Ce texte est publiĂ© avec un fac-similĂ© de la signature de Guy XVI, mais sans indication de source. En outre, son Ă©diteur n'a pas jugĂ© Ă propos d'en remplir les abrĂ©viations ; et cette mal- heureuse abstention n'a pas rendu sa publication plus correcte, car Ă la deuxiĂšme ligne ayant Ă lire de la Roche et d'Acquigny il s'est bornĂ© Ă imprimer de la Roche â rt. 44 LA MAISON DE LAVAL l'une d'un, l'autre d'autre, chacune bordĂ©e de fil d'or de Chipre. Tout ledit acoustrement bordĂ© d'un demy pied de veloux violet Ă double bord d'argent traict, lassĂ© l'un sus l'autre. Et sus ledit veloux devises faites Ă l'antique Ă plaisir d'argent traict. Et en plusieurs endroits y avoit des bords en façon de carreaux lacez de drap d'or. Et au milieu de chacun estoit un D et un E lacsez Ă un lac d'amours, le tout fait a broderie bien riche. Son bonnet estoit de veloux noir, bordĂ© Ă large bord de toile d'or traict Ă carreaux, des plumes dessus blanches, jaunes et violettes et une image d'or devant.. . 2200. â 1515, 11 juillet. â Acte par lequel Pierre de Laval-LouĂ©, en exĂ©cution des derniĂšres volontĂ©s d'Hardouine de Laval, dame de Pressigny, fonde une chapelle en l'Ă©glise paroissiale de Benais Note, B. N., dom Housseau, xni 1 , 9432. 2201. â 1515, 25 aoĂ»t. â Quittance des mille livres de sa pension de l'annĂ©e 1515 dĂ©livrĂ©e par Gilles de Laval-MarcillĂ© Original signĂ©, B. N., français, 28153, 141. 2202. â 1515. â Acte par lequel Jean de Laval-ChĂąteau- briant vend la terre de Gavre Ă Jacques de Luxembourg' moyennant trente-quatre mille Ă©cus Note, Biographie Nationale Belge, VII, 531. 2203. â 1510, 15 avril, Aunay. â Lettre Ă©crite par Guyonne de Beauvau, Ă©pouse de BenĂ© de Laval-Bois Dauphin, Ă madame de la TrĂ©moĂŻlle afin d'obtenir d'elle le prĂȘt de trois lettres relatives Ă PrĂ©cignĂ© Archives de la TrĂ©moĂŻlle. Madame, trĂšs humblement Ă vostre bonne grĂące me recom- mande. Madame, mon filz a besoingnez de quelque lettres qui sont en vostre trĂ©sor de Touars, lesquelles ne touchent plus mon- seigneur ne vous, car elles concernent seullement la terre de PrĂ©cignĂ©, ainsi qu'il vous plaira faire voirs par le mĂ©moire que vous en envoyĂ©. Madame, je vous suply qu'il vous plaise faire ce bien Ă mondit filz et Ă moy de les nous faire communicquez, affin que nous puisson en avoir des coppies pour nous servir contre ung moyngne, lequel, aprĂšs que l'avons eu faict abbĂ©, nous faict touz les maulx du monde. CARTULAIRE 1501-1531 45 Madame, s'il est chouse que puissons, mondit fdz et moy, pour Monseigneur et pour vous, vous pl[aise] le nous com- mander, affin de le acomplir Ă toute dili[gence] Ă nous possible, aidant Nostre Seigneur, qui vous doien[t], Ă Monseigneur et Ă vous, bonne vie et longue. Aunay, ce mardi, XV e d'apvril par voustre trĂšs humble et trĂšs hobĂ©issante ser[vante]. G. DE BEAUVAU. 2204. â 1516, 18 avril. â Reçu signĂ© de Jean Bougard du prĂȘt des. trois lettres des xn° et xin e siĂšcles confiĂ©es par Madame de la TrĂ©moĂŻlle Ă RenĂ© I er de Laval-Bois-Dauphin original, archives de la TrĂ©moĂŻlle. Ma trĂšs redoubtĂ©e dame, madame de la Trimotlle pour les lettres que madame a envoyĂ©es Ă mademoiselle de liois- Dauphin du xvm B jour d'apvril l'an MDX VI. Je Jehan Bougard, demourant en la parroisse de Peton prĂšs Craon, serviteur de Jehan de Laval, seigneur du Boys- Dauphin, et son sergent en sa terre d'Aulnay, confesse avoir eu et receu de haulte et puissante dame madame de la Tri- moĂŻlle, par les mains de Simon de la Ville, les lettres qui s ensuyvent C'est assavoir Une lettre d'appoinctement faict entre les doyen et chappitre de Sainct Martin de Tours et madame Ysabeau, jadis femme de feu monsieur Morice de Craon, touchant le droit de juridicion, cohue et four Ă ban de PrecignĂ© en Anjou, datĂ©e du moys d'octobre MCCLII, sellĂ©e de cinq seaulx en cire vert. Item, une autre lettre d'un appoinctement donnĂ© par Michel, Ă©vesque d'Angers, entre ledit Morice de Craon, seigneur de SablĂ©, et lesdits doyen et chappitre de Saint- Morice de Tours, touchant la justice et droiz de PrĂ©signĂ© en Anjou, donnĂ© Ă BaugĂ©, ou moys d'octobre, l'an MCCLII, seellĂ©e aussi de cinq seaulx en cire vert. Item, une lettre de transaction et appointement fait entre le seigneur de SablĂ© et ledit chappitre de Sainct Martin de Tours, touchant les boys et autres choses, datĂ©e de l'an 46 LA MAISON DE LAVAL MCLXXII, seellĂ©e de deux seaulx Ă qutuhes doubles en cire jaulne '. Lesquelles troys lettres je promectz porter Ă madamoiselle Guionne de Bauveau, ma maistresse, femme de mondit seigneur du Boys-Dauphin, pour luy servir en aucuns procĂšs qu'il a Ă Paris ; et aprĂšs les promez rendre Ă madite dame, ou Ă autres de par elle, dedans ung an prouchain venant, Ă compter du jour et date de ces prĂ©sentes, lesquelles, en tesmoing de vĂ©ritĂ© j'ay signĂ©es de mon seing manuel, le xvni e jour d'avril, l'an mil cinq cens seze aprĂšs Pasques. BoGARD. 2205. â 1517, 3 mai, les CarriĂšres prĂšs Charenton. â Contrat de mariage do Guy XVI avec Anne de Montmo- rency, fille de Guillaume de Montmorency et d'Anne Pot, suivi de sa ratification donnĂ©e le 9 mai A. N., M. 453, dossier Laval. A tous ceulx qui ces prĂ©sentes lettres verront Gabriel, sei- gneur et baron d'Aligre, Sainct Just, Meilhan, Terzet, Sainct Dier et de Fussel, conseiller, chambelain du Boy, nostre sire et garde de la prĂ©vostĂ© de Paris, salut. Sçavoir faisons que, pardevant Pierre Pichon l'aisnĂ© et Pierre Pichon le jeune, notaires du Boy, nostredict seigneur, de par luy establys au Chastelet de Paris, furent prĂ©sens et personnellement establys haullz et puissans seigneurs mes- sieurs Guy, conte de Laval, de Montfort et de Quintin,sire de VitrĂ©, d'une part, et Monsieur Guillaume, seigneur de Mont- morancy, premier baron de France, seigneur d'Escouen, Chantilly, Auffoys, Montespilouer et Chavenay, conseillier, chambellain ordinaire du Boy, nostredict seigneur, et che- vallier de son ordre, et demoiselle Anne de Mqntmorancy, fille de luy et de feue dame Anne Pot, en son vivant son es- pouse, laditte damoiselle Ă©mancippĂ©e et aucthorisĂ©e par son- dict pĂšre quant Ă ce qui s'ensuict, d'autre part, soubsmec- tans lesdittes partyes et chacunes d'icelles respectivement, elles, leurs hoirs, avecques tous leurs biens, meubles et im- 1. Sur les trois lettres en question deux seulement sont encore connues aujourd'hui. L'une et l'autre figurent in-extenso sous les numĂ©ros 148 et 285 du Carlulaire de Craon. CAKTULAIIIE 1501-1531 47 meubles quelconques ; et recongnurent et confessĂšrent icelles partyes de leurs bons grez, sans contraincte, induction ou decevance aulcunes, en la prĂ©sence et pardevant lesdictz notaires, comme en jugement pardevant nous, que, enparlant, traictant et accordant le mariage d'entreledict conte de Laval, d'une part, et laditte damoiselle Anne de Montmorancy,d'au- tre part, et Ă ce que ledict mariage puisse estre faict, con- sommĂ© et acomply, icelles partyes ont faict les pactions, accordz et promesses qui ensuivent C'est assavoir que ledict conte de Laval a promis, et par ces prĂ©sentes promect prendre Ă femme et espouse laditte damoiselle Anne de Montmorancy. Et pareillement icelle damoiselle Anne a promis et par ces prĂ©sentes, promect prendre Ă mary et espoux ledict conte de Laval, sy Dieu et saincte Ă©glise sy accordent. En faveur et contemplation duquel mariage ledict sei- gneur de Montmorancy, pour le dot et don des nopces de saditte fille et tout tel droict, part et portion des successions iudict seigneur de Montmorancy, son pĂšre, qui luy poue- reyent escheoir, et qui luy est escheue Ă cause de sa feue mĂšre a promis, et par sesdittes prĂ©sentes promect payer, bailler et nombrer audict conte de Laval et Ă laditte damoi- selle, son espouse, la somme de quarente mil livres tournois, dont en y aura la somme de dix sept mil cinq cens livres, qui sera censĂ©e et rĂ©putĂ©e meuble commung entre lesdictz futurs espoux, ledict mariage faict, consommĂ© et accomply, qui ne sera subjecte Ă restitution. Et le rĂ©sidu de laditte somme de quarante mil livres tournois, montant vingt deux mil cinq cens livres tournois, ledict conte de Laval a promis et sera tenu convertir et employer en acquest de hĂ©ritage, qui sera censĂ© et rĂ©putĂ© le propre hĂ©ritage de saditte future espouse, ses hoirs et ayans cause, ou luy bailler et faire assiĂšte de hĂ©ritages en ses terres et seigneuries, jusques Ă la valleur et estimation de laditte somme de vingt deux mil cinq cent li- vres tournois, le payement Ă luy prĂ©alablement faict de la- ditte somme par ledict seigneur de Montmorancy, o grĂące et facultĂ© de rĂ©mĂ©rĂ©, ainsy que sy aprĂšs sera dĂ©clarĂ©. Lequel seigneur de Montmorancy a promis, doibt et sera tenu bailler et nombrer manuellement audict conte de Laval, dedans le jour des espousailles de luy et de saditte future espouse, la 48 LA MAISON DE LAVAL somme de vingt mil livres tournois sur et en dĂ©duction de laditte somme de quarente mil livres tournois ; et pour le rĂ©- sidu d'icelle somme, montant autre vingt mil livres tournois, icelluy seigneur de Montmorancy a vendu, ceddĂ© et trans- portĂ© audict conte de Laval les terres et seigneuries de Meu- ressault et de Sainct Romain en Bourgongne, lesquelles terres et seigneuries ledit seigneur de Montmorancy a promis et par cesdittes prĂ©sentes promect faire valloir audict conte de Laval la somme de mil livres tournois de rente par chacun an, qui est, Ă la raison de chacun cent livres tournois, deux mil livres tournois ; et, icelles lui garentir et parfaire jusques Ă la valleur de laditte somme de mil livres tournois de rente vers tous et contre tous de tous empeschemens quelconques, o grĂące et facultĂ© donnĂ©e par ledict conte de Laval audict seigneur de Montmorancy que touteffoys et quantes que ledict seigneur de Montmorancy, ses hoirs et ayans cause payeront et bail- leront audict conte de Laval laditte somme de vingt mil livres tournois, dedans six ans pour le retraict et recousse desdittes terres et seigneuries, ainsy vendues pour icelles sommes de vingt mil livres tournois, en ce cas laditte vendition sera et demeurera nulle, pendant et durant lequel temps et facultĂ© de laditte grĂące de rĂ©mĂ©rĂ©, ledict conte de Laval prendra et lĂšvera les fruictz desdittes terres et seigneuries sans en faire aulcune desduction sur le principal dudict acquest, pour ce qui sera en l'Ă©lection dudict seigneur de Montmorancy, de les retirer pendant ledict temps et facultĂ© de laditte grĂące de rĂ©mĂ©rĂ© ou de les laisser Ă perpĂ©tuitĂ© audict conte de Laval, pour le paye- ment desdictz vingt mil livres tournois ; et, si ledict seigneur de Montmorancy ne retire lesdittes terres et seigneuries ainsy par luy vendues et transportĂ©es audict conte de Laval en vertu de laditte grĂące et facultĂ© de rĂ©mĂ©rĂ©, et icelles il ne baille audict conte de Laval laditte somme de vingt mil livres tournois, icelles terres et seigneuries seront et demeu- reront le propre hĂ©ritage de laditte damoiselle Anne de Mont- morancy, future espouse dudict conte de Laval et demeurera icelluy conte de Laval quitte et deschargĂ© de pareille somme de vingt mil livres tournois qu'il doit convertir en acquest d'hĂ©ritage pour sa ditte future espouse sur et en dĂ©duisant de laditte somme de vingt deux mil cinq cens livres tournoiz, et sera seullementtenu icelluy conte de Laval convertir et em- CARTULAIRE 1501-1531 49 ployer en acquestz d'hĂ©ritages ou bailler assiette d'hĂ©ritage Ă saditte future espouse sur ses terres et seigneuries le reste desdictz vingt deux mil cinq cens livres tournois, qui est cent vingt cinq livres tournois Ă la raison dessusdite o la grĂące et facultĂ© de rĂ©mĂ©rĂ© cy aprĂšs contenue. Aussy, sy ledict seigneur de Montmorancy retire lesdittes terres et seigneuries ainsy par luy baillĂ©es audict conte de Laval en payement desdictz vingt mil livres tournois, et, pour laditte recousse ou retraict, il ptye et baille Ă icelluy conte de Laval laditte somme de vingt mil livres tournois, en ce cas dĂšs Ă prĂ©sent comme pour lors et dĂŽslors comme Ă prĂ©sent, ledict conte de Laval a vendu, ceddĂ© et transportĂ©, et par cesdittes prĂ©sentes vend, cedde et transporte Ă laditte damoiselle. sa future espouse, les terres et seigneuries de Becherel assize et scituĂ©e en Bretaigne et assiz et scituez en Normandye, laquelle vendition est faicte, tant pour lesdictz vingt mil livres tournois que pour lesdictz deux mil cinq cens livres tournois, qu'il a promis convertir en ac- quest d'hĂ©ritage au proffict de laditte damoiselle, sa future espouse, ainsy que dessus est contenu ; lesquelles terres et seigneuries il a promis et par ces prĂ©sentes promet faire val- loir Ă saditte future espouse, ses hoirs et ayans cause la somme de unze cens vingt cinq livres tournois de rente, par chacun an, qui est Ă la raison dessusditte chacun cent livres tournois de rente, deux mil livres tournois et prorata, o pa- reille grĂące et facultĂ© retenue par ledict conte de Laval de pouvoir recouvrer et retirer lesdittes terres et seigneuries tant par luy, s'il survit saditte future espouse, que par seshĂ©- ritiers aprĂšs son trespas, de six ans prochains et ensuivant la dissolution du mariage, en rendant et payant Ă icelle future espouse ou Ă ses hĂ©ritiers, dedans ledit terme de six ans, laditte somme de vingt deux mil cinq cens livres tournois pour le retraict et recousses d'icelles terres et seigneuries. Aussy, sy ledit conte de Laval ne faissoit laditte recousse ou retraict desdictz unze cens vingt cinq livres tournois de rente dedans le temps de six ans, et s'il dĂ©cĂ©doit avant qu'elle feust faicte, pendant et durant ladit'e grĂące et facultĂ© de rĂ©mĂ©rĂ© saditte future espouse, ses hoirs et ayans cause prendront et lĂšveront les fruictz desdittes terres et seigneuries baillĂ©es et vendues pour laditte somme de vingt deux mil cinq cens livres I 50 LA MAISON DE LAVAL tournois, sans en faire desduction sur le principal de laditte somme, pour pareille cause que dessus est contenu pour la vendition desdictz mil livres tournois de rente, et, moyennant ce. laditte damoiselle a renoncĂ© et renonce, o l'auctoritĂ© de sondict pĂšre, aux successions paternelles et maternelles. Et a ledict conte promis d'habondant luy faire renoncer et ratiffier ces prĂ©sentes incontinant aprĂšs le mariage con- sommĂ©, sauf touteffoys que sy les masles dudict seigneur de Montmorancy alloient de vie Ă trespas, sans enfans nez en mariage, laditte damoiselle pourra en ce cas venir et prendre part Ăšsdittes successions avec autres filles ou fille desdictz pĂšre et mĂšre. Et nĂ©antmoins, par ce prĂ©sent traictĂ© de mariage, et nonobstant icelluy, est dict et accordĂ© entre les dittes par- tyes que laditte damoiselle future espouse dudict conte de Laval pourra venir aux successions colatĂ©ralles qui luy pour- roient escheoir, sans que au moyen d'icelluy traictĂ© de ma- riage elle en puisse estre privĂ©e. En faveur et contemplation duquel mariage, ledict conte de Laval a constituĂ© et constitue Ă saditte future espouse au cas qu'il dĂ©cedde avant elle, ledict mariage faict, consommĂ© et accomply, pour le droict de douaire qu'elle pourrait prĂ©- tendre et demander sur ses terres et seigneuries, la somme de six mil livres tournois de rente par chacun an, Ă en estre faicte assiette sur le chastel, terre et seigneurie de Comper, Gael, BrĂ©at, Plelain, LohĂ©ac et jusques au parfaict de laditte somme de six mil livres tournois, et autres ses terres et sei- gneuries lequel chastel elle aura pour son logis et demeure pour jouir desdittes choses sa vie durant par usufruict seul- lement Oultre a estĂ© dict, promis et accordĂ© entre lesdittes par- tyes, pour ce que ledict conte de Laval a ung filzet deux fdles de son premier mariage 1 qui seroyent fondez en sa succession, s'il estoit deceddĂ©, et que s'il y avoit enfans masles de luy et de saditte future espouse et de leur mariage qu'ilz ne succĂ©de- royent que en bienfaict leur vye durant et par usuffruict en la tierce partye de ses hĂ©ritages, terres et seigneuries avec ses autres puisnez, et n'auroient aucune chose en propriĂ©tĂ©, 1. François, nĂ© le 30 avril 1503, Catherine, nĂ©e en 1504, Anne, nĂ©e le 29 septembre 1505. et CARTULAIRE 1501-1531 51 selon les coustumes du pays oĂč lesdictz hĂ©ritages, terres et seigneuries sont scituez et assizes ; ce qu'il n'entend, mais veult et entend leur bailler et distribuer de cesdictz hĂ©ritages, terres et seigneuries en propriĂ©tĂ©, en maniĂšre que honneste- ment ilz en puissent vivre et eux entretenir ; Ă ceste cause, ledict conte de Laval, en faveur et contemplation dudict ma- riage de luy et de saditte future espouse, lequel autrement n'eust estĂ© faict, a donnĂ©, ceddĂ© et transportĂ©, et, par ces prĂ©- sentes, donne, cedde et transporte aux enffans, qui ystront de luy et de saditte future espouse et de leur dict mariage, s'aulcuns en y a, la tierce partye de toutes et chacuncs ses terres et seigneuries, estans tant es pays d'Anjou, le Mayne, Normandye, Bretaigne, que ailleurs, pour jouir aprĂšs son trespas Ă perpĂ©tuitĂ© pour eux, leurs hoirs et ayans cause; c'est asscavoir pour l'aisnĂ© masle, s'aulcun en y a, ou sa re- prĂ©sentation, pour les deux tierces partyes, et tous les autres puisnez, tant filz que filles issuz d'icelluy mariage, pour l'au- tre tierse partye Ă©gallement Ă perpĂ©tuitĂ©, aussy pour eux, leurs hoirs et ayans cause ; toutesfoys est dict et accordĂ© entre lesdittes partyes, que au cas que le filz aisnĂ© dudict conte de Laval de son premier mariage, aprĂšs le dĂ©cedz de sondict pĂšre, s'il le survit, ou les hoirs procrĂ©ez de sa chair en mariage, vouldroict bailler, cedder, transporter et dĂ©lais- ser ausdictz enfans dudict conte de Laval et de saditte future espouse, le contĂ©, terre et seigneurie de Quintin et ses apar- tenances, pour en jouir par lesdictz enfans dudict second mariage, par la forme et maniĂšre qu'ilz feroyent et pouroyent faire desdittes tierces partyes et portions desdittes choses donnĂ©es et ainsy que dessus est contenu, et pour rĂ©compen- ses d'icelles tierces partyes et portions, faire le pourront ; et, en ce cas, retourneront et appartiendront icelles tierces par- tyes et portions desdittes choses, donnĂ©es ausdictz enfans desdictz futurs espoux, audict filz aisnĂ© dudict conte de Laval de sondict premier mariage et aux hoirs procrĂ©ez de sa chair en mariage. Moyennant lesquelz dons et pactions cy dessus dĂ©clarĂ©s, a estĂ© expressĂ©ment dict et accordĂ© entre lesdittes partyes ; que les enffans qui ystront desdictz futurs espoux et de leur mariage, ne pourront plus aulcune chose prĂ©tendre ne demander en la succession dudict conte de Laval, mais en seront privez, synon au cas que le filz aysnĂ© dudict 52 LA MAISON DE LAVAL conte de Laval, dudict premier mariage, yroit de vye Ă tres- passement sans hoirs, procréés de sa chair et, qu'il y eust en- fans masles dudict second mariage, ouquel cas, l'aisnĂ© y suc- ceddera, selon les coustumes des pays ou lesdictz hĂ©ritaiges, terres et seigneuries sont scituĂ©es et assizes'. Aussy est dict et accordĂ© entre lesdittes parties que sy dudict second mariage dudict conte de Laval et de saditte future espouse, n'y a aulcuns enflans masles, ou qu'ilz dĂ©ced- dassent sans hoirs, procréés de leur chair et qu'il n'y eust que fdles, en ce cas le don, cession et transport ainsy faict par ledict conte de Laval, desdittes tierces partyes et portions desdittes terres et seigneuries, en faveur d'icelluy mariage, aux enfans dudict mariage, ou ledict contĂ© de Quintin, s'il estoit baillĂ© en rĂ©compense desdittes tierces parties et por- tions, n'aura lieu, mais viendront lesdittes fdles Ă leur reprĂ©- sentation, Ă succĂ©der audict contĂ© de Laval, avecques ses autres enfans dudict premier mariage, tant Ăšsdittes partyes et portions, ainsy donnĂ©es, et audict contĂ© de Quintin et ses apartenances, s'il estoit baillĂ© pour laditte rĂ©compense que es autres choses, terres et seigneuries de la succession du- dict conte de Laval, selon les coustumes des pays, ou les choses sont scituĂ©s et assizes. Et aprĂšs que ce prĂ©sent contract a estĂ© leu, Ă rĂ©vĂ©rend pĂšre en Dieu, messire Philipes de Montmorancy. Ă©vesque de Li- moges, Anne et Francoys de Montmorancy, frĂšre de laditte damoiselle, et par eux a estĂ© entendu iceulx de Montmo- rancy frĂšre, ont le tout approuvĂ©, ratiffyĂ© et consenty, de l'aucthoritĂ© et bon plaisir de leurdict pĂšre, lesquelz traictez, accordz, cessions, transportz, promesses, convenances et toutes et chacune les autre choses dessus dittes, et en ces prĂ©sentes lettres contenues et escriptes, lesdittes partyes et aussy lesdicts maistre Philipes, Anne et FrançÎys de Mont- morancy, frĂšres, promisrent et jurĂšrent par les foy et serment de leurs corps, pour ce par eux baillez et jurez corporelle- ment es mains desdietz notaires, ledict maistre Philipes de Montmorancy en parolle de prĂ©lat, Ă avoir chacun en 1. C'est cette hypothĂšse qui s'est rĂ©alisĂ©e, car François, fils de Charlotte d'Aragon, fut tuĂ© te 27 Avril 1522, et Claude, ils d'Anne de Montmorency, succĂ©da Ă son pĂšre, lors du dĂ©cĂšs de celui-ci, le 20 mai 1531. CARTULAIRE 1501-1531 53 droict soy Ă bien agrĂ©ables, les tenir ferme et stables Ă tousjours. sans jamais aucunement venir allencontre, fut ou soit par voye d'erreur, d'ignorence, de circonvention ou dĂ©ce- vance, ne autrement comment que ce soit ou puisse estre. Ainçoys rendre payer et restituer Ă pur et Ă plain, et sans aulcun plaid ou procĂšs, tous coustz, fraiz, mises, despens, dommages et interestz, que faictz et encouruz seroyent, par deffault d'entretenir et deuement accomplir, chacun en droict soy, le contenu en sesdittes prĂ©sentes et en se pourchassant et requĂ©rant soubz l'obligation de tous leurs biens et de ceulx de leurs hoirs, meubles et immeubles prĂ©sens et advenir qu'ilz en soubzmisrent et soubsmectent chacun en droict soy pour ce du tout Ă la juridiction et contraincte de laditte prĂ©- vostĂ© de Paris et de toutes autres justice et juridictions oĂč trouvez seront, et renoncĂšrent en ce faisant expressĂ©ment lesdittes partyes et lesdictz maistre Philipes, Anne et Fran- coys de Montmorancy, frĂšres, Ă toutes exceptions, dĂ©ceptions, fraudes, baratz, cautelles, cavillacions, raisons, deftences, oppositions, Ă tous droictz escript et non escript, canon et civil, us, stilles, coustumes et establissemens de villes, pays et lieux, et Ă toutes autres choses gĂ©nĂ©rallement quelconques que l'on pourroit dire, proposer ou allĂ©guer contre ces prĂ©- sentes lettres, l'effect, teneur et exĂ©cution d'icelles et au droict, disant gĂ©nĂ©ralle renonciation non valloyr; mesmement laditte damoiselle Anne de Montmorancy, de l'aucthoritĂ© des- susdittes, Ă tous droictz, statutz, privilĂšges, franchises et libertez, faictz, donnez et introduictz pour les femmes et en leur faveur. En tesmoing de ce, nous, Ă la rellation desdictz notaires, avons mis le scel de laditte prĂ©vostĂ© de Paris Ă cesdittes let- tres, qui passĂ©es furent multiples, au lieu des CarriĂšres, prĂšs le pont de Charenton lĂšz Paris, le dimanche tiers jour de may, l'an mil cinq cens dix sept. Pichon. Et au doz, est escript ce qui ensuict Ledict seigneur et conte de Laval et dame Anne de Mont- morancy, Ă prĂ©sent sa femme, de luy aucthorisĂ©e, nommez au blanc de ces prĂ©sentes, confessent avoir ratiffiĂ©, confirmĂ©, approuvĂ© et par ces prĂ©sentes ratifĂŻĂŻent, confirment, approu- vent et ont pour bien agrĂ©able tout le contenu audict blanc 4 54 LA MAISON DE LAVAL selon sa forme et teneur, et outre, confessent avoir eu et receu dudict seigneur de Montmorancy aussy nommĂ© audict blanc, les vingt mil livres tournois qu'il leur estoit tenu et avoit promis payer, au jour de leurs espousailles, ainsy que con- tenu est en icelluy blanc, dont ilz se tiennent pour bien comp- tans de luy et l'en quictent, et tous autres Ă qui en apartient quittance, promettant et obligeant, renonçant, etc. Faict et passĂ© double, l'an mil cinq cens dix sept, le samedy neufiesme jour de may. Pichon. 2206. â 1517, 5 mai. â Mariage de Guy XVI avec Anne de Montmorency Note, Paris-Jallobert, 6. 2207. â 1517, 18 mai. â Acte par lequel Guy XVI, investi de l'office de lieutenant gĂ©nĂ©ral en Bretagne, s'engage Ă s'abstenir de l'Ă©mission de certaines catĂ©gories de lettres Copie, B. N., français, 15523, 28. Nous Guy, conte de Laval, promectons au Roy, nostre souverain, que, par vertu de la lieutenanderie gĂ©nĂ©ralle et pouvoir, qu'il luy a pieu nous bailler en Bretaigne, en l'absence de Monseigneur, ne donner, ne faire expĂ©dier, aucunes lectres de rĂ©missions, pardons ne opposicions, ne du don pareillement d'aucuns offices, bĂ©nĂ©fices, confiscations ne aubeynes en quelque maniĂšre, ne pour quelque cause que ce soit. En tesmoing de ce, nous avons signĂ© ces prĂ©sentes de nostre main. Le dixiesme jour de may l'an MDXVII. 2208. â 1517, 4 juin. â EntrĂ©e solennelle Ă Laval d'Anne de Montmorency, seconde femme de Guy XVI Note de Le Doyen, Annales, p. 162. 2209. â 1517, 18 juin. â EntrĂ©e solennelle Ă VitrĂ© d'Anne de Montmorency, seconde femme de Guy XVI ImprimĂ©, Paris-Jallobert, 6. 2210. â 1517, 18 juin. â Comptes de Jean le Gouverneur, miseur de VitrĂ©, relatifs aux frais faits par la ville pour l'entrĂ©e d'Anne de Montmorency ImprimĂ© par M. de la Borderie, Collectionneur Breton, 1862. CARTULAIRE 1501-1531 55 2211. â 1517, 18 aoĂ»t, Rouen. â Mandement de François I er Ă Guy XVI et Ă divers autres personnages leur pres- crivant de rĂ©clamer des Etats de Bretagne l'octroi d'un fouage en vue des dĂ©penses de la maison du roi et du ravi- taillement des places fortes Arch. municipales de Nantes, AA., 19. 2212. â 1517, 5 dĂ©cembre. â Appel en cour de Rome de Gilles Roussel, du diocĂšse de Bayeux, contre François Le Vayer, prieur de Notre Dame de VitrĂ© A. N., AA. 55, dossier 1516. 2213. â 1517. â Jean de Laval cĂšde Ă Gilles de Malestroit les cent livres de rente que, en sa qualitĂ© d'ayant droit de Françoise de Dinan, il lui rĂ©clamait sur le lac de Grand- lieu Note, B. N.. français, 22331, 242. 2214. â 1518, 15 mai, Amboise. â Lettres patentes par lesquelles François I er confĂšre la seigneurie de Dinan Ă Pierre de Laval-Montafilant » ImprimĂ©, domMorice, III, 943. 2215. â 1518, 23 juin, Angers. â Lettres de jussion enjoignant aux gens des comptes de Bretagne d'enregistrer la donation de la terre de Dinan faite Ă Pierre de Laval, seigneur de Montafilant Arch. de la Loire-InfĂ©rieure b' I, 200. 2216. â 1518, 28 juin, Angers. â CrĂ©ation Ă MontsĂ»ra d'une chambre Ă sel dĂ©pendant du grenier de Laval Note Actes de François I er , 851. 2217. â 1518, 28 juillet, Angers. â Acte par lequel François I er fait don Ă Guy XVI de quatre mille six cent soixante livres sur les recettes de Bretagne Arch. delĂ Loire- InfĂ©rieure, B. I., 217. 2218. â 1518, 4 septembre. â Achat par Jean de Laval- ChĂąteaubriant de cinq cents livres de rente vendues autre- fois par Françoise de Dinan, sa grand mĂšre Note, B. N. français, 22331, 262. 1. Ce Pierre Ă©tait le frĂšre cadet de Jean de Laval-ChĂąteau- bnant. 56 LA MAISON DE LAVAL 2219. â 1518, 11 novembre, Comper. â Contrat de Claude de Rieux avec Catherine de Laval Note, B. N., français i 22331, 640. Contrat de mariage de Claude de Rieux, chevalier, fils aisnĂ© et hĂ©ritier du sire de Rieux, de Rochefort et d'Ancenis, comte de Harcourt, marĂ©chal de Bretagne, et de feue dame Isabeau de Bretagne, sa mĂšre, avec demoiselle Katerine de Laval, fille aisnĂ©e de Guy, comte de Laval, de Montfort et de Quintin, sire de VitrĂ© et de la Roche, lieutenant gĂ©nĂ©ral du Roy et duc, nostre sire, gouverneur de ce pays et duchĂ©, et de dame Charlotte d'Arragon, premiĂšre femme et com- pagne dudit comte. Laquelle demoiselle eut trois mille livres de rente ; et est stipulĂ© que, au cas que ladite demoiselle viendroit Ă estre hĂ©ritiĂšre principale et noble dudit comte de Laval, ou ses hoirs Ă recueillir ladite succession, au moyen de quoy le nom, cry et armes dudit comte de Laval pourrait dĂ©pĂ©rir ; pour y obvier et Ă ce que lesdits nom, cry et armes de Laval se puissent perpĂ©tuer, ledit messire Claude de Rieux, o l'authoritĂ© Ă luy donnĂ©e et o le vouloir et assentiment dudit sire des Rieux, son pĂšre, Ă iceluy cas advenu, et, par avant que il se puisse emparer ne recueillir aucune chose de ladite succession, dĂšs Ă prĂ©sent, comme pour lors et dĂšs lors comme Ă prĂ©sent iceluy messire Claude, pour luy et pour ses hoirs, descendants dudit mariage, a promis, jurĂ©, et s'oblige sur l'obligation de tout le sien prĂ©sent et Ă venir laisser le nom, cry et armes de son dit pĂšre et mĂšre et prendre et porter le propre nom et surnom de Laval c'est assavoir Guy de Laval, comte dudit lieu, et de porter les nom, cry et pleines armes de Laval et tymbres, ainsi que les porte ledit comte de Laval, sans riens y adjouter, neoster tant es banniĂšres, panoncaux, escussons, tuniques-, heaumes, sceaux que es toutes autres choses, et les porter en bataille, joustes, tournois et tous faits d'armes et au lieu et cas oĂč noble peut estre parĂ© et user de ses armes. Et au cas que lesdits mariĂ©s n'eussent qu'une fille, ils ont promis la marier Ă homme noble, qui sera tenu porter les noms, cry et armes de Laval ... sous telles et semblables peines que plus Ă plain est contenu ou contract et traittĂ© de mariage fait entre dĂ©funt messire Guy, sire de Laval et de VitrĂ©, et messire CARTULAIRE 1501-1531 57 Raoul, sire de Montfort et de la Roche, du mariage de demoiselle Anne de Laval, lorsfille, hĂ©ritiĂšre prĂ©somptive du- dit sire de Laval, d'une part, et Jehan de Montfort, fils aisnĂ© dudit sire de Montfort, d'autre part, l'an de grĂące 1404, le xxii 6 jour de janvier. FaitauchasteldeComper, le xi 6 jour de novembre l'an 1518. PrĂ©sents Jehan de Laval, sire de ChĂąteaubriant, de CandĂ©, Derval et Malestroit; Pierre de Laval, sire de Montafilant, Beaumanoir et de la Roche-Bernard ; Jean de Rohan, sire de Landal, grand maistre de ce pais ; François de Rieux, sire de ChĂąteauneuf ; de ReynĂ© deMontjean sieur de Montjean ; Jean sire de Maure ; François de Maure, sieur du Plessis Augier ; Jehan de ThĂ©hillac, sieur de ThĂ©hillac ; Jehan de Saint-Amadour, chevalier, sieur de Launay, des VallĂ©e et de la RagottiĂšre, maistre des Eaux et ForĂȘts, grand veneur de ce pais et duchĂ© ; Tenguy de Kermaouan, sieur dudit lieu ; Robert de Vaubergier, chevalier, sieur de Vaubergier; Jehan de Saint-Gilles, sieur du Prado ; Louis du Pont, sieur de Kermenguy ; nobles hommes messire Louis des DĂ©sers, sieur de BrĂ©quignĂ© ; maĂźtre Jullien le jeune, procureur gĂ©nĂ©ral de ce pais ; Jehan de Lounat, sieur de Lounat ; Xristophe de Breuil, sieur du Boais ; messire Bertram de Cote, sieur de Cote ; Pierre Bertran, sieur de la Riollaye, sĂ©nĂ©chal de VitrĂ© ; messire Pierre Audren, sieur de Maleville ; Symon Compaign, allouĂ© de la Roche, et plusieurs autres. 2220. â 1518, v. s., 22 janvier, Comper. â Contrat de mariage de Claude de Rieux et de Catherine de Laval ; Claude s'engage dans le cas oĂč il hĂ©riterait du comtĂ© de Laval Ă en prendre le blason et le nom de Guy ; Jean de Laval- ChĂąteaubriant, Pierre de Laval-Montafilant prĂ©sents Note B. N., Français, 22331, 640. 2221. â 1518. â Guy XVI fait aveu pour la terre du Per- rier Ă lui advenue par le dĂ©cĂšs de Jeanne du Perrier sa mĂšre Note, B. N., français, 22332, 503. 2222. â 1519, 31 mai, CarriĂšre. â DĂ©claration de foi et hommage faite au Roi, au nom de Guy XVI par Robert de Vauberger, pour Acquigny et CrĂšvecĆur Original, A. N., P. 264 2 , 1046. 58 LA MAISON DE LAVAL 2223.â 1519, 14 juin, Saint-Germain-en-Laye. âLettres par lesquelles François I er accorde prorogation pour six ans aux bourgeois de VitrĂ© d'une exemption de taille, impo- sitions, emprunts, aides et subsides Arch. de la Loire-InfĂ©- rieure, B, I, 215. 2224. â 1519, 23 aoĂ»t, VitrĂ©. â Naissance de RenĂ© de Laval, fils de Guy XVI et d'Anne de Montmorency, dĂ©cĂ©dĂ© dĂšs le 11 octobre 1519, aprĂšs avoir Ă©tĂ© baptisĂ© le 10 septembre Paris Jallobert, Notes sur VitrĂ©, p. 8. 2225. â 1519, 7 septembre. â Lettres par lesquelles François I er charge divers personnages â parmi lesquels le seigneur de ChĂąteaubriant â d'obtenir un fouage des Etats de Bretagne Archives de la Ville de Nantes, AA. 19. 2226. â 1519, 23 octobre. â Foi et hommage rendu Ă Pierre de Laval par Jean des Aubays, seigneur de Tallennye Note B. N., dont Housse iu, XII 1 , 5873 et 6047. 2227. â 1519, 21 novembre, Blois. â Lettres de François 1 er portant jussion aux gens de comptes de Bretagne de faire exĂ©cuter en faveur de Guy XVI le don de quatre mille six cent soixante livres Ă lui fait par le roi Arch. de la Loire- InfĂ©rieure, B, I, 216. 2228. â 1519. â Georges de Tournemine, baron de la Hunaudaye, s'engage Ă indemniser Pierre de Laval, sire de Montafilant et de Beaumanoir, des cinq cents livres qu'il s'Ă©tait engagĂ© Ă payer pour lui Note, B. N., français, 22331, 242. 2229. â 1519. â RĂšglement de procĂšs entre Gilles de Laval et sa femme Françoise de MaillĂ© avec le vicomte de Rohan au sujet de la succession de Jacques de Rohan Archi- ves de LĂ©vis Mirepoix au chĂąteau de LĂ©ran. 2230. â 1519. â Acte par lequel il est constatĂ©, comme en 1490, que Guy de Laval-LouĂ© possĂ©dait les deux tiers du moulin de Gennes et de certains biens situĂ©s auprĂšs de lui Archives de M. d'Achon. 2231 . â 1520, 7 octobre. â Lettres par lesquelles Charles ti'Alençon approuve la fondation, faite en l'Ă©glise de la CARTULAIRE 1501-1531 59 Guierche en exĂ©cution du testament de Catherine d'Alençon, comtesse de Laval Note, B. N., français, 18945, 474. 2232. â 1520, 16 octobre. â Quittance des mille livres de sa pension de l'annĂ©e 1520, dĂ©livrĂ©e par Pierre de Laval, seigneur de LouĂ©, de Bressuire et de Benais Original signĂ©, B. N., français, 28153, 146. 2233. â 1520, 16 octobre. â Quittance des six cents livres de sa pension de l'annĂ©e 1520 dĂ©livrĂ©e par François de Laval- MarcillĂ© Original signĂ©, B. N., français, 28153, 147. 2234. â 1520, 28 octobre. âQuittance de sept cents livres de sa pension d'une annĂ©e dĂ©livrĂ©e par Gilles de Laval, seigneur de la Haye en Touraine Original signĂ©. B. N., français, 28153, 149. 2235. â 1520, 28 octobre. â Quittance de quatre mille livres dĂ©livrĂ©e par Jean de Laval-ChĂąteaubriant Original signĂ©, B. N., français, 28153, 148. 2236. â 1520, 10 novembre. â Reçu des six cents livres de sa pension pour une annĂ©e dĂ©livrĂ© par Guy de Laval-Lezay B. N., français, 28153, 150. 2237. â 1520. â Guy XVI, sous la rĂ©serve que la terre de Guignen relĂšvera de LohĂ©ac, consent Ă ne pas s'opposer Ă l'Ă©rection de la terre en vicomte au profit de Jean de Saint- Amadour Note, B N., français, 22319, 153. 2238. â 1520, v. s., 30 janvier, Le Mans. â Lettres par lesquelles JĂ©rĂŽme de Hangest, au nom de Louis de Bourbon, autorise l'ouverture au culte de la partie bĂątie de l'Ă©glise de Saint- VĂ©nĂ©rand et accorde une indulgence de quarante jours Ă ceux qui feront une aumĂŽne destinĂ©e Ă la terminer De la BeauluĂšre, Le Doyen, p. 355. 2239. â 1520, v. s., 15 fĂ©vrier, la Faigne. â Naissance de Françoise, aĂźnĂ©e des enfants de RenĂ© II de Laval et de Marie de Bussu de Broussilion, Les Laval-la-Faigne, 16. 2240. â 1521, 19 mai. Laval. â Acte par lequel de nom- breux paroissiens de Saint-Melaine de Laval concĂšdent Ă Guillaume Le Clerc un banc dans l'Ă©glise Saint-VĂ©nĂ©rand, dont il Ă©tait bienfaiteur de la BeauluĂšre, Le Doyen, p. 357, 60 LA MAISON DE LAVAL 2241. â 1521, 20 juin, Saint Jean de BĂ©rĂ©. â BaptĂȘme de Pierre de la Chapelle, fils de Mathurin, seigneur de la Roche ; sont parrains Jean de Laval-ChĂąteaubriant et Pierre de Laval-Montafilant, la marraine est Françoise de la Haie [Inventaire des archives de la Loire-InfĂ©rieure, sĂ©rie E supplĂ©ment, p. 114. 2242. â 1521, 11 aoĂ»t, Autun. â Commission donnĂ©e par François I er Ă Guy XVI de demander aux Etats de Bretagne un fouage, destinĂ© Ă aider Ă l'entretien de l'armĂ©e levĂ©e contre Charles Quint Arch. municipales de Nantes, AA. 19. 2243. â 1521,24 aoĂ»t, VitrĂ©. â Ban par lequel, sur l'ordre de Guy XVI, on est avisĂ© que, par suite de l'Ă©pidĂ©mie qui rĂ©gnait, la montre gĂ©nĂ©rale qui devait se faire Ă ChĂąteaugiron le 9 septembre, n'aurait pas lieu Copie, B. N., français, 22319, 193. Oyez le ban du roi et duc nostre souverain. Sieurs, on vous faict scavoir que, combien que par cy devant les monstres gĂ©nĂ©ralles des gentilz-hommes et annobly, tenans fiefs nobles, francs archers et esleuz et aultres subgets aux armes de ce pays et duchĂ© de Bretagne ayent Ă©tĂ© assignĂ©s Ă tenir le neuffiesme jour de septembre prochain venant en la ville de Chasteaugiron, ce nĂ©antmoins a estĂ© advisĂ© par messire le grant gouverneur de cest pays, monsieur le comte de Laval, pour le danger de la mortalitĂ© qui rĂšgne Ă prĂ©sent, en diverses contrĂ©es et que l'assemblĂ©e et amas de gens que l'on pourrait assembler pourroit estre plus grande cause de ladite mortalitĂ©, que l'assignation desdites monstres ne sera ledit neuffiesme jour de septembre prochain tenue, et ne tiendront icelles monstres. Faisons toutefois scavoir auxdits gentilz-hommes et anno- bliz tenans fiefs nobles, francs archers et esleuz et aultres subgets aux armes qn'ilz se tiennent pretz Ă le'urs maisons montĂ©s et armĂ©s pour marcher et aller au service du roy la part et lorsqu'il leur sera ordonnĂ©.... Ladite ordonnance adressĂ©e Ă messieurs les seneschal, allouĂ©, lieutenant et procureur de VitrĂ© faite par commande- ment de messire le grant gouverneur comte de Laval, le 24 aoĂ»t MDXXI. Jean PĂšlerin. CARTULAIRE 1501-1531 61 2244. â 1521, 8 novembre. â DĂ©cĂšs de Pierre de Laval- Montafilant Note B. N., français, 22331, 233. Anno Domini MDXXI, VIII novembris, obiit dominus de Montafilant, nomine Petro de Lavalle, qui requiescit apud Quintin. 2245. â 1521, 16 novembre, Giraucourt. â Lettre par laquelle Louis II de la TrĂ©moĂŻlle annonce Ă Guy XVI l'arrivĂ©e de François, son petit-fils, dĂ©sireux d'avoir une entrevue avec Anne de Laval ImprimĂ© par M, le duc de la TrĂ©moĂŻlle dans Inventaire de François de la TrĂ©moĂŻlle, p. 186. Monsieur mon cousin, je me recommande Ă vous tout comme je puys en ensuyvant le propox que vous et moy avons eu ensemble, j'envoye le prince de Talmond vers vous pour veoir si ma cousine, vostre fille, le trouvera homme pour lui laire service. Briente vous dira l'envye que j'ay que les choses tirent en avant, si vous estes raisonnable. Je ne vouldrays que le je vous eusse envoyĂ© plus tost, car il s'est trouvĂ© Ă l'ung des plus beaux voyages qui fust faict long temps a, et si s'est trouvĂ© bien homme de payne, et vous asseure qu'il s'a aussi bien portĂ© que homme de la bande. Escript Ă Gyraucourt le xvi novembre. 2246. â 1521, 30 novembre, Dijon. â Lettre adressĂ©e par Louis II de la TrĂ©moĂŻlle Ă Guy XVI et relative au projet de mariage dont il Ă©tait question entre François delĂ TrĂ©moĂŻlle et Anne de Laval ImprimĂ© par M. le duc de la TrĂ©moĂŻlle dans Inventaire de François de la TrĂ©moĂŻlle, p. 187. Monsieur mon cousin, je me recommande Ă vous tant comme je puys. En ensuyvant les propoux que nous avons eu ensemble, j'ay envoyĂ© le filz de chex nous veoir madamoiselle vostre fille, pour veoir comment ils se trouveront l'un et l'autre ; et ay donnĂ© charge Ă Chazerac, Briente et autres, que y ay envoyĂ©, vous parler de cest affaire plus au long. Je vous prie que les croyez et que par eulx m'en mendez la vollomtĂ© que vous aurez en cest affaire . Monsieur mon cousin, si vouliez autre chose, escripvez le °^ LA MAISON DE LAVAL moy et je le feray de bon eueur, Ă l'ayde de Nostre Seigneur, lequel je prye vous donner tout ce que dĂ©sirez. Escript Ă Dijon, le derrenier jour de novembre. 2247. â 1521, 2 dĂ©cembre, CompiĂšgne. â Lettres de François I r portant don Ă Jean de Laval-ChĂąteaubriant de la seigneurie de Dinan Arch. de la Loire-InfĂ©rieure B I 239. ' ' 2248. â 1521, 20 dĂ©cembre, Laval. â Lettre Ă©crite par Guy XVI Ă Louis II de la TrĂ©moĂŻlle, au sujet de l'alliance projetĂ©e entre Anne de Laval et François de la TrĂ©moĂŻlle Archives de la TrĂ©moĂŻlle. A Monsieur mon cousin Monsieur de la TrĂ©moĂŻlle. Monsieur mon cousin, je me recommande Ă vous tant de bon cueur comme je puys. J'ay veu monsieur le prince, vostre filz, lequel ay trouvĂ© si gaillard, et de tant bonne sorte, que avecques le bon voulloir que congnois que avez Ă moy et l'honneur que m'avez fait de l'envoyer icy, dont de bon cueur vous mercye, me suys mys en tel devoir et raison de tout ce qu'il m'est possible honeste- ment faire, que suys certain congnoestrez de ma part que dĂ©sire vostre allyance, ainsi que serez adverty par messieurs de Chazerac, de Briante et autres, qu'avez envoyez en la compaignye de mon dit sieur le prince, lesquelz vous diront bien au long le demourant. En pryant Dieu, monsieur mon cousin, vous donner tout ce que plus dĂ©sirez. Escript Ă Laval, ce xx e jour de dĂ©cembre. Le tout vostre bon cousin. Guy DE LAVAL. 2249. â 1521, 20 dĂ©cembre, ChĂąteau-Gontiar. â Lettre dans laquelle François de la TrĂ©moĂŻlle fait connaĂźtre Ă son grand pĂšre, Louis II, son impression sur Anne de Laval, sa fiancĂ©e ImprimĂ© par M. le duc de la TrĂ©moĂŻlle dans Char- trier de Thouars, p 58. Monseigneur, plaise vous sçavoir que, an ansuivant se que CARTULAIRE 1501-1531 63 me dytes au partir que fis d'avecques vous et ausy que m'avez escript par Chaserat, je arrivay Ă Laval mady dernier, lĂ oĂč je trouvĂ© monsieur et madame de Laval et madamoiselle leur fille ; et vous promez, monseigneur, qui m'ont faict de l'onneur et du bon traitement se que jamais j'ans saroint faire, et vous assure, monseigneur, qu'ils ont merveilleuse- ment grant anvye que je soye leur fiz. Et quant au regard de madamoiselle leur fille, aprĂšs que j'uz parlĂ© Ă monsieur et Ă madame de Laval, me miz Ă parler Ă elle et fuz avĂšques elle deux ou troys heures ; et ansamble i ay estĂ© troys jours. Je l'ay veue en toutes sortes que j'ay peu voir, et ne fasoit on point de difficultĂ© de la me montrer. Et quant au personnage, elle est assez belle et a fort bonne grĂące, sa manyĂšre douce et fort arrĂȘtĂ©e, fort beau corps sans avoir tare d'estre boussue, et austant hobĂ©issante Ă monsieur son pĂšre et Ă madame sa belle mĂšre que famĂ© que je acontay jamais. Et premier que luy dire ma voulontĂ©, je regardĂ© Ă tout sesi, mais je n'ay trouvĂ© chouse an elle qui ne soit fort honneste ; sa parolle moyns esgarĂ©e que famĂ© que je viz onques. J'ay bien regardĂ© partout et la trouve taryblement de ma fanstesye. Quant je viz qu'elle s'y adonnoit, je luy diz que ne luy sçavois sĂ©ler se qui estoit an ma fanstesye s'est que je l'ay- moist bien fort et que ne sçavoys famĂ© an Francez avĂšques qui je vĂ©quise plus voulontyers que avĂšques elle. Je luy pryĂ© qu'elle me dit la syĂšne, et qu'elle me regardast bien et qu'elle ne dist point chouse de quoy elle se vousist repantir. Elle mefist rĂ©ponse qu'elle feroit se qu'il plairoit Ă monsieur son pĂšre. Je luy rĂ©pliquĂ© sela et luy diz que se n'estoit point parlĂ©, et quant Ă se quaz lĂ le pĂšre n'an doit avoir la connoy- sance . Je luy pryĂ© que Ă pĂšre ne Ă mĂšre elle ne fut point sy hobĂ©issante qu'elle ne m'an dist sa vaulontĂ©, et que de moy je n'ay heu conseil que Ă ma fantasye. Elle me rĂ©pondit qu'elle se santiroit bien heureuse d'estre an ma companye, puis que luy fasoys sest honneur que de la prandre, et qu'elle mestera sy bonne paine d'obĂ©ir Ă sceluy qu'il l'aura qui devera estre contant d'elle. AprĂšs je luy dys que nous fereyons grant chĂšre amsamble ; et vous jure ma foy, monseigneur, que je n'an ay creu que 64 LA MAISON DE LAVAL ma fantesye, qui s'adonne sy fort Ă elle qui n'est possible de plus, car s'est unne ausy honneste famĂ© et unne des plus parfaites que je viz jamais ; je vous suplie, monseigneur, que je l'aye, car je l'aime fort, et croy que sy nous sommes bien toust amsamble que nous vous ferons se[que] toutjours avez tant dĂ©syrĂ©, car elle est de ma fantasye et je suis de la syene. Et croy que sy vous l'avyez veue que vous deligantryez la chouse, car Ă mon avis, mais que la voyez, la trouverez ainsin que je vous dys ; et si je ne pançoys vivre avĂšqueselle, je vous asure, monseigneur, que je ne vous an manderoys pas se que je vous an mande. Je vous suplie, monseigneur, ancores ung coup qui ne tiene Ă rien qui ne se face, car je vous asure que se qu'elle a dit n'a pas estĂ© par son pĂšre, car elle l'a dit de nayvetĂ© ; et se que j'ay dit, on ne me l'a point faict dyre. Et quant Ă l'onnestetĂ© du maistre et de la maistraise, il an ont se que jans an peuve avoir ; ausy tant des serviteurs que des famĂ©s, car s'est la maison la mieux railĂ©e que je viz jamais, qui i vont de mileure voulante Ă seste afaire. Si je voulays louer tout insin que la raison le vieulx, je ne sĂ©seroys jamais. J'ay donnĂ© charge Ă Chaserat et Ă Bryante de vous dyre le demourant. Je vous suplye, monseigneur, qu'il vous plaise les croyre, vous supliant que je demeure an vostre bonne grĂące Ă laquelle, tant et sy trĂšs humblement que faire puis, Ă vostre bonne grĂące me recommande, pryant Noustre Seigneur, monseigneur, qu'il vous doint trĂšs bonne vie et longue. Escript Ă ChĂąteau-Gontyer, se xx e jour de dĂ©sambre. Vostre trĂšs humble et trĂšs hobĂ©issant filz . F. DE LA TrĂMOILLE. 2250. â 1521, v. s., 9 janvier. â Lettres par lesquelles JĂ©rĂŽme de Hangest, au nom du cardinal Louis de Bourbon, confĂšre Ă l'Ă©vĂȘque de Chitri le droit de procĂ©der Ă la con- sĂ©cration de l'Ă©glise Saint- VĂ©nĂ©rand De la BeauluĂšre, Le Doyen, p. 359. 2251. â 1521, v. s., 20janvier, Laval. â ProcĂšs-verbal de CARTULAIRE 1501-1531 65 la consĂ©cration par l'Ă©vĂȘque de Chitri de l'Ă©glise Saint- VĂ©nĂ©rand de la BeauluĂšre, Le Doyen, p. 360. 2252. â 1521, v. s., 23 fĂ©vrier, VitrĂ©. â Contrat d'Anne de Laval, fille de Guy XVI, avec François de la TrĂ©moĂŻlle ; Anne reçoit en dot une rente annuelle et perpĂ©tuelle de trois mille livres assignĂ©e sur la Roche d'IrĂ© et Kergorlay Copie partielle Dom Fonteneau, XXVI, B. N., Latin, 18401, 623. 2253. â 1522, n. s., 25 fĂ©vrier, VitrĂ©. â Lettre adressĂ©e par Anne de Laval Ă Louis II de la TrĂ©moĂŻlle et relative Ă son mariage avec François de la TrĂ©moĂŻlle ImprimĂ©e par M. le duc de la TrĂ©moĂŻlle dans Chartrier de Thouars, p. 68. Monseigneur, tant et si trĂšs humblement comme je puys Ă vostre bonne grĂące me recommande. Monseigneur, monsieur le prince est cĂ©ans lequel, par vos- tre commandement, a parachevĂ© ce qu'estoit acordĂ© et comancĂ© entre vous et monsieur mon pĂšre ; et, Ă ce que j'ay peu entendre de luy, est dĂ©libĂ©rĂ© bien tost partir de cĂ©ans et m'emmenez avecques luy la part oĂč il vous a pieu luy com- mander. Et la chose de ce monde qui autant me reconforte de perdre la prĂ©sance de monsieur mon pĂšre et de madame ma belle mĂšre, c'est de pencer avoir recouvert ung si bon pĂšre comme vous ; vous advigant, monseigneur, qu'il vous plaise avoir ceste estime de moy jusques Ă ce que ayez congneu de contraire, qui ne sera jamais, s'il plaist Ă Dieu me saulver l'entendement. En pryant Dieu, monseigneur, qui vous doyent trĂšs bonne vie et longue. Vostre trĂšs humble et trĂšs obĂ©issante fille. Anne de Laval. 2254. â 1522, n. s., 25 fĂ©vrier, VitrĂ©. â Lettre du prince de Talmond Ă Louis II de la TrĂ©moĂŻlle, son grand pĂšre, au sujet de son mariage avec Anne de Laval ImprimĂ©, Marche- gay, Lettres du xvi e siĂšcle, n° 50. A monseigneur, Monseigneur, plaise vous sçavoir que je suis arrivĂ© en ce bb LA MAISON DE LAVAL lieu de VitrĂ©, oĂč j'ay trouvĂ© monsieur et madame de Laval ', lesquels m'ont faict trĂšs bonne chĂšre. Et fuz ier espousĂ©. Et pour commancement je m'y treuve trĂšs bien et croy, monseigneur, mais que ayez veu voustre fille, que la trouverez sy hobĂ©issante an ce qui vous plaira luy commander que vous an contenterez car toute ma vie je antandray que ansinelle le face. Monsieur de Rieux a s'est trouvĂ© issy dont j'ay estĂ© bien [aise], et se prĂ©sante fort de vous faire plaisir et service. Je tins ier sur les fons le filz de madame de Laval 3 ; je vou- drays bien que d'isy Ă ung an que voustre fille an hut aus- tant, et ne tyendra point Ă moy. Monseigneur, je m'an partiray demain et seray le mardy gras Ă Thouars *, et i vous plaira me mander se qui vous plaist que je face sus ce que vous escrivez Chaserat, Renaut et Briante. Mouton vous dira le demourant, qui vous porte le double du contract. S'il est bruit de gerre, mon intancyon n'est point de de- mourerĂ© au logiz. Vous leconnĂšterez par effet, vous suplyant, monseigneur, que je demeure an voustre bonne grĂące Ă la- quelle tant et sy trĂšs humblement que faire puis, Ă voustre bonne grĂące me recommande, pryant Noustre Seigneur, mon- seigneur, qui vous doint trĂšs bonne vie et longue. Escript de VitrĂ©, se XXV e jour de fĂ©vrier. Vostre trĂšs humble et trĂšs hobĂ©issant filz. F. DE LA TrĂMOILLE. Je vous suplye, monseigneur, escripre Ă mademoiselle de Puiboulart B , mais qu'elle soit relevĂ©e de son anfant, qu'elle vienne deverz vostre fille, car il me semble qui n'y a famĂ© au monde qui soit plus sĂ©ante que sĂšte lĂ . 2255. â 1521, v. s., 25 fĂ©vrier, VitrĂ©. â Lettre Ă©crite par François d'Availlolles Ă Louis II de la TrĂ©moĂŻlle, au sujet du 1. Anne de Montmorency, seconde femme de Guy XVI. 2. Le marĂ©chal de Rieux,Ă©poux, depuis le 10 novembre 1518, de Catherine de Laval. 3. Il s'agit ici de Claude, qui, nĂ© le 14 fĂ©vrier 1522, succĂ©da Ă son pĂšre sous le nom de Guy XVII. 4. En partant de VitrĂ© le 26 fĂ©vrier, ils ne devaient arriver Ă Thouars que le 4 mars. 5. Marguerite de la Tousche dame de Puybouillart. CARTULAIRE 1501-1531 I Ă 67 mariage de François avec Anne de Laval Arch. de la TrĂ©- moĂŻlle . 2256. â 1522, n. s., 27 fĂ©vrier, VitrĂ©. â Lettre adressĂ©e par Guy XVI Ă Louis de la TrĂ©moĂŻlle relative au mariage du prince de Talmond avec Anne de Laval et au dĂ©part des jeunes Ă©poux ImprimĂ©, Marchegay, Lettres du xvi e siĂšcle, n°36. A monsieur mon cousin, monsieur de la TrĂ©moĂŻlle. Monsieur mon cousin, je me recommande Ă vous tant de bon cueur comme je puis. En ensuyvant ce que par cy davant m'avez dit et escript touchant le mariaige de noz enfans, j'ay faict et acordĂ© tout ce que messieurs vos procureurs ontvoullu; et, pour monstrer le dĂ©sir que avoye de vostre aliance, ay fait plus que ne devoye pour la raison. Toutesfoiz, congnoessant le bon voulloir de monsieur le prince, et l'amytiĂ© d'entre vous et moy, renforcĂ©e pour l'alliance que avons faicte, je n'ai regrect en chose que j'aye acordĂ©e, ains en suis trĂšs joyeux. Au surplus, monsieur mon cousin, monsieur le prince en a voullu mener sa femme, et n'ont pas estĂ© avecques moi si lon- guement que eusse bien voullu ; car je vous asseure que leur compaignye ne m'ennuyoit pas, pour la bonne chĂšre que leur voiaye faire ensemble, car l'un ne l'autre ne portoyent visaige de repentiz. Il m'a dit pour excuse que luy avyez commandĂ© se retirer incontinent Ă Touars. Et de ma part ne vouldroye conseiller Ă l'un ne Ă l'autre faire autre chose que vostre com- mandement. Ce gentilhomme, prĂ©sent porteur, qui a veu le tout, vous dira le demourant ; par quoy feray la fin en pryant Dieu, monsieur mon cousin, vous donner ce que dĂ©sirez. Escript Ă VitrĂ©, ce XXVII e jour de febvrier. Le tout vostre bon cousin. Guy de Laval. 2257. â 1521, v. s., 2 mars, Saint-Germain-en-Laye. â Lettres de jussion prescrivant aux gens des comptes de Bre- tagne de mettre Ă exĂ©cution la donation de Dinan, faite en faveur de Jean de Laval-ChĂąteaubriant Archiv. de la Loire- InfĂ©rieure, B. I, 240]. 68 LA MAISON DE LAVAL 2258. â 1522, 14 avril, CompiĂšgne. â Lettre adressĂ©e par Guy XVI Ă Louis II de la TrĂ©moĂŻlle ; il s'y fĂ©licite de la gros- sesse d'Anne de Laval ImprimĂ©e par M. le duc de la TrĂ©- moĂŻlle dans Inventaire de François de la TrĂ©moĂŻlle, p. 188. A monsieur mon cousin, monsieur de la TrĂ©moĂŻlle. Monsieur mon cousin, je me recommande Ă vous tout de bon cueur comme je puis. J'ay receu les lettres que m'avez escriptes de Dijon, et m'a estĂ© grand plaisyr de scavoir de vos nouvelles et qu'estes bien aise de l'assemblĂ©e denozdeux enfants, et encores serez Ă mon advis plus, mais que saichez les nouvelles qu'ilz m'ont escriptes, c'est que nostre fille est grosse. Je vous asseure qu'il ne tiendra point Ă moy que !a bonne amour qui a tousjours estĂ© entre noz deux maisons ne aug- mente de moytiĂ©. Et vous advisant que en tout ce que me vouldrez emploiez, vous me trouverez aussi prest et bien Ă vostre commandement que parent ne amy que vous aiez en ce monde. Monsieur mon cousin, vous m'escryvez que m'envoyez la ratification de ce que avez agrĂ©able que voz gens ont fait ; touttefoiz je ne l'aye point receue. Monsieur mon cousin, si vouliez autre cliose escryve? le moy, et de bon cueur le feray, aidant Nostre Seigneur, que je prie vous donner ce que dĂ©sirez. Escript Ă CompiĂšgne le XIIIP jour d'avril. Le tout vostre cousin. Guy de Laval. 2259. â 1522, 1 er juillet. â Quittance des six cents livres de sa pension, pour 1522, dĂ©livrĂ©e par Guy de Laval-Lezay Original signĂ©. B. N., français, 28153, 151. 2260. â 1522, 11 juillet, Laval. â Lettre Ă©crite par Charles de Coesmes Ă Guy XVI ImprimĂ©, Victor Alouis, Les Coesmes, 2 e partie, p. 100. Monseigneur, plaise vous savoir que je suys arivĂ© en vostre ville de Laval avec mes bandes ', qui sont Ă une lieue 1. Les francs archers, dont Charles de Coesmes avait Ă©tĂ© nommĂ© capitaine BourdignĂ©, II, 329, se firent remarquer par leur indiscipline Voir Le Doyen, Ă la page 187 de ses Annales. CAIiTULAIRE 1501-1531 69 ou deux Ă l'entour, et m'en partyrĂ© dimanche ou lundi pour tirer le chemin de Lamballe. ainsi qu'il vous a plu me l'es- cripre. Et pensoys bien trouver en ceste ville payement pour mes gens, car le Roy m'avoit rescript qu'il avoit dĂ©peschĂ© ung trĂ©sorier pour les poyer et faire ce qu'il vous plairoit luy commander... Vous mectez taux aux vivres pour les faire poyer, ce qui n'est possible, veu que savez bien qu'ilz n'ont pas ung double ; et croy que toutes mes bandes ne sauroient fournir trente escuz ; et ad ce que l'on dit de ce pays de Bretaigne, il fauldra pour vivre que ayons toujours le harnoys sur le dos, et croy que avent que nous soyons devers vous, il nous fauldra avoir quelque bataille, mais s'il en vient mal je m'en descharge.... De vostre ville de Laval, ce xi e jour de juillet. Vostre humble et obĂ©issant serviteur. 2261. â 1522, 14 juillet, Saint-Mathieu. â Lettre par laquelle Guy XVI demande aux membres de la confrairie de Saint-Yves de prendre pour aumĂŽnier, Ă la place de feu Olivier Turmel, Guillaume Lemarchand, l'un de ses aumĂŽniers ImprimĂ©, Paris Jallobert, 521. 2262. â 1522, 26 juillet. â Reçu des mille livres de sa pension, pour l'annĂ©e 1522. dĂ©livrĂ© par Gilles de Laval- MaillĂ© Original signĂ©, B. N., français, 28153, 142. 2263. â 1522, 25 aoĂ»t, Paris. â Commission Ă Guy XVI de requĂ©rir des Etats de Bretagne un fouage destinĂ© Ă couvrir leÂŁ dĂ©penses de guerre Archives municipales de Nantes, AA. 19. 2264. â Vers 1522, le 26 aoĂ»t, le Havre de Blavet. â Lettre adressĂ©e par Guy XVI au roi François I er B. N., français, 2971, fol. 134. Au roy mon souverain seigneur. Sire, tant et si trĂšs humblement comme je puys Ă vostre bonne grĂące me recommande. Sire, en ensuyvant ce qu'il vous a pieu m'escripre, et aussi 5 70 LA MAISON DE LAVAL ce que depuys m'a fait sçavoir monsieur l'admirai, n'ay fait aucun sĂ©jour que ne soye venu le long de la coste de la mer de Bretaigne pour sçavoir quelz navires il y avoit, oĂč j'en ay trouvĂ© en nombre compĂ©tant, et en ay fait ariver douze, sçavoir six bons navires et six barques, et espoyre qu'il se y en trouvera encores d'autres Ă les acompaigner, lesquelz feront voille dedans huyt jours, pour se aller joindre avec- ques Lartigue et avecques l'armĂ©s que a fait faire mondit sieur l'admirai en Guyenne, pour vous faire service, oĂč il vous plaira ordonner. Sire, j'ay mis peine de sçavoir quelz gens vous povez avoir en ce pays pour vous servir si affaire survient ; mais n'y ay trouvĂ© que les gentilzhommes du payz qui sont trĂšs mal garniz de chevaulx et de long temps ne pĂšvent estre prestz. Au regard des francs archiers, il se y trouvera le nombre acoustumĂ©, mais vous scavez quelz gens se sont. Sire, j'ay eu tout Ă ceste heure lettres du capitaine Fayet, lieutenant de monsieur l'admirai Ă Brest, qui m'a fait sçavoir qu'il a parlĂ© Ă gens seurs, qui luy ont dit pour vĂ©ritĂ© que au port de Caufer ou Ă l'environ, il y a bien trante voilles en guerre de Strelins et Flamans dĂ©libĂ©rez de venir en la coste de deçà . Aussi m'a adverty du petit nombre de municions qu'il a en sa place. A l'occasion de quoy, j'ay incontinent dĂ©peschĂ© ung gentilhomme pour aller vers luy sçavoir de tout Ă la vĂ©ritĂ© pour y pourveoir Ă mon povair, et aussi pour vous en advertir si le cas le requiert Et y fusse allĂ© moy mesmes ne fust la diligence qu'il fault que je face icy pour faire partir vostre armĂ©e. Monsieur de Rieux est icy avecques moy qui s'employe Ă ce qu'il peult Ă vous faire service, et est dĂ©libĂ©rĂ© n'y espargner le corps ny les biens. Sire, j'ay tousjours eu avecques moy jusques cy messieurs les gĂ©nĂ©ral et trĂ©sorier, lesquelz, combien que les deniers soyent cours, ainsi qu'ilz m'ont dit, n'ay trouvĂ© estonnez jusques Ă ceste heure, et eulx et moy avons employĂ© nostre crĂ©dit en maniĂšre que riens n'est demourĂ© de voz affaires. Sire, pource qu'il y a peu de gens en voz places de Brest, Sainct Malo et autres de la frontiĂšre de ce pays, il vous plaira, si affaire survient en maniĂšre qu'il soit besoignd'y en mectre, CARTULAIRE 1501-4531 71 me faire sçavoir quelz gens il vous plaira que l'on mecte dedans. Sire, vous plaise me mander et commander voz bons plaisirs pour y obĂ©ir Ă mon povair, aidant le CrĂ©ateur, que je pry, sire, vous donner trĂšs bonne vie et longue. Escryt au Havre de Blahouet, le xxvi" jour d'aougst. Vostre trĂšs humble et obĂ©yssant suget et serviteur. Guy de Laval. 2265. â 1522, 5 novembre, Saint-Malo de Beignon. â Lettre adressĂ©e par Guy XVI au trĂ©sorier Robertet B. N., français, 2933, 96. A Monsieur le trĂ©sorier Robertet. Monsieur le trĂ©sorier, je me recommande Ă vous tant de bon cueur comme je puys. J'escripz au roy touchant un mandement qu'il a envoyĂ© en ce pays, adressant aux capitaines Fayet et Lartigue par un nommĂ© Gabriel Donaleu. J'envoye ce porteur Ă la court pour remonstrer le prĂ©judice et dommaige que ledit mandement porteroit audit seigneur et Ă son pays, s'il avoit lieu. Monsieur le trĂ©sorier, vous sçavez comme par cy davant ledit seigneur a ordonnĂ© qu'il ne fust dĂ©peschĂ© mandemens, tant pour la police dudit pays que pour le fait de la guerre, qui ne s'adressassent Ă moy et, pource que je vous tiens l'un de mes bons amys, j'ay donnĂ© charge Ă cedit porteur de s'en adresser Ă vous et vous donner bien au long le faict Ă entendre ad ce que vous en advertissez ledit seigneur et autres que voyiez estre bon pour le profdt dudit seigneur, et que mon auctoritĂ© en la charge qu'il luy a pieu me donner ne soit diminuĂ©e ' en vous, pryant, monsieur le trĂ©sorier, vous y employez pour moy et croyre cedit porteur de ce qu'il vous dira de ma part; et le plaisir que me ferez, je le recong- noestrĂ© vers vous de bon cueur si en aucune chose me vouliez employer. Priant Dieu, monsieur le trĂ©sorier, vous donnez ce que dĂ©sirez. 1 Allusion Ă son office de lieutenant en Bretagne. 72 LA MAISON DE LAVAL Escript de SainctMalo de Beignon, ce v e jour de novembre. Estant vostre bon amy. Guy de Laval. 2266. â 1522, 15 novembre, Tours. â Lettres par les- quelles l'archevĂȘque de Tours investit Guillaume Lemarchand del'aumĂŽneriede Saint- Yves de VitrĂ© imprimĂ©, Paris- Jallo- bert, 521. 2267. â 1522, 8 dĂ©cembre, Blois. â Lettre par laquelle RenĂ©e de France fait compliment de sa grossesse Ă Anne de Laval ImprimĂ©, Lettres du XVI e siĂšcle, n° 37. A ma cousine la princesse de Tallemont. Ma cousine, j'Ă© entendu que vous ĂȘtes grose, dont je suys fort ayse, et groyĂ©s que je vous voyroys voullantiers. Afin que vous connessoys que j'Ă© touzjours bonne souvenance de vous vous hĂ© bien vouleu escripre par vostre famme de chambre, et aucy pour vous donner l'oquasion de me fayre savoyr de vos nouvelles. Et Ă Dieu, ma cousine, que je prie qu'il vous het en sa garde. De Bloys se vm descambre. Vostre bonne cousine. RenĂ©e de France. 2268. â 1522-1526. â Etats de Bretagne tenus Ă Vannes et Ă Rennes par Guy XVI Manuscrit du XVI e siĂšcle, B. N., français, nouv. acquis., 456. 2269. â 1522, v. s., 16 mars, Rennes. â RĂ©ponse du clergĂ© de Bretagne Ă la demande Ă lui adressĂ©e, au nom de François I er , par Guy XVI, lieutenant du roi, d'un subside de dix mille cinq cent soixante cinq livres tournois Copie, B. N.,Dupuy, DXLIII, 31. 2270. â 1522, v. s., 17 mars, la Puisaye. â Naissance et baptĂȘme de Louis de Laval, fils de RenĂ© II de Laval-la- Faigne et de Marie db Bussu De Broussillon, Les haval-la- Faigne, 17. 2271. â 1522, 17 mai, Guingamp. â Lettre de Guy XVI a Anne de Montmorency, son beau frĂšre B. N., français, 6639,325. CARTULAIRE 1501-1531 A mon frĂšre, Monsieur le marĂ©chal de Montmorency 73 Mon frĂšre, j'envoie ce porteur tout exprĂšs devers vous pour vous advertir bien au long des affaires de ce pays, qui vous dyra les alarmes que nous avons chacun jour tant des An- glois 2 que des Espagnols, qui sont Ă leur adventure Ă la mer en grosse puissance et s'efforcent descendre en plusieurs lieux de la coste de pays, pour y piller et bruller et incontinent se rembarquer, aprĂšs qu'ilz ont fait du pis qu'ilz pourront. OĂč est trop diffieille de bien y rĂ©sister sans artillerye. pour ce qu'il convient souvent faire long chemin pour aller de l'un lieu Ă l'aultre, comme on le veoit, et qu'il ne m'a estĂ© dĂ©livrĂ© Ă Tours l'artillerye et municions qu'il avoit pieu au Roy conrnander Ă monsieur de Samblançay m'envoyer ; mais seullement ay eus vingt cinq milliers de poudre, qui n'est pas encore assez pour les havres de la coste, sans ce qu'il fault pour les places et pour mener avec moy oĂč besoing y a. Monsieur le Maistre de l'artillerye et le dit sieur de Samblançay m'ont bien envoyĂ© un estĂąt d'en prendre dix piĂšces Ă Nantes, que je n'ay pu recouvrer, pour ce qu'elles n'estoient remontĂ©es ny en ordre pour mener par pays et comme le sieur d'Arpanty, lieutenant de Monsieur l'admirai, a fait difficultĂ© de les bail- ler sans ordonnance et mandement exprĂšs du Roy et que par ce moyen sa place demoureroit despourvue mais quant encore les auroye ne suffiroient pour les havres. Mon frĂšre, il ne m'a aussi estĂ© envoyĂ© aucun commis du trĂ©sorier de l'extraordinaire, comme il m'avoit estĂ© ordonnĂ© pour les mises nĂ©cessaires qu'il convient poyer pour les affaires par de ça et n'y a personne et quans j'en ay demandĂ© Ă monsieur le gĂ©nĂ©ral Cenpays tant pour cela pour les gens des domaines y lever et ceux de mortepayes, ilm'arespondu qu'il n'avoit estĂąt ny ordonnance Ă celle fin ; pourquoy vous prye, mon frĂšre, donner ordre qu'il y soit pourveu. Mon frĂšre, pour la ^ause que ledit porteur vous advertira et sollicitera plus amplement de tout, je ne vous veulx faire pour ceste heure plus longue lettre, vous priant l'ouĂŻr et 1. Ce titre de marĂ©chal donnĂ© Ă Anne de Montmorency oblige donner Ă cette lettre une date postĂ©rieure au 6 aoĂ»t 1522. 2. La paix avec l'Angleterre est du 30 aoĂ»t 1525. 74 LA MAISON DE LAVAL croyre, et avoir tousjours les dictes affaires pour recomman- dĂ©es. Qui sera la fin, en priant Dieu vous donner ce que dĂ©sirez. De Guingamp, ce XVII jour de may. Votre bon et loyal frĂšre et amy. Guy de Laval. 2272. â 1523, 24 juin, Guingamp. â Lettre Ă©crite par Guy XVI au Roi B. N., Dupuy, CCLXI, 192. Au Roy mon souverain seigneur. Sire, j'ay prĂ©sentement reçue par la poste la lettre qu'il vous a pieu m'escryre touchant le fait des VĂ©nissiens et ceulx du Croisic devers lesquels je n'ay envoyĂ©, ainsi qu'il vous plaisoit mander, pour ce que le chevauscheur d"escuyrie et le vĂ©nissien que m'escryviez ne sont encores aryvĂ©s, et que par avant ce jour lesdits du Croisic avoient envoyĂ© et en estoit allĂ© partie d'eulx devers vous pour ceste affaire ; et croy que de ceste heure et depuis vos dites lettres escriptes ils y soient pour vous donner Ă entendre comme il en va du tout, et le droict qu'ils y prĂ©tendent. Sire, j'estime que de prĂ©sent avez plus Ă plain entendu etfaict veoir leur justification et droict qu'ils prĂ©tendent de chascun costĂ© es dits biens, oĂč je feray ce qu'il vous plaira me commander. Sire, j'ay aussi Ă ceste heureestĂ© adverty, tant par lettre du capitaine de Saint -Malo que d'autres comme troys prinsonniers de ce pays, estymĂ©s gens de bien et croiables, ont dit qu'ils ont trouvĂ© moyen d'eschaper de leur dite prin- son en Angleterre et qu'ils en partirent vendredi derenier, oĂč le lundi paravant ils avoient veu aryver soixante gros navires d'Espaigne chargĂ©es de gens de guerre Espagnols et autre nombre de Flandres lesquels, avecques les navires Anglois, pouvoient bien estre trois cens voilles et s'assem- bloient de toute pars pour s'embarquer les maryniers du dit pays et disoit on communĂ©ment qu'ils avoient entreprise descendre en deux lieux de vos pays sans dĂ©clarer oĂč. Sire, je vous suplie faire pourveoir aux choses requises pour ce pays, dont j'en escris plus au long Ă monsieur l'admi- rai pour vous en advertir. Avecques me commander vos CARTULAIRE 1501-1531 75 plaisirs pour y obĂ©ir et les acomplir aidant le CrĂ©ateur, que je prye, Sire, vous donner trĂšs bonne vie et longue. Escriptde Guingamp le xim e jour de juin. Vostre trĂšs humble et trĂšs obĂ©issant suget et serviteur. Guy de Laval. 2273. â 1523, 2 juillet, Quintin. â Lettres par lesquelles Guy XVI donne Ă Guillaume de la Motte mission de recevoir, le 10 juillet, Ă Paimpol, les montres de l'Ă©vĂȘchĂ© de Saint- Brieuc ImprimĂ©, Dom Morice, III, 959. 2274. â 1523, 7 septembre. â ArrĂȘt par lequel le Parle- ment interdit Ă Gilles de Laval et Ă Françoise de MaillĂ©, son Ă©pouse, la levĂ©e d'un pĂ©age dans la terre de SavonniĂšre Note, Mantellier, Marchands frĂ©quentant la Loire, III, 337. 2275. â 1523 â Note des bijoux fournis Ă Anne de Laval par Pierre Durand, orfĂšvre Ă Tours ImprimĂ© par M. le duc de la TrĂ©moĂŻlle dans Inventaire de François de la TrĂ©moĂŻlle p. 95. 2276. â 1523, v. s., 2 mars, Nanteuil. â Naissance et baptĂȘme de Hugues de Laval, fils de RenĂ© II de Laval-la- Faigne et de Marie de Bussu de Broussillon, Les-Laval-la Faigne, 17. 2277. â 1524, 28 mars, Blois. â Lettres par lesquelles FrançoisI er accorde prorogation pour six annĂ©es d'une exemp- tion des tailles, aides, emprunts et subsides octroyĂ©e par ses prĂ©dĂ©cesseurs aux bourgeois de VitrĂ© Archives de la Loire- InfĂ©rieure, B, I. 280. 2278. â 1524, 28 septembre, Avignon. â Mandement par lequel François I er donne mission Ă Guy XVI et Ă d'autres personnages de recevoir les actes d'hommages des seigneurs bretons, qui lui Ă©taient dus par suite du dĂ©cĂšs de la reine Claude ImprimĂ©, Dom Morice, III, 960. 2279. â 1524, 26 novembre, Rennes. â ProcĂšs-verbal de la dĂ©cision prise par les Etats de Bretagne, sous la prĂ©sidence de Guy XVI, et constatant le droit de François I er Ă jouir de l'usufruit de la Bretagne ImprimĂ©, Dom Morice, III, 962. 2280. â 1524, 9 dĂ©cembre. â Pierre de Laval, baron de LouĂ©, et seigneur de Bressuire, la Mothe Saint-HĂ©raye. la Roche Luzais, Benais, Monsabert, La MachefĂ©rierre, Brains- 76 LA MAISON DE LAVAL sur-Authion, la Haye en Touraine et de Fayette Note, B. N., Dom Housseau, XIII ', 8067 et 8107. 2281. â 1524, v. s., 5 janvier, Saint- Just-sur-Lyon. â Provision pour Guillaume le Fort de l'office de sergent royal en la forĂȘt de VitrĂ©, vacant par le dĂ©cĂšs de Jean le Fort, son pĂšre Note, B. N., français, 5779, 39. 2282. â 1524, v. s., 28 mars, Saint- Just-sur-Lyon. â Lettres par lesquelles François I er accorde Ă François de la TrĂ©moĂŻlle, prince de Talmont, souffrance d'un an pour faire foi et hommage Note, B. N., français, 5779, 75. 2283. â 1525, 17 avril, Lyon. â Don Ă Jean de Laval- ChĂąteaubriant de la charge de capitaine des cinquante lances de la compagnie du feu duc d'Alençon Note, B. N., français, 5779, 82. 2284. â 1525, 27 avril, Lyon. â Don Ă François de la TrĂ©moĂŻlle des droits seigneuriaux dus au roi par suite du trĂ©pas du sieur de la TrĂ©moĂŻlle pour Berrie Note, B. N., français, 5779, 84. 2285. â 1525, 15 mai, Lyon. â Don Ă Jean de Laval- ChĂąteaubriant des droits seigneuriaux dus au roi par suite de la mort du sieur de ProĂ«sy ', pour la seigneurie de Rime- fault, mouvante de Lannion Note, B. N., français, 5779 93. 2286. â 1525, 12 juin, Lyon. â Mandement au changeur du trĂ©sor de payer dix sept cents livres Ă François de la TrĂ©moĂŻlle, pour le dĂ©frayer de ses dĂ©penses pendant la campagne du Milanais Note, B. N., français, 5779, 112. 2287. â 1525, 29 juin. â Epitaphe d'Anne de Montmorency, seconde femme de Guy XVI ' la BeauluĂšre CommunautĂ©s et Chapitres, 24. Cy gist trĂšs illustre dame Anne de Montmorency, en son vivant Ă©pouse de trĂšs haut et puissant seigneur Guy, comte de Laval, de Montfort et de Quintin, vicomte de Rennes, baron de VitrĂ©, etc. dĂ©cĂ©dĂ©e le pĂ©nultiĂšme jour de juin MGCGGCXXV \ 1. Il s'agit ici de Jean de Proisy, troisiĂšme Ă©poux de Françoise de Dinan. 2. C'est au chĂąteau de Comper, dans la paroisse de Concoret, qu'Anne de Montmorency, ayant mis au jour une fille, mourut le 29 juin Paris Jallobert, p. 9. CARTULAIRE 1501-1531 77 2288. â 1525, 3 juillet. â Aveu rendu Ă Jean de Laval, seigneur de Bresteau, de Bois-Dauphin, d'Aulnay, de Saint- Aubin par Jean Cueillette, pour le Grand-Parc A. N., T, 1051 32 , 343. 2289. â 1525, 16 juillet, Lyon. â Lettres par lesquelles la rĂ©gente prescrit Ă Guy XVI de contraindre les habitants de la principautĂ© d'Orange Ă fournir le logement aux gens de guerre Archives de l'IsĂšre, B. 2910, cah. 24. 2290. â 1525, 18 juillet, Lyon. â Lettres par lesquelles Jean de Laval-ChĂąteaubriant fait Ă Henri de Foix, second fils d'Odet de Foix, une donation de quatre mille livres de rente sur ChĂąteaubriant ImprimĂ©, Dom Morice, III, 965 et copie, B. N., français, 4730, 23. 2291. â 1525, 21 aoĂ»t. â Lettres par lesquelles la rĂ©gente fait don Ă François de la TrĂ©moĂŻlle des droits seigneuriaux dus au roi pour Talmont et Olonne Note, A. N., PP 119, 19 B. N., français, 21405, 293; Clairambault, 782, 279. 2292. â 1525, v. s., 18 mars, Aveluy. â Lettres par lesquelles RenĂ© de Laval-la-Faigne octroie Ă Jeanne de la Croix diverses rentes et la jouissance d'une chambre en l'hĂŽ- pital Saint-Mathieu d'Arras communiquĂ© par M. Ricouart. A tous ceux qui ces prĂ©sentes lettres verront, RenĂ© de Laval, chevalier, sĂ©nĂ©chal hĂ©rĂ©ditat du Perche, seigneur de la Faigne et delaPuysaie, d'Aveluis, gouverneur et colla- teur de la maison et hospital de St-Mahieu sĂ©ant en le ville et eschevinage d'Arras, Ă nous venu et escheu par la succession, mort et trĂ©pas de Monseigneur Arthus de Bussu, en son vivant seigneur dudit Aveluis et pĂšre de notre bien aymĂ©e espouse Marie de Bussu, salut. Savoir faisons que pour , les bons rapports et le bonne renommĂ©e et gouvernement que faites nous a estĂ© de la per- sonne de Jehannedela Croix et autres causes Ă ce nous mou- vans, avons donnĂ© et octroie, donnons et octroions par nos prĂ©sentes cinq mençault de blĂ©, mesure dudit lieu d'Arras, vingt-deux sols tournois d'argent et une chambre en ladite maison et hospital dudit Saint-Mahieu, et laquelle chambre, blĂ© et argent soĂ»lait tenir une nommĂ©e Marguerite de Sailly, au moyen du don Ă elle fait par nos prĂ©dĂ©cesseurs seigneurs 78 LA MAISON DE LAVAL dudit lieu d'Aveluys, pour par ladite de la Croix joyr desdites choses sa vie durant ; et ce moyennant que ladite Jehanne de la Croix sera tenue payer au jour de son trespas dix francs tournois pour la morte main. Et mandons Ă tous nos justichier, officier et subjets et mesme iceulx qui ont charge et gouvernement de ladite mai- son et hospital qu'ils laissent joyr et user ladite Jehanne de la Croix dudit don. Car tel est notre plaisir. En tĂ©moing de ce nous avons signĂ© ces prĂ©sentes de notre seing et scellĂ©e de notre scel d'armes. DonnĂ© audit Aveluys dixhuitiĂšme jour de mars l'an mil cinq cens vingt cinq. R. de Laval. 2293. - .1526, 12 avril, Bordeaux. â DĂ©claration de foi et hommage au roi par François de la TrĂ©moĂŻlle, pour Saint- Gondon Original, A. N., P. 10, n° 3459. 2294. â 1526, 12 avril, Bordeaux. - DĂ©claration de foi et hommage au roi par François de la TrĂ©moĂŻlle pour Sully Original, A. N., P. 10, n°3457. 2295. â 1526, 12 avril, Bordeaux. â DĂ©claration de foi et hommage au roi par François de la TrĂ©moĂŻlle, pour l'Isle Bouchard Original, A. N., P. 13, n" 4403. 2296. â 1526, 15 juin, Thouars. â Lettres par lesquelles Anne de Laval, dame de la TrĂ©moĂŻlle, ayant reçu deux cents Ă©cus, transporte Ă Gilles de Laval les droits de rachat dĂ»s pour le dĂ©cĂšs de Philippe de Beaumont Note 19428 du cata- logue 29 de la librairie Saffroy. 2297. â 1526, 23 aoĂ»t, Amboise. â Mandement de payer au trĂ©sorier des guerres de Bretagne vingt mille huit cent trente deux livres, pour la solde des douze cents hommes d'armes commandĂ©s par MM. de Laval-ChĂąteaubriant et de Rieux pendant le dernier quartier de 1525 et le premier de 1526 Note, B. N., français, 5502, 25. 2298. â 1526, 24 aoĂ»t. â Acte du mariage de Guy XVI avec Antoinette de Daillon, fille de Jacques de Daillon, baron du Lude Antoinette a pour dot les terres de la Cropte et de CARTULAIRE 1501-1531 79 Tlsle sous BrĂčlon, avec vingt mille livres tournois Note, B. N., Dom Housseau, XII 1 , 6175. 2299. â 1526, 27 aoĂ»t, Amboise. â Provisions de gouver- neur de Bretagne octroyĂ©es Ă Guy XVI pour succĂ©der au duc d'Alençon ImprimĂ©, Dom Morice, III, 970. 2300. â 1522-1530, 6 septembre, BlĂ©rĂ©. â Lettre Ă©crite par Guy XVI au prince de Talmont Archives de la TrĂ©- moĂŻlle . A mon filz monsieur de la TrĂȘmoĂŻlle. Mon filz, hier, nous assemblasmes Ă Chenonceau monsieur de Lautrec, messieurs les prĂ©sidans et moy, pour besongnerĂ l'apoinctement d'entre vous et madame la douairiĂšre de la TrĂ©moylle, et vous asseure que mes dits sieurs y prindrent grande peine et de ma part je y feis ce que je peu, de sorte que les choses vont bien pour tous deux, ce me semble, et que je l'ay entendu deceulx qui entendent mieulx telz affaires que moy, et croy que de vostre part serez bien contant de ce que en avons fait. Vous advisant, mon filz, que non seullement en cela, mais en tout autre chose oĂč je vous pouray faire plaisir ny service, je m'y emploiray d'aussi bon cueur et me trouverez autant Ă vostre commandement que parant ne amy que vous ayez en ce monde. Messieurs de vostre conseil, que avyez envoyez par deçà , vous diront de toutes nouvelles de cette court, qui me garde de vous faire longue lettre, si non vous advertir que pour ma part des distribucions, je demande des oyseaulx et vous prie m'en donner ; autrement je ne scauray Ă quel mestier passer le temps cette annĂ©e. Je croy que vous aurez pitiĂ© de moy, pourquoy feray fin de lettre. Priant Dieu, mon filz, vous donner ce que dĂ©sirez. De BlĂ©rĂ©, ce VI e jour de septembre. Vostre bon pĂšre et amy, Guy de Laval. 2301. â 1526, 21 septembre. â EntrĂ©e solennelle Ă Laval d'Antoinette de Daillon, troisiĂšme femme de Guy XVI Note de Le Doyen, p. 209 des Annales. 2302. â 1526, 1 er dĂ©cembre, Saint-Germain-en-Laye. â 80 LA MAISON DE LAVAL Mandement par lequel François I confirme l'allocation de six mille livres consentie, en septembre 1526, par les Etats de Bretagne, en faveur de Guy XVI, gouverneur de la province Arch. de la Loire-InfĂ©rieure, B. I., 301. 2303. â 1526, 29 dĂ©cembre, Saint-Germain en-Laye. â Don Ă Guy XVI du revenu du grenier Ă sel de Laval pendant la prĂ©sente annĂ©e Note, H. N., français, 5502, 38. 2304. â 1526, v. s., 26 janvier, VitrĂ©. â Lettres par les- quelles Guy XVI rĂ©glemente la fabrication des toiles Ă VitrĂ©, de façon Ă leur maintenir leurs bonnes qualitĂ©s Copie, A. N , AA. 55, dossier 15i5. Guy, comte de Laval, de Monfort et de Quintin, viconte de Rennes, sires de VitrĂ©, de la Roche et d'Acquigny^ gouver- neur et lieutenant genneral pour le roy en Bretaigne. Comme, pour la conservation de la rĂ©publique, utillitĂ© de cedit pais et duchĂ©, et singuliĂšrement des marchans, manans et habitans de ceste noz villes et baronnie de VittrĂ©, aient estĂ© faictz plusieurs statuz et ordonnances tant par les roys, royne et princes de cesdits pais, que par noz trĂšs chers et trĂšs aimĂ©s sieurs, prĂ©dĂ©cesseurs, contes de Laval et barons dudit VittrĂ©, dont Dieu ait les asmes ! touchant la vendicion et façon des toilles canevaz, quelz par chaincunjour ont estĂ© et sont expo- sĂ©s en vente en nostredite baronnie, entre lesquelz nous avons trouvĂ© avoir estĂ© statuĂ© et ordonnĂ© qu'il n'estoit et n'est loi- sible Ă aulcuns estrangĂ©s d'achatter ne faire rĂ©sidance en nostredite baronnie pour achatter lesdites toilles ; aussy que aulcune toille ne fust expossĂ©e en vente sy elle n'estoit de certaine laisse et estellon, quy estoit de trois quartiers d'aulne, de laquelle l'on usse en nostredite ville et baronnie de VitrĂ©, Ă quoy n'a estĂ© gardĂ© estĂąt ; car, comme nous avons informĂ© par plussieurs bons notables et anciens marchans, tant de nostredite ville que d'ailleurs, les marchans estrangĂ©s quy n'ont ossĂ© achattĂ©s lesdites toilles par eulx mesmes, de crainte d'en estre reprins, ont substituĂ© et submis pour ce faire plussieurs facteurs et personnaiges interpossĂ©s Ă quy font et payent les achetz qu'ilz font desdites toilles de l'ar- gent desditz estrangĂ©s pour quelque saliĂšre qu'ilz en pren- nent sans ce qu'il y expossent du leur, et par ce moyen tolli- sent aulx marchans de nostredite ville et baronnie et autres \ CARTULAIRE 1501-1531 81 inclos de ce pais qu'ilz contribuent Ă l'entretĂšnement de la cliosse publicque et au poyment de nos rentes, et qui par rai- son doibvent estre prĂ©fĂ©rĂ©s aulx estrangĂ©s es prouffitz quy yssent des toilles et autres chosses croissantes en cedit pais. Davantaige avons congneu que plussieurs marchans ont souvent expossĂ© en vente grand nombre de paquetz desdites toilles canevas de moindre laisse et haulteur que de trois quartiĂ©s d'aulne de nostredite baronnie, et pour ce que aul- cuns en ont estĂ© reprins, plussieurs marciians vendeurs des- dites toilles ont exogitĂ©, inventĂ© par avarice et cupiditĂ© autre moyen d'abusser desdites toilles, car ilz en ont faict et font faire les lames Ă faire lesdites toilles plus clĂšres au millieu que aulx deulx boutz, dont est advenu que plussieurs toilles achattĂ©s, quy senbloient Ă la monstre bonnes, fortes et prouf- fitables, et au desploier, ou millieu d'icelles, ont estĂ© trouvĂ©s trop clĂšres, foibles et desraisonnables, jaçoy que elles fussent achattĂ©s et poiĂ©s au pris raisonnable des bonnes toilles, et y a eu et a de prĂ©sent plussieurs tessiers quy ont participĂ© Ă ceste fraulde et, quy plus est, faisant lesdites toilles, ont, pour abusser les acbatteurs, tissu les lys et monstre desdites toilles plus fort et y ont plus employĂ© de fil que au millieu d'icelles, dont les marchantz. quy les ont achattĂ©s Ă la bonne foy, s'en sont trouvĂ©s déçuz et tronpĂ©s, et sont Ă celle ocasion lesdits marchans et marchandies mesme nostredite ville et baronnie de VittrĂ©, quy par cy d'avant avoint grand bruit et estoient en honneur et rĂ©putation et estimation es pais de Flandres, Espaigne, Engletesre et ailleurs es nacions estranges et fai- soint grand prouffilt en la chosse publicque de ce pais, sont maintenant descritz et en danger de tonber en ruine et desti- macion de perdre leur eresdit, au grand dommaige et dimi- nucion des dĂ©niĂ©s et subvencions du roy et de la chosse rĂ©pu- blique et de nous, s'il n'y est prĂ©sentement donnĂ© provision. Pour quoy nous, dĂ©sirant de tout nostre cĆur le bien et advancement de toutz les originaires et subjetz de cedit paĂŻs et divissĂ©ment des nostres, voullans en ce cas et toutz autres pourveoir Ă nostre posiblitĂ©, avons cy ensuivant et adhĂ©rant aulx statuz, prohibicions et ordonnances faites sur le faict de la vente et façon desdites toilles et canevaz par lesdits prin- ces de ce paĂŻSj et en confirmant, louant et renouvelant et ap- prouvant les deffences et prohibicions faites par nosdits prĂ©- 82 LA MAISON DE LAVAL dĂ©cesseurs, faict et faisons par ces prĂ©santes prohibicions et deffences Ă tous estrangĂ©s de non achatter pour eulx ne per- sonnaiges interpossez en cas de contravencion, de eonfisqua- tion de la marchandie et d'amande arbitraire. Plus, prohibons et deffendons Ă toutz de non exposser toille en vente en ceste nostre baronnie sy non qu'elle contiennent lesdits trois quartiĂ©s d'aulne, de laquelle l'on usae en nostre- dite ville et baronnie, et que elles soint bonnes, fortes et mar- chandes Ă©guallement au millieu et aulx deulz boutz. Item, pour tollir les fraudes et abus quy y ont estĂ© et peu- vens estre commis, prohibons et deffendons Ă tous tessiĂ©s et marchans par nostre dite baronnie de non tenir, garder et avoir aulcunes lames pour faire lesdits canevas qu'elles soint bonnes et loyalles, et aussy fortes et espaisses au milieu comme aulx deulx boutz et quy ne soint de vint et seix portes pour le moins. Aussy ordonnĂ© que, en ensuivant l'ancienne coustume, les- dites toilles et canevas seront ourdies de brin tessue de tes- ture.... Ă ce que par deffault de vissitacion abus mes- mes et que ne se puisse faire fraulde sur les dĂ©niĂ©s du roy et les nostres, avons prohibĂ©, deffendu, prohibons et deffendons lesdits canevas n'estre vendus ne achattĂ©s en nostredite ville et baronnie que en la halle dudit lieu de VittrĂ©. Et tout ce, sur painnes aulx vendeurs et achatteurs tessiĂ©s ou autres, quy y seront trouvĂ©s contrevenans, chaincun de ces prĂ©sentes nos statutz et ordonnances, prohibicion et con- fisquacion desdites lames et marchandie et amende arbitraire. Ces prĂ©sentes Ă commanser et avoir effaict dedans ung mois prochain apprĂšs la proclamacion et bannie d'icelluy, pendant lequel tens pouront lesdits marchans faire leur prouffilt des toilles qu'ilz ont Ă prĂ©sent en rĂ©serve, et leursdites lames, sans autre painne et danger. Se donnons en mandement Ă noz amez et fĂ©aulx sennĂ©chal, et allouĂ©, et lieutenant, et procureur de VittrĂ©, sy comme Ă chaincun apartiendra, faire lire et publier, bannir et procla- mer cesdites prĂ©sentes Ă ce que chaincun n'en prĂ©tende causse d'ingnorance et icelle gardent et facent garder, regestrĂ©s, tenir et observer de point en point, sellon leur forme et teneur, et Ă notz sergeans et chaincun faire lesdites procla- macions, bannis et autres chosses quy leur seront par nos- CARTULAIRE 1501-1531 83 dits juges et chaincun ordonnĂ©s touchant et consernant le faict de leur office sur les peinnes en tel cas pertinant. En tesmoing de quoy nous avons signĂ© ces prĂ©sentes de nostre main et faict sailler du sel de noz armes. DonnĂ© en nostre chastel dudit VittrĂ©, le XXVI e jour de jan- vier mil cinq centz vingt et seix. 2305. â1526, v. s., 2 et 4 fĂ©vrier, la Faigne et Pontvallain. â Naissance et baptĂȘme de Jacques I de Laval, fils de Henri II de Laval-la-Faigne De Broussillon, Les Laval-la- Faigne, 19. 2306. â 1526, v. s., 10 mars, Paris.â DĂ©cĂšs d'Antoinette Havard et sa sĂ©pulture, ainsi que celle de Henri I de Laval-la- Faigne De Broussillon, Les-Laval-la-Faigne, 22. 2307. â 1526, v. s., 12 mars, VitrĂ©. â Lettres par les- quelles Guy XVI fait divers dons Ă François Daussay, son con- fesseur, administrateur de Saint-Nicolas de VitrĂ© Commu- niquĂ© par M. P. de Farcy, d'aprĂšs les archives de Saint- Nicolas de VitrĂ©, Guy, conte de Laval, de Montfort et de Quintin, viconte de Rennes, sires de VitrĂ©, de la Roche et d'Acquiny, gouver- neur et lieutenant gĂ©nĂ©ral pour le roi en Bretaigne, Ă tous ceux qui ces prĂ©sentes lettres verront salut. Sçavoir faisons que, pour aulcunes bonnes considĂ©rations et pour ce que trĂšs bien nous plaist, avons donnĂ©, baillĂ© et concĂ©dĂ©, donnons, baillons et concĂ©dons par ces prĂ©sentes Ă nostre cher bien amĂ©, conseiller et confesseur, frĂšre François Daussays, docteur en thĂ©ologie et administrateur de nostre prieurĂ© et aulmonerie de St-Nicolas de VitrĂ©, trois places gastes et jardrins scituĂ© Ă joignant, l'un, qui fut feu MacĂ© PĂ©pin, et les deux aultres, qui furent Jehan Cantirieulx et JametThouin, et joignant d'ung coustĂ© Ă une place gaste, apartenante Ă Denis Georgeaulx et d'aultre coustĂ© Ă ung jardin apartenant Ă RenĂ© Geffrart et aux hoirs Jacques Hu°- gain et du bout derriĂšre Ă Laval et pro- cureur en la Chambre des comptes de Laval, est connu seulement jusqu'ici par la Chronique selon que le dit Gesland a recuilli et vue de lui-mĂȘme depuis le temps de Guy XVI, comte de Laval, laquelle a Ă©tĂ© imprimĂ©e par d'Hozier, comme complĂ©ment de celle de Le Baud. En outre de cette piĂšce de vers, adressĂ©e Ă François de Laval et restĂ©e jusqu'ici inĂ©dite, il est encore l'au- teur du numĂ©ro et de deux Ă©pigrammes, qui ne tarderont guĂšre sans doute Ă voir le jour. 222 LA MAISON DE LAVAL A monseigneur de Dol, Jean Gesland, humble salut. On ne veoit point veneur si mal aprins -, hors que le cerf ou le sanglier a prins, qui ses filetz et retz veuille brasier ; aussi, monsieur, quoy qu'en puissent urler ungtas de loups, de brebis ennemys, je ne croiray que vous m'aies hors mys de vostre grĂące et de vostre service, qui ay tant faict en faisant mon office, que vous avez Ă l'aise prins la beste dont vous aviez si grand mal Ă la teste, oĂč j'ay servy de retz, je l'ose dire, et toutesfois ne m'en estes que pire. S'il s'est venu rendre Ă vous d'advanture, pour se saulver soubz vostre couverture, mĂ©rite-il d'en chasser ung dehors qui est Ă vous plus de cueur que de corps ? Qui est Ă vous, non corne moyne Ă force sic, non corne gens qui riens que l'escorce de bon amour sic, et qui vous font caresse, mais e [st] Ă vous, Fortune tienne ou verse. Il y a tant que m'avez retenu, et me sens tant obbgĂ© et tenu Ă vous, monsieur, que je ne puys penser que sans meffaict vous ays peu offenser, ne qu'au crĂ©dit de gens de double face je sois hors mys de vostre bonne grĂące. Je suis joyeulx si vous en trouvez bien, mais je suys bien marry si j'y perdz rien et que feussiez de sens si exilĂ© qu'aprĂšs la prinse eussiez ars le filĂ©. 2597. â 1545, v. s., 1 er janvier. â Vers adressĂ©s par Ni- colas Bourbon Ă Guy XVII de Laval B. N., Dupuij, t. 736, f. 151. 1. En supprimant la majuscule qu'il est d'usage de placer en tĂȘte de chacun des vers, nous nous proposons de rendre plus facde Ă saisir le sens des poĂ©sies que nous mettons au jour. CAItTULAIRE 1531-1547 223 Inclytoadolescenti Vidonia Lavallo, MĆcenatisuo liberalis- simo, Nicolas Borbonius '. Ni tui prorsus mihi notus esset lectoris candor, generose Vido, haud tibi vellem toties ineptas mittere nugas. Quin et audacem facit hĆe^Bifrontis me dies faustas tibi quas calendas sic rĂ©currentes videas. ut annos nestora vincas. O tuum dum me patiare'dici, quantus evadam ? tua fama quantum crescet, o hĂ©ros, mea quis reprendet carmina censor? 1. La ville de Vendeuvre-sur-Barse Aube a donnĂ© naissance Ă deux poĂštes du nom de Nicolas Bourbon. Le second, Nicolas Bourbon le jeune, nĂ© en 1574, mort le 7 aoĂ»t 164'*, a fait partie de l'AcadĂ©mie Française et a Ă©tĂ© l'objet d'une notice insĂ©rĂ©e par M. Kerviler dans la Revue de Champagne et de Brie II, 417 ; III, 23,110,198, 274, 410. Quant au premier, Nicolas Bourbon l'ancien, nĂ© en 1503, il avait Ă©tĂ© prĂ©cepteur de Jeanne d'Albret. et figure encore dans un compte de 1549 Archives de Pau, B. 5. 11 a Ă©tĂ© lui aussi l'objet d un travail Notice sur Nicolas Bourbon, par J -A. Jacquot, laquelle, aprĂšs avoir Ă©tĂ© publiĂ©e au Journal de l'Aube, des 7, 11, 14, 18 et 21 juillet 1857, a paru Ă Troyes chez Bouquot en 24 pages in-8°. Nicolas Bourbon l'an- cien vint finir ses jours Ă CandĂ©, oĂč il possĂ©dait, paraĂźt-il, un petit bĂ©nĂ©fice. Il laissait huit livres d'Ă©pigrammes, intitulĂ©s Nugee, imprimĂ©s Ă Lyon en 1538. lesquels tĂ©moignent de ses frĂ©- quentes relations avec les Laval au livre II, numĂ©ro 85, la piĂšce De solicita potentum vita, Semper habet varias immensa potentia curas est adressĂ©e ad dominum Claudmm Lavallum. Au livre V, le numĂ©ro 107, Si mihi apud fratrem o clara fata stirpe Lavalle est adressĂ© BgregiĆ indolis adolescenti domino Claudio Vidoni Lavallo Au mĂȘme livre, les piĂšces 34 et 35 Obscuros homines constat plerosque fuisse et Magnas divitias tuo favore sont Ă©crites ad illustissimum heroa dominum Johannem a Lavallo Castri Briantii, in Armoricis dominum totiusque oras Britannica? pra^sidem. Enfin, dans une lettre datĂ©e de Lyon 1 er octobre 1538 et adressĂ©e Ă Henri de Foix-Lautrec, Nicolas Bourbon fait mention de nobi- lissimum virum adolescentem dominum Vidonem Lavallum, fra- trem tuum, ejusque prĆceptorem Gui. Lateranum, veterem ami- cum meum. 224 LA MAISON DE LAVAL Res canam magnas seriemque rerum, et tuse clarum genus omne gentis, et brevi prolem tibi quam datura inclyta conjux. Quos celebrarit mea Musa, vivent, dum suos fructus dabit aima tellus, omnes dum se fluvius profundum volvet in aequor. Calendarum Januariarum die, M. D. XLV. Suv Taßç MoĂ»aatç 2598. â 1545, v. s., janvier, Paris. - Lettres par lesquelles François P r Ă©rige le marquisat de Nesle en faveur de Louis de Sainte-Maure A. N., JJ. 257\ etX ,a , 8616, 211. 2599. â1545, v. s., 15 avril, FerriĂšre. -DĂ©claration con- firmative de celle du 29 avril 1544, par laquelle les habitants de Laval avaient Ă©tĂ© exemptĂ©s des subsides imposĂ©s par le sĂ©nĂ©chal du Maine et reconnaissant au seul juge des exempts du comtĂ© de Laval le droit de rĂ©partir sur eux les contribu- tions Titres du comtĂ© de Laval, Paris, 1657, in-4°, p. 30. 2600. â 1546, 4 juillet. â Quittance dĂ©livrĂ©e par RenĂ© de Laval-Bois-Dauphin des cent livres Ă lui dues pour le dernier semestre de l'annĂ©e 1546 en qualitĂ© de porte-guidon de la compagnie du comte du Lude Original signĂ©, B. N., français, 28153, 167. 2601. â 1546, 14 aoĂ»t. â Acte par lequel Louis de la TrĂ©- moĂŻlle cĂšde la baronie de Luçon Ă Anne de Laval, sa mĂšre Dom Fonteneau, XIX, 425. 2602. - Vers 1546, un 20 septembre, Saint-Michel du Bois. â Lettre adressĂ©e Ă Anne de Laval par la marĂ©chale de Vieilleville ImprimĂ©, Lettres du XVI e siĂšcle, n° 115. 2603. â Vers 1546, 26 octobre, Laval. â Lettre par laquelle les demoiselles de compagnie de Claude de Foix mandent Anne de Laval, dame de la TrĂ©moĂŻlle, auprĂšs de sa belle-sĆur trĂšs gravement malade ImprimĂ©, Lettres du XVI e siĂšcle, n° 116. A madame. Madame, nous avons receu la lettre qu'il vous a plu nous escripvre et l'avons montrĂ©e Ă madamoyselle vostre seur, qui CARTULAIRE 1531-1547 225 a estĂ© trĂšs ayse de connoystre la volontĂ© qu'avez de la venyr veoyr, car c'est une chose qu'elle [a] de long temps dĂ©sirĂ©e. Elle nous commande vous faire ses recommandations humble- ment Ă vostre bonne grĂące. Elle vous envoyĂ© mulletz et hac- quenĂ©s, ainsi qu'il vous playst les demander, et est bien marie qu'ilz ne sont desjĂ Ă Cran pour avoir l'aise de vous veoir bientost. Madamme, nous vous advertisson qu'elle fut hier aussi malade que nous la vymes jamays, et de sorte que nous avons toutz envoyĂ© devers monseigneur vostre frĂšre en la plus grant diligence qu'il a estĂ© pocyble ; y lui semble que sy elle avoict cest heure et bien de le veoir qu'il luy housteroict toutz ces maulx. Nous somes toutz trĂšs ayses de vostre venue, pour la consolacyon que ce luy sera et Ă toutz nous aultres, pouvres serviteurs. Nous avons remandĂ© monsieur du Bois-Dauphin, qui s'en alloict Ă la court, pour revenir ycy, faute que nous ayons seu nouvelles de mondit seigneur vostre frĂšre. Nous penssons qu'il sera anuyct ycy, de jour ou de nuyct, et amaynera mais- tre Gabriel quante luy. Qui est l'endroict oĂč nous recommanderons, madame, trĂšs humblement Ă vostre bonne grĂące, supliant Dieu vous donner trĂšs bonne et longue vie. A Laval, le xxvi e d'octobre. De votz trĂšs humbles et trĂšs obĂ©issantes servantes. GuYONNE DE LA HAYE, K. TlERRY. 2604. â 1546, novembre. Joinville. â Lettres de naturali- sation en faveur d'Ulrich Helizuer, valet de chambre de Guy XVII, prĂ©cĂ©demment au service de Jean de Laval- ChĂ teaubriant, natif de BaviĂšre et Ă©tabli en France depuis quinze ans A. N., JJ. 257\ 297] . 2605. â Vers 1546. â RequĂȘte en vers adressĂ©e par Ma- thieu Guimel Ă Guy XVII de Laval ' Copie, B. N., Dupuy, 736, fol. 207. 1. Sous les numĂ©ros 176-177 on trouvera ici le dessin du sceau et du contre-sceau de la cour de VitrĂ©, tels qu'ils figurent Ă la fois au musĂ©e de VitrĂ©, attachĂ©s Ă un acte de 1546 et au cabinet de M. Paul de Farcy Ă l'Ă©tat isolĂ©. 226 LA MAISON DE LAVAL A monseigneur le conte de Laval. S'il vous plaisoit, Monseigneur cinq fois conte ', en ce papier si beau, si blanc, si nect, cy attachĂ©, d'escripre ce signet Guy de Laval, je puis faire mon compte que pour cent fois plus que cela ne monte envers Dolu, marchant de draps de soye, j'auray crĂ©dit. Avant doncq que je soye d'habillemens aussi nud corne un ver, j'ay ceci dict, pour ce que je pensoie qu'il ne fera pas grand chault en hyver. 176-177. â Sceau et contre-sceau des contrats de VitrĂ©, 1546 2606. â 1546, v. s., 3 fĂ©vrier. â Naissance de RenĂ© de Laval, baron de MaillĂ© et de la Roche-Corbon, qui Ă©pousa un jour RenĂ©e de Rohan-Montbazon Note, Dictionnaire d'Indre-et-Loire, IV, 131, et du Chesne, Histoire, 615. 2607. â 1546, v. s., 8 fĂ©vrier. âActe par lequel Guy XVII remet entre les mains des habitants de Laval l'administration 1. Guy XVII, dans la plupart des actes postĂ©rieurs Ă son ma- riage, se pare de six titres de comte Laval, Quintin et Montfort, de son chef, Comminges, Rethel et Beaufort en Champagne, du chef de Claude de Foix. Sans doute, Ă la fin de sa vie, force lui fut de renoncer au comtĂ© de Comminges. car le titre n'en figure pas en tĂȘte de son ordonnance, en date du 8 fĂ©vrier 1546, v. s., relative Ă l'aumĂŽnerie Saint-Julien de Laval. CARTULAIRE 1531-1547 227 de l'hĂŽpital Saint- Julien de Laval L. MaĂźtre, HĂŽpitaux de Laval, 18. 2608. â 1546, v. s., 16 fĂ©vrier, Paris. â Lettre adressĂ©e par Charles de la TrĂ©moĂŻlle Ă Anne de Laval, sa mĂšre, lui recommandant de faire les dĂ©marches nĂ©cessaires pour obtenir la nomination d'un la TrĂ©moĂŻlle Ă l'Ă©vĂŽchĂ© de Mirepoix 1 ImprimĂ©, au Chartrier de Thouars, p. 247. 2609. â 1546, v. s., 26 mars. â EnquĂȘte relative Ă la remise aux mains des habitants de Laval de l'administration de l'hospice Saint-Julien de Laval L. MaĂźtre, HĂŽpitaux de Laval, 22. 2610. â 1546, v. s., 28 mars. â ProcĂšs en Parlement d'Aymon Martin et de Jean Papelard, prĂȘtres, vicaire et curĂ© de Saint-Verin-du-Bois, contre Thibaut de Laval et Guy XVII X 2a . 2611. â 1547, 25 mai, Laval. â Epitaphe de Guy XVII, mort Ă Saint-Germain-en-Laye LaBeauluĂšre, CommunautĂ©s et Chapitres, 24. » CygisttrĂšs haut et trĂšs puissant prince messire Guy, comte de Laval, Montfort, Quintin, Rethelois et Beaufort en Champagne, vicomte de Rennes, Fronsac et 'Saint-Florentin, baron de Donzy, VitrĂ©, Donval et Lescun, seigneur de Lau- trec, chevalier de l'ordre des rois François I er et Henry II e de leurs noms, capitaine de cinquante lances des ordonnances d'iceux seigneurs ; mari et Ă©poux de trĂšs haulte et trĂšs puis- sante dame madame Claude de Foix, sĆur unique et hĂ©ritiĂšre de trĂšs hault et trĂšs excellent prince Henry de Foix, seigneur de Lautrec, lequel, nĂ© Ă Laval 2 , dĂ©cĂ©da au lieu de Saint- Germain-en-Laye le mercredi 2[5 mai 1547] entre deux et trois heures, aprĂšs la moitiĂ© du jour; de son Ăąge.... Et fut inhumĂ© en ce lieu le mardi 18° jour d'avril [1548] 8 . 1. C'est le 29 mai 1546 que David Bethon avait Ă©tĂ© tuĂ© par les hĂ©rĂ©tiques ; son successeur sur le siĂšge de Mirepoix fut Claude de Guiche, Ă©vĂšque d'Agde Gams, 578. 2. A VitrĂ© et non Ă Laval. 3. Le texte donnĂ© par M. de la BeauluĂšre porte mardi 18 a jour d'avril 1551 ; mais en 1551 le 18 avril n'Ă©tait pas un mardi, et l'annĂ©e 1548 est la seule entre 1547 et 1555, dans laquelle le 18 avril ait Ă©tĂ© un mardi. On croit donc pouvoir rectifier le texte 228 LA MAISON DE LAVAL 2G12. - 1547, 25 mai. - Epitaphe de Guy XVII faite par Jean Gesland ' Copie, B. N., Dupuy, t. 736, 198. Epitaphe de feu monsieur de Laval par M. Jehan Gesland. Puisque si fort paroissoit sa jeunesse, que de ses faitz chacun s'esmerveilloit, considĂ©rez qu'eust paru sa vieillesse s'il fut venu au poinct oĂč il falloit. Toutes faveurs Fortune luy bailloit, Nature aultant qu'on sçauroit dĂ©sirer, mais son esprit, qui tousjours travailloit Ă parvenir, voulut plus hault tirer, et prĂ©voyant qu'on ne peult qu'empirer en demeurant en ce monde longtemps, soubdain aux cieulx s'est voulu retirer, pour devenir du nombre des contents. de l'Ă©pitaphe avec d'autant plus de raison que Bouriolly fixe la sĂ©pulture a 1548. Il est vrai qu'il place la cĂ©rĂ©monie au 13 novem- bre, qui Un. aussi Ă©tait un mardi. 1. Cette epitaphe, dont l'auteur est rĂ©vĂ©lĂ© ici pour la premiĂšre fois, est loin d ĂȘtre inĂ©dite elle a Ă©tĂ© publiĂ©e par le Cabinet his- torique XV, 309, qui l'appliquait Ă l'un des Laval-Lezay ; elle a m ,,Tm a " s ?' P armi les additions au MĂ©moire de Ăourjolly 11, S il, trois des derniers comtes de Laval sont morts Ă la fleur de la jeunesse Guy XVII, en 1547. Ă l'Ăąge de vingt-cinq ans. Lrtiy XIX et Guy XX, l'un en 1586, l'autre en 1605, ĂągĂ©s l'un de trente-et-un ans et l'autre de vingt ans seulement ; aussi l'Ă©pita- phe en question conviendrait-elle Ă©galement Ă tous les trois Ce qui dĂ©cide a l'appliquer Ă Guy XVII, c'est que Gesland. qui n'est guĂšre connu que parla chronique, dont il est l'auteur, etqui a Ă©tĂ© imprimĂ©e par d'Hozier comme complĂ©ment de celle de Le Baud a mis fin Ă son Ćuvre en mai 1558, et ne semble avoir Ă©tĂ© con- temporain que du seul dĂ©cĂšs de Guy XVII. XXII F GUYONNE ET GUY XVIII 25 mai 1547 â 13 dĂ©cembre 1567 Le 25 mai 1547, par suite du dĂ©cĂšs de Guy XVII, la descendance masculine de Guy XIV se trouvait Ă©teinte et avec elle prenait fin la branche des Montfort-Laval. Son hĂ©ritage revenait de droit Ă l'une des niĂšces du dĂ©- funt, RenĂ©e de Rieux, qui prit le nom de Guyonne de Laval ' . Catherine, l'aĂźnĂ©e des filles de Guy XVI et de Char- lotte d'Aragon, Ă©tait nĂ©e dans le courant de l'annĂ©e 1504; le 11 novembre 1518, alors qu'elle Ă©tait ĂągĂ©e de qua- torze ans, elle avait Ă©pousĂ© Claude de Rieux, marĂ©chal de France, fils de Jean de Rieux et de sa troisiĂšme fem- me, Isabeau de Brosse. Elle avait donnĂ© le jour Ă deux filles RenĂ©e de Rieux, devenue comtesse de Laval en 1547, et Claude de Rieux, morte le 5 aoĂ»t 1561, dont le fils, Guy XIX, fut comte de Laval aprĂšs sa tante. RenĂ©e de Rieux, nĂ©e en 1524, avait Ă©pousĂ© le 5 jan- vier 1541 n. s., le second fils de Jean III de Sainte- Maure et d'Anne d'HumiĂšres, Louis de Sainte-Maure, comte de Joigny, en faveur de qui, en janvier 1545, Fran- çois 1 er devait Ă©riger le comtĂ© de Nesle en marquisat 2 . C'est cette RenĂ©e de Rieux qui, le 25 mai 1547, suc- cĂ©da Ă Guy XVII ; puis qui, le 26 avril 1548, hĂ©rita aussi de son frĂšre consanguin Claude, de telle sorte qu'elle rĂ©unit ainsi sur sa tĂȘte Ă la fois le patrimoine des 1. Voir au Cartulaire, sous les numĂ©ros 2636 et 2637, deux mittances de Guyonne qui ne laissent aucun doute sur la date lu dĂ©cĂšs de Guy XVII. 2. Cartulaire, numĂ©ros 2i78 et 2570. 15 230 LA MAISON' DE LAVAL Laval et celui des Rieux, sauf bien entendu les parts que la coutume l'obligeait Ă abandonner sur l'un et l'autre Ă sa sĆur Claude de Rieux et sur la succession de Rieux seule, Ă sa sĆur consanguine Louise qui, nĂ©e en 1531 d'un second lit, devait ĂȘtre un jour marquise d'ElbĆuf. MalgrĂ© leur rang Ă©minent, malgrĂ© le grand nombre des fiefs accumulĂ©s sur leurs tĂštes, malgrĂ© la bonne pro- portion qui existait entre leurs Ăąges, les nouveaux sei- gneurs furent loin d'ajouter un Ă©clat quelconque au lustre dont les gĂ©nĂ©rations prĂ©cĂ©dentes avaient revĂȘtu le nom de Laval ; Louis de Sainte-Maure, qui n'Ă©tait pas douĂ© de l'intelligence nĂ©cessaire pour dominer sa fem- me, laissait en outre, parait-il, agir Ă leur fantaisie deux de ses intendants, Charrault et Fiacre Amy, qui ont, l'un et l'autre, laissĂ© un nom exĂ©crĂ©, et qui, dit-on, lui firent aliĂ©ner dans des conditions dĂ©sastreuses, LohĂ©ac et le marquisat de Nesle. Quant Ă RenĂ©e de Rieux, son objectif principal semble avoir Ă©tĂ© de lutter contre son Ă©poux et d'Ă©chapper Ă son action, et cependant jamais au- cun succĂšs dans l'administration de sa fortune n'est venu lĂ©gitimer ses vellĂ©itĂ©s d'indĂ©pendance. A force de querelles de mĂ©nage, Ă force de procura- tions donnĂ©es et reprises, Ă force de procĂšs, Ă force de sĂ©parations amiables et de rĂ©unions prescrites par le Conseil du Roi, les deux Ă©poux finirent par mĂ©riter une dĂ©considĂ©ration complĂšte, Ă laquelle l'adhĂ©sion de Guyonne au protestantisme vint mettre un sceau dĂ©fini- tif, en mĂȘme temps que le comble aux dĂ©plorables exemples que Guyonne et Guy XVIII avaient donnĂ©s aux populations stupĂ©faites. En outre, les difficultĂ©s d'argent semblent avoir singu- liĂšrement pesĂ© sur leur existence. Guy XVII, toute sa vie, avait Ă©tĂ© la proie d'embarras financiers qu'il n'avait pas tous créés et dont la responsabilitĂ© pour la plus grande part remontait Ă Guy XVI et aux splendeurs de son train de maison ; Guyonne en hĂ©ritant de Laval, se GUYONNE ET GUY XVIII 231 trouva chargĂ©e des lourdes dettes de son oncle et de son grand pĂšre. 11 est un document qui, bien qu'impri- mĂ© depuis longtemps, n'a pas Ă©tĂ© utilisĂ© par les histo- riens locaux c'est un accord du 8 fĂ©vrier 1555, passĂ© entre Louis de Sainte-Maure et Claude do Rieux, sa belle sĆur ; on y apprend qu'Ă cette date le comtĂ© de Laval Ă©tait saisi et mis en criĂ© » et que les crĂ©anciers qui en poursuivaient la vente Ă©taient la veuve de Jean Dolu, Jean BarthĂ©lĂ©my, Jeanne de Saincte, veuve de Michel Millot, Pierre Lussaut, Nicolas Fichepain, Denis Plou, RenĂ© Tardif et autres »'. En passant ce contrat du 8 fĂ©vrier 1555, le i>ut que poursuivait le marquis de Nesle Ă©tait de mettre ses fiefs Ă l'abri des revendications des crĂ©anciers des maisons de Laval et de Rieux et c'est ce que s'offrait Ă accomplir la sĆur de Guyonne, Claude de Rieux, se portant fort pour d'Andelot, son Ă©poux. Tous deux se chargeaient de faire l'avance des sommes nĂ©cessaires pour Ă©teindre toutes les dettes de la maison de Laval ; en retour, com- me sans doute ils dĂ©siraient acquĂ©rir Laval, ils obtenaient de Guy XVI II la promesse formelle que le comtĂ© serait mis en vente par adjudication avant la NoĂ«l prochaine ; en sus, ils devaient soutenir eux-mĂȘmes toutes les in- stances en cours relatives aux maisons de Laval et de Rieux. En fait, Laval ne fut pas mis aux enchĂšres. MalgrĂ© le consentement donnĂ© par elle au contrat du 8 fĂ©vrier 1555, consentement relatĂ© dans l'acte lui-mĂȘme, Guyonne jugea Ă propos de poursuivre la nullitĂ© de celui-ci devant le Parlement. Elle obtint une Ă©vocation au Conseil PrivĂ© du Roi qui, par arrĂȘt donnĂ© Ă Rennes le 8 juin 1557, dĂ©cida que pour indemniser d'Andelot des soixante mille Ă©cus payĂ©s par lui Ă la dĂ©charge des serait mis en possession du comtĂ© de Montfort dont la valeur Ă©tait supĂ©rieure Ă celle du comtĂ© de Laval. D'Andelot, Ă 1. Cartulaire, numĂ©ro 2679. 232 LA MAISON DE LAVAL son tour, le 11 octobre 1560, obtint du Conseil PrivĂ© un arrĂȘt dĂ©cidant qu'en retour des soixante mille Ă©cus â cent trente cinq mille livres â payĂ©s par lui, il conserverait la propriĂ©tĂ© du comtĂ© de Montfort, dont il Ă©tait alors en possession, sauf cependant pour Guyonne de Laval la rĂ©serve du droit pendant deux ans d'y exercer une action en rĂ©mĂ©rĂ© '. Cet arrĂȘt du 11 octobre 1560 se termine par une dou- ble injonction Ă Guyonne il ordonne de rĂ©intĂ©grer le domicile conjugal, etaumarquis de Nesle, il prescrit de traiter humainement et gracieusement ladite de Laval comme femme et espouse et ainsi qu'il appartient Ă leur estĂąt et qualitĂ© ». Il contient en outre une interdic- tion formelle Ă Guyonne de s'immiscer dans l'adminis- tration de ses biens et d'en aliĂ©ner une portion quelcon- que. Ce serait sans doute un chapitre piquant dans l'his- toire de la maison de Laval que celui qui dans tous ses dĂ©tails ferait connaĂźtre les pĂ©ripĂ©ties de la lutte de Guyonne contre Louis de Sainte-Maure ; malheureuse- ment les actes de ces multiples procĂ©dures Ă©chappent aux recherches, on n'a pas pour y supplĂ©er la ressource des lettres missives, si prĂ©cieuses pour l'Ă©poque de Guy XVII et de Claude de Foix ; elles aussi demeurent introuvables. Cette pĂ©nurie de documents oblige Ă laisser dans l'om- bre une autre importante question, celle du protestan- tisme de Guyonne ; elle empĂȘche de prĂ©ciser l'Ă©poque oĂč elle se dĂ©cida Ă abjurer la foi de ses pĂšres et ne permet pas d'Ă©numĂ©rer les actes de prosĂ©lytisme que, sans doute, elle ne manqua point de faire dans ses fiefs en faveur des nouvelles croyances. On peut cependant signaler la note par laquelle, sans en indiquer la source, M. de la Borderie a donnĂ© comme point de dĂ©part de l'apostasie 1. On ne connaĂźt pas le texte de l'arrĂȘt du Conseil du 8 juin 1557 donnĂ© Ă une Ă©poque antĂ©rieure Ă celle oĂč commence la sĂ©- rie des Archives nationales. Celui du 11 octobre 1560 est impri- mĂ©. Voir Cartulaire, numĂ©ros 2689 et 2725. GUYONNE ET GUY XVIII 233 de Guyonne la signification qui lui aurait Ă©tĂ© faite le 20 fĂ©vrier 1558, Ă la MĂ©riaye, d'une bulle par laquelle le pape Paul IV l'aurait excommuniĂ©e Ă cause de sa con- duite Ă l'Ă©gard de GuyXVIII 1 . Cette bulle, dont le texte n'est pas connu, n'est pas nĂ©cessaire pour expliquer le protestantisme de Guyonne Ă qui il a pu ĂȘtre en quelque sorte imposĂ© par son beau-frĂšre d'Andelot, auprĂšs de qui, sans doute, elle chercha un appui dans ses dĂ©mĂȘlĂ©s con- tre son mari. D'Andelot, qui fut l'un des premiers gen- tilshommes français ayant mis leur Ă©pĂ©e au service de la cause protestante, ne pouvait nĂ©gliger une proie aussi prĂ©cieuse que Guyonne, et usa sans doute de toute son influence sur sa belle-sĆur pour obtenir d'elle qu'elle im- plantĂąt le culte nouveau dans ses domaines 2 . A VitrĂ©, oĂč Guyonne rĂ©sidait le plus ordinairement, les dĂ©buts du protestantisme datent de 1558, annĂ©e oĂč d'An- delot fit en Bretagne un cĂ©lĂšbre voyage de propagande. DĂšs 1559, la ville possĂ©dait un ministre, lequel, en 1560, y procĂ©dait Ă son premier baptĂȘme. Les progrĂšsdu nou- veau culte ne furent cependant ni bien rapides, ni bien importants ; il est facile de s'en rendre compte par le petit nombre d'actes que M. l'abbĂ© PĂąris-Jallobert a relevĂ© pour les annĂ©es 1567 Ă 1576 ; aucun en 1567, 1568, 1573, 1574 et 1575 ; deux seulement en 1569, un mariage en 1570 ; un baptĂȘme et cinq mariages en 1571 et un baptĂȘme en 1572. AprĂšs l'Ă©dit de pacification de 1576, la nouvelle religion prit certains dĂ©veloppements dans l'Ă©gli- se protestante, solennellement rĂ©tablie le 28 juin 1576 3 . 1. Cette note de M. de la Borderie se trouve dans la brochure extraite du Journal de Rennes le Calvinisme Ă VitrĂ© Rennes, 1851, p. in 8, 52 p. cotĂ©e Ă la BibliothĂšque nationale Ld 175 52. Ce petit volume est d'une raretĂ© telle que la plupart des biblio- philes de VitrĂ© ne croient pas Ă son existence. 2. Il existe un curieux tĂ©moin de l'action que, du vivant mĂȘme de sa belle-sĆur, d'Andelot exerçait dans les fiefs de celle-ci. C'est le rapport que le 15 mai 1561 Georges de Gennes lui adres- sait au sujet de la capitainerie de VitrĂ©. Voir Cartulaire, numĂ©ro 2726. 3. Voir Journal historique de VitrĂ©, p. 36. mu 234 LA MAISON DE LAVAL A Laval, dont le chĂąteau n'Ă©tait pas comme celui de VitrĂ©, la demeure permanente de Guyonnc, l'ardeur du prosĂ©lytisme de celle-ci n'eut pas une action Ă©gale ; aussi la foi catholique n'y fut-elle pas entamĂ©e de mĂȘme et Ă©tait encore intacte le jour du dĂ©cĂšs de Guyonne 13 dĂ©- cembre 1567. Charles IX, du reste, n'avait pas laissĂ© la ville exposĂ©e sans dĂ©fense aux attaques des protestants; le 14aoĂčt 1562, il avait chargĂ© Lancelot de BrĂ©e, seigneur de Fouilloux. de lever les troupes nĂ©cessaires Ă la garde du comtĂ© de Laval. Le 25 novembre 1567, il lui avait renouvelĂ© sa commission'. De son cĂŽtĂ©, l'Ă©vĂȘque duMans, Charles d'Angennes, Ă qui Charles IX avait confiĂ© le gouvernement du Maine, avait fait appel Ă Guillaume Le Breton de NuillĂ©, seigneur de Haute Folie, connu sous le nom de capitaine de la Barre, Ă qui son attitude nette- ment catholique devait valoir un jour la haine de d'An- delot?, et lui remit la garde de Laval. Le moment Ă©tait solennel ; car si Laval Ă©tait restĂ© ca- tholique, les amis de d'Andelot tenaient la campagne du cĂŽtĂ© de VitrĂ©, et en rendaient le sĂ©jour assez pĂ©rilleux pour que les chanoines du Port-Bingeard et les religieux de Clermont, sachant de quelles cruautĂ©s sans nom les huguenots usaient Ă l'Ă©gard des moines, se fussent rĂ©fu- giĂ©s en ville. Guyonne y Ă©tait, elle aussi, et son sĂ©jour insolite faisait redouter pour la ville quelque coup de main, rendu facile par la complicitĂ© des protestants do la suite de la comtesse enfermĂ©s avec elle dans le chĂąteau. Il fut dĂ©cidĂ© qu'on ferait dans Laval une grande proces- sion identique Ă celle de la FĂȘte-Dieu et qu'on y de- manderait Ă Dieu l'extirpation de l'hĂ©rĂ©sie ; le jour choisi fut le 13 dĂ©cembre 1567. Or, tandis que le Saint- Sacrement Ă©tait solennellement portĂ© de Saint-ĂŻugal Ă 1. Voir au Carlulaire les numĂ©ros 2735 et 2765. 2. Voir au Cartulaire le numĂ©ro 2776. Il est peu vraisemblable que ce capitaine de la Barre soit celui-lĂ mĂȘme qui fut si grave- ment compromis lors du pillage du Mans par les protestants en LA MAISON DE LAVAL f /^effte*Q"-S' o e^u&L' 4-95^ y* 178. â Guy XVIII Louis de Sainte-Maure. LA MAISON DE LAVAL 179. â Guyonne de Laval RenĂ©e de RieuxJ. GUYONNE ET GUY XVIII 235 la TrinitĂ©, puis ramenĂ© Ă son point de dĂ©part Ă travers les rues richement tendues ; tandis que tout le clergĂ© de la ville augmentĂ© des moines fugitifs, lui faisait cor- tĂšge ; tandis que la population tout entiĂšre le suivait en une immense procession, Guyonne, l'objet du mĂ©pris de son peuple et devenue la terreur des Lavallois, Guyonne, qu'on avait appelĂ©e du nom de la folle, se mou- rait misĂ©rablement, et le soir mĂŽme de ce 13 dĂ©cembre 1567, rendait son Ăąme Ă Dieu. MalgrĂ© con protestantisme, elle fut ensevelie Ă Saint- Tugal, mais sans aucune cĂ©rĂ©monie '. Guyonne, qui n'avait pas eu d'enfant, laissait un tes- tament datĂ© du 4 septembre 1567, lequel est visĂ© dans l'arrĂȘt du Parlement du 19 dĂ©cembre 1569, mais ne sem- ble pas avoir Ă©tĂ© conservĂ©. Lors de sa mort Guyonne Ă©tait sous le coup d'une in- formation judiciaire, grĂące Ă laquelle un arrĂȘt du 31 180. â Sceau plaquĂ© de Guy XVIII, 1548. janvier 1567 avait ordonnĂ© la mise sous sĂ©questre des fiefs lui appartenant, et qui, enfin, le 19 dĂ©cembre 1569, plus de deux ans aprĂšs sa mort, aboutit Ă un arrĂȘt qui la dĂ©clarait criminelle de lĂšse-majestĂ©, confisquait ses biens, ordonnait l'exhumation de son corps et prescrivait que dans toutes les villes oĂč ses armoiries avaient Ă©tĂ© pla- cĂ©es en lieu honorable elles fussent promenĂ©es attachĂ©es Ă la queue d'un cheval et brisĂ©es en signe d'ignominie. A l'exception de l'exhumation de son corps, ces diverses 1. Voir son Ă©pitapheau Cartulaire sous le numĂ©ro 2768. 236 LA MAISON DE LAVAL mesures furent exĂ©cutĂ©es et l'existence de cet arrĂȘt re- tarda singuliĂšrement pour Guy XIX l'Ă©poque oĂč il fut mis en possession de l'hĂ©ritage de sa tante. On trouvera ici trois monumenls relatifs Ă Guyonne et Ă GuyXVHI tout d'abord, sous les numĂ©ros 178 et 179, leurs portraits donnĂ©s d'aprĂšs les crayons originaux du musĂ©e CondĂ© ; puis, sous le numĂ©ro 180, le sceau de Guy XVIII, oĂč figure un Ă©cu de Montfort-Laval surmon- tĂ© d'une couronne de marquis, dessinĂ© d'aprĂšs l'em- preinte du 28 mars 1548, plaquĂ©e au numĂ©ro 2632 du cartulaire. Les actes 2636 et 2637, tous deux datĂ©s du 18 septembre 1548, possĂšdent chacun une empreinte plaquĂ©e sur papier, du sceau de Guyonne ; malheureuse- ment elles ne sont plus distinctes et ne sauraient ĂȘtre dessinĂ©es ; on peut affirmer cependant que le blason qui y figurait consistait simplement en un Ă©cu de Montfort- Laval, Ă peu prĂšs semblable Ă celui de Guy XVIII, des- sinĂ© ici sous le numĂ©ro 180. CARTULAIRE DE LA VAL GUYONNE ET GUY XVIII XVIII 2614-2771 1547-1567 2614. â 1547, 12 juin, Paris. - Acte par lequel Louis de Sainte-Maure, marquis de Nesle, donne Ă RenĂ©e de Rieux, sa femme, tout pouvoir pour rĂ©gler la succession de Guy XVII ImprimĂ©, du Bouchet, Coligny, 1096. 2615. â 1547, 16 juin, SaintGermain-en-Laye. â Lettres par lesquelles Henri II donne Ă RenĂ© de Rohan la charge de capitaine de cinquante homnes d'armes vacante par le dĂ©cĂšs de Guy XVII ImprimĂ©, dom Morice, III, 1059. CARTULAIRE 1547-1567 237 2616. â 1547, 4 aoĂ»t, Laval '. â Lettre Ă©crite par Claude de Foix Ă l'Ă©vĂȘque de Conserans B. N., français, 3212, 188. A monsieur de Conserans. Monsieur mon compĂšre, estant asseurĂ©e de la bonne affec- tion que vous avez tousjours eu vers mes prĂ©dĂ©cesseurs et moy, je ne veulx faillyr Ă me adresser Ă vous pour vous prier d'avoir mes affair. s en telle recommandation comme j'ay tousjours eu en vous fiance, vous asseurant quejen'ay jamays eu oppinion du contraire, quelque chose que l'on me en ayt rapportĂ©, et sçay bien que vous en avez estĂ© sollicitĂ©. Je vous advertiz que monsieur de Duza m'a faict adjourner pour reprandre ou dĂ©laisser le procĂšs pendant en la court de Parlement entre feu monsieur de Laval et luy touchant le vicomte de Fronsac, oĂč il prĂ©tend droict ; vous entendez que c'est, Ă mon advis, mieux que homme de ce monde. A ceste cause je vous pry me y estre aydant ; et si j'ay jamays moyen de le recognoistre, ce sera de tout mon cueur, moyennant l'ayde de Dieu, auquel je supply, monsieur mon compĂšre, aprĂšs mes recommandations Ă vostre bonne grĂące, vous don- ner ce que dĂ©sirez. A Laval, le im e jour d'aoust. Monsieur mon compĂšre, je vous pry me tenir excusĂ©e si la prĂ©sente n'est escripte de ma main, Ă l'occasion d'un ca- tharre qui me y est tombĂ©, de sorte que je ne puys tenir ma plume. Vostre bonne amye et conmĂšre. Claude de Foix. 2617. 1547, 5 septembre, Laval. â Lettre adressĂ©e par Claude de Foix Ă Menault de Martory B. N., français, 3212, 122. A monsieur mon compĂšre, monsieur de Conserans. Monsieur mon compĂšre, j'ay entendu par Duchesne, prĂ©sent porteur, ce que luy aviez donnĂ© charge me dire de vostre part, de quoy je vous mercye de tout mon cueur, estant asseurĂ©e que vous estes tousjours demeurĂ© en ceste bonne opinion de procurer l'honneur et le bien de ma t. Cette lettre fut Ă©crite aprĂšs le dĂ©cĂšs de Guy XVII, advenu le 25 mai 1547, mais avant que Claude eut contractĂ© sa seconde alliance. 238 LA MAISON DE LAVAL maison comme de long temps vous avez commencĂ©, et vous pry, monsieur mon compĂšre, continuer, car je vous en donne autant et plus de puissance que vous y avez jamays eu, et veulx que vous soyez obĂ©y par tous ceulx qui ont charge de mes affaires par delĂ , comme reoy mesme, et que vous retirer par devers vous tous les tiltres et enseignemens de ma mai- son en quelques mains qu'ilz soient, affin d'estre remis chas- cun en son lieu oĂč ilz se puissent trouver quand l'on en aura affaire, el en bailler descharge Ă ecluy ou ceulx que sçaurez qui en sont chargez par le rĂ©cĂ©pissĂ© mesmes que vous avez d'eulx car vous entendez quel prĂ©judice ce m'est qu'ilz soient ainsi semez czĂ et lĂ , pour le danger de mort qui peult sur- venir Ă ceulx qui en sont charger et l'ennuy que ce me seroit de les aller chercher par aprĂšs et puis me reposer du tout sur vous en cela et aultres mes affaires de par delĂ . Remectant le sourplus Ă vous dire par cedit porteur, ne vous feray plus longue lettre, sinon pour vous asseurer, mon- sieur mon compĂšre, que, lĂ oĂč je auray moyen de le recon- gnoistre pour vous ou voz amys, l'effect vous donnera bon tesmoignaige de ma volontĂ©. A tant je me recommande Ă vos- tre bonne grĂące, en pryant Dieu, monsieur mon compĂšre, vous donner ce que dĂ©sirez. A Laval, le v e septembre '. Vostre bonne commĂšre et milleure amye. Claude de Foix. 2618. â 1547, 12 septembre, la Forest-Neuvc. â Provi- sions par lesquelles Guy XVIII et RenĂ©e de Rieux maintien- nent Bertrand d'ArgentrĂ© dans l'office de sĂ©nĂ©chal de VitrĂ© B. N., français, 22342, 233. Guy et RenĂ©e, comte et comtesse de Laval, marquis et marquise de Neelle, comte et comtesse de Joigny, de Mont- fort, deQuintin, soigneur et dame de l'isle sous MontrĂ©al, baron et baronesse de VitrĂ©, vicomte et vicomtesse de Ren- nes, etc., Ă tous ceux qui ces prĂ©sentes verront salut. 1. En l'absence de tout millĂ©sime, on croit pouvoir dater cette lettre de l'annĂ©e mĂȘme du dĂ©cĂšs de Guy XVII, Ă une Ă©poque oĂč Claude de Foix avait sur 1 administration de ses biens une autoritĂ© qui ne lui appartenait pas pendant la vie de Guy XVII. Il semble bien du reste que la lettre numĂ©ro 2619, datĂ©e du 26 septembre 1547, est la rĂ©ponse Ă celle de Claude de Foix. CARTULAIRE 1547-1567 239 Sçavoir faisons que, deuement informĂ©s de plusieurs bons et loyaux services que do dix ans devers nous a faitz nostre cher et bien amĂ© conseiller Bertrand d'ArgentrĂ©, en l'exercice de l'office de sĂ©nĂ©chal de VitrĂ©, voulant par ce le bien et favo- rablement traiter et luy donner occasion de continuer de bien en mieux Ă l'advenir, Ă icelles ; pour ces causes et autres bon- nes considĂ©rations Ă ce nous mouvants, lui avons continuĂ© et confirmĂ©, continuons et confirmons ledit office de sĂ©neschal de VitrĂ©, qu'il a tenu et exercĂ© de par nostre trĂšs honorĂ© seigneur et oncle, Guy, comte de Laval que Dieu absolve, et jusques au jour de son trespas, tient et exerce encore Ă prĂ©sent. Et lequel office du tant que besoin seroit et qu'il pourrait estre dit vacant au moyen duquel trespas, luy avons de nouvel donnĂ© et octroyĂ©, donnons et octroyons par ces prĂ©sentes pour l'avoir, tenir et doresnavant exercer et en jouir et user tant qu'il nous plaira, aux honneurs, autoritĂ©, prĂ©rogatives, prééminences, franchises, libertĂ©s, gages, droits, profits et Ă©moluments accoustumĂ©s, et qui y appartiennent, sans qu'il soit pour ce requis faire autre nouveau serment que celui qu'il a fait et preste par cy-devant, ne prendre autre institution, ratification, ne expĂ©dition pour la jouissance dudit office et perception desdits gages et droits que celles qu'il a dĂ©jĂ prinses par ces prĂ©sentes. Auxquelles, entesmoin de ce, nous avons fait mettre nostre scel. DonnĂ© Ă la Forest Neusve, le douxiĂšme jour de septembre, l'an de grĂące MCCCCCXLVII. 2619. â 1547, 26 septembre, Coulommiers. â Lettre Ă©crite par Menault de Martory, Ă©vĂ©que de Conserans, Ă Claude de Foix, comtesse douairiĂš,e de Laval français, 3212, 49. A Madame de Lautrec par Jean de Molin. Madame, plaise vous savoir quej'ay receu la lettre et le povoir qu'il vous a pieu m'envoyer par monsieur le docteur Duchesne, vostre solliciteur, et par luy entendu la parfaicte confiance que avez en moy, tant en ce qui concerne le bien et protection de vostre personne, comme aussi pour la conduicte de vos procĂšs et autres affaires d'importance. Et pour ce. Madame, que je dĂ©sire sur toutes choses vous faire congnoistre pour vrais effects le grant dĂ©sir et singuliĂšre 240 LA MAISON DE LAVAL affection que j'ai de vous faire service, Ă ceste cause je vous supplie, Madame, vouloir estre bien asseurĂ©e que, en toutes les choses qui concernent le bien de vostre personne et de vos dictes affaires, que je y employeray ma vie et tout ce que Dieu m'a donnĂ© en ce monde, ainsi que ledict Duchesne vous a dict de par moy, vous avisant, Madame, que vos dictes affaires ont trĂšs bon besoing d'estre redressĂ©es et que j'espĂšre, avec l'ayde de Dieu et de vos bons serviteurs, que le tout sera remys en si bon ordre et estĂąt que vous, Madame, n'aurez Ă penser que Ă triumpher et faire bonne chĂšre, et que demeu- rerez hors d'ennuicts et fascheries, et ne vous trouverez plus en aucunes arriĂšres ne nĂ©cessitĂ©s. Et pour ce, Madame, que ledict Duchesne m'a dict que vous estiez dĂ©libĂ©rĂ©e de vous en venir bientostĂ Dozy, et que je ne fauldray point, Dieu aydant, de vous y aller faire la rĂ©vĂ©rence, pour le grant dĂ©sir que j'ay de vous veoir, et aussi de deviser plus amplement avec vous de vos dictes affaires, ne vous ennuyeray de plus longue lettre ; fors Madame, qu'il me semble que pour quelques importunitĂ©s ou procĂšs que l'on vous puisse faire, que vous ne devez despĂ©cher aucunes choses d'importance jusques audict Donzy, Ă celle fin que le tout se face avec bonne et meure dĂ©libĂ©ration de conseil et qu'il n'y aye riens Ă redire. Me recommandant, Madame, Ă vostre bonne grĂąse, tant et si trĂšs humblement que je puys, Madame, je supplie Nostre Seigneur qu'il vous donne ce que de trĂšs bon cĆur je vous souhaicte. De vostre maison, Ă Colomyers ce xxvi c septembre MDXLVII. 2620. â 1547, 14 octobre. â Aveu rendu Ă RenĂ© II de Laval-Bois-Dauphin par Guy Lasnier, seigneur de Sainte- Gemmes-sur-Loire, Monternault-l'Amaury et l'EffrediĂšre ' Cabinet de M. d'Achon. 2621. â 1547, 15 octobre, Fontainebleau. â Contrat de mariage de Charlotte de Laval, fille de Guy XVI, avec Gas- pard de Coligny, du consentement de Jean, comte de Lude, 1. Cet aveu possĂšde comme lettre initiale un D, qui est dessinĂ© ici sous le numĂ©ro 181. CARTULAIRE 1547-1567 241 et en prĂ©sence de Claude de Laval, seigneur de TĂ©ligny ImprimĂ©, du Bouchet, Coligny, 447. 2622. â 1547, 16 octobre, Bruxelles. â Lettre adressĂ©e Ă Anne de Laval par Anne de Lorraine, veuve de RenĂ© de ChĂą- lon, prince d'Orange, en la remerciant de songer Ă elle pour Blason de Laval-Bois-Dauphin 1547. devenir la femme de Louis III de la TrĂ©moĂŻlle et en s'excusant au sujet du retard de sa rĂ©ponse, sur la nĂ©cessitĂ© oĂč elle est de consulter ses parents ImprimĂ©, Lettres du X VI e siĂšcle, n°119. 2623. â 1547, 25 octobre, Laval. â Lettre adressĂ©e par Guy XVIII Ă Anne de Laval, douairiĂšre de la TrĂ©moĂŻlle Ar- chives de la TrĂ©moĂŻlle. A Madame, Madame de la Trimouille. Madame, j'ay receu la lettre qu'il vous a pieu m'escrire de Cran, et regrette infiniment que je n'estois en ce pays, lors que vous y estiĂ©s, pour avoir cest honneur de vous aller baizer 242 LA MAISON DE LAVAL les mains, comme je n'y eusse failli, et m'offrira vous rendre le bien humble service que je vous ay'veuĂ©. Madame, le gentilhomme que vous aviĂ©s envoyĂ© vers moy m'a faict entendre ce que vous luy aviĂ©s commandĂ© touchant les affaires qui sont entre messieurs vos enfanset, moy. Je vous puis asseurer que la chose du monde que je dĂ©sire le plus est d'en sortir par ung bon accort, et pour le respect que je vous veulx porter toute ma vie, je ne feray difficultĂ© d'en passer par vostre jugement. Et pour ce que le gentilhomme que vous m'avĂ©s envoyĂ© n'avoit pas Ă mon avis assĂ©s expresse charge de vous, je n'ay peu rien conduire avec luy, mais j'espĂšre dans quelque temps vous envoyer ung des miens qui en sera amplement instruit, et en cela et toutes autres choses, ma- dame, vous aurez autant de commandement sur moy que sur parent et serviteur que vous ayĂ©s au monde, qui en ceste ferme volontĂ© vous baize trĂšs humblement les mains et prie Dieu, Madame, qu'il luy plaise vous donner en toute prospĂ©- ritĂ© et santĂ© trĂšs heureuse et longue vie A Laval, le xxv e d'octobre. Vostre plus humble et obĂ©issant cousin et serviteur Laval. 2624. â 1547, 12 dĂ©cembre. â En secondes noces, RenĂ© II de Laval-Bois-Dauphin Ă©pouse Jeanne de Lenoncourt ; Guy XVIII et Claude de Laval-TĂ©ligny sont prĂ©sents 1 Note, Duchesne, Histoire, C44. 2625. â 1547, 13 dĂ©cembre, VitrĂ©. â Acte par lequel Guyonne de Laval et Guy XVIII autorisent au profit d'An- ceau de Goucelles ? l'Ă©tablissement dans l'Ă©glise de RĂ©tier d'un ban armoriĂ© Note au numĂ©ro 280 du Bulletin d 'autogra- phes, d'Etienne Charavay, 1897. 2626 â 1547, v. s., 14 janvier, Montrond. â Contrat de mariage de Charles de Luxembourg, vicomte de et de Claude de Foix, comtesse de Rethelois et de Beaufort en Champagne, vicomtesse de Fronsac, dame de Lautrec et d'Or- val, veuve de Guy XVII 2 Copie, B. N., français, 5121, 21. 1. Ici sous le numĂ©ro 182 on trouve le dessin du sceau de RenĂ© II de Laval-Bois-Dauphin. 2. Ils eurent un fils nommĂ© Henri, dĂ©cĂ©dĂ© avant son pĂšre Note du manuscrit français, 22331, 642. CARTULAIIiE 1547-1567 243 2627. â 1548. â Sonnet de Melin de Saint- Gelays pour les masques de monsieur de Martigues Ă la cour aprĂšs qu'il eut espousĂ© madame de Laval » ImprimĂ©, Ćuvres poĂ©tiques de Melin de Saint-Gelays, Paris, 1873, I, 294. AprĂšs l'heureuse honnorable conqueste que je fis d'un, de qui l'arc et la corde tient tout le monde en peine et en discorde dessous un nom aimable et honneste, J'ay sur Fortune entrepris une queste ; et si vostre aide et faveur s'y accorde j'attends l'avoir Ă ma misĂ©ricorde car par vous seul il faut que je l'acqueste. VoilĂ pourquoy j'en despars la figure qui se prendra, s'il vous plaist, pour augure de voir vaincus les trois dieux plus volages. Car ni l'Amour, ni le Temps, ni Fortune Ne peuvent nuire Ă Vertu, qui seule une Est forte, heureuse et jeune aprĂšs tous aages. 18a. _ Sceau de RenĂ© II de Laval-Bois-Dauphin. 2628. â 1547, v. s., 17 mars, Fontainebleau 1 . â Lettres par lesquelles Henry II accorde Ă VitrĂ© la levĂ©e pendant quatre ans d'un droit de cloison, dont le profit doit ĂȘtre em- 1. Sur l'exemplaire de ces lettres, conservĂ© Ă Notre-Dame de VitrĂ© il est impossible dĂ©lire le nom du lieu d'oĂč les lettres sont datĂ©es. A Leuville proposĂ© par M. PĂ ris-Jallobert, il faut, croyons-nous, substituer Fontainebleau; dont la cour ne s'est guĂšre Ă©cartĂ©e en mars 1548. Voir aux Lettres de Catherine de MĂ©dicis, les lettres datĂ©es des 14 et 17 mars 1548 publiĂ©es d'aprĂšs des originaux. 244 LA MAISON DE LAVAL ployĂ© Ă l'entretien des fortifications de la ville ImprimĂ©, Paris- Jallobert, 10. 2029. â 1547. v. s., 17 mars, Fontainebleau. - Lettre par laquelle Henri II donne son assentiment au mariage de d'Ande- lot avec Claude de Rieux ImprimĂ©, du Bouchet, Coligny, 1098. A ma cousine la marquise de Nesle, comtesse de Laval. Ma cousine, j'ay entendu par la lettre que m'avez escrite et ce que ce gentilhomme prĂ©sent porteur m'a dit de vostre part, le dĂ©sir que vous avez que le mariage de ma cousine, vostre sĆur, se fasse avec le seigneur d'Andelot, dont j'ay eu trĂšs grand plaisir pour estre, comme il me semble, le parti trĂšs Ă propos pour l'un et pour l'autre, vous advisant, ma cousine, que seray trĂšs aise d'en voir sortir l'effet ; et m'a semblĂ© que vous ne sçauriez mieux faire que d'en prendre une rĂ©solution asseurĂ©e le plutĂŽt que faire se pourra, qui sera Ă mon trĂšs grand contentement, ainsi que je l'ay plus avant fait entendre Ă cedit porteur. Priant Dieu, ma cousine, vous avoir en sa garde. Escrit Ă Fontenay-en-Brie 2 le xvn e jour de mars MCCCCCXLVII. Henry. de Laubespine. 2630. â 1547, v. s., 17 mars, Fontainebleau, â Lettre par laquelle Catherine de MĂ©dicis fĂ©licite Guyonne de Laval du mariage de sa sĆur Claude avec d'Andelot 3 ImprimĂ©, du Bouchet, Coligny, 1099. 1. Ce gentilhomme prĂ©sent porteur » se nommait Michel-An- thoine Rover ; il Ă©tait Ă© juyer et seigneur de GĂ©rizolle. Ce rensei- gnement est donnĂ© par le numĂ©ro 2631. 2. Cette lettre et le n' 2630 sont publiĂ©s d'aprĂšs un imprimĂ©, dont il n'existe aucun moyen de vĂ©rifier l'exactitude ; on les donne tels quels, mais au titre on les date de Fontainebleau, d'oĂč sont datĂ©es deux lettres de Catherine de MĂ©dicis des 17 et 20 mars 1548. 3. Cette lettre a Ă©tĂ© omise par M. de la FerriĂšre au tome I de son Ă©dition des Lettres de Catherine de MĂ©dicis. On estime qu'elle a Ă©tĂ© Ă©crite Ă Fontainebleau. Voir les notes qui accompa- gnent les numĂ©ros 2628 et 2629. CARTULAIRE 1547-1567 245 A ma cousine la marquise de Nesle, comtesse de Laval. Ma cousine, j'ay un grand plaisir d'entendre par vostre let- tre et par ce que ce gentilhomme prĂ©sent porteur m'a dit de vostre part l'affection que vous avez que le mariage de ma cousine, vostre sĆur, se face avec le seigneur d' Andelot, pour me sembler trĂšs Ă propos pour l'un et pour l'autre et aussi pour l'amitiĂ© que je porte Ă vostre sĆur, pour l'avoir nourrie; j'auray grand plaisir de lavoir accompagnĂ©e d'un si honneste gentilhomme qu'est ledit seigneur d'Andelot, vous advisant, ma cousine, que j'auray grand contentement d'entendre que vous y mettiez fin le plutĂŽt que faire se pourra ; et m'a sem- blĂ© que ne sçauriez mieux faire que de faire' prumptement sortir effet Ă la bonne volontĂ© que vous y avez. Priant Dieu, ma cousine, vous avoir en sa garde. Escrit Ă Fontenay - en - Brie le xvu° jour de mars MCCCCCXLV1I. Catherine. Le Barge, F. de LarchĂ©. 2631. â 1547, v. s., 19 mars, Paris. - Contrat de mariage de d'Andelot avec Claude de Rieux, passĂ© en prĂ©sence de RenĂ©e de Rieux, dite Guyonne, comtesse de Laval, de Louis de Sainte-Maure, de Claude de Laval, seigneur de TĂ©ligny. Afin de la remplir de ses droits dans les successions de leur mĂšre et de Guy XVII, leur oncle, Guyonne s'engage Ă aban- donner Ă sa sĆur des biens pour une valeur de trois mille cinq cents livres ImprimĂ©, du Bouchet, Coligny, 1092. 2632. â 1547, v. s., 20 mars. â Lettres par lesquelles Guy XVIII donne quittance de ses gages de capitaine de quarante lances pendant le semestre Ă©coulĂ© d'avril Ă septembre 1546 B. N., français, 28153, 157. Nous, Guy, conte de Laval, chevalier de l'ordre, cappitaine de quarante lances fournyes des ordonnances du Roy, confes- sons avoir eu et receu comptant de maistre Nycolas de Troyes, conseiller dudit seigneur et trĂ©sorier de ses guerres, par les mains de AndrĂ© DuprĂ©, payeur de nostre dite com- paignye, la somme de quatre cens quarante livres tournoys, Ă nous ordonnĂ©e par le Roy nostre dit seigneur, pour nostre estĂąt et droict de cappitaine des dites quarante lances, des quartiers d'avril, may et juing, de juillet, aoust et septembre ensuyvans, mil V e XLVI, derniers passez, qui est Ă raison, 16 246 LA MAISON DE LAVAL c'est Ă savoir cent livres pour nostre dit estĂąt ancien, pour chacun quartier, et deux cens quarante livres pour la creue de nostre dit estĂąt, Ă raison de vingt sols pour chacune lance par mois, oultre et par dessus le payement qui nous a estĂ© faict pour notre place d'hommes d'armes pour lesdits deux quartiers. De laquelle somme de quatre cens quarante livres, nous tenons pour contens et en quittons lesdits de Troyes, trĂ©so- rier, et DuprĂ©, payeur, dessusdits et tous autres. En tesmoing de ce nous avons signĂ© ces prĂ©sentes de nostre main et faict sceller du scel de noz armes 1 . Le xxâą jour de mars, 1 an mil V e quarante sept. Guy de Laval. 2633. â 1548, 7 avril, Nogent-sur-Seine. â Lettre par laquelle Catherine de MĂ©dicis prie Menault de Martory d'intervenir prĂšs de Claude de Foix, vicomtesse de Martigues, en faveur de JĂ©rĂŽme Marchand, l'un de ses secrĂ©taires, que Claude de Foix, alors comtesse de Laval, avait investi des greffes de Fronsac ImprimĂ©, Lettres de Catherine de MĂ©dicis, I, 22. 2634. - 1548. 26 avril. â DĂ©cĂšs de Claude II de Rieux, seigneur de Rochefort, comte d'Harcourt et d'Aumale, nĂ© en 1530. Il eut pour principale hĂ©ritiĂšre Guyonne de Laval, sa sĆur note du P. Anselme, VI, 769. 2635. - 1548, 7 septembre. â ArrĂȘt du parlement de Paris dans la cause pendante entre Claude de Foix et Anne de Montmorency, au sujet de la donation du chĂąteau de ChĂąteaubriant faite Ă ce dernier en 1525, par Jean de Laval B. N., français, 16791, 95. 2636. â 1548, 18 septembre. â Quittance de ce qui Ă©tait dĂ» Ă Guy XVII au jour de son dĂ©cĂšs sur ses gages de capitaine de quarante hommes d'armes dĂ©livrĂ©e par Guyonne, comtesse de Laval, sa niĂšce B. N., français, 28153, 168. Nous Guyonne, contesse de Laval, marquise de Nesle, confessons avoir eu et receu comptant de maistre Jacques 1. C'est cet acte qui possĂšde le sceau plaquĂ©, dessinĂ© ici sous le numĂ©ro 180 et qui dans la Sigillographie des seigneurs de Laval avait Ă©tĂ© donnĂ© par erreur comme un sceau de Guy XVII. CAKTULAfnE 1547-1567 147 Veau, conseiller du Roy et trĂ©sorier ordinaire de ses guerres, par les mains de AndrĂ© DuprĂ©, payeur des quarante lances fournies des ordonnances d'icelluy seigneur estans soubz la charge et conduicte de feu monsieur le conte de Laval, nostre oncle, la somme de quatre cens deux livres quinze solz six deniers deux tiers de deniers tournois, deue Ă nostre dict feu oncle, Ă cause de son estĂąt de cappitaine desdicles quarante lances, du quartier de janvier, fĂ©vrier et mars MCCCCCXLVI et ung mois vingt cinq jours eschuz le xxv" 1 ' jour de may, icelluy jour comprins, qui est le jour du dĂ©cĂšs de nostre dict feu oncle, du quartier d'avril, may et juing MCCCCCXLYII. De laquelle somme de quatre cent deux livres quinze sous six deniers deux tiers de deniers tournois, nous nous tenons pour contcn et bien payĂ©e, et en quictons lesdits Le Veau, trĂ©sorier, et DuprĂ©, payeur, dessusdicts, et tous autres, et prometons faire acquicter envers tous. En tesmoing de ce, nous avons signĂ© ces prĂ©sentes de nostre main, et faict sceller du scel de nos armes 1 , le xvm me jour de septembre l'an MCCCCCXLV1II. Gu YONNE DE LAVAL. Par madame la contesse de Laval, dame de Rieux, marquise de Nesle. Testart. 2637. â 1548, 18 septembre. â Acte par lequel Guyonne de Laval, en donnant quittance des deux cent cinquante livres dues Ă Guy XVII pour le quartier d'octobre 1546, les impute sur une somme versĂ©e en avance Ă celui-ci B. N., français, 28153, 169. Nous Guyonne, contesse de Laval, marquise de Nesle, etc., confessons avoir receu de maistre Jacques Veau, conseiller du Roy et trĂ©sorier ordinaire de ses guerres, par les mains de AndrĂ© DuprĂ©, payeur des quarante lances fournyes des ordonnances d'icelluy seigneur, estans naguĂšres soubz la charge et conduicte de feu monsieur le conte de Laval, nostre oncle, la somme de deux cens cinquante livres tournois, 1. L'empreinte du sceau plaquĂ©e sur papier n'est plus malheu- reusement bien distincte. 248 LA MAISON DE LAVAL laquelle il nous a fournyĂ« en ung rĂ©cĂ©picĂ© en papier de nostre dit feu oncle, en date du XXVII" mars V C XLVI ou nom dudit DuprĂ©, montant cent vingt-cinq Ă©cus vallant deux cent quatre-vingt une livre, cinq sous tournois ; pour lequel recepicĂ© nous luy avons fourny ceste prĂ©sente quictance pour luy servir Ă la rĂ©diction de ses comptes par ce que ledit recepicĂ© ne luy eust estĂ© vallable; et ce, pour TestĂąt deu Ă nostre dit feu oncle pour son estĂąt de cappitaine des dictes quarante lances, du quartier d'octobre, novembre et dĂ©cembre MV AL VI ; et du surplus duquel rĂ©cĂ©picĂ©, montant trente et une livres cinq sous tournois oultre les deux cents cinquante livres que monte la prĂ©sente quictance, ledit DuprĂ© nous en a tenu compte sur autres sommes de deniers Ă luy deue Dar nostre dit feu oncle. l De laquelle somme de deux cent cinquante livres tournois nous nous tenons pour contente et bien payĂ©e, et en quictons Le Veau, trĂ©sorier, et DuprĂ©, payeur, dessusdits et tous autres, et promectons faire acquicter envers tous En tesmoing de ce, nous avons signĂ© ces prĂ©sentes de nostre main et faict sceller du scel de noz armes, le xvmâą jour de septembre, l'an mil cinq cens quarante huict. GUYONNE DE LAVAL. Par madame la conlesse de Laval, dame de Rieux, marquise de Nesle. n Testart. 2638. - 1548. - Ăpitaphed'Ambroise Amy Ă Saint-Tugal La BeauluĂšre, CommunautĂ©s et chapitres, 27. 2639 - 1548, 29 septembre, FĂ©olles. - Lettre adressĂ©e Ă Anne de Laval par Pierre Meignen, sieur de Garnaud, afin de lui recommander Pierre Escot 1 ImprimĂ©, Lettres du XVI" siĂšcle, n° 121. 2640 _ Vers le 29 septembre 1548. - Lettre adressĂ©e Ă Anne de Laval par Hilaire Goguet, afin de lui recommander Pierre Escot 1 [ImprimĂ©, Lettres du XVb siĂšcle, p 175 i 1 ' ĂŻ! es t?> ien probable que sous ce nom de Pierre Escot il fnnf chercher Pierre Lescot Ă cĂ©lĂšbre architecte du Louwe nĂ© en i51o, qui fut chanoine de Paris le 31 dĂ©cembre 1554 et abbĂ© de Clermont avant 1557 voir nos Documents inĂ©dits, p 109 CAn-ruLAiRE 1547-1567 249 2641. â 1548. â Gratification accordĂ©e par Guy XVIII en faveur du mariage de François Grimaud avec RenĂ©e de la Chapelle note, B. N., français, 22319, 140. 2642. â 1548. â ProcĂ©dures entre Christophe de Thou et dame RenĂ©e de Rieux, femme de messire Louis de Sainte- Maure, chevalier, marquis de Nesle, comtesse de Laval, hĂ©ritiĂšre de Guy XVII, et encore entre Claude de Foix, dame de Lautrec, comtesse de Rethelois, douairiĂšre de Laval autorisĂ©e de Charles de Luxembourg, vicomte de Martigues, note, B. N., français, 22331, 696. 2643. â 1548, 12 novembre, Laval. â DĂ©tails de la sĂ©pul- ture de Guy XVII, d'aprĂšs les registres de Saint-Tugal Bourjolly, 1, 399. 2644. â 1548, 25 novembre. â Aveu Ă Thouars, pour la baronnie de Bressuire, par Gilles de Laval note, La TrĂ©moĂŻlle, Fiefs de Thouars, 13. 2645. â 1548, 25 novembre. â Aveu rendu Ă Thouars, âąpour la Roche-Luzais, par Gilles de Laval note, La TrĂ©- moĂŻlle, Fiefs de Thouars, 128. 2646. â 1548, v. s., 31 janvier, Laval. â Ordonnance par laquelle Robert le Bret, juge ordinaire de Laval, rĂšgle le service intĂ©rieur de l'HĂŽtel-Dieu de Laval, conformĂ©ment Ă l'arrĂȘt du Parlement du 23 fĂ©vrier 1547, v. s., ImprimĂ©, L. MaĂźtre, HĂŽpitaux de Laval, p. 29. 2647. â 1548, v. s., 16 mars. â Testament de Claude de Foix, veuve de Guy XVII, Ă©pouse en secondes noces de Charles de Luxembourg, vicomte de Martigues copie, français, 5121, 237. 2648. â 1548, v. s., fĂ©vrier, Saint-Germain-en-Laye. â Lettres par lesquelles Henri II fait don au seigneur d'Antragues et au seigneur du Bois-Dauphin, son conseiller et maĂźtre d'hĂŽtel ordinaire, des biens confisquĂ©s sur certains criminels condamnĂ©s Ă mort A. N., ZZ. 259, fol. 32j. 2649. â 1549, 27 mai. â ArrĂȘt par lequel le Parlement dĂ©cide que l'hĂŽpital de Laval sera rĂ©gi par deux ou trois administrateurs gratuits choisis entre les notables de la ville in extenso, B. N., français, 26 325, fol. 165-175. 250 LA MAISON DE LAVAL 2650. â 1549, 3 septembre, MaillĂ©. - Naissance de Jeanne de Laval-MaillĂ© qui Ă©pousa un jour François de Saint-Nectaire, seigneur de la FertĂ©-Habert note, du Chesne, Histoire, 612'. 2651. â 1549, 13 novembre. â Aveu rendu Ă Claude de Lorraine, duc de Guise, baron de SablĂ©, par le seigneur de PrĂ©cignĂ© Claude de Laval-Bois-Dauphin, aussi seigneur de Saint-Aubin-des-Coudrais note 1500 du catalogue 99 de la librairie Emile Chevalier. ^ 2652. â 1549. â Louis de Silly, seigneur de la Roche- Guyon et de Rochefort, et Anne de Laval, son Ă©pouse, pour quatre mille cinquante livres tournois qu'ils reçoivent, con- stituent au profit de l'HĂŽtel-Dieu de Paris une rente d'e cent cinquante Ă©cus d'or soleil {Documents pour servir Ă l'histoire des HĂŽpitaux de Paris, RI, 288. 2653. - Vers 1549, un 3 juin, ChĂąteau-Gontier. â Lettre adressĂ©e Ă Anne de Laval par AndrĂ© Hamelin ImprimĂ©, Lettres du XVI e siĂšcle, n° 126. 2654. â 1549. 28 novembre. â Acte de naissance de Charles de Chambes Arch. de G. 1475. Mademoiselle Anne de Laval, dameetespouzedeM. Philippe de Chambez, sieur de Montsoreau, achouscha d'ung beau fils au lieu de Challain, le jeudi XX\IIP jour de novembre MDXLIX ; et furent les pareins M. le prince de la Roche-sur- Yon et M. de Vieilleville et marraine Madame de Crapudan , et porte le nom de Charles. 2655. - 1549, v. s., 14 janvier. â Acte par lequel Anne de Laval approuve le relevĂ© des travaux faits pour elle par Lucazeau, orfĂšvre Ă Thouars, et s'engage Ă lui payer cent soixante trois livres huit sous trois deniers [Inventaire de François de la TrĂ©moĂŻlle, p. 104. 2656. â 1550, juin, Saint-Germain-en-Laye. â Lettres par lesquelles, Ă la requĂȘte d'Anne de Laval, douairiĂšre de la TrĂ©moĂŻlle, Henri H institue au bourg de Bourgouzeau une foire annuelle et un marchĂ© hebdomadaire A. N., JJ. 260 1 , n° 171. 2657 â 1550, 5 juillet, â Contrat de mariage de Pierre I de Laval-Lezay avec Jacqueline ClĂ©rambault note, du Chesne, Histoire, 621. CARTULAIRE 1547-1567 251 2658. â 1550, 29 juillet. âQuittance de ses gages comme lieutenant de la compagnie du comte du Lude dĂ©livrĂ©e par RenĂ© de Laval-Bois-Dauphin original signĂ© et scellĂ© 1 , B. N., français, 28153, 170. 2659. â Vers 1550. â Lettre par laquelle Charlotte de la TrĂ©moĂŻlle, religieuse de Fontevrault, informe Anne de Laval, sa mĂšre, que l'abhesse se propose de l'envoyer par raison de santĂ© au prieurĂ© de Gaines ImprimĂ©, Chartrier de Thouars, p. 257. 2660. â 1551, 30 avril, DouĂ©. â Lettre par laquelle Claude de la TrĂ©moĂŻlle donne quittance de cent Ă©cus, versĂ©s par Anne de Laval pour lui faciliter son voyage Ă Malte ImprimĂ©, Chartrier de Thouars, p. 342. 2661. â 1551, 27 mai, Montjean. â DĂ©cision de Guy XVIII placĂ©e au bas d'une requĂȘte des habitants de VitrĂ©, relative Ă l'organisation Ă donner Ă l'hĂŽpital de VitrĂ© ImprimĂ©, PĂąris- Jallobert, 13. 2662. â 1551, 7 juin, Le Plessis-MacĂ©. â Lettre Ă©crite par Claude de Laval-Bois-Dauphin Ă Jean Pot de Rhodes, seigneur de Chemeaux ImprimĂ©, Papiers de Pot de Rhodes, 1529-1648, a" XXXV. Monsieur mon cousin, je n'ai voulu laisser partir ce por- teur sans vous Ă©crire un petit mot pour vous faire entendre comme je prends ce soir congĂ© du Roi pour m'acheminer devant monsieur le marĂ©chal pour ce qu'il ira trop tĂŽt. Pour moi, je vous puis assurer, puisqu'il faut passer cette carriĂšre, que la chose que je dĂ©sire le plus, c'est d'ĂȘtre prĂšs de vous tant pour l'envie que j'ai de vous voir, que pour estre instruit de ce que j'ai Ă faire en vostre absence au lieu oĂč vous estes, me fiant beaucoup plus aux bons advertissements et conseils qu'il vous plaira me donner qu'Ă ce peu de sens qu'il a plust Ă Dieu me donner. Je ne vous en dirai davantage pour cette heure, mais prĂ©senterai mes humbles recommandations Ă vostre bonne grĂące d'aussi bon cĆur que pour jamais je veux demourer vostre plus obĂ©issant cousin et serviteur et fidĂšle ami. Claude de Laval. Du Plessis MacĂ©, le 6 juin 1551. 1 Voir le dessin qui accompagne le numĂ©ro 2624. 252 LA MAISON DE LAVAL -663 15ol] 15 oĂ»t> _ RĂšglement poup Saint . Nicolag de Vitre donne par le marquis de Nesle et Guyonne de Laval Note dans PĂąns-Jallobert, d'aprĂšs les archives de Notre- Dame de VitrĂ©. 2664 -1551 5 octobre, ArrĂȘt du parlement de Bretagne relatif Ă l'hĂŽpital Saint-Nicolas de VitrĂ© ImprimĂ©, PĂąris-Jallobert, 14. n P 2665 Tr7-/f 2 ' 28 ^ lin ' Sedan - Lettres P ar les q^s Henri II fait don a d'Andelot des terres de Fontete et de Noyers, situĂ©es au baillage de Troyes et confisquĂ©es par le roi lors de la dĂ©claration de guerre Note, du Bouchet, toligny, 1100. 2666. - 1552. 26 aoĂ»t. - Lettres d'Anne de Laval au heutenant gĂ©nĂ©ral du Poitou In extenso, Reme du Maine, GuTx vm Tf "\ T' Meslay - ~ Lettre adressĂ©e P ar Gu XV III de Laval a Anne de Laval en s'excusant d'avoir quitte Vitre sans avoir connu Ă temps le projet qu'elle avait d y venir ImprimĂ©, Lettres du XVI" siĂšcle. n° 132. A madame ma tante, madame de la TrimoĂŻlle. Madame ma tante, j'ay receu la lettre qu'il vous a pieu m laquelle m'a portĂ© tosmoignage de la bonne amitiĂ© que me portes pouravoĂŻr pris la peine de vous estre acheminĂ©e pour me venir visiter. De quoy bien humblement je vous mercye, estant nĂ©anmoins bien dĂ©plaisant que n'ay eut c est heur d avoir peu entendre vostre arrivĂ©e si briefve Ă Vittre, pour l'affection j'avoys et ay de m'estre efforcĂ© de vous y avoir faict la meilleure chĂšre de quoy me fusse pu adviser ; mais n'en sçachant riens les affaires oĂč je suis qui sont de telle importance que pouvez penser et sçavoir m'ont commandĂ© mon deslogement de Bretaigne pour essaier Ă y donner ordre ; qui me faict penser que vostre vertu, sur ceste ignorance, m'excusera de mon absence, et que je ne porte peu d ennuy pour ne vous avoir peu veoir avant mon desUe- ment. Vous supplyant humblement, madame ma tante me vouloir tousjours continuer le bĂ©nĂ©fice de vostre bonne -race et croyre que toute ma vie seray prest et en voluntĂ© parfaicte de vous faire service, quand vostre plaisir sera me comman- CARTULAIRE 1547-1567 253 der, d'aussi bon cueur que, y prĂ©sentant mes trĂšs humbles recommandations, supplye Dieu vous donner, madame ma tante, en bonne santĂ©, longue vie. Ă Meslay ce xim e juing 1553. Vostre trĂšs humble et obĂ©issant nepveu Ă jamais. Guy de Laval. 2668. â 1553, 22 novembre, Thouars. â Ătat des gentils- hommes, officiers de justice et autres habillĂ©s de deuil aux frais de Louis III de la TrĂ©moĂŻlle lors des obsĂšques d'Anne de Laval ImprimĂ© par M. le duc de la TrĂ©moĂŻlle dans Inventaire de François de la TrĂ©moĂŻlle, p. 185. 2669. â 1553, novembre, Thouars. â Programme dressĂ© par M. de la BourdoisiĂšre pour les obsĂšques d'Anne de Laval ImprimĂ© par M. le duc de la TrĂ©moĂŻlle dans Chartrier de Thouars, p. 70. 2670. - 1553, novembre, Thouars. â Ătat des objets prĂ©cieux destinĂ©s Ă servir Ă l'ornement de l'effigie d'Anne de Laval, le jour de ses obsĂšques ImprimĂ© par M. le duc de la TrĂ©moĂŻlle dans Chartrier de Thouars, p. 71. 2671. â 1554, 24 avril. â Aveu rendu par Guy de Laval pour Rochefort Archives de la Loire-InfĂ©rieure, B. 509. 2672. â 1554, 9 mai, Lorris. â Lettre de Guy XVIII Ă M. le duc de Nivernois original, B. N., français 3212, 50. Monsieur, j'ay receu la le'.tre qu'il vous a pieu m'escripre, maisjen'ay sceu sçavoir du porteur d'icelle quelz tiltres demandez. Je vous supplye trĂšs humblement, monsieur, d'en communiquer avec vostre conseil affm de sçavoir que c'est dont avez affaire, et s'il y a choie qui soit en ma puissance, vous le recouvrirez. Non seullement en cela, mais en toutes choses lĂ oĂč j'auray moyen de vous faire service, scray toute ma vye prest et en parfaicte voulluntĂ© de m'y employer et vous obĂ©yr d'aussi bon cĆur que, prĂ©sentant mes trĂšs humbles recommandations Ă vostre bonne grĂące, supplye Dieu vous donner, monsieur, en bien bonne santĂ© longue et heureuse vye. A Lorriz, ce ix e jour de may 1554. Vostre trĂšs humble et obĂ©issant serviteur. Guy de Laval. 254 LA MAISON DE LAVAL 2673. â 1554, 28 juin. - Transaction entre François I de ClĂšves, duc de Nevers, et Jean de Bretagne, duc d'Etampes, touchant la succession de Claude de Foix, dame de Lautrec' veuve de Guy XVII et de Charles de Luxembourg, vicomte de Martigues copie, B. N., français, 5121, 44. 2674. â 1554, 2 juillet, Dol. â Ăpitaphe de François de Laval, Ă©vĂȘque de Dol ' Dom Taillandier. Histoire de Bre- tagne, II, LXV. Messire François de Laval, Ă©vĂȘque de Dol, abbĂ© de Paim- pont el du Tronchet, qui fonda cĂ©ant douze obits, dĂ©cĂ©dĂ© le II juillet, dort ici. Requiescat in pace. 2675. - 1554, 4 octobre. â Acte par lequel Gilles de Laval-LouĂ© et MaillĂ© vend la baronnie delĂ Haye Ă Louis de Rohan-GuĂ©menĂ© Note, B. N., Dom Housseau, XIP, 5845 et 5848. 2676. â 1554, 21 novembre, Paris. â Lettres patentes par lesquelles le roi Henri II homologue la transaction du 28 juin 1554 relative Ă la succession de Claude de Foix Copie, B. N., français. 5121, 148. ^ 2677. â 1554, 13 dĂ©cembre, Coligny. â Acte par lequel Guyonne de Laval ratifie un acte du 15 novembre 1554 relatif aux droits de Claude de Rieux, sa sĆur ImprimĂ©, Notes la BeauluĂšre sur Bourjolly, 53. 2678. â 1554, v. s., 2 fĂ©vrier, ChĂąteauneuf-en-Thyme- rais 2 . â Contrat de mariage entre Jacques II de Laval-la- Faigne et Marguerite de MĂ©ziĂšres, veuve de Jean de Villiers, seigneur de l'Ătang en Saint-Cosmes de Vair 3 Note, Durand, ChĂąteau de Montuel, 22. 1. Voir sur François de Laval les notes de M. de la BeauluĂšre a la page 218 des Annales de Le Doyen. Il faut remarquer que la date 1556 a ete ajoutĂ©e par lui Ă ta copie de l'Ă©pitaphe qu'il empruntait a dom Moriee. Le document n» 2685 du Cartulaire oblige a assigner Ă son dĂ©cĂšs la date de 1554. 635, assigne Ă ce contrat la date du 2. Du Chesne, Histoire. 22 janvier. 3. De son premier mariage Marguerite de MĂ©ziĂšres avait eu comme seconde fille Marie de Villiers, qui devait, en 1563 devenir la premiĂšre femme de Jacques I de Laval'-la-Faigne' lequel se trouva ainsi gendre de la femme de son frĂšre puĂźnĂ© ' CARTULA1RE 1547-1567 255 2679. â 1554, v. s., 8 lĂ©vrier, Paris. â Contrat passĂ© entre le duc de Guise et le marquis de Nesle, d'une part, et le cardinal de ChĂątillon et Claude de Rieux autorisĂ©e par le roi, d'Andelot, son mari Ă©tant en captivitĂ©, d'autre part, dans lequel, afin de dĂ©charger le marquis de Nesle de toute la responsabilitĂ© des dettes de la maison de Laval, il est dĂ©cidĂ© que toutes ses dettes seront imputĂ©es sur le comtĂ© de Laval, lequel sera mis en vente. Les d'Andelot se chargent de faire l'avance du montant de toutes les dettes et sont investis de la charge de toutes les instances relatives Ă la maison de Laval 1 ImprimĂ©, du Bouchet, Coligny. 1100. 2680. â 1554, v. s., 18 fĂ©vrier, Fontainebleau. â Lettres par lesquelle Henri II homologue l'accord du 8 fĂ©vrier 1555, dĂ©cidant la mise en vente du comtĂ© de Laval 2 ImprimĂ©, Notes la BeauluĂšre sur Bourjolly, 50. 2681. â 1554, v. s., 4 avril. â Fragment d'un acte qui dĂ©cide que Guyonne de Laval devra rĂ©intĂ©grer le domicile conjugal et qui dĂ©clare en mĂŽme temps que le marquis de Nesle conserve l'administration des biens de sa femme Note informe, sans indication de source, imprimĂ©e dans les Notes la BeauluĂšre sur Bou/jolly, 53. 2682. â 1555, 20 mai. â Quittance de ses gages de lieutenant de la compagnie du comte du Lude dĂ©livrĂ©e par RenĂ© de Laval-Bois-Dauphin original signĂ© et scellĂ©, B. N., français 28153, 171. 2683. â 1555, 22 juillet. â Accord entre Charles Tierce- lin, seigneur de la Roche-du-Maine, tuteur de Louise de Laval-la-Faigne, et Hugues, Jacques I, Jacques II, Françoise, Jacqueline, et Madeleine, enfants de RenĂ© II de Laval-la- Faigne Note, du Chesne, histoire, 631. 2684. â 1555, 13 aoĂ»t. â Naissance de Guy XIX Note 1. Nous ne publions pas ici ce contrat d'une Ă©tendue con- sidĂ©rable dont les dĂ©cisions furent modifiĂ©es par les arrĂȘts du Conseil du 8 juin 1557 et du 11 octobre 1560. 2. Ce texte est donnĂ© sans aucune indication de source et il est affublĂ© de ce titre absolument erronĂ© TraitĂ© et contrat entre Louis de Sainte-Maure, marquis de Nesle. Claude de Rieux, dame d'Andelot, sa Jeanne, [!], François de Lorraine, duc de Guise, et le cardinal de Chaslilloii, 256 LA MAISON DE LAVAL Coligny, ImprimĂ©, du Itouchet, du livre de raison des Coligny, 1121. Le fils aisnĂ©, nommĂ© Paul de Coligny, nasquit dans un bateau sur la nviĂšre du Pau du PĂŽ, entre Chivas[so] et lan U MDLv niej0Urd ' aOUSt ' enVir ° n ** heUr6S du matin ' 2685 - 1555, 31 octobre. - ArrĂȘt par lequel le parle- ment de Bretagne, Ă la requĂȘte de Guillaume de GliviĂŽre condamne Guy XVIII, vu sa qualitĂ© d'hĂ©ritier de François de Laval, eveque de Dol, Ă rembourser au demandeur ce qui m In ? Par Cehli " Ci W oU >BMlon, Dictionnaire de* ArrĂȘts Ut, 174, d aprĂšs ArrĂȘts de NoĂ«l de Fail, livre II, chapitre 26.' 2686. - 1555, v. s. , 17 mars, Maison-Maugis. - DĂ©nombre- ment pour VitrĂ© fourni par Guy XVIII A. N., T. 1051 19 , 211. r-?f 87 ;T 1 T 556, 6 80Ăt ' Ma ' illĂ© " "- Note Sllr le dĂ©cĂšs do Gilles I de Laval-LouĂ© Arch. de Maine-et-Loire, G 1474 M de LouĂ© pĂšre de Mme de Montsoreau ala de vie Ă trĂšs- pas le vi» jour d'aougst, Ă sis heures du soir ; et fut entĂ©rĂ© le vendredi vu- jour ; le tout au [chĂąteau] de MaillĂ© , oĂč dit-on qu il a Ă©tĂ© empoisonnĂ©. 2688. _ 1556, 20 aoĂ»t, Villeneuve-Saint-Georges. - Lettre adressĂ©e par le Dauphin, depuis François II, Ă Louis 111 de la TremoĂŻlle, en sollicitant en faveur du nouveau seigneur de Bressuire une modĂ©ration des droits de rachat dus par suite du dĂ©cĂšs de Gilles de Laval-LouĂ© ' ImprimĂ©, Lettres du XVI e siĂšcle, n» 134. A mon cousin monsieur de la TrimoĂŻlle. Mon cousin, j'ay estĂ© adverty que par la mort du feu sieur de Loue, les seigneuriaulx de rachapt de la terre de Bressuyre et autres fiefz vous sont deheuz pour raison de ce que lesdictes terres sont tenues et mouvantes de vostre seigneurie et vicontĂ© de Thouars. mmmm CARTULA1RE 1547-1567 257 Et pour ce que RenĂ© de Laval, filz aisnĂ© dudit sieur de LouĂ©, est apparent hĂ©ritier, au moyen de quoy il vous est redevable, je vous ai bien voullu dĂ©pescher ce pourteur, l'un de mes secrĂ©taires, et par luy escripre ceste lettre pour la recommandation dudict de Laval, l'un de mes enfans d'hon- neur, lequel ordinairement est Ă ma suycte me faisant service, pour vous prier bien fort, mon cousin, luy faire composition si honneste desdictz droictz, qu'il puisse cognoistre de combien ceste mienne premiĂšre rĂ©quisition que vous faiz luy aura rapportĂ© de commoditĂ© et promet. Vous asseurant que ce que luy en donnerez Ă ma faveur me tournera Ă singulier plaisir, pour m'en souvenir oĂč vouldrez que m'employe Ă vous le dĂ©monstrer, d'aussi bonne voullentĂ© que je supplye le CrĂ©ateur vous donner sa saincte grĂące. De Villeneufve-Saint-Georges, ce xx e jour de aoust 1556. Vostre bon cousin FlĂźANĂOYS. 2689. â 1557, Sjuin, Rennes. â ArrĂȘt par lequel le Conseil PrivĂ© dĂ©cide que le comtĂ© de Montfort est substituĂ© Ă celui de Laval en ce qui concerne l'exĂ©cution du contrat du 8 fĂ©vrier 1554, v. s. 1 Note dans un arrĂȘt du 11 octobre 1560 imprimĂ© par du Bouchet, Coligny, 1106. 2690. â 1558, 27 avril, Paris. â DĂ©claration par laquelle Henry II autorise les habitants de VitrĂ© Ă Ă©lire Ă la pluralitĂ© des voix leur maire et les Ă©chevins Note de Chopin, du Domaine, 111,20, n°7. 2691. â 1558, 30 avril. â ArrĂȘt du parlement de Rennes relatif Ă l'administration de l'hĂŽpital Saint-Nicolas de VitrĂ© ImprimĂ©, PĂąris-Jallobert, 16. ^ 2692. â 1558, 4 mai, Laval. â Aveu fait au roi par Guy XVIII au nom de Guyonne pour les terres de Quintin B. N., français, 18697, 202. 2693. â 1558, 10 mai. â Lettre Ă©crite par Calvin Ă d'An- delot ImprimĂ©, Bulletin du Protestantisme français, III 240. ' i. C est en vain que nous avons cherchĂ© aux archives nationa- les cet arrĂȘt. La collection des actes du conseil privĂ© ne com- mence qu'Ă une date postĂ©rieure. 258 LA MAISON DE LAVAI, 2694. â 1558, mai. â Lettre Ă©crite au roi par d'Andelot ImprimĂ©, Bulletin du Protestantisme français, III, 243. 2695. â 1558, 22 mai. - Lettre Ă©crite parMacar 1 Ă Calvin ; il y est question de d'Andelot ImprimĂ©, Op. Calvini. Ă©dition Reuss, XVII. 177. 2696. â 1558, 25 mai. â Lettre Ă©crite par Macar Ă Calvin, oĂč il est question de d'Andelot ImprimĂ©, Op. Calvini, XVII, 182. 2697. â 1558, 8 juin. â Lettre Ă©crite par Calvin au roi de Navarre, dans laquelle il est question de d'Andelot ImprimĂ©, Corresp. franc, de Calvin, II, 196. 2698. â 1558, 10 juin. â Lettre Ă©crite par Macar Ă Calvin dans laquelle il est question de d'Andelot {Op. Calvini, XVII, 200. 2699. â 1558, 13 juin. â Lettre Ă©crite par Macar Ă Calvin dans laquelle il est question de d'Andelot Op. Calvini, XVII, 209. 2700. â 1558, 18 juin. - Lettre Ă©crite par Macar Ă Calvin, dans laquelle il est question de d'Andelot [Op. Calvini, XVII, 212. 2701. â 1558, 20 juin. â Lettre Ă©crite par Macar Ă Calvin, dans laquelle il est question de d'Andelot Op. Calvini, XVII, 216. 2702 â 1558, 22 juin. â Lettre Ă©crite par d'Andelot Ă M. des Gallars Op. Calvini, XVII, 223. 2703. â 1558, 26 juin. â Lettre Ă©crite par Macar Ă Calvin, dans laquelle il est question de d'Andelot Op. Calvini, XVII, 224. 2704. â 1558, 1 er juillet, Melun. â Lettre Ă©crite par d'Andelot aux protestants de Paris Op. Calvini, XVII, 228 et Bulletin du Protestantisme français, III, 245. 2705. â 1558, 3 juillet. â Lettre Ă©crite par Macar Ă Calvin, dans laquelle il est question de d'Andelot Op. Calvini XVII, 230. 1. Jean Macar fut ministre protestant Ă Paris pendant l'annĂ©e 1558 tout entiĂšre. RentrĂ© Ă GenĂšve Ă la fin de l'annĂ©e, il y mourut de la peste en 1560. CARTULAIRE 1547-1567j 259 2706. â 1558, 7 juillet, Melun. â Lettre par laquelle d'Andelot demande au ministre Macar envoi d'un ministre chargĂ© d'administrer le baptĂȘme Ă sa fille qui venait de voir le jour Bulletin du Protestantisme français, III, 247, et Op. Calvini, XVII, 241. 2707. â 1558, vers le 7 juillet. â Lettre adressĂ©e au roi par d'Andelot qui lui tĂ©moigne la satisfaction que lui a fait Ă©prouver la visite de RuzĂ©, docteur en Sorbonne et aumĂŽnier du roi, envoyĂ© par celui-ci afin de dĂ©cider le retour de d'Andelot au catholicisme ImprimĂ©, Bulletin du Protestan- tisme français. III, 248, d'aprĂšs B. N., français, 20461, 103. 2708. â 1558, 9 juillet. â Lettre Ă©crite par Macar Ă d'Andelot et remise par Antoine de la Roche-Chandieu, alors attachĂ© Ă l'Ă©glise protestante de Paris, et chargĂ© de procĂ©der au baptĂȘme de la fille que d'Andelot venait d'avoir [Op. Calvini, XVII, 242, et Bulletin du Protestantisme français, III, 248. 2709. â 1558, 11 juillet. â Lettre Ă©crite par Macar Ă Calvin, dans laquelle il estquestionde d'Andelot [Op. Calvini, XVII, 248. 2710. â 1558, 12 juillet. â Lettre Ă©crite par Calvin Ă d'Andelot ImprimĂ©, Bulletin du Protestantisme français, III, 250, et Op. Calcini, XVII, 251. 2711. â 1558, 19 juillet. â Lettre Ă©crite par Calvin au marquis de Vico ImprimĂ©, Correspondance française de Calvin, II, 206, et Op. Calcini, XVII, 255. 2712. â 1558, 26 juillet. â Lettre Ă©crite par Macar Ă Calvin Op. Calcini, XVII, 262. 2713. â 1558, fin juillet. â Lettre Ă©crite par Calvin Ă d'Andelot afin de lui reprocher la capitulation de sa con- science ImprimĂ©, Correspondance française de Calvin. II, 219. 2714. â 1558, 17 aoĂ»t. â Lettre Ă©crite par Macar Ă Calvin, oĂč il est question de d'Andelot ImprimĂ©, Op. Calcini, XVII, 291. 2715. â 1558, 26 aoĂ»t. â Lettre Ă©crite par Macar Ă Calvin, oĂč il est question de d'Andelot ImprimĂ©, Op. Calvini, XVII, 302. 260 LA MAISON DE LAVAL ^ 2716. â 1558, 4 septembre. â Lettre Ă©crite par Calvin Ă Camerarius, oĂč il est question de d'Andelot ImprimĂ© Op Calvini., XVII, 313. ' ^ 2717. â 1558, 4 septembre. - Lettre Ă©crite par Calvin Ă Charlotte de Laval, dame de Coligny ImprimĂ©, Delaborde, Coligny, I, 350, d'aprĂšs B. N., Dupuy, 102, 41. 2718. â 1558, 24 septembre. â Lettre Ă©crite par Macar Ă Calvin, oĂč il est question de d'Andelot ImprimĂ© Op Calvini, XVII, 348. 2719 â 1558, 16 octobre, Brain. â Noie sur le dĂ©cĂšs d'Anne de Laval-LouĂ©, dame de Montsoreau Arch. de Maine- et-Loire, G. 1474. Ce dit jour, XVI octobre, ala de vie Ă trespas noble dame madame Anne de Laval, dame de Montsoreau ; et a este son corjDs portĂ© le jour ensuivant en l'Ă©glise de Brain jusqu'au x e jour de novembre. Et ce dit jour fut portĂ© en l'Ă©glise de Varennes et le lendemain en l'Ă©glise Saint-Pierre-de-Rest ; et y fut jusquas au vu avril MDLXII. 2720. â 1558, v. s., 6 janvier. â Lettre Ă©crite par Marellanus Ă Calvin, oĂč il est question de d'Andelot ImprimĂ© Op. Calvini, XVII, 406. 2721. â 1558, 20 fĂ©vrier, La MĂ©riaye prĂšs VitrĂ©. â Date de la signification Ă Guyonne de la bulle de Paul IV l'excom- muniant Ă cause de sa conduite Ă l'Ă©gard de Guy XVIII Na Borderie, Calvinisme, p. 2. 2722. â 1558, v. s., 5 mars. â Lettre Ă©crite par Calonius Ă Calvin, oĂč il est question de d'Andelot ImprimĂ© Op Calvini, XVII, 471. ^ 2723. â 1559, 23 juin. â Lettre Ă©crite par Calonius Ă Calvin, oĂč il est question de d'Andelot ImprimĂ©, Op. Calvini XVII, 567. 2723 bis. â 1559, 17 novembre. - Quittance de François de Coligny, sieur d'Andelot original, signĂ© et scellĂ© ' par plaquĂ©, B. N., français 27298, 52. 1. Le sceau plaquĂ©, Ă cet acte porte un Ă©cu Ă©cartelĂ© de ColLny et de Montmorency . ° CARTULAIHE 1547-1567 261 2724 â 1560, 2 octobre. â Aveu pour Montmuran rendu Ă l'abbesse de Saint-Georges de Rennes par l'amiral Coligny et Charlotte de Laval, son Ă©pouse en partie, Cartulaire de Saint-Georges, 458. 2725. â 1560, 11 octobre, Paris. â Acte par lequel le Conseil PrivĂ© annule dans la plupart de ses clauses le contrat du 8 fĂ©vrier 1555 et dĂ©cide en mĂȘme temps que, sauf un cas de rĂ©mĂ©rĂ© pendant deux ans, d'Andelot conservera Montfort, pour se couvrir des soixante mille ccus consacrĂ©s par lui Ă l'extinction des dettes de la maison de Laval ImprimĂ©, du Bouchet, Coligny, 1006. 2726. â 1561, 15 mai â Lettre par laquelle Georges do Gennes adresse Ă François de Coligny, seigneur d'Andelot, l'Ă©tat des deniers de la capitainerie de VitrĂ© ImprimĂ©, PĂąris-Jallobert, 20. 2727. â 1561, 5 aoĂ»t. â DĂ©cĂšs de Claude de Rieux, fille de Catherine de Laval et Ă©pouse de d'Andelot ; rĂ©cit de sa mort Ph. Lenoir, Histoire ecclĂ©siastique de Bretagne, p. 67. 2728. â 1561, 27 septembre, Mathefelon. â Conlrat de mariage de Louise de Laval, fille unique de Louis de ^aval- la Faigne, avec François de Chastaigner de la Rocheposay note, du Chesne, Histoire, 632. 2729. â 1561. 10 octobre. â Accord entre Gilles Laval-LouĂ©, baron de Bressuire, la Haye, et la Motte-Saint- HĂ©raye, et Jeanne de Bretagne, veuve de RenĂ© de Laval-LouĂ©, afin de rĂ©gler le douaire auquel celle-ci avait droit, par suite de son contrat de mariage, passĂ© le 11 mars 1531, v. s., note, B. N., dom Housseau, XII 1 , 5836 et 5843. 2730. â 1561, 31 octobre, Comper. â Lettre Ă©crite par d'Andelot au duc d'Ătampes ImprimĂ©, dom Morice III 1291. 2731. â 1561, dĂ©cembre, Nantes. â Lettre Ă©crite par d'Andelot au ducd'Ătampes ImprimĂ©, dom Morice, III, 1294. 2732. â 1562, 14 mai, Montdidier. âActe par lequel Marie de Bussu, veuve de RenĂ© de Laval-la-Faigne, fait don de la terre d'Obvillier Ă son troisiĂšme fils Jacques de Laval copie, B. N. , français, 28153, 177. 17 202 LA MAISON DE LAVAL 2733. â 1562, 14 juillet. â Lettre Ă©crite par Coligny Ă Charlotte de Laval, lors du dĂ©cĂšs de Gaspard, leur fils aĂźnĂ© ImprimĂ©, Delaborde, Coligny, II, 132 d'aprĂšs Vie de Coli- gny, Cologne, 1686, 258. 2734. â 1562, 11 aoĂ»t. â Lettre Ă©crite par d'Andelot Ă Calvin ImprimĂ©, Bulletin du Protestantisme français, XVI, 103. 2735. â 1562, 14 aoĂ»t, Blois â Lettres par lesquelles Charles IX donne mission Ă Lancelot de BrĂ©e, sieur duFouil- loux ', de lever cinquante arquebusiers et cent hommes de pied pour la garde du comtĂ© de Laval, et affecte Ă leurs gages les livresque devait produire un emprunt de cette somme, prescrit par lettres du 25 juillet 1562 ImprimĂ©, Documents Godbert, p. 195. 2736. â 1502, 18 aoĂ»t. â Acte par lequel d'Andelot, muni des pouvoirs du prince de CondĂ©, de Coligny, du comte de la Rochefoucauld, du sieur do Genlis, de Jacques de Soubise et de leurs adhĂ©rents, lĂšve dans la Hesse les gens de guerre destinĂ©s Ă envahir la France ImprimĂ©, Bulletin du Pro- testantisme français XVI, 110, d'aprĂšs B. N., français 6618, 136. 2737. â 1562, 20 aoĂ»t, Cassel. â Lettre Ă©crite par d'An- delot Ă Calvin ImprimĂ©, Bulletin du Protestantisme français, XVI, 103. 2738. â 1502, 30 aoĂ»t. â Naissance de Louis de Laval- LouĂ©, fils de RenĂ© II de Laval-LouĂ© et de RenĂ©e de Rohan Note, du Chesne, Histoire, 616. 2739. - 1562, 8 octobre. â DĂ©cĂšs de RenĂ© II de Laval, baron de MaillĂ© et de la Roche-Corbon Note, du Chesne, Histoire, 615. 2740. â 1562, 11 novembre. â Ordonnance du sieur du GuĂ©, lieutenant du Roi Ă VitrĂ©, par laquelle il prescrit au gens sans aveu de quitter VitrĂ©, et aux protestants de dĂ©poser au chĂąteau toutes les armes possĂ©dĂ©es par eux ImprimĂ©, Paris-Jallobert, 21. 1. Sur ce Lancelot de BrĂ©e qu'on retrouvera plus loin, voir Angot Dictionnaire de la Mayenne, I, 420. cArtulaihe 1547-1567 263 2741. â 1562. â PrĂ©sentation Ă l'Ă©vĂȘque du Mans de Denis Gautherot, prĂȘtre du diocĂšse de Sens, pour le doyennĂ© de Saint-Tugal de Laval et la cure d'AndouillĂ© en dĂ©pendant, par Guy XVIII, comte de Laval, sire de Rieux. baron de VitrĂ© et de l'Isle-sous-MontrĂ©al Arch. de la Sarthe, G. 340. 2742. â 1562, v. s., 5 janvier, OrlĂ©ans. â Lettre Ă©crite par d'Andelot Ă la reine Elisabeth ImprimĂ©, DelaborĂ»e, ElĂ©onore de Roye, 291. 2743. â 1562, v. s., 24 fĂ©vrier, OrlĂ©ans. â Lettre Ă©crite par d'Andelot Ă la connĂ©table ImprimĂ©, Delaborde, ElĂ©onore de Roije, 304. 2744 â 1562, v. s., 5 mars. â Acte par lequel Anne de Laval vend la baronie de Luçon Ă Miles d'Illiers, Ă©vĂȘque de la ville Dom Fonteneau, XIV, 465, 473. 2745. â 1562, v. s., 13 mars. â Lettre Ă©crite par Smith Ă d'Andelot pour lui reprocher d'avoir aidĂ© de ses conseils Charles IX Ă signer Ledit d'Amboise ImprimĂ©, la PerriĂšre, Le XVI" siĂšcle et les Valois, 110;. 2746 â 1563, 13 mars. â Lettres par lesquelles Louis de Rohan-GuĂ©menĂ© procĂšde Ă l'assiette de sept mille livres de rente au profit de sa sĆur, RenĂ©e, veuve en premiĂšres noces de François de Rohan, seigneur de GiĂ©, et en secondes de RenĂ© de Laval, seigneur de LouĂ© B. N., français, 22310, 170;. 2747. â 1563, 1" avril, OrlĂ©ans. â Lettre Ă©crite Ă d'An- delot par Catherine de MĂ©dicis ImprimĂ©, Lettres de Cathe- rine deMĂ©dicis, II, 6, d'aprĂšs B. N., français, 3189, 6;. 2748. â 1563, 1 er mai. ChĂątillon. â Lettre de Charlotte de Laval, dame de Coligny, au prince de Portien original, B. N., français, 3196, 5. .4 Monsieur monsieur le prince de Portian. Monsieur, je vous remereye bien humblement de la bonne part que me faictes de vos nouvelles, ayant estĂ© bien fort aise de ce qu'elles sont si bonnes, comme on les m'a faict entendre, vous assurant que ne les sçauriez mander Ă personne qui les 264 LA MAISON DE LAVAL reçoye de meilleur cĆur que moy, ne qui soiot plus preste Ă vous faire service. Quant aux myennes, elles sont assez bonnes, veu le temps, grĂąces Ă Dieu, auquel je prie, aprĂšs vous avoir prĂ©sentĂ© mes bien humbles recommandations Ă vostre bonne grĂące, qu'il vous doinct, Monsieur, en santĂ© trĂšs bonne et longue vie. De Chastillon, ce pramyer jour de may 1563. Vostre humble et trĂšs obĂ©issante Ă vous faire servyce 1 . Charlotte de Laval. 2749. â 1563. 15 octobre. â Contrat de mariage entre Jean de Laval-LouĂ© et RenĂ©e de Roban, veuve de son frĂšre B. N., français, 22310, 178. 2750. â 1563, v. s., 18 fĂ©vrier. â Quittance de d'Andelot original signĂ© et scellĂ© 2 , B. N. français 27298, 59. 2751. â 1564, 18 juin. â Lettre Ă©crite par Catherine de MĂ©dicis au sujet de l'affaire de Cravant ImprimĂ©, MĂ©moires de CondĂ©, V. 2752. â 1564, 29 juillet. â Lettres par lesquelles Guy XVIII prĂ©sente pour la chapelle des Rivettes Nicolle Joubert Ă la place de feu Jean Esnault Bibl. d'Angers, n° 710. 2753. â 1564, 27 aoĂ»t, Essey-lĂšs-Nancy. â Contrat de mariage de d'Andelot avec Anne de Salm, sa seconde femme ImprimĂ©, du Bouchot, Coligny, 1112. 2754. â 1564, v. s., 5 janvier, ChĂątillon. â Lettre Ă©crite par Charlotte de Laval Ă RenĂ©e de France, duchesse de Ferrare ImprimĂ©, Delaborde, Coligny, II, 356, d'aprĂšs B. N., français, 3211, 27. 2755. â 1565, v. s., Il fĂ©vrier, Bergerac. â Lettre Ă©crite par d'Andelot au vicomte de Martigues, gouverneur de Bretagne ImprimĂ©, Dom Morice, III, 1345. 2756. _ 1565, 21 mai, Mont-de-Marsan. â Mandement par lequel Charles IX prescrit Ă d'Andelot de s'abstenir de venir Ă Paris original, B. N. français, 27298, 65. 1. Cette ligne derniĂšre est de la main de Charlotte de Laval. 2. Le sceau plaquĂ© Ă cet acte possĂšde un Ă©cu Ă©cartelĂ© de Coligny et de Montmorency ; il est un peu plus grand que celui du numĂ©ro 2723 bis. cartulaire 1547-1567; 265 A mon cousin, le. sieur d'Andelot, chevalier de mon ordre et cappitaine de cinquante hommes d'armes de mes ordonnances. Mon cousin, quant j'ai bien cherchĂ© les occasions qui tiennent quasy tout mon royaulme en allarme et aportent subject Ă ceulx qui n'ont pas l'intention bien nette, je trouve qu'elles proceddent de tant d'allĂ©es et venues qui sont laictes par aucun des principaux de mon royaulme, en la ville de Paris, pour les interprĂ©tations diverses que chacun y donne selon son humeur, de façon que ce a Ă©tĂ© le subject de tous les bruits qui ont couru et courent encores par mondict royaulme, semez par ceulx qui ne cognoissent pas quelle fiance j'ay de ceulx lĂ et combien ils sont esloignez de vouloir troubler le repos de mondict royaulme. Et, ne ayant meilleur remedde, pour leur oster ceste occa- sion,' durant mon absence, j'ay pensĂ© que ceulx dont leur veult naistre tel suspeçon, n'auront dĂ©sagrĂ©able, pour le bien de mondict royaulme et me satisfaire aussy en chose de telle importance, s'abstenir de tels voyages jusqu'Ă mon retour en ladicte ville, qui sera, Dieu aydant, environ la Samt-Michel prochaine, qui me faict vous prier, mon cousin, si vous y avez quelques procĂšs et affaires, les faire manyer par vos gens et procureurs, sans y aller vous-mĂȘmes, et faire, en ce fai- sant, que le zelle et sincĂšre dĂ©votion que je sçay que vous avez Ă mon contentement, au bien de mon service et repos de mondict royaulme, conduict et dispense selon les occasions et mon intention, serve Ă ce que je dĂ©sire et cognoys estre sy nĂ©cessaire pour contenir le public et tant myeulx retenir ung chascun en son debvoir ; ayant, pour donner plus de effect Ă ceste mvenne intention, escript Ă mon cousin, le mareschal de Montmorency, ne souffrir que avant mondict retour vous ne autres de ceulx que je luy ay envoyez par roolle entrent dedans ladicte ville, et Ă ma court de parle- ment surceoir la procĂ©dure de tous leurs procĂšs quand ils seront en personne, et, en leur absence, y administrer toute la plus prompte et meilleure justice que faire se pourra. Priant Dieu, mon cousin, vous avoir en sa garde. Kscript au Mont-de-Marsan le XXP jour de may 1565. Chaules. de Laubespine. 266 LA MAISON DE LAVAL 2757. - 1565, 28 juillet. - Naissance de Guy de Laval qui devait ĂȘtre un jour marquis de Nesle et Ă©pouser Mar- guerite Hurault de Cheverny, lequel fut baptisĂ© le 23 dĂ©cembre 1566 Ă MaillĂ© Note, du Chesne, Histoire, 614. 2758. â 1565, v. s., janvier. - Lettre Ă©crite par Charlotte de Laval Ă RenĂ©e de France, duchesse de Ferrare ImprimĂ© Delaborde, Coligny,\\,kĂk, d'aprĂšsB. ^., français, 3211,63'. 2759. - 1566, 14 fĂ©vrier. - Lettre Ă©crite par Charlotte de Laval a RenĂ©e, duchesse de Ferrare 8720, 63. 2760. â 1565, v. s., avril. â ArrĂȘt au profit de RenĂ© de Rohan contre Louis de Laval, au sujet d'un partage Note de Chopin, Du Domaine, II, 142. 2761. â 1566, 21 mai. - Quittance de d'Andelot original signĂ© et scellĂ©, B. N., français. 27298, 60. 1566, 6 aoĂ»t. - Guy XVIII prĂ©sente pour la chapelle des Rivettes Jean Haurez Ă la place de Nicolle Joubert, qui l'avait rĂ©signĂ©e Bibl. d'Angers, n° 710. 2763. â 1566, 22 septembre, ChĂątillon. -. Lettre Ă©crite par Charlotte de Laval Ă Madame de Soubise, lors de la mort de son mari ImprimĂ©, Bulletin du Protestantisme, II, 551, et Delaborde, Coligny, II, 425. 2764. - 1566, v. s., 15 janvier. â Date oĂč fut promulguĂ© au Mans l'Ă©dit de Paris de janvier 1563, v, s., prescrivant de commencer dĂ©sormais l'annĂ©e au premier janvier. En consĂ©quence le chapitre de la CathĂ©drale date du 15 janvier 1567 sa dĂ©libĂ©ration de ce jour Extrait de l'un des registres du Chapitre, donnĂ© par M. l'abbĂ© Ledru dans la ProvĂčice du Maine, VI, 298. Mutatio computationis anni. â Hac die mercurii sub- scripta, fuit in Palatio Regio Cenomanensi promulgatum edictum regium quo canetur quod amodo perpefuis futuris temporibus mutatio seu computatio anni fiet prima die januarii. Die mercurii, dĂ©cima quinta mensiis januarii, anno Domini MDLXVII, juxta edictum regium computando, scolasticus.... 2765. â 1567, 18 fĂ©vrier. â Pancarte concernant les statuts et ordonnances de la prĂ©vostĂ© de Laval Godbert, Documents, p. 179-190. cAnTULAinE 1547-1567 267 9766 â 1567, 20 mai. â Lettres par lesquelles Guy XVIII prĂ©sente pour la chapelle des Rivettes Jacques Eveillard Ă la place de Jean Haurez Bibl. d'Angers, n° 710. 2767. _ 1567, 17 aoĂ»t, Laval. â Procuration rĂ©ciproque, avec pouvoir de se substituer un ou plusieurs procureurs pour l'administration des terres de Laval et de Rieux, passĂ©e par Julien Duboys, seigneur de Mayneuf, et Gilles Raton, seigneur de la Ville-Auffray, sĂ©questres et commissaires au gouvernement des dites terres, suivant arrĂȘt du parlement de Paris du 31 janvier 1567 Arch. de la Mayenne, E. 183, indiquĂ© par M. Laurain. 2768. â 1567, 24 novembre. â Quittance dĂ©livrĂ©e pat- Jean de Laval-LouĂ© original signĂ© etscellĂ©, B. N., français, 28153, 185. 2769. â 1567, 25 novembre, Paris. â Mandement par leq~uel Charles IX donne Ă Lancelot de BrĂ©e, sieur du Fouilloux. la mission de commander au comtĂ© de Laval en l'absence del'Ă©vĂȘque du Mans ImprimĂ©, Documents Godbert, 197. 2770. â 1567, 9 dĂ©cembre, la Neuville. â Montre des gens de guerre de Louis de Sainte-Maure, marquis de Nesle, comte de Joigny Copie, B. N., français, 21539, 527. 2771. _ 1567, 13 dĂ©cembre, Laval. â Ăpitaphe de Guyonne de Rieux ImprimĂ©, la BeauluĂšre, CommunautĂ©s et Chapitres, 24. Cy gist le corps de trĂšs illustre et excellente Guyonne, comtesse de Laval, auparavant nommĂ©e RenĂ©e de Rieux, femme de trĂšs hault et trĂšs puissant seigneur messire Louis de Sainte-Maure, marquis de Neelle, chevalier de l'ordre du Roy, et fille de feu trĂšs illustre et excellent seigneur messire Claude, sire de Rieux, comte d'Harcourt, et de excellente [dame] Catherine de Laval, laquelle dĂ©cĂ©da au chĂąteau de Laval le xm" jour de dĂ©cembre l'an MDLXVI1, en l'annĂ©e des troubles de France pour la religion rĂ©formĂ©e. XXIV GUX XIX 13 dĂ©cembre 1567 â 15 avril 1586. Le 13 dĂ©cembre 1567, le dĂ©cĂšs de Guyonne amena pour la troisiĂšme fois en un vingtaine d'annĂ©es un chan- gement clans le sang des seigneurs de Laval Guy XVII Ă©tait un Montfort ; Guyonne une Rieux ; Guy XIX fut un Coligny. Ce nom dit assez quel parti fut embrassĂ© par le nouveau comte dans le lutte engagĂ©e par la RĂ©forme contre le Catholicisme. C'est en reprĂ©sentation des droits de sa mĂšre, Claude de Rieux, sĆur de Guyonne. que Guy XIX se trouva Ă l'Ăąge de douze ans, investi sur le patrimoine des mai- sons de Laval et de Rieux des droits que le dĂ©cĂšs de Guyonne laissait vacants. NĂ©e le 8 fĂ©vrier 1526 n. s., Claude de Rieux avait Ă©pousĂ©, le 19 mars 1548 n. s., le frĂšre cadet de Gas- pard de Coligny, François, seigneur d'Andelot, nĂ© Ă ChĂątillon-sur-Loing le 18 avril 1521, et lui avait donnĂ© quatre enfants 1° une fille, appelĂ©e Marguerite, qui, nĂ©e Ă Milan le 28 fĂ©vrier 1554 n. s., devint un jour dame de 1. Voirai! CartulairĂš les numĂ©ros et LA MAISON DE LAVAL TM©Ăii>TcouaNY jFr/wçuu de .Coitpny cl-Jm/tlvt ââ,!,â ,ÂŁâ. lic/aiĂŻ fisk tA/slnura/. X Photulypie Berlhaud, Paris l,S,-> __ Poitrail de d'Andelot Crayon / 1 INART. â'!!?,- l " 4 ' 31 mars ' Vincennes. - Mandement par le- Sa n t M 6S 1 ĂŻ T"' " Si6Ur dU F ° uiIi0UX ' cheva '- ^ Saint-Michel, de lever cent hommes d'armes, afin d'ĂȘtre en force dans la ville de Laval et limite Ă deux mois le temps pendant lequel l ul et ses troupes seront payĂ©s par la vX Imprime, Documents Godbert, 199. Jea'nTe m ^ " TP' T ° UrS " ~ A ° te ^ h ^ le » tri de PI, T' Ă« iT? 1 d6S fmanCeS ' -"exĂ©cutoires les let- st'ĂŻĂŻr 2l mars i574im ^ mĂ© ' *~* 2823. - 1574 10 juin. -Quittance dĂ©livrĂ©e par Jean de S' ^N Ă ; MaUlĂ© ' se ^eur ^ LouĂ© Original signĂ© et scelle, tS. N., français, 28153, 215. ft, 2824 ' r\!^ 4 '- 15 a ° Ăt ' M ^»y-I"EvĂŽque. - Lettre de Ca- therin* de Medios Ă Monsieur de BelliĂšvre ; elle y donne ses instructions sur la conduite Ă tenir Ă l'Ă©gard de" Guy XIX t-, ^.ĂŻr Imp " imĂ© ' Lmre " de Catherinede ul - Quant au dict sieur de Laval, j'avois cv devant escrint au sieur de Haulefort, vostre frĂšre, qu'il eusfĂ luy dire qu'i s en revint en ce royaulme ou, Ă faute de ce faire, que Von procĂ©dĂšrent Ă la saisie de ses biens. Touttefoys il luy a semblĂ© que cela ne se devoit haster. Je dĂ©sireroys bien qu'il feust de deçà , afin qu estant par delĂ il ne soyt en danger d'estre sĂ©- duict ou pour entrer en quelques response du payement des reistres ou de faire mauvaise chose au prĂ©judice des affaires du Roy, mondit sieur et 01s, et de son service. NĂ©anmoins lĂ ou vous verrez n'estre Ă propos de l'en pousser, vous le pourrez tousjours admonester de se gouverner saigemenl par delĂ ainsi que je suis advertye qu'il a faict jusques icy, sans pourl suivre aucune chose prĂ©judiciable au service du Roy mondit sieur et filz, qui, en ce faisant, le traictera favorablement CARTULAIRE 1568-1586 301 2825. â 1574, 6 septembre. â Acte par lequel RenĂ© de Rieux, bail de Guy XIX, rĂšgle en son nom le diffĂ©rend qui existait entre le comte de Laval et le prieurĂ© Saint-Martin de Laval Note de Bourjolly, II, 11. 2826. â 1574, 20 octobre. â Quittance dĂ©livrĂ©e par Jean de Laval-LouĂ© Original signĂ© et scellĂ©, B. N., français, 28153, 186. 2827. â 1575, 20 novembre. â Mariage de RenĂ©e, fille de Pierre I er de Laval-Lezay et de Jacqueline ClĂ©rambault, avec RenĂ© de Bouille, comte de CrĂ©ance Note, de Chesne, His- toire, 622. 2828. â 1576, 28 fĂ©vrier. â Quittance dĂ©livrĂ©e par Jean 191. Sceau de Jean de Laval LouĂ©, 1576. de Laval-LouĂ©, capitaine de trente lances des ordonnances du roi Original, signĂ©et scellĂ© 1 , B. N., français, 28153, 216. 2829. â 1576, 6 juillet. â Moyens d'opposition de Guy XIX contre des lettres royales du mois d'octobre 1575, au profit du sieur d'Espinay A. N., AA. 60 . 2830. â 1577, 24 janvier, VitrĂ© âMandement de Guy XIX relatif au guet Ă faire dans le chĂąteau de VitrĂ© par les hom- mes des paroisses Original, aux Archives de la TrĂ©moĂŻlle, achetĂ© Ă la vente Pichon. Guy, comte de Laval, de Montfort, Quintin et Harcourt, baron de VitrĂ©, la Roche-Bernard et Ancenis, viconte de Rennes, de Donges et Lislebonne, sires de Rieux, Rochefort, 1. Sous le numĂ©ro 191, on donne ici le dessin du sceau plaquĂ© Ă cette quittance, et sous le numĂ©ro 190 le dessin d'un sceau du mĂȘme personnage donnĂ© d'aprĂšs une empreinte de 1567. 302 LA MAISON DE LAVAL la Roche en Nord, etc., Ă noz amez et fĂ©aulx nostre sĂ©neschal, allouĂ©, procureur et autres noz officiers de ceste ville, chas- tellainye et jurisdition de VitrĂ©, salut. Comme, pour le dĂ©sir que nous devons avoir Ă la conser- vation de nous et de noz subgectz en icelle jurisdition, et nous maintenir autant qu'il nous sera possible en repoz et seurtĂ©, suyvant le vouloir et intencion du roy, nous avons avisĂ© de cercher et procurer les moyens qui nous pourront estre en cela plus doulx, propres et convenables, en quoy nous vou- lons tousjours embrasser la bonne affection que nous ont nos- dits subgectz, Ă ces causes nous vous mandons et enjongnons que vous ayez incontinent de par nous Ă advertir tous les trĂ©soriers des parroisses de cestedite chastellenye et jurisdi- tion qu'ilz apportent pardevers nous les roolles au vray de ceulx qui sont tenuz au devoir de guetz, pour aprez iceulx appeller et faire venir en tel nombre qu'il sera avisĂ© pour faire le guet et garde en cestedite ville et chasteau autant qu'il sera nĂ©cessaire, dĂ©clarans par cesdites prĂ©sentes que, faisant chacun d'eulx ce qui est dudit devoir et service ainsy qu'ilz y seront appeliez et nommez Ă tour de roolle, nous voulons qu'ilz soient deschargez et quictes de ce qu'ilz doivent et sont tenuz en argent Ă cause desdits guetz et qu'ilz n'en soient recercliez aucunement tant qu'ilz feront ledit service. De ce faire vous avons donnĂ© pouvoir et commission par cesdites prĂ©sentes, mandant Ă tous nosdits parroissiens qui sont tenuz ausdits guetz d'y obĂ©yr pour nostredite garde et conservation, ainsy que dict est, sur les peynes, en cas de deffault, que verrez appartenir. Faict en nostre chasteau dudict VitrĂ©, le vingt et quatriesme jour de janvier, l'an MV C LXXVII. Guy de Laval. Par commandement de mondict seigneur '. Bayle. 2831. â 1577, 16 fĂ©vrier, Angers. â Mariage d'Urbain de Laval-Bois-Dauphin, avec Madeleine de MontĂ©cler Note, B. N., français, 28154, 350. 1. Voir sous les numĂ©ros 186 et 187 le fac-similĂ© de la signature apposĂ©e a cet acte par Guy XIX et le dessin du sceau qu'il pos- sĂšde. CARTULAIRE 1568-1586 303 Contrat de mariage de haut et puissant Urbain de Laval, gentilhomme de la Chambre du Roy, seigneur de Bois-Dau- phin, vicomte de Bresteau, de Saint-Aubin, d'Ainay, de BaĂŻf, d'AillignĂ© et de ParillĂ©, demeurant au lieu de Bois-Dauphin, parroisse de Saint-Pierre de PrĂ©cignĂ© en Anjou, assistĂ© de haut et puissant messire Henry de Lenoncourt, naguĂšres son curateur, chevalier de l'ordre du Roy, capitaine de cinquante hommes d'armes de ses ordonnances, chambellan de Mon- sieur, frĂšre du Roy, et seigneur de Lenoncourt, de Coupevrai et de Saint-Amand, et dame Françoise de Laval, sa femme, sĆur du futur Ă©poux ; acordĂ© le 16 fĂ©vrier 1577 avec damoi- selle MadelĂšne de MontĂ©cler, fille aĂźnĂ©e de noble et puissant messire RenĂ© de MontĂ©cler, chevalier, seigneur de Bourgon, de Montaudain, de Torbeschet, de Barge, de BoisemparĂ©, des Granges et de Saint-Remy, et de dame Claude des Hayes, sa veuve, dame de Fontenailles, la Ville et le Breil, demeurante au chasteau de la Guierche, paroisse de Saint-Aubin de Lui- gnĂ©, assistĂ©e de noble et puissant messire Louis de MontĂ©cler, son curateur, seigneur de Courcelles, chevalier de l'ordre du Roy ; et de dame RenĂ©e de MontĂ©cler, sa femme ; et de dame RenĂ©e de JonchĂšres, dame de Coulonges, â lesdicts Louis, RenĂ© et RenĂ©e, oncles et tante de la future Ă©pouse, â et par l'avis de darooiselle Urbanne de Laval, fille d'honneur de la Reine rĂ©gnante et sĆur dudiot sieur de Bois-Dauphin, de messire François Le Cirier, chevalier de l'ordre du Roy. seigneur de Semur, noble et puissant messire Claude de la Jaille, chevalier de l'ordre du Roy, seigneur d'AvrillĂ© et de la ThuandiĂšre, parens dudict seigneur de Bois-Dauphin ; de messire Jean de Chahanay, chevalier de l'ordre du Roy, sei- gneur de Cheronne, noble et puissant messire Jean de Ville- neuve, seigneur dudict lieu, aussi chevalier de l'ordre ; mes- sire Louis de ChivrĂ©, seigneur de la Chevalerie, parens de la future Ă©pouse. Ce contrat reçu par Maturin GrudĂ©, notaire Ă Angers, fut passĂ© dans la maison abbatialle de Saint-Aubin d'Angers, prĂ©sens nobles hommes RenĂ© de Ciriers, seigneur du Butz, Julien de Fontenailles, seigneur de Moulins, paroisse de Beau- mont-Pied-de-BĆuf. et nobles hommes maistres François Grimault, sieur de la Croizerie, François Le FĂšvre, sieur de LaubriĂšre, avocats demeurans Ă Angers ; nobles hommes 304 LA MAISON DE LAVAL Charles Olivier, sieur des Brosses, conseiller et maistre des requestes du duc d'Anjou, demeurant Ă Bellande en Dunois ; maistre RenĂ© Gastin, sieur de la PrevostiĂšre, avocat demeu- rant au Mans ; maistre Julien Le Fevre, sieur de la Poterie, avocat au siĂšge prĂ©sidial du Mans. 2832. â 1577, fĂ©vrier. â Contrat de mariage d'Urbain de Laval-Bois-Dauphin avec Madeleine de MontĂ©cler, fille de feu RenĂ© de MontĂ©cler et de Claude des Hayes, celle-ci veuve en secondes noces depuis 1574, de Baudoin de CoulĂąmes' Ori- ginal au chĂąteau de Bourgon. 2833. â 1577, 5 mars, VitrĂ©. â Etat de la maison de Guy XIX Copie. B. N., français 22310, 315. Rolle des gentilshommes, cappitaines et officiers et servi- teurs estant de prĂ©sent Ă la suite de monseigneur le comte de Laval. Gentilshommes M. de Beaufeu. M. des Cros, M. de Vau- gais, M. de JangĂ©, M. de Mongla. M. de Mignonville, M. de PicassiĂšre, M. d'Argenlieu, M. de Pierreficte, M. de Busanval, M. DolfĂ©, M. du Mottel, M. de la Covaide ? Cappitaines VaudrinĂšre, La Gaye, La Salle, Arramon, La Brosse, Bricotte, DoultrĂ©, MoriniĂšre, Jean Nicolle, La Bille, Souette, Hauteville, Lainel. Maistres d'hostel et officiers M. de Sigon, M. des Housches, M. Poupart, Bayle, secrĂ©taire, le conterolleur Gilibert gĂ©nĂ©ral, le conterolleur de la maison, l'argentier, Perclos, Couette, Du MĂ©e, Planeval, le forrier, le tapissier! Valets de chamhre Le Noir, Droin, Lapierre, le chirur- gien, le tailleur, le valet garde-robbe. Sommellerye François, Nicollas, Michon, Michel, Jean du Four, Henry, Jean le Boyteux. Cuisine M. Jean Lescuyer, M. Martin, CarrĂ©, AndrĂ©, Thomas, François, troys marmitons, un lave vaysselle. Escuyrie M. de Champfestu, escuyer. Paages Montfou, Quercyn, Diesbac, Barvileste, Brosset, Tronssay Le Parc, le petit Diesbac. Lacques L'Espaignol, Bonheul, Le Camuz, Fizicque. Pallefiieniei!s Claudes, Pierre, le marĂ©chal, le mulletier, 1. Voir Province du Maine, IV, 225. CAIITULAIRE 1568-1586 305 deux charretiers, sept garçons d'estable, troys suisses, ung portier, un vallet deferriĂšre, ung prouvoyeur et troys hommes, les boullangiers, les lavandiers, le chenetyer. Faict Ă VitrĂ©, le cinquiesme jour de mars 1577. Guy de Lavai.. 2834. â 1577, 20 juillet, Laval. â RĂšglement par lequel Guy XIX fixe les conditions de la fabrication et du blanchis- sage des toiles Ă Laval et prescrit la nomination de quatre visiteurs des toiles Copie, A. N. , AA. 55, dossier 1516. Guy, comte de Laval, de Montfort, Quintin et Harcourt, baron de Vil rĂ©, la Roche-Bernard et Ancenis, vicomte de Rennes, de Donges et Lislebonne, sire dĂ© Rieux, de Roche- fort et de la Roche en Nord, etc., Ă tous ceulx qui ces prĂ©- sentes lettres verront, salut. Noz chers et bien amez les bourgeoys, marchans et habitans de nostre ville de Laval nous ont faict remonstrer que le prin- cipal moyen que eulx et le menu peuple de nostre comtĂ© ont eu par le passĂ©, et ont de prĂ©sent, de subvenir aux nĂ©cessitez de la vie provient de l'abondance des lins qui y croissent par leur labeur et industrie, que nosdits subjectz du plat pays sĂšment, prĂ©parent et fillent, affin d'en faire des toilles pour, aprĂšs qu'elles ont estĂ© vendues au marchĂ© de Laval aux mar- chans et bourgeoys de nostredite ville et fausbourgs de Laval, estre blanchies es lavanderies Ă eulx concĂ©dĂ©es par noz prĂ©- dĂ©cesseurs comtes Ă ceste fin, pour eulx et leur usaige seulle- ment et non pour aultres, de sorte que de ceste seulle manu- facture, toilles et blanchisseures tout le menu peuple de nostre- dite contĂ© en est substantĂ©, lequel ledict pays aultrement pour estre de soy infertille de bledz, grains et aultres chosses nĂ©cessaires Ă la vie de l'homme ne pourront soustenir et substanter, lesquelles toilles, d'aultant qu'elles sont prĂ©parĂ©es Ă l'usaige de l'estranger et non pour estre dĂ©bitĂ©es en ce royaulme, nosdits bourgeoys, marchans et habitans de nos- tredite ville ont accoustumĂ© de tout temps de vendre aux marchans des nations estrangiĂšres d'Espaigne, Portugal, Barbarie, GuynĂ©e, Indes Orientalles et Occidentalles, Ăšsquelles nations elles sont dĂ©bitĂ©es et usĂ©es ; et s'ilz en vendent aul- cunes aux marchans demeurans en ce royaulme, ce n'est pour l'usaige dudict royaulme, mais pour les porter vendre esdits pais estrangers ; l'entiĂšre manufacture, prĂ©paration et louaige \ 1 306 LA MAISON DE LAVAL desquelles toilles, comme estant de l'industrie et invention de nosdits subjcctz, le traffic d'icelle aussi leur a de tout temps appartenu en nostredite ville de Laval prisvativement Ă tous aultres marchans estrangers ou forains de nostredite ville et comtĂ©, et lesquelz estrangers et forains de tout temps les ont achaptĂ©es toutes blanchies, appareillĂ©es de leurs fĂąchons, empacquetĂ©es de nosdits subjectz, sans qu'ilz se soint ingĂ©rez ne entretenuz de faire blanchir, appareiller et empacqueter en nosdites lavanderies aulcunes toilles escreues qu'ilz eussent achaptĂ©es audit Laval ou ailleurs, conformĂ©ment Ă la forme que a acoustumĂ© d'estre gardĂ©e en touttes aultres villes bien pollicĂ©es, tant de ce royaulme que des nations estrangĂšres, qui est que ceulx qui par leur industrie ou labeur et commo- ditĂ© du paĂŻs oĂč ilz ont estĂ© nez et eslevez, ont inventĂ© et en- tretenu quelque manufacture utille au publicq, ont estĂ© prĂ©vil- laigiez d'en avoir seulx la manufacture, exercice et tralicq en la ville et au lieu oĂč la manufacture et marchandie croist et s'exerce privativement au forain et estranger, estant trĂšs rai- sonnable que chacun recueille plus tost le fruict du pais oĂč il est nĂ© et nourry, et de son labeur et industrie que souffrir que l'estranger, qui n'y a riens apportĂ©, le luy ravisse des mains et comme de sa maison ; considĂ©rĂ© mesmement que cest mar- chandie destinĂ©e pour l'usaige de l'estranger, non de ceulx en royaulme, et que, pour considĂ©ration du peu de gaign qu'ilz peuvent faire de ceste manufacture et trafĂźcq, ilz sont surchargĂ©s de diverses charges et subcides, nĂ©anlmoings aulcuns marchans espaignolz, portugailz et aultres estrangers et forains, qui depuis quelque temps se sont habituez en aul- cunes des villes maritines de ce royaulme, jaloux et envieulx du peu de proffuct que nosdits subjectz prenoint avecq eulx, puis quelque temps se sont efforcez et efforcent de transphĂ©rer et tirer Ă eulx tout le promet de la manufacture, prĂ©paration et trafĂźcq desdites toilles par le moyen de quelques facteurs et entremeteurs de nosdits subjectz qu'ilz interposent pour achapter pour eulx, moyennant quelque certain pris pour aulne qu'ilz leur donnent, haulsant lesdites toilles de pris excessif et non accoustumĂ©, et, aprĂšs les avoir achaptĂ©es escreues contre la forme ancienne, se ingĂšrent aussi contre les prĂ©vilaiges de ceulx de nostredite ville, forme et charges anxiennes, ausquelles les lavanderies ont estĂ© par noz prĂ©dĂ©- ! CARTULMRE 1568-1586 307 cesseurs accordĂ©es Ă tous nosdits subjectz, faire blanchir et appareiller Ăšsdites lavanderies tant les toilles qu ilz font acliapter audict Laval que dehors et pour attirer les lavan- diers Ă ce faire, ilz leur en payent pris excessif et non accous tumĂ©, de sorte que par ces moyens indirectz, non seullement la marchandise est en ung instant grandement haulcĂ©e de son pris accoustumĂ© de fason que nosdits subjectz ne peuvent faire aulcune emplecte pour eulx pour contynuer leur traficq, du- quel ilz sont frustrez par le haulcement que y meptent lesdicts estrangers. Mais il en advient aussi deux aultres inconvĂ©niens trĂšs grandz au prĂ©judice du publicq l'un est que ladite mar- chandie de toille en est excessivement enchĂ©rie ; l'aultre que les manoupvriers, tissiers et ceulx qui appareillent lesdictes toilles, voyant lesdicts estrangers et forains si eschauffez Ă l'achapt d'icelles, se licentient facillement de faire une infinitĂ© de faultes, tromperies et desguissemens tant Ă l'Ă©toffe et fason, ce que ayant estĂ© auitreffois par nostre trĂšs honorĂ© sieur uncle et tuteur monsieur l'admirai remonstrĂ© Ă Sa MajestĂ©, auroit obtenu ses lettres patentes dĂšs le trĂ©ziesme septembre mil cinq cens septante et ung affin de establir et faire observer en la manufacture, prĂ©paration, vente et achapt desdites toilles tel reiglemenf qu'il seroict advisĂ© et ordonnĂ© par noz officiers tant pour les biens de nosdicts subjects, marchanset habitans de nostredite ville et comtĂ© et du publicq du pais ; mais tant pourledĂ©ceix de nostredict sieur et tuteur que troubles depuis survenuz, lesdictes lettres n'auroint peu estreminses Ă effeict et plus ses abus pourroint pulluler s'il n'y estoict par nous pourveu promptement par ung bon et raisonnable reiglement suyvant lesdictes lettres, affin de faire cesser touttes lesdittes faultes et abus. Et, aprĂšs avoir ouy sur touttes ses chosses plussieurs desdits marchans tissiers, lavandiers et aultres entenduz en la manu- facture, nĂ©gociation et traficq de ladicte marchandie, ensemble aulcuns particuliers, marchans forains, qui, tant pour eulx que aultres, nous auroinct prĂ©sentĂ© requeste signĂ©e de plus- sieurs marchans forains et estrangers, contenant les remons- trances que sur ce ilz avoinct Ă nous faire ; et finablement, aprĂšs avoir le tout confĂ©rĂ© et eu l'advis tant de noz officiers en nostre comtĂ© de Laval, bourgeoys et marchans et aultres de nostre conseil, avons, par forme de pollice et reiglement et 308 LA MAISON DE LAVAL jusques ad ce que autrement y aict estĂ© pourveu, ordonnĂ© les poinctz et articles cy aprĂšs dĂ©clarez estre gardez et observez en noz villes et forsbourgs et contĂ© de Laval, pour la manu- facture, blanchisseure et trafficq desdites toilles '. I- â Que les toilles qui seront exposĂ©es en vente au marchĂ© dudict Laval seront de, la largeur par cy devant ordonnĂ©e, tant par les ordonnances anxiennes, qui est de deux tiers, deux poulces, aulne de Laval, et celles qui ne seront de ceste lar- geur seront contremarquĂ©es de la faulce marque, comme non loyalles ny marchandes ; et sera celluy qui en exposera en vente de moindre largeur, deux moys aprĂšs ces articles pu- bliez, oultre condempnĂ© pour chacune piĂšce de la quallitĂ© susditte en cent soulz tournoiz d'amende. II. â Seront lesdictes toilles faczonnĂ©es d'une mesme fac- zon, serrĂ©es Ă©gallement par les deux liziĂšres et millieu, et Ă ceste fin tiendront les tissiers leurs lames esgallement com- passĂ©es sans les tenir plus lasches par le melieu que les liziĂšres, comme ilz en ont abusĂ© par le passĂ©, et les toilles faictes aultrement seront confisquĂ©es, arses etbruslĂ©es comme desloyalles, et oultre celluy qui les aura ainsi falcifiĂ©es com- dempnĂ© en dix livres d'amende pour chacune piĂšce de toille. III. âą- Seront aussi lesdites toilles faictes et fasonnĂ©es uniement, c'est assçavoir de fil de pareille filleure et bontĂ©, sans entremeller soict au meillieu ne aux liziĂšres de la chaigne ne en la teslure de la toille de fil plus gros, gastĂ©, empirĂ©, pourry ou d'aultre quallitĂ© et de moindre valleur, sur peyne aussi de confiscation de la piĂšce de toille et de dix livres d'a- mĂźnde. IV. â Touttes les toilles destinĂ©es pour estre vendues Ă Laval seront sans empeschement apportĂ©es au marchĂ© de Laval pour y estre vendues et non ailleurs, et est deffendu Ă touttes personnes de quelque quallitĂ© et condition qu'ilz soint, de la ville et forsbourgs et comtĂ©, ensemble aux forains et estrangers d'icelles achapter hors le marchĂ©, enerrer ou barguyner par eulx ou interposĂ©es personnes, facteurs et nĂ©gotiateurs, et d'aller au devant des tissiers et vendeurs, sur 1. Pour rendre plus faciles Ă saisir les dispositions prises par Guy XIX, on a ajoutĂ© des numĂ©ros en tĂȘte de chacun des articles de ce rĂšglement. CARTULAIRE 1508-1586 309 peync au vendeur de confiscation de la toille, et achapteur de cinquante livres d'amende. V. â Pouront les marchans desdites villes et forsbourgs achapter touttes sortes de toilles qui seront exposĂ©es en vente audict marchĂ© et non ailleurs Ă touttes heures indiffĂ©remment pourveu qu'elles soinct de fason, bontĂ© et quallitĂ© cy dessus dĂ©clarĂ©e, et que ce soict pour eulx et sans fraulde. Et au regard des marchans forains et estrangers, pouront achapter audict marchĂ© et non ailleurs touttes sortes de toilles de la quallitĂ© suĂ ditte, c'est assçavoir, depuis Pasques jus- ques Ă la Sainct-Michel aprĂšs l'heure de neuf heures sonnĂ©es Ă l'orloge du chĂąteau, et depuis ledict jour Sainct-Michel jusques Ă Pasques aprĂšs l'heure de dix heures sonnĂ©es Ă la mesme orloge et non plus tost, soict par eulx, ou interposĂ©es personnes dudict Laval ou d'aultrelieu, sur peyne de forfaire touttes les toilles. lesquelles ils auroint achaptĂ©es, barguy- gnĂ©es ou enerr'Ă©es paravant les heures dessus dĂ©clarĂ©es. VI. â Deffendons trĂšs expressĂ©ment Ă tous lavandiers d'a- chapter Ă l'advenir audict marchĂ© aulcunes toilles pouraultres que poureulx, soict pour les mananset habitans dudict Laval, forains ou estrangers, sur peyne d'estre privez de se pouvoir par cy aprĂšs entremeclre de l'estat de buandier et cinquante livres d'amende pour chacune fois qu'ilz seront trouvez con- trevenans Ă la prĂ©sente ordonnance. VIL â Tous lavandiers seront tenuz de bien et deubment blanchir, laver et appareiller les toilles qui leur seront bail- lĂ©es pour ce faire, sans les laisser brusler, pourrir, dĂ©chirer ou endommaiger, sur peyne aux contrevenans d'estre privez de leur estĂąt de lavandier, de rĂ©parer le dommaige qu'il au- roictfaict aux bourgeoys ou marchans, duquel il auroict ainsi corrompu et empirĂ© les toilles, et d'amende arbitraire. VIII. â D'aultant que les buanderies et laveries dressĂ©es et establies sur nostre ripviĂšre de Laval sont de nostre vray patrimoyne et dommaine, concĂ©dĂ©es par noz prĂ©dĂ©cesseurs pour en gratiffier noz subjectz, marchans et habitans de nos- tredite ville, forsbourgs et comtĂ© de Laval et pour leur usaige seullement et non d'aultres, laquelle concession, encores que le revenu et ferme ordinaire de nostredite ripviĂšre en soict grandementdymynuĂ©,nousvoullonsetdĂ©sironsleurconserver. Deffendons trĂšs expressĂ©ment Ă tous lavandiers et buan- 20 310 LA MAISON DE LAVAL diers de buander, laver et blanchir aulcunes toilles pour aul- tres que pour noz subjectz, bourgeoys, marchans, manans et habitans de noz ville, faulxbourgs et contĂ© de Laval, et non pour les forains et estrangers, sy ce n'estoict pour leur usaige et par nostre permission seullement, sur peyne d'estre privez de leurs dites buanderies, et ne s'en pouvoir Ă l'advenir en- tremettre dedans'le ressort de nostredite contĂ© et de cinquante livres d'amende envers justice, dĂ©clarans oultre que nous ferons rĂ©aulment et de faict abaptre et desmollir les arrivouers et Ă©diffices construictz en et sur nostredite ripviĂšre pour lesdites buanderies et laveries de ceulx qui seront trouvez avoir contrevenu Ă la prĂ©sente deffense et injonction. IX. - Deffendons aussi sur pareilles peines ausdits buan- diers de blanchir et laver en leurs lavanderies aulcunes toilles apportĂ©es de dehors qui n'auront estĂ© vendues audict marchĂ© de Laval et marquĂ©es de la mercque ordinaire dont on a acoustumĂ© de marcquer les toilles loyalles et marchandes vendues audict marchĂ©. X. â Et, pour l'entretenement des poinctz et articles sus- dicts et Ă ce que le traficq desdites toilles puisse estre main- tenu hors de touttes faulles, tromperies et abuz, avons or- donnĂ© que Ă l'advenir il y aura quatre visiteurs desdictes toilles, dont y en aura deux esleuz en numbre des marchans demeurans en nostre ville etforsbourgs, expertz et congnois- sans en ceste marchandie, le tiers sera esleu delacompaignie des tessiers qui chacun jour de marchĂ© visiteront les toilles qui y seront apportĂ©es et exposĂ©es en vente ; et, pour estre auclorize?, se pourront accompaigner de l'un de noz sergens et des faultes, mespremptures et malversations qu'ilz con- gnoistrcnt estre faictes es poinctz et articles susdicts et choses qui en deppendent en feront leur rapport Ă justice pour en estre ordonnĂ© ce que de raison; lesquelz visiteurs seront changez chacun an et esleuz par devant nostre juge de Laval ou son lieutenant Ă la plurallitĂ© des voix desdits marchans, buandiers et tissiers, lesquelz pour ce faire seront assemblez par devant luy. Lesquelz poinctz et articles nous avons voulu estre gardez et observez en nostredite ville, forsbourgs et contĂ© de Laval par provision et par forme de pollice et reiglement, jusques Ă ce que aultrement par nous en aict estĂ© ordonnĂ©. CARTULAIRE 1568-1586 311 Faict audict Laval le vingtiesme jour de juillet mil cinq cens soixante dix sept. Guy de Laval. Par commandement de Monseigneur, Le Roy. L'ordonnance cy dessus a estĂ© ce jourd'huy en jugement, les plectz tenans, leue et publiĂ©e, ce requĂ©rant le procureur fiscal de Laval, et registrĂ©e au greffe de ceste court, et avons enjoinct Ă tous les subjectz de ce comtĂ© et aultres garder et entretenir icelle ordonnance de poinct en poinct sur les peynes qui y appartiennent ; et ad ce que aulcun n'en prĂ©tende cause d'ignorance, ordonnons qu'il en sera faict lecture et publica- tion Ă son de trompe et cry publicq Ă jour de marchĂ© par les carrefours de cesle ville et forsbourgs par le premier noslre sergent sur ce requis, dont avons dĂ©cernĂ© acte. DonnĂ© Ă Laval par devant nous Jean de Martines, sieur de la HilguyniĂšre, conseiller du Roy en sa court de parlement de Bretaigne, juge ordinaire dudit Laval, le sabmedy ving- tiesme jour de juillet, l'an mil cinq cens soixante dix sept. Prodhomme, pour greffier. 2835. - 1577, 26-28 dĂ©cembre, VitrĂ©. â Synode protestant tenu Ă VitrĂ© en prĂ©sence de Guy XIX Note, dom Taillandier, Hist. de Bretagne, II, 343, d'aprĂšs Crevain, ttist. du Calvi- nisme . Les calvinistes de Bretagne profitĂšrent du calme que leur procura le dernier Ă©dit pour assembler un synode Ă VitrĂ©. Il se tint au chĂąteau le lendemain de NoĂ«l, en prĂ©sence du comte de Laval. Il se trouva treize ministres Ă cette assem- blĂ©e. 11 rĂ©sulte des actes de ce synode qu'il restait encore en Bretagne seize Ă©glises calvinistes, malgrĂ© le massacre de la Saint-BarthĂ©lĂ©my et les persĂ©cutions qui avaient suivi cette journĂ©e. Les seize Ă©glises Ă©taient Rennes, Nantes, VitrĂ©, ErcĂ©, Vieille-Vigne, ChĂąteaubriant, GuĂ©rande, le Croisie, Piriac, Sion, Saint-Malo, Pontivi, Ploermel, Blein etMorlaix, Hennebon, Pont et Vannes Ă©taient abandonnĂ©s. Outre ces Ă©glises, il faut en ajouter deux autres qui n'estoient que sei- gneuriales et domestiques, sçavoir Laval et Bordage. La pre- miĂšre suivoit le comte de Laval et elle avoit pour ministres Merlin et des Ousches. L'Ă©glise du Bordage Ă©toit fixe dans la maison du seigneur de ce nom ; elle n'avoit point de ministre 312 LA MAISON DK LAVAL propre, mais elle se servoit de ceux du voisinage. L'on y fai- soit le prĂȘche et l'on y administrait le baptĂȘme, ce qui l'a fait mettre au nombre des Ă©glises calvinistes de Bretagne. Le synode de VitrĂ©, qui dura trois jours, ne fut occupĂ© que des moyens de rĂ©tablir les Ă©glises chancelantes et de faire des rĂšglements pour ordonner aux pasteurs absents de retourner Ă leurs troupeaux. 2836 â 1577. â Etat des parents de Madame de la TrĂ©moĂŻlle assignĂ©s Ă sa requĂȘte afin de procĂ©der Ă l'Ă©lection des tuteur et curateur de ses enfants mineurs ; Guy XIX de Laval et Jean de Laval, marquis deNesle, sont au nombre des seigneurs convoquĂ©s Jeanne de Montmorency et la prin- cesse de CondĂ©, p. 128, 1895, in-4°. 2837. â 1577, 13 dĂ©cembre, Paris. â Lettre par laquelle Guy de Laval-Nesle demande Ă M. d'HumiĂšres, son oncle, de venir prendre place Ă NoĂ«l dans son conseil de famille français, 3217, 64. A monsieur mon oncle, monsieur de HumiĂšres, chevalier de l'ordre du Roy, conseiller en son conseil privĂ© et son lieu- tenant gĂ©nĂ©ral au gouvernement de PĂ©ronne, Mondidier et Roye. Monsieur mon oncle, depuis la mort de deffunct monsieur le marquis de Neele, mon pĂšre, je ne vous ay aucunement escript de mes affaires pour en avoir assez peu de cognois- sance et m'en estant remis Ă madame la marquise de Neele, ma mĂšre, qui me faict cest honneur de les embrasser. Seule- ment adjousterai-je ce mot Ă la sienne et vous suppliray me tant honorer que de vous trouver en l'assemblĂ©e qui se faict pour l'amour de moy, dans ce NoĂ«l en ceste ville, oĂč je sçay que pouvez beaucoup et que votre prĂ©sence aidera grande- ment Ă mesdites affaires. Vous asseurant de n'en eslrejamais ino-rat et que je vous feray tous les services qui me sera pos- sible quand Dieu m'aura faict si heureux que d'en avoir le moyen. N'estant la prĂ©sente Ă aultre effect, je la finiray en vous baisant bien humblement les mains. Je supplie le CrĂ©ateur, monsieur mon oncle, vous donner en parfaite santĂ©, longue et heureuse vie. caivtvlaire 1568-1586 313 A Paris, le 13 dĂ©cembre 1577. Vostre bien humble neveu et affectionnĂ© Ă vous faire service. Guy de Laval. 2838. - 1578, 3 aoĂ»t. â Etat des terres aliĂ©nĂ©es par Guy XIX A. N.,T. 1051 20 , 219. 2839. - 1578, 20 septembre. â DĂ©cĂšs de Jean de Laval, comte de MaillĂ©, marquis de Nesle 1 Note, du Chesne, Histoire, 613. 2840. â 1578, 4 octobre, la FertĂ©-Ernault. â Testament de Jacques I de Laval-la-Faigne ; il y nomme Marie Le Sec 2 , sa seconde femme, Michel de Laval, son bĂątard, Jacques II de Laval, son frĂšre, Jean de Laval-Tartigny et Madeleine de Laval, Ă©pouse de Pierre de Normanville Note, Durand, ChĂąteau de Montuel, 22. 2841. â1578, 7 dĂ©cembre, Comper. - Lettre de Guy XIX au sieur du Plessis delĂ RiviĂšre Copie, B. N., français, 22310, 326. A monsieur du Plessis de la RiviĂšre. Monsieur du Plessis. Estant venu en ce lieu pour le plaisir de la chasse du san- glier, attendant les Estats qui se tiendront Ă Rennes, je vous en ay bien voulu advertir et que ce sera vostre chemin pour y aller comme je sçay que vous avez la vollontĂ©, ayant dĂ©li- bĂ©rĂ© me trouver Ă Rennes le xm, pour ce que je m'attends que les Estats se tiennent le xv, ainsi que le Roy le m'a encores mandĂ© depuis I rois jours. Passant en ce lieu vous y serez le trĂšs bien venu aussi vos frĂšres et aultres gentilshommes vos voisins qui y viendront ; de quoy vous les adverlirez, s'il vous plaist, et les prierez de ma part aussi de se tenir prests pour estre de deçà le xn. Et nous irons de compagnie avec autres gentilshommes vassaux de mes terres, qui me feront ce plaisir de m'y accompagner. Sur ce, Monsieur du Plessis, je supplieray le CrĂ©ateur vous 1. Cette date est certainement fausse. Voir le numĂ©ro 2837. 2. Duehesne, Histoire, p. 62ÂŁ, ne parle pas de cette seconde alliance de Jacques I. 314 LA MAISON DE LAVAL donner sa sainte et digne garde, me recommandant de bien bon cĆur Ă la vostre. De Comper, ce vu dĂ©cembre 1578. Vostre plus affectionnĂ© amy, Laval. 2842. â 1579. 3 mars, Paris. â ArrĂȘt par lequel le Par- lement de Paris dĂ©cide que, attendu les privilĂšges du comtĂ© de Laval, le sĂ©nĂ©chal du Maine n'a pas qualitĂ© pour faire sur ses nobles la rĂ©partition des frais dĂ»s au reprĂ©sentant de la province aux Etats GĂ©nĂ©raux ImprimĂ©, Titres du comtĂ© de Laval, p. 133. 2843. â 1579, 16 mars, Rennes. â Ordonnance par laquelle Guy XIX prescrit que toutes les instances soutenues en son nom devront au prĂ©alable ĂȘtre soumises Ă son conseil Ă©tabli Ă Rennes Original aux archives de la TrĂ©moĂŻlle achetĂ© Ă la vente Pichon. Guy, comte de Laval, de Montfort, Quintin et Harcourt, baron de VitrĂ©, la Roche-Rernard et Ancenys, vicomte de Rennes, de Donges et de Lislebonne, sire de Rieux, de Ro- chefort et de la Roche en Nord, etc., Ă noz chers et bien amez sĂ©neschal, allouĂ© et procureur fiscal en nostre jurixdition de ChĂšvre, salut. Nous avons estĂ© advertiz par les gens de nostre conseil et mesmes l'expĂ©rience nous a faict congnoistre les grands intĂ©- âŠestz et prĂ©judices qui nous sont arivez au passĂ© Ă cause de plusieurs instances et procĂšs cy davant intentez soubz nostre nom, sans en avoir premiĂšrement prins l'advis de nostredit conseil et vousestre assemblez pour confĂ©rer entre vous para- vant qu'intenter aucun procĂšs, mesmes affin de dresser mĂ©moy- res signez de vous, pour sur iceulx entendre l'advis de nostre dict conseil, ainsi que ce a estĂ© tousjours nostre volunctĂ© et intention. A ceste occasion, pour Ă©vitter Ă l'advenir telz inconvĂ©niens, nous avons faict et estably le rĂšglement cy aprĂšs pour estre par vous inviolablement gardĂ© et observĂ©, sans y contrevenir, en tant que vous dĂ©sirez nous obĂ©yr et faire agrĂ©able service Que, auparavant qu'intenter aucun procĂšs et instance, vous confĂ©riez ensemble pour dresser les mĂ©moyres requis et nĂ©cessaires touchant le faict et dificultĂ© qui se prĂ©sentera, 1 cautulaire 1568-1586 315 lesquelz mĂ©moyres vous signerez jusques au nombre de deux pour le moings. Et contiendront iceulx mĂ©moyres une naration sommaire de nos droictz et de ce qui se pourra vĂ©riffier tant par actes que tesmoings. Lesquelz mĂ©moyres ainsi signez et arestez par vous seront promtement envoyez en la ville de Rennes, pour en avoir l'advis de nostre dict conseil, lequel sera par vous suivy au discours desdites instances et procĂšs, sans y desroger ny con- trevenir. Et estans lesdits procĂšs terminez, et advenant que y auroict appel interjectĂ© d'une ou aultre part du jugement qui y inter- viendra sur iceulx, vous envoyrez de bonne heure et de temps compectant pour se prĂ©senter Ă celluy qui aura la principalle charge de nosdits procĂšs et affaires audit Rennes, tant les assignations qui seront donnĂ©es et seront pendantes pour le faict dudict appel, que autres procĂ©dures, tiltres et enseigne- mens, d'aultant que vous en aurez entre mains requis et nĂ©- cessaires pour soustenir lesdits jugemens, sentences, ou icelles faire rĂ©former, si elles sont donnĂ©es contre nous. Et quand auxprocĂšs criminelz Ăšsquelz interviendront appel- lations, vous envoyrez semblablement emples mĂ©moyres signez de vous avec coppyes des principalles charges, affin que nostre dict conseil puisse estre instruict si ou nom il debvra prendre la cause en nostre nom et se prĂ©senter Ăšsdites appellations. Et Ă faulte Ă nostre procureur fiscal de nosdictes jurixdi- tions et signeuryes de ChĂšvre de ce faire, il sera par nous dĂ©sadvouĂ© pour le faict des procĂšs intentez et suiviz sans l'ad- vis de nostre dict conseil. Et pour le regard des assignations qui seront donnĂ©es soit en appel ou premiĂšre instance, il sera laissĂ© exploict par noz procureurs de causes tant en ladicte court de parlement de ce pays que audict siĂšge de Rennes, Ă faulte d'avoir envoyĂ© lesdictes procĂ©dures et assignementz, l'Ă©vĂ©nement duquel exploict, soit diffault ou congĂ©, tombera sur ledict procureur fiscal et en portera tous despens, dommaiges et intĂ©restz en son privĂ© nom s'il ne trouve et fasse aparoir d'excuse lĂ©gi- time. Sauf Ă nous Ă procĂ©der outre Ă la destitution de nosdicts 316 LA MAISON DE LAVAL officiers qui auront faict et commis faultes si notables ainsi que verrons avoir affaire et que les ocasions s'y prĂ©senteront. Et affin que le prĂ©sent rĂšglement ne demeure illusoire et sans fruict et que aulcun cy aprĂšs n'en puisse prĂ©tendre cause d'ignorence, nous vous enjoignons chacun en droict soy icel- luy faire lire et publier en audience Ă jour de plaitz gĂ©nĂ©raux, et nous envoyer acte de ladicte publication, et icelluy faire regestrer au papier du greffe de nosdictes jurixditions et signeuryes. De ce faire vous donnons plain pouvoir et man- dement spĂ©cial. En foy de quoy nous avons signĂ© la prĂ©sente de nostre main et Ă icelle faict apposer le scel de noz armes'. Faict par l'advis de nostre dict conseil audict Rennes, le xvi c marsMV c LXXLX. Guy de Laval. Par commandement de monseigneur. Deplaneval. 2844. â 1580, 27 janvier. â Aveu pour la ladrerie de Saint-Etienne Ă VitrĂ© fait Ă Guy XIX ImprimĂ©, Paris-Jallo- bert, 37. 2845. â 1580, 3 fĂ©vrier, VitrĂ©. â Aveu pour la PoultiĂšre en VitrĂ© fait Ă Guy XIX par Pierre Frain et Julienne Lam- barĂ©, sa femme ImprimĂ©, MĂ©moire gĂ©nĂ©alogique..,, de plusieurs familles Ă©tablies Ă VitrĂ©, 1885, in-16, p. 27. 2846. â 1580, 12 avril, Paris. â Lettre Ă©crite par Guy de Laval -LouĂ© Ă Madame de la TrĂ©moĂŻlle Archives de la TrĂ©- moĂŻlle. A Madame, Madame de la TrĂ©moĂŻlle. Madame, j'accompagneray celle de Madame la marquise de Nesle, ma mĂšre, de ceste pour vous supplier bien humble- ment de me fayre cet honneur de recepvoir le sieur des Noubes Ă l'hommaigequeje vous doy, en vertu delĂ procuration qu'a Ă ceste fin expĂ©diĂ©e mon tuteur. Ce me sera une obligation de laquelle je m'aquitteray par quelque bon service, si je suis jamais si heureux que de mĂ©riter voz bonnes grĂąces et que me laciez cet honneur de m'enployer. 1. Le dessin de ce sceau a Ă©tĂ© donnĂ© sous le numĂ©ro 188. CARTULAIRE 1568-1586 317 Sans la vous fayre plus longue, sinon de vous baiser bien humblement les mains, suppliant le CrĂ©ateur, Madame, vous donner en parfaicte santĂ© trĂšs longue et heureuse vie. A Paris, ce xn e apvril 1580. Vostre bien humble et obĂ©issant cousin Ă vous fayre service, Guy de Laval. 2847. â 1581, 12 mars. â Lettre Ă©crite par Henri IV au duc de Montpensier ; Guy XIX ' y est indiquĂ© comme prĂ©sent prĂšs du roi de Navarre Lettres missives, I, 360. 2848. - 1581, 12 mars, Cadillac. â Lettre de Henry IV au duc de Montpensier relative Ă une affaire concernant celui-ci et dont il a dĂ©libĂ©rĂ© avec le duc d'Alençon. Guy XIX, monsieur d'Escars et d'autres sont prĂ©sents ImprimĂ©, Lettres missives, I, 361. 2849. â 1581, 17 mars. â Pension de quatre cents Ă©cus en faveur de Jean Ravenel, sieur de la Grange, commandant de VitrĂ© Arch. delĂ Loire-InfĂ©rieure, H. 64, 42. 2850. â 1581, mai, le Mans. â Lettre Ă©crite par le duc d'Alençon Ă Urbain de Laval-Bois-Dauphin ImprimĂ©, B. de Broussillon, Documents inĂ©dits, 92, d'aprĂšs B. N., français, 3348, 2. 2851. â 1581, 10 mai, Alençon. â Lettre Ă©crite parle duc d'Alençon Ă Urbain de Laval-Bois-Dauphin, le conviant Ă prendre part avec lui Ă l'expĂ©dition des Pays-Bas ImprimĂ©, B. de Broussillon, Documents inĂ©dits, 93, d'aprĂšs B. N., français, 3348, 1. 2852. â 1581, 6 juin, Blois. â Lettre adressĂ©e Ă Urbain de Laval-Bois-Dauphin par Henri III, lui interdisant d'ac- compagner le duc d'Alençon dans son expĂ©dition dans les P^ys-Bas ImprimĂ©, B. de Broussillon, Documents inĂ©dits, 94, d'aprĂšs B, N., français, 3348, 5. 2853. â 1581, 28 octobre, Paris. â Lettre adressĂ©e par 1. C'est par erreur que M. Berger de Xivrey. dans sa note, identifie le monsieur de Laval » dont il est question dans le texte avec Guy de Laval, marquis de Nesle, alors ĂągĂ© de moins de seize ans. 318 LA MAISON DE LAVAL / Catherine de MĂ©dicis Ă BelliĂšvre ; elle y mentionne le dĂ©part pour l'Angleterre du duc d'Alençon accompagnĂ© de divers personnages au nombre desquels figure le sieur de Laval ImprimĂ©, Lettres de Catherine de MĂ©dicis, VII, 408. 2854. â 1581, 13 mars, Thouars. âActe par lequel Jeanne de Montmorency, dame de la TrĂ©moĂŻlle, dĂ©clare avoir reçu du procureur de Guy de Laval, marquis de Nesle, baron de Bressuire, les foy et hommage lige, baiser et serment de fidĂ©litĂ© auxquels il est tenu Ă cause de sa dite baronnie Cata- logue Ernest Dumont, n" 90, octobre 1898. 2855. â 1582, 22 janvier. â Procuration donnĂ©e par Pierre de Laval-Lezay, afin de rendre en son nom hommage Ă l'Ă©vĂȘ- que d'Angers Note, B. N , Dom Housseau, XIII 1 , 9399. 2856. - 1582, 15 fĂ©vrier. â Contrat de mariage de Claude de Laval, fille de Pierre de Laval-Lezay et de Jacqueline ClĂ©- rembault avec RenĂ© Gillier ' Copie aux archives de LĂ©vis- Mirepoix au chĂąteau de LĂ©ran, et note Du Chesne, Histoire, 622. 2857. â 1582, 22 avril. â DĂ©lai obtenu par Guy de Laval, marquis de Nesle, pour prĂ©senter les aveux de Plouha et de Plouazec Arch. de la Loire-InfĂ©rieure, B. 1225. 2858. â 1582, mai, la ChĂ©tardiĂšre. â DĂ©cĂšs de Pierre I de Laval-Lezay Note Du Chesne, Histoire, 621. 2859. â 1582, 12 juillet. â Acte par lequel Guy XIX prĂ©- sente Ă la chapelle Saint-Martin, au manoir de MĂ©nitrĂ© en Rosiers, Jacques Cador Ă la place de Louis du Fresne, qui l'avait rĂ©signĂ©e 2 Arch. de Maine-et-Loire, E. 3024. 2860. â 1582, 20 octobre. - Ordonnance donnant mission Ă Jean Richard de conduire Ă Saint-Nicolas tous les pour- ceaux qui seraient rencontrĂ©s sur le territoire de VitrĂ© Im- primĂ©, Paris-Jallobert, 39. 2861. â 1583, 12 avril, Anvers. â Contrat de mariage de Guillaume d'Orange avec Louise de Coligny, fille de l'amiral 1. Leur fils Urbain Gilliers, le 27 dĂ©cembre 1613. Ă©pousa Marie- Chabot Voir Dom Fonleneau. XXV, 729. 2. Ce document, comme le numĂ©ro 2830, possĂšde un bel exem- plaire de sceau dessinĂ© sous le numĂ©ro 187. CARTULAIRE 1568-1586 319 et veuve de ThĂ©ligny ; Guy XIX est mentionnĂ© parmi les per- sonnages prĂ©sents ImprimĂ©, Preuves de la Maison de Coli- gny, p. 582. 2862. â 1583 ; 15 mai, VitrĂ©. â Actes gĂ©nĂ©raux du XII e synode protestant tenu Ă VitrĂ© sous la prĂ©sidence de Pierre Merlin suivis de la liste des pasteurs et des anciens dĂ©putĂ©s Ă ce synode ImprimĂ©, La France Protestante, 1858, PiĂšces justificatives, p. 180. 2863. â 1583, 31 juillet, Paris. â Lettre adressĂ©e par le chancelier de Cheverny Ă madame de la TrĂ©moĂŻlle, en lui recommandant les intĂ©rĂȘts de son gendre, Guy de Laval, marquis de Nesle ImprimĂ©, Lettres du XVI' siĂšcle, n° 195. 2864. â 1583, 7 aoĂ»t. â Mariage de Guy XIX avec Anne d'AlĂšgre note, Bourjolly, II, 19. 2865. â 1583, 1 er septembre. â Mariage de Guy XIX avec Anne d'AlĂšgre note du plaidoyer, du Chesne, XL, 305. 2866. â 1583, septembre, Paris. â Lettres patentes par lesquelles Henri III confirme les privilĂšges du comte deJoigny lequel Ă©tait alors Guy deLaval-Nesle français, 4600, 96. 2867. â 1583, 9 novembre, VitrĂ©. â Reconnaissance d'une dette signĂ©e par Guy XIX [Archives de la TrĂ©moĂŻlle. Je confesse debvoir Ă Jean Chevallerie. sieur de la Tou- chardiĂšre, la somme de six vingtz escuz sol, laquelle je luy promectz payer Ă sa vollontĂ©. Faict Ă ViJtrĂ©, le IX" jour de novembre 1583. Guy de Laval. 2868. â 1584, 26 janvier, Paris, en l'hĂŽtel de Laval rue Saint-AndrĂ©-des-Arts. â Accord entre Guy XIX et la com- tesse de Salm, grand-mĂšre de François, Benjamin et Anne de Coligny,par lequel Guy XIX, conformĂ©ment au testament de d'Andelot et Ă l'accord passĂ© le 10 fĂ©vrier 1572 entre Anne de Salm et Gaspard de Coligny, prend les engagements nĂ©- cessaires en faveur de ses frĂšres et de sa sĆur du second lit ImprimĂ©, Preuves de Coligny, 1121. 2869 â1584, 21 fĂ©vrier. â RĂšglement Ă©tabli pour prĂ©server de la peste la ville de VitrĂ© ImprimĂ©, Paris-Jallobert, 39. 2870. â 1584, 23 fĂ©vrier. laFaigne. - Contrat de mariage 320 LA MAISON DE LAVAL de Pierre de Laval Lauresse, fils de Pierre de Laval, avec Louise de Laval-la-Faigne ' Note, MĂ©moires de la SociĂ©tĂ© d'Eure-et-Loir, VI, 99. 2871. â 1584, 24 mars. â Aveu rendu au nom de Guy de Laval-Nesle, mineur, Ă Thouars. pour la baronnie de Bres- suire 2 Note, La TrĂ©moĂŻlle, Fiefs de Thouars, 13. 2872. â 1584, 3 avril. â Procuration donnĂ©e par Jacques de Laval-la-Faigne, chevalier de l'ordre B. N., français, 28154, 225. 2873. â 1584, 7 juillet. â Transaction entre Guy XIX et le prince de GuĂ©menĂ© touchant la succession de Guy XVII, frĂšre de Marguerite de Laval, mĂšre du prince B. N-, français, 22311, 31. 2874. â 1584, 13 septembre, Montauban. â Lettre par la quelle Henri IV accrĂ©dite prĂšs de Henri III Guy XIX et du Plessis-Mornay chargĂ©s de porter au roi les dĂ©cisions de l'as- semblĂ©e protestante de Montauban ImprimĂ©, Lettres mis- sives, I, 683. 2875. â 1584, 13 septembre, Montauban. â Instruction Ă M. le comte de Laval et Ă M. du Plessis, auxquels a Ă©tĂ© ad- joint le sieur Constant, de ce qu'ils auront Ă dire et Ă remontrer Ă Sa MajestĂ©, de la part du roy de Navarre et de l'assemblĂ©e des Ă©glises, tenue Ă Montauban par la permission de Sa Ma- jestĂ© 3 ImprimĂ©, MĂ©moires de la Ligue, in 4°, I, 606. 2876. â 1584, 13 septembre, Montauban. â Lettre de Henri IV Ă Walsingham dans laquelle il mentionne l'envoi vers Henri III de Guy XIX et de du Plessis-Mornay ImprimĂ©, Lettres missives, VIII, 271. 2877. â 1584, 13 septembre, Montauban. â Lettre par la- quelle Henri IV annonce Ă Catherine de MĂ©dicis que Guy XIX, 1. Ce contrat fut insinuĂ© au greffe de Chartres le 26 octobre 1584. 2. Sous les numĂ©ros 192-194, on trouvera ici les dessins de trois jetons de Guy de Laval, marquis de Nesle. Les faces des trois jetons sont identiques, les revers seuls sont diffĂ©rents. 3. Le compilateur des MĂ©moires de la Ligue prĂ©tend que Guy XIX, ayant appris par cĆur cette instruction, la prononça devant le roi, en son cabinet. CARTULAIRE 1568-1586 321 du Plessis-Mornay et le sieur Constant sont dĂ©putĂ©s vers le roi par l'assemblĂ©e protestante de Montauban ImprimĂ©, Let- tres missives, I, 684. 2878. â 1584, 13 septembre, Montauban. - Avis donnĂ© par Henri IV au comte de Leicester qu'il a envoyĂ© Ă Henri III Guy XIX et du Plessis-Mornay, chargĂ©s de faire connaĂźtre au roi les dĂ©cisions de l'assemblĂ©e protestante de Montauban ImprimĂ©, Lettres missives, VIII, 270. 2879. â 1584, 14 novembre, Saint-Germain en-Laye. â Lettre Ă©crite par du Plessis-Mornay au roi de Navarre. Il 192-194. â Jetons de Guy de Montmorency-Laval, marquis de Nesle, 1584. l'informe entre autres choses que Guy XIX, en passant par Blois, a Ă©tĂ© faire un tour chez lui, d'oĂč il n'est pas encore re- venu Ă cause d'accĂšs de fiĂšvre ImprimĂ©, MĂ©moires et corres- pondance de du Plessis-Mornay, II, 680. 2880. â 1584, 25 novembre. â Quittance dĂ©livrĂ©e par Jean Dumoulin, conseiller du Roi et prĂ©sident en l'Ă©lection de Paris, en qualitĂ© de tuteur de Guy de Laval, marquis de Nesle, comte de Joigny et de MaillĂ© Original, B. N., français, 28154, 226. 2881. â 1585, 31 janvier et 4 fĂ©vrier, Harcourt. â Lettre Ă©crite par Guy XIX Ă M. Chorin [Archives de la TrĂ©moĂŻlle. 322 LA MAISON DE LAVAL A Monsieur Chorin, procureur en la court de parlement de Paris 1 . Monsieur Chorin, j'ay receu voz lettres des XX1IIP et XXVIII e de ce moys, pour responce ausquelles je vous diray estre bien aise que monsieur Marion ayt dressĂ© les contredictz contre madame de Longueville, encores plus de la bonne oppinion qu'il a du procĂšs, aprĂšs l'avoir si bien veu qu'il a comme je seray qu'il besongne Ă la production nouvelle, mesmes pour les terres de Partenay. J'ay veu ce que vous me mandez touchant le sieur de Torcy, aussi ce que m'en escript Laulan, trouvant bien estrange qu'en faisant l'exĂ©cution contre luy, on n'ayt trouvĂ© Ă son loo-is aultre chose q'ung mullet, pour ce que je sçay que ce n'est le train d'ung chevallier du Sainct Esperit que cela, mais qu'il doibt estre plus grand. Une aultre foys, il se fauldra tenir plus prĂšs des sergentz. Pour le faict de Dumesnil, fault regarder de se deffendre comme l'on pourra et ne pense pas qu'il prouve tout ce qu'il mect en faict. Pour le regard de LarmnoiĂšre, vous luy manderez que je dĂ©sire la faire paier et que si elle ne faict plus de poursuitte, elle le sera au plus tard dans six sepmaines, et que si elle poursuict Ă la rigueur, elle n'aura son argent si tost. Je dĂ©sire que vous voyez monsieur Le Gresle pour luy dire ce que je vous ay cy devant mandĂ©, aussi ce que vous m'en escrivez maintenant. Je suys bien aise que la damoiselle d'Argenlieu a faict re- noncer Ă son appel. Maintenant il la fault poursuyvre vive- ment sans y perdre une seulle heure de temps. Avant vous aurez sceu le nom de celluy qui sera rapporteur du procĂšs de Chasteau-Giron ; vous me le manderez. Je croy que vous regarderez songneusement entre les mains de qui vous le ferez mectre. Quant Ă ce que vous m'escripvez pour estre payĂ© d'une annĂ©e de voz gaiges, c'est chose que je n'ay garde d'oublier, et sçay bien la diffĂ©rence qui se doibt garder entre les vieulx serviteurs et les nouveaulx. Mais je dĂ©sire que de vostre costĂ© 1. L'original porte en note ponse le 7" ». Receu le 6 fĂ©vrier et faict res- CARTULAIRE 1568-1586 323 aussi vous me faciez paroistre les effectz de vostre affection, usant ung peu plus de dilligence que vous n'avez accoustumĂ© en ce qui m'est d'importance, comme vous sçavez, et qui est trĂšs facille. Je dyz ceci entre aultres choses pour le long temps qu'il y a que je suys Ă vous solliciter de faire faire une estude en laquelle vous mettiez tous les pappiers que vous avez Ă moy . Vous mesmes avez jugĂ© cela estre nĂ©cessaire, et touteffoiz pour l'exĂ©cuter vous y apportez tant de longueur qu'Ă la vĂ©ritĂ© cela m'ennuye et trouve ung petit estrange qu'Ă cette heure que monsieur de Martines est arrivĂ© Ă Paris, vous remectez encores d'icy Ă ung moys. Je vous prye donc que sans plus de remise Ă ce coup vous le faciez faire et, si tost que cela sera, vous n'aurez point de besoing de me ramentevoir voz gaiges. J'en escriptz Ă monsieur de Martines, affin qu'il face dili- gence de retirer ses hardes. Je suys bien aise de la dilligence que vous faictes en mes affaires et vous prye d'y continuer. En ce lieu je feray fin, priant Dieu, monsieur Chorin, vous avoir en sa saincte garde. De Harcourt, ce dernier jour de janvier 1585. Votre bien bon amy. Laval. 1111 e febvrier 1585. Je seray bien aise que vous et Laulan obteniez du Roy let- tres en mon nom, causĂ©es sur le dĂ©sir que j'ay de prĂ©senter Ă MajestĂ© l'adveu des terres que je tiens d'elle et entre aul- tres de celle de Rieux et deppendances, et que pour ceste occasion il soit mandĂ© Ă messieurs les prĂ©sident, procureur, garde des comptes et tous aultres qu'il apartiendra me dĂ©li- vrer ou Ă mon procureur deument fondĂ© coppie collationnĂ©e et garendie tant des anciens adveuz que modernes baillez par mes prĂ©dĂ©cesseurs ; et le plus dilligemment que vous pourrez, vous me ferez tenir les dites lettres. Vous verez aussi les lettres que le sieur de la ValliĂšre m'a rĂ©unyes, aussi l'exploict faict suyvant icelles contre madame de la FueillĂ©e. Je n'escriptz poinct pour ceste heure Ă M. Marion pour le remercier de la peyne qu'il a pr ; se pour moi ; j'attends l'heure que je luy envoyĂ© de l'argent tant pour ses dites peynes que pention, qui sera bien tosi lĂ que vous luy ferez entendre. 324 LA MAISON DE LAVAL Vous m'advertirez qui fera les dilligences au premier con- seil du roy contre madame de la FueillĂ©e, pour ce que je n'ay poinct de procureur. Vous m'avez cy devant dict que vous avez plusieurs piĂšces qui pouroient servir contre elle ; vous vous en aiderez. Vous ne m'avez poinct faict responce Ă ce que je vous avois mandĂ© plusieurs foiz, sçavoir ce qu'il faudroit Ă M. Marion pour les escriptures qu'il a dressĂ©es, lesquelles je luy ren- voiray par la premiĂšre commoditĂ©. 2882. â 1585-1586. â Avertissement par lequel est som- mairement discouru de ce qui se passa.... Ă la fin de l'annĂ©e 1585 et en l'an suivant, 1586' ImprimĂ©, MĂ©moires de la Ligue, in-4°, II, 156-179. 2883. â 1585, 28 juillet, Taillebourg. â Testament de Guy XIX Note, Bourjolly, II, 20. 2884. - 1585, 27 aoĂ»t. â Lettre adressĂ©e Ă Guy XIX par Henri III le fĂ©licitant des mesures prises par lui pour exĂ©cuter l'Ă©dit de juillet 1585 ImprimĂ©, Bourjolly, II, 336, d'aprĂšs B. N., français, 3309, 29. 2885. â 1585, 8 octobre, Paris. â Lettre par laquelle Henri III avise Anne d'AlĂšgre qu'il a confiĂ© la garde du chĂąteau de VitrĂ© au sieur de la PrĂ©vallais ImprimĂ©, Bourjolly, II, 337, d'aprĂšs B. N., français, 3309, 43. 2886. â 1585, 15 novembre, Paris. â Mandement par le- quel Henri III charge le sieur de la PrĂ©vallais de la garde du chĂąteau de VitrĂ© ImprimĂ©, Bourjolly, II, 338, d'aprĂšs français, 3309, 43. 2887. â 1585, 15 novembre Paris. â Lettre par laquelle Henri III annonce au sieur de la PrĂ©vallais l'envoi des lettres patentes lui confiant la garde du chĂąteau de VitrĂ© ImprimĂ©, Bourjolly, II, 339, d'aprĂšs B. N., français, 3309, 74. 2888. â 1585, 22 novembre. â Lettre par laquelle Jean de Chourse, seigneur de Malicorne, avise les habitants de Saint- 1. On y trouve le rĂ©cit de la campagne de Guy XIX dans le Poitou terminĂ©e par son dĂ©cĂšs le 15 avril 1586 11 ne faut tenir aucun compte de la note par laquelle l'Ă©dition in,-4 1758 des MĂ©moires de la Ligue, identifie M. de Laval avec Urbain de Laval-Bois-Dauphin. CAItTULAlHK 1568-1586 325 Maixent que le comte de Laval est Ă Villeneuve h- Vicomtesse Note dans Journal de Michel Le Riche. 2889. â 1586, 1" fĂ©vrier, Coupvrai. â Contrat de mariage de Louis de Rohan-GuĂ©menĂ© et de Françoise de Laval, veuve de Henri de Lenoncourt 1 Note, dont Morice, III, 1473. 1. Ce contrat fut ratifiĂ© le 21 fĂ©vrier 1580 devant les notaires du ChĂątelet de Paris B. N., français, 22311, 45. ^JS> 21 XXV GUY XX 15 avril 1586. â 3 dĂ©cembre 1605. Le 15 avril 1586, lorsque Guy XIX rendit Ă Taille- bourg le dernier soupir, aprĂšs avoir vu mourir avant lui ses trois frĂšres, il laissait un fils, nĂ© de sa femme Anne d'AlĂšgre Ă Harcourt, le 6 mai 1585, ĂągĂ© par consĂ©quent de moins d'un an le jour oĂč, par la mort de son pĂšre, il devenait hĂ©ritier de la maison de Laval. Guy XX, Ă qui Bourjolly, on ne sait pourquoi, donne le prĂ©nom de François ' , fut tout naturellement placĂ© sous la tutelle de sa mĂšre, laquelle, semble-t-il, n'eut aucun des profits qu'elle avait droit 'd'attendre de ce chef tout d'abord Guy XIX Ă©tait mort en Ă©tat de rĂ©bellion armĂ©e contre le roi de France, d'oĂč il s'en Ă©tait suivi confiscation de tous les biens laissĂ©s par lui ; puis, en 1588, Charles de Lorraine, marquis d'Elbeuf, et RenĂ© de Rieux, sieur de SourdĂ©ac 2 , se firent investir par Henri 111 de la tutelle et curatelle de Guy XX, ĂągĂ© alors de trois ans Ă peine ; en 1590, il est vrai, pendant le siĂšge de Paris, Henri IV rendit Ă Anne d'AlĂšgre la tutelle de son fils, mais ses revenus n'en furent guĂšre augmentĂ©s, car le duc de MercĆur Ă©tait maĂźtre de la Bretagne et appli- 1. Il n'existe pas un seul document original dans lequel il soit dĂ©signĂ© sous le nom de François ; et, Ă©tant donnĂ© l'usage Ă©tabli chez les seigneurs de Laval de toujours porter le nom de Guy, on peut ĂȘtre certain que Guy XX n'en a jamais reçu d'autre. 2. Second fds de Jean de Rieux et de BĂ©atrix de JonchĂšre. LA MAISON DE LAVAL 195. â Portrait d'Anne d'AlĂšgre, marĂ©chale de Fervaque, 1599. Crayon du Louure, n° Ă382 ouy xx 327 quait aux besoins de la Ligue la plus grosse partie du produit des fiefs de Guy XX 1 . On ne saurait du reste s'Ă©tonner des sĂ©vĂ©ritĂ©s d'Henri III contre Anne, car Ă peine veuve de Guy XIX elle s'Ă©tait empressĂ©e de se mettre en opposition avec les ordres de la cour, en enlĂšvent le jeune Guy XX et en le faisant conduire Ă Sedan, afin qu'il y fĂ»t imbu des doctrines protestantes. C'est Antoinette du Prat, sa mĂšre, qui se chargea de la conduite de l'enfant, son petit-fils, et qui, dit-on, Ă partir de Reims, ayant eu soin de se vĂȘtir en paysanne, le porta elle-mĂȘme, sur ses bras, pendant les sept Ă huit lieues qui sĂ©parent Reims de Sedan. Guy XX passa seulement cinq ans dans cette der- niĂšre ville et, en 1591, paraĂźt-il, il fut amenĂ© Ă Gaen, oĂč il reçut la plus solide instruction. 11 Ă©tait ĂągĂ© de quatorze ans, quand, par suite de la pacification de la Bretagne, sa mĂšre obtint enfin la jouis- sance dos biens de la maison de Laval. A cette Ă©poque, sĂ©duite par les propositions du marĂ©chal de Fervaque, qui offrait de lui assurer Grancoy, avec dix mille livres de rente Ă©tablies sur le fief et sur les terres les plus proches, elle se dĂ©cida Ă convoler en secondes noces avec Guillaume de Haulemer, seigneur de Fervaque. marĂ©chal de France, lequel, en 1611, obtint de la rĂ©gente l'Ă©rection de sa terre de Grancey en duchĂ©-prairie, dont il ne fit pas enregistrer les lettres patentes. Leur mariage eut lieu en 1599 et dĂšs lors Anne d'AlĂšgre ne fut plus dĂ©signĂ©e que sous son nouveau titre madame la marĂ©chale de Fervaque ; c'est celui qui figure sur le second de ses portraits donnĂ©s ici, celui qui est conservĂ© parmi les crayons du Louvre figure 195. En 1613, elle devint veuve pour la seconde fois, par 1. La plupart des renseignements donnĂ©s ici sur l'enfance de de Guy XX et sur sa vie entiĂšre sont puisĂ©s dans un plaidoyĂ© que l'avocai Servin prononça au Parlement lors des dĂ©bats du procĂšs entre la marĂ©chale de Fervaques et les la TrĂ©moĂŻfle. 328 LA MAISON DE LAVAL la mort du marĂ©chal, alors ĂągĂ© de soixante-quinze ans. Elle lui survĂ©cut six ans et mourut en 1619, entre le 9 fĂ©vrier et le 8 juin', quatorze ans aprĂšs son fils. Une fois le mariage accompli, les nouveaux Ă©poux se prĂ©occupĂšrent de la constitution du douaire auquel Anne avait droit ; il fut procĂ©dĂ© Ă la dĂ©signation d'un tuteur spĂ©cial François Harpin de MarignĂ©, prĂ©sident Ă mortier au parlement de Bretagne et ancien maĂźtre des requĂȘtes, lequel reçut pour mission de supplĂ©er Guy XX pendant les nĂ©gociations relatives aux deniers dotaux et au douaire prĂ©vus par le contrat d'Anne d'AlĂšgrc. Pour ses deniers dotaux et pour le don de dix mille Ă©cus, elle reçut la terre de la Roche-Bernard, laquelle sortit ainsi du patrimoine des Laval, de sorte qu'elle ne vint pas avec lui aux mains des la TrĂ©moĂŻlle. Quant au douaire, il fut assis sur les comtĂ©s de Montfort et d'Harcourt. Son second mariage ne priva pas la marĂ©chale de Fervaque de ses droits Ă la tutelle de son fils. En novembre 1603, Guy XX, alors ĂągĂ© de plus de dix-huit ans, partit pour l'Italie ; au retour il revint par les Flandres et prit place dans l'armĂ©e de Maurice de Nassau avec laquelle, en aoĂ»t 1604, il se trouva Ă la prise de l'Ecluse. En janvier ou fĂ©vrier 1605, il obtint des lettres d'Ă©mancipation et prit par lui-mĂŽme l'admi- nistration de ses nombreux domaines. Il avait alors dix-neuf ans huit mois. Son esprit Ă©tait en pleine maturitĂ© ; aussi est-ce en parfaite connaissance de cause et, aprĂšs en avoir long- temps mĂ©ditĂ© les motifs, qu'il prit la grande rĂ©solution de se convertir au catholicisme. La pensĂ©e que l'Eglise romaine pouvait ĂȘtre la vĂ©ritable religion de JĂ©sus- 1. Cette date, qui n'est donnĂ©e nulle part, rĂ©sulte de deux lettres, l'une d'Anne de Rohan au prince de Joinville, et la seconde d'Anne de Rohan Ă Mme de la TrĂ©moĂŻlle. Le pasteur Dumoulins l'assista Ă ses derniers moments Voir France Pro- testants, I, 128, et Bulletin du Protestantisme Français, VII, 467. GUY XX 329 Christ lui Ă©tait venue Ă Naples alors que, tĂ©moin du miracle du sang de saint Janvier, il voyait le peuple Napolitain tout entier se livrer aux ardentes manifesta- tions de la foi qui l'animait. 11 avait Ă©tĂ© profondĂ©ment Ă©mu du gracieux accueil que lui avait fait le pape ClĂ©ment VIII, puis, rentrĂ© en France, il avait acceptĂ© d'assister Ă la messe dite devant Henri IV, au chĂąteau de Fontainebleau, et enfin avait sollicitĂ© du cĂ©lĂšbre P. Coton les instructions nĂ©cessaires pour Ă©clairer sa foi de nĂ©ophyte. Le P. Coton n'eut pas la bonne fortune d'amener Guy XX jusqu'au pied de l'autel oĂč il devait abjurer obligĂ© de quitter Paris pour aller fonder Ă Rouen un noviciat, il avait, le 24 fĂ©vrier 1605, priĂ© le P. de BĂ©rulle de prendre la charge d'affer- mir Guy XX dans ses projets de retour Ă la foi de ses pĂšres. Tandis que les catholiques s'efforçaient ainsi de faire fructifier les germes de conversion que le Saint-Esprit avait semĂ©s dans son esprit, les protestants, de leur cĂŽtĂ©, faisaient tous leurs efforts pour le retenir dans le sein de la religion prĂ©tendue rĂ©formĂ©e dans laquelle il avait Ă©tĂ© Ă©levĂ©. Au Cartulaire on trouvera rĂ©numĂ©ra- tion des divers documents relatifs Ă cette conversion ; lettres de du Plessis-Mornay, lettre de Philippe de Mornay, son fils, dissertations de Michel Tilenus sont des preuves suffisantes du prix que les huguenots atta- chaient Ă la prĂ©sence du jeune comte de Laval parmi eux. Mais tous les efforts des protestants furent prodiguĂ©s en vain et la grĂące l'emporta tant sur les arguties des sec- taires que sur les appels rĂ©pĂ©tĂ©s Ă des amitiĂ©s vieilles d'un demi siĂšcle. DĂšs le 13 mars 1605 Guy XX Ă©tait allĂ© Ă la messe assez publiquement pour que Philippe de Mornay pĂ»t en aviser sa famille ; puis enfin, entre le 10 et le 21 avril, il fit sa profession de foi entre les mains de l'archevĂȘque de Paris, Henri de Retz, et alla s'en- fermer aux Feuillants pour trois jours, afin d'y faire sa confession gĂ©nĂ©rale. 330 LA MAISON DE LAVAL A cĂŽtĂ© des lettres protestantes il faut signaler un bien curieux opuscule, dont l'unique exemplaire connu a pris place dans la bibliothĂšque de M. le duc de la TrĂ©- moĂŻlle La conversion de monsieur le comte de Laval, avec la dispute par luy faite contre les ministres, et la vĂ©ritĂ© par luy recogneue dans la Foy catholique, Apos- tolique et Romaine. Ensemble la lettre envoyĂ©e Ă madame la marĂ©challe de Fervaques, sa mĂšre, sur le sujet de sa conversion. A Paris M DC XXXV, avec permission. Ce petit livret, qui a Ă©tĂ© reproduit en partie dans un travail rĂ©cent !, ne se prĂ©sente pas avec des signes d'authenticitĂ© suffisants pour que sa paternitĂ© soit incon- testable. Il est datĂ© de 1635, Ă©poque oĂč sa mise au jour ne semble avoir prĂ©sentĂ© aucune actualitĂ© -, en outre on n'y trouve aucune de ces allusions intimes que Guy XX Ă©crivant en 1605 Ă sa mĂšre n'eĂ»t pas manquĂ© d'y insĂ©rer. Aussi, au lieu d'y voir une lettre de 1605, imprimĂ©e une trentaine d'annĂ©es plus tard, il faut peut-ĂȘtre y chercher tout simplement le travail de quelque thĂ©ologien qui, Ă©crivant en 1635, a trouvĂ© commode d'attribuer Ă la plume de Guy XX les arguments qu'il cherchait Ă faire valoir. Au XVII siĂšcle on n'hĂ©sitait pas Ă user de ce procĂ©dĂ© pour donner de l'importance Ă un factum sur lequel on voulait attirer l'attention. Quoi qu'il en soit de la paternitĂ© de la brochure en question, la conversion de Guy XX Ă©tait sincĂšre au point de lui inspirer le dĂ©sir de donner un sĂ©rieux tĂ©moignage de son dĂ©vouement Ă la cause catholique, en allant exposer sa vie sur le champ de bataille oĂč une lutte bien des fois sĂ©culaire se poursuivait entre la ChrĂ©tientĂ© et l'Islamisme. Afin de dĂ©fendre la Hongrie contre les hordes bar- bares, que le sultan Achmet I y avait lancĂ©es, l'em- 1. Par M. l'abbĂ© Angot dans son Guy XX de Laval, sa con- version, son expĂ©dition en Hongrie, sa mort, au tome XXVIII, p. 231-236, de la Revue du Maine. GUY XX 331 pereur Rodolphe II y entretenait depuis plusieurs annĂ©es dĂ©jĂ une armĂ©e commandĂ©e par Georges Basta', laquelle, avec des fortunes diverses, tenait en Ă©chec l'invasion MahomĂ©tane. Guy XX, se souvenant du bon accueil fait autrefois par l'armĂ©e impĂ©riale aux Français qui lui avaient apportĂ© le secours de leur Ă©pĂ©e le baron de Vaubecourt, en 1598, lors de la reprise de Raab, autre- ment dit Javarin, puis, plus tard, en 1600, le duc de MercĆur, Ă qui on avait confiĂ© le commandement de l'armĂ©e, voulut Ă son tour y prendre place. Guy XX partit de Paris le 29 aoĂ»t 1605, accompagnĂ© de M. de Marolles, dĂ©signĂ© par Henri IV pour seconder le jeune comte dans le commandement de sa troupe, accompagnĂ© surtout de David Rivault de Florence 2 , dont le prĂ©cieux manuscrit, conservĂ© aujourd'hui aux archives de M. le duc de la TrĂ©moĂŻlle, contient tant de renseigne- ments prĂ©cieux-sur la campagne trop courte qui devait coĂ»ter la vie au dernier des comtes de Laval 3 . Guy XX arriva Ă l'armĂ©e vers le 15 octobre. Il ne tarda guĂšre Ă donner des preuves sĂ©rieuses d'une rare intrĂ©piditĂ© et Ă mĂ©riter le brevet de capitaine de la com- pagnie de mille combattants qu'il se proposait de lever en France ; malheureusement, le 3 dĂ©cembre 1605, aprĂšs avoir pendant six semaines seulement pris sa 1. Son nom Ă©tait bien Basta et non Baht. â Ce Georges Basta, honorĂ© par l'empereur Rodolphe II de divers commandements en Hongrie et en Transylvanie, reçut par lettres patentes du 25 fĂ©vrier 1598 la charge de gĂ©nĂ©ral de cavalerie ; puis, par diplĂŽme du 4 septembre 1605, le titre de comte d'Hulst et du Saint- Empire, pour lui et tous ses enfants et descendants lĂ©gitimes de l'un et l'autre sexe. C'est de ce diplĂŽme, interprĂ©tĂ© dans son sens le plus large que s'autorisent tous ses descendants pour porter eux aussi le titre de comte d'Hulst, qui va se multipliant de jour en jour Voir Annuaire de la Noblesse de France, 1854, p. 303-307. 2. Telle est l'orthographe actuelle du nom du fief que Rivault possĂ©dait en Saint-LĂ©ger dans la baronnie de Sainte-Suzanne. 3. Voir dans le Guy XX de M. l'abbĂ© Angol, au tome XXVIII de la Revue du Maine, tout ce que notre savant confrĂšre, grĂące Ă lui, est parvenu Ă divulguer de faits nouveaux sur la campagne de Guy XX en Hongrie. 332 LA MAISON DE LAVAL part des fatigues de l'armĂ©e, il fut atteint d'une balle, qui traversa son armure mal ajustĂ©e, et il pĂ©rit le jour mĂȘme, au moment oĂč on le dĂ©barrassait de sa cuirasse, qui tout d'abord avait arrĂȘtĂ© l'effusion du sang. Sa dĂ©pouille mortelle ne resta pas aux mains des barbares ; sans soupçonner la gravitĂ© de la blessure qu'il avait reçue, il avait eu l'Ă©nergie de continuer pendant plus d'une lieue la poursuite de l'ennemi et il se trouvait au milieu des siens quand, parvenu au bord du Danube, trahi enfin par ses forces, il tomba pour ne plus se relever. On se battait alors dans la Hongrie occidentale, autour de Komarom', ville situĂ©e sur la rive gauche du bras principal du Danube, au confluent commun du bras septentrional et du Vag et dont les Turcs Ă©taient maĂźtres depuis 1594. C'est dans l'un des combats livrĂ©s entre les vieux remparts et les importants cours d'eaux qui entouraient la ville que Guy XX fut ainsi frappĂ© Ă mort. MalgrĂ© toutes les difficultĂ©s d'un pareil voyage, malgrĂ© la peine extrĂȘme que les gentilshommes de sa suite Ă©prouvĂšrent Ă se procurer l'argent nĂ©cessaire, son corps fut rapportĂ© Ă Laval oĂč, grĂące Ă la nĂ©gligence de la marĂ©chale de Fervaque, sa mĂšre, grĂące aussi Ă un litige entre le chapitre de Saint-Tugal et le couvent des FrĂšres PrĂȘcheurs de Laval, il resta sans sĂ©pulture, exposĂ© en l'Ă©glise Saint-Dominique jusqu'au 26 fĂ©vrier 1609, date oĂč ses obsĂšques eurent enfin lieu, avec le cĂ©rĂ©mo- nial dont Bourjolly a conservĂ© les dĂ©tails et qui prĂ©senta cette singularitĂ© que, tout ce qui Ă©tait protestant, ayant refusĂ© de prendre part Ă la cĂ©rĂ©monie, la sĂ©pulture se fit hors de la prĂ©sence de sa mĂšre et de son beau-pĂšre et qu'elle fut prĂ©sidĂ©e par un cousin, Brandelis de Cham- pagne, marquis de Villaines, fils de Nicolas de Cham- 1. Le nom allemand est Komorn ou Comorn. La ville, qui au cours du XIX" siĂšcle a Ă©tĂ© pourvue de fortifications considĂ©rables, a Ă©tĂ© en 1849 le dernier rempart de l'insurrection hongroise. 333 pagne et de Françoise de Laval-Lezay. La parentĂ© avec le dĂ©funt Ă©tait singuliĂšrement Ă©loignĂ©e, puisqu'il faut remonter Ă Guy VIII pour trouver l'auteur commun, dont elle dĂ©coulait. Le cĆur de Guy XX fut placĂ© Ă Saint- Tugal, oĂč se trouvait une inscription dont le texte a Ă©tĂ© conservĂ© par M. de la BeauluĂšre. Quant Ă son corps, c'est dans l'Ă©glise des Jacobins de Laval qu'il reçut la sĂ©pulture. Dans le couvent sur la porte par laquelle on passait de la chapelle dans le cloĂźtre, on avait placĂ© un portrait de Guy XX et, tout auprĂšs, sur la muraille, l'armure dorĂ©e qu'il portait le jour oĂč il fut tuĂ©. Le tout existait encore au dĂ©but du XVIII e siĂšcle, Ă l'Ă©poque oĂč Bour- jolly Ă©crivait son MĂ©moire gĂ©nĂ©alogique. Il n'en reste rien aujourd'hui, pas mĂȘme un dessin. Par la mort de Guy XX la maison de Laval se trouva prendre fin, car il eut pour hĂ©ritier principal Henri de la TrĂ©moĂŻlle, son cousin au quatriĂšme degrĂ© et dont les droits puisaient leur origine dans la reprĂ©sentation de son arriĂšregrand'mĂšre, Anne de Laval, sĆur cadette de Catherine, arriĂšre-grand'mĂšre de Guy XX. Les La TrĂ©moĂŻlle possĂ©dĂšrent Laval jusqu'Ă la RĂ©volu- tion ; mais pour eux le titre de comte de Laval fut seule- ment une qualification accessoire qui prit place dans la nomenclature des titres de la famille sans qu'aucun d'eux s'en soit parĂ© jamais, sauf pourtant le deuxiĂšme fils d'Henri de la TrĂ©moĂŻlle, Louis-Maurice, qui, grĂące aune donation faite par son pĂšre vers 1670, fut jusqu'Ă son dĂ©cĂšs, en janvier 1681, comte de Laval, tandis que son aĂźnĂ©, Henri-Charles, Ă©tait baron de VitrĂ© par la remise que son pĂšre lui en fit le 9 aoĂ»t 1661 et le 30 janvier 1669. M. le duc de la TrĂ©moĂŻlle, membre de l'Institut, a montrĂ© un tel discernement dans l'emploi des splendides archives qui lui viennent de ses pĂšres et a si libĂ©rale- ment mis au jour les documents qui importent Ă l'histoire de sa famille, que chercher Ă en Ă©lucider l'histoire 334 LA MAISON DE LAVAL serait aller sur ses brisĂ©es ; on arrĂȘte donc Ă l'annĂ©e 1605 les recherches sur la Maison de Laval, sauf Ă donner place dans le cartulaire aux quelques mentions postĂ©rieures Ă cette date, qui sont venues Ă notre connaissance et dont la nomenclature peut aider Ă faire la lumiĂšre sur !a pĂ©riode Ă laquelle nos volumes sont consacrĂ©s. CARTULAIRE DE LAVAL XX 2890-3168 1586-1605 2890. â 1586, aprĂšs le 15 avril. â Lettre de condolĂ©ance adressĂ©e par Henri IV Ă Anne d'AlĂšgre ImprimĂ©, Lettres missives, II, 206. A madame de Laval Ma cousine, si je n'avois autant de regret en la perte qu'a- vons faicte de feu mon cousin, vostre mary, que pas un de ses amys, il me semble que j'aurois plus de subject de vous en donner la consolation qui vous est nĂ©cessaire ; mais le mal nous est si commun Ă tous, l'amitiĂ© que nous luy portions telle, et le besoin qu'il nous faict si cogneu, que chascun jour nostre regret augmente, nous resouvenant de sa valeur et du zĂšle singulier qu'il portoit Ă la gloire de Dieu, oultre l'amitiĂ© et grande affection qu'il m'avoit dĂ©monstrĂ©e. Ceste perte, Ă©tant accompagnĂ©e de tout le reste de sa mai- son, nous faict croire que le monde n'estoit pas digne de si gens de bien et que Dieu nous veult bien affliger ; mais aussi n'en a-il pas voulu oster la mĂ©moire puisqu'il vous en a laissĂ© le gaige qui vous reste en vostre fds, lequel je suis trez aise qu'ayez retirĂ© Ă Sedan, pour estre en plus grande seuretĂ© de sa personne et pour le faire nourir comme vous le dĂ©sirez et nous le dĂ©sirons. Je suis marry qu'il n'a plus d'aago pour voir plus tost le fruict que les gens de bien se promettent de luy. Je vous prie de croire que je luy serviray de frĂšre et qu'il CARTULAlItE 1586-1605 335 trouvera tousjours en moy le mesme soing et la inesme affec- tion Je veulx aussi que vous fassiez estĂąt de moy et de tous les moyens que j'auray jamais de tesmoigner par effect que mon amitiĂ© n'est point morte avec le corps mais qu'elle continuera Ă l'endroict de tout ce qui le peut reprĂ©senter, comme s'il estoit vivant. Je sçais, ma cousine, qu'avez beaucoup perdu et nous aussy ; pour le moings ses amys vous restent entre lesquels tenez moi pour vostre plus affectionnĂ© cousin et meilleur amy. Henry. 2891. â 1586, 1" mai, Paris. â Lettre par laquelle Henri III prescrit au capitaine Comte, qui occupait Laval avec soixante-dix harquebusiers, de les mener Ă Alençon sauf contre-ordre que lui donnerait M. de Fargis ImprimĂ©, Bour- jolly, II, 339, d'aprĂšs B. N., français, 3310, 67. 2892. â 1586, 1 er mai, Paris. â Lettre par laquelle, entre autres choses, Henri III avise M. de Fargis que, sauf nĂ©ces- sitĂ©, les harquebusiers du capitaine Comte doivent se rendre Ă Alençon et ĂȘtre remplacĂ©s Ă Laval par ceux du capitaine Pastoureau ImprimĂ©, Bpurjolly. II, 340, d'aprĂšs B. N., français, 3310, 07 j. 2893. â 1586, 6 octobre, Rennes. â Lettre Ă©ciite Ă M. du Plessis, conseiller au parlement de Rennes, par M. Le Me- neust de BrĂ©quigny, sĂ©nĂ©chal de Rennes, en le priant d'obte- nir d'Anne d'AlĂšgre de rĂ©duire la garnison de VitrĂ© au nom- bre d'hommes qui lui avait Ă©tĂ© fixĂ© ImprimĂ©, La Borderie, Calvinisme Ă VitrĂ©, p. 13, d'aprĂšs Archives des Le Gonidec de Traissan. Monsieur, vous voirrez ce que j'Ă©cris Ă Madame [la comtesse de Laval] et la mĂ©moire du bruit, lequel court en ceste ville, plusieurs sont rĂ©fugiez au chĂąteau de VitrĂ©. Madame aura volluntiers besoin d'une troisiĂšme grĂące du Roy, son lems finy. Mais ce n'est pour l'obtenir que de recueillir tant d'hommes, lesquels lui font grand tort. J'ay empeschĂ© qu'on advertisse monseigneur de MercĆur jusqu'Ă avoir response d'elle et de vous, Monsieur, m'estant promis que parentzny alliez ne nous divertiront de la voluntĂ© que avons au service du Roy et du pays. Et seray pledge de la bonne intention de Madame, 336 LA MAISON DE LAVAL mais toulz ces hommes lĂ rentrez au chĂąteau perdent tout... Faites qu'ils se retirent ou rĂ©duisent, autrement je crains quelque malheur. Faites que Madame me rende response bien ample ; elle ny vous ne pouvez douter de la bonne volluntĂ© que j'ay Ă son service et ce qui lui touche, mais le service du Roy est le pre- mier et du peuple, auquel il ne faut donner sujet de s'Ă©mou- voir ou dĂ©sir... A Rennes, ce 6" jour d'octobre 1586, environ les quatre heures. Vostre confrĂšre obligĂ© et obĂ©issant serviteur. Meneust. 2894. â 1587, 13 mai. â Contrat de mariage de Suzanne de Laval, fille de Jacques II de Laval-la-Faigne, avec Esprit Dallonville Note, du Chesne, Histoire, 636, et Durand, ChĂą- teau de Montuel, p. 23. 2895. â 1587, 1 er juillet, Laval. â Mandement de Pierre Champhuon, conseiller pour le Roy Ă Laval, exerçant la judi- cature des exempts par appel et pour les cas royaux, relatif Ă une rente sur BĂ©cherel Ă©tablie au profit de la chapelle de MontsĂ»rs par Jeanne de Laval in-extenso, B. N., français, 22339, 141;. 2896. â 1587, 3 aoĂ»t, Paris. â Lettre Ă©crite par Henri III Ă Urbain de Laval-Bois-DĂąuphin 1 , lui prescrivant de se mettre en route, afin de combattre l'invasion qui venait de franchir le Rhin ImprimĂ©, B. de Broussillon, Documents inĂ©dits, 95, d'aprĂšs B. N., français, 3348, 8. 2897. â 1587, 18 dĂ©cembre. â Lettres de Henri III rela- tives Ă la perception par le chapitre de Saint-Tugal d'une ren'e de vingt-six livres, seize sols, assise sur BĂ©cherel in extenso, B. N., français, 28339, 140. 2898. â 1588, 12 mars, Paris. Lettre Ă©crite Ă Urbain I. On trouvera ici numĂ©ro 196 le dessin du sceau d'Urbain de Laval- Bois-Dauphin, tel qu'il figure aux archives de Maine-et- Loire E. 3021, plaquĂ© Ă un acte du 26 avril 1584 ; et, sous le numĂ©ro 197, le dessin de celui de Madeleine de Montecler plaquĂ© Ă un acte du 3 juin 1582, conservĂ© au mĂȘme dossier. Le sceau de Madeleine porte au centre un Ă©cu parti de Laval et de Birague, oĂč les trĂšfles ne sont plus visibles sur les trois fasoes breteschĂ©es. CARTBLAinE 1586-1605 337 de Laval-Bois-Dauphin par la duchesse de Montpensier, laquelle, entre autres choses, le fĂ©licite de la naissance d'une fille ImprimĂ©, B de Broussillon, Documents inĂ©dits, 96, d'aprĂšs B. N., français, 3348, 27. 2899. - 1588, fin de mars. â Lettre adressĂ©e par Henri IV Ă François de la Noue, chargĂ© de la tutelle de Charlotte de la 196. â Sceau d'Urbain de Laval-Bois-Dauphin, 1!>84. Marck, duchesse de Bouillon ; le roi de Navarre lui recom- mande Mademoiselle de Bourbon, sa niĂšce, et Guy XX de Laval qui ne peuvent ĂȘtre en meilleur sĂ©jour que là » Im- primĂ©, Lettres missives. II, 361. 2900. â 1588, fin de mars. â Lettre par laquelle Henri IV assure Anne d'AlĂšgre qu'il ne l'abandonnera pas ImprimĂ©, Lettres missives, II, 360. A madame de Laval Ma cousine, vous sçaurez par ce porteur de mes nouvelles il vous dira que je suis dĂ©libĂ©rĂ© de n'abandonner pas Sedan et ce qui est dedans, que je tiens par trop cher. Croyez que j'auray aultant de soingde ma niepce, de ma cousine et de vostre fils que s'ils estoient mes enfans '. Aussy leur veulx-je servir de pĂšre. Je vous prie qu'ils ne se sĂ©parent poinct et vous mesme avoir l'Ćil sur ce que jugerez estre de leur bien, surtout pour empescher les praticques et menĂ©es que je ne doubte poinst qui ne se dressent de diverses parts. Il nous 1. Mademoiselle de Bourbon, Guy XX. mademoiselle de Bouillon et 338 LA MAISON DE LAVAL fault voir plus clair aux affaires du monde. Rien ne nous presse ; il y a de la besoigne taillĂ©e ailleurs, qu'il fault voir couldre premiĂšrement. J'espĂšre qu'on ne perdra rien en l'attente. Avertissez-moy et me tenez, ma cousine, pour vostre bien affectionnĂ© cousin et meilleur amy. Henry. 2901. â 1588, 7 avril, la FertĂ©-Ernault. â Acte parlequel Suzanne de Laval, dame Dallonville, renonce Ă la succession de Jacques de Laval-la-Faigne Note Durand, ChĂąteau de Montuel, 24. 2902. â 1588, 11 avril, Sedan. â Lettre Ă©crite par Anne d'AlĂšgre Ă un nommĂ© Salomon Original, Archives de la TrĂ©- 197.â Sceau de Madeleine de Monlecler, Ă©pouse d'Urbain Bois-Dauphin, 158?. moĂŻlle, et imprimĂ© par Marchegay dans Anecdotes galantes et tragiques du XIV e siĂšcle au XVII e . les Roches Baritaud, in-4°, 1883, tirĂ© Ă 100 exemplaires. A monsieur Salomon. Monsieur Salomon, je ne vous feray qu'un mot pour ceste heure, qui sera pour vous prier me vouloir mander au plus tost des nouvelles de mademoiselle de.., dont je suis en peine, et aussy me mander cornant sera jugĂ© le procĂšs de ma mĂšre '. 1. Antoinette du Prat, fille d'Antoine de Nantouillet et d'Anne d'AlĂšgre. LA MAISON DE LAVAL 198. â Portrait de Guy de Laval, marquis de Nesle, 1590. Tableau sur hns. n .';.'»"?'; de Versailles CARTULAIRE 1586-1605j 339 J'ay une autre requeste Ă vous faire, laquelle je vous prie ne dĂ©daigner, encore que je la vous face pour chose qui ne vaut guĂšre, aussi n'est-ce pas en sa considĂ©ration que je dĂ©sire que vous preniĂ©s de la peine, mais bien pour soulager la mienne, Ă quoy je m'assure que vous vous estudirĂ©s tousjours trĂšs volontiers, et il c'en prĂ©sente une occasion. C'est que je suis du tout rĂ©solue de me dĂ©faire de la bonne dame que vous savĂ©s, et sans bruict, car voici un lieu oĂč toutes choses sont sensurĂ©es quelquefois assĂ©s sinistrement, et seulement les miens rĂ©prouvent mes actions, mais les autres non, Ă mon advis au moins, n'ai-ge point remarquĂ© cela ; aussy n'en veus- je donner nul sujet, s'il est possible, et, pour ce, il m'est nĂ©ces- saire que cette affaire soit traitĂ©e avec quelque dextĂ©ritĂ©, qui ne sauroit estre, ce me semble, en nul autre corne en vous. AdvisĂ©s donc, monsieur mon bon ami, d'user tellement de vos couleurs que la tante de ceste nainfe m'escrive qu'elle dĂ©sire de la revoir, soit pour la visiter en quelque maladie qu'elle trouvera avoir, ou telle autre excuse qu'il luy plaira pour faire torner l'honneur de son costĂ©. Je suis contente qu'elle l'ait. Pourveu que j'en sois qui'.e. c'est ce que je de- mande. TrouvĂ©s donc moien de faire parler Ă elle et que ce!a puisse torner Ă mon contentement. Elle est fort prĂšs de Paris, ma mĂšre saict ce que c'est ; advisĂ©s ensemble sur cela ce qui ce doit faire. Si elle ne pouvoit point savoir que ceste envie lĂ vint de moy, j'en serois bien aise. Il faudrait, ce me sem- ble, interposer une tierce personne qui, reprĂ©sentant Ă ceste estropiĂ©e le hasart que sa niepee court oĂč elle est et qu'elle feroit beaucoup pour elle de la retirer pour quelque temps et de chercher quelque moien de me le faire trouver bon, qu'il y a de la vraie semblance que l'aimant comme je fai, que je ne refuseray pas de luy donner quelque temps pour la visiter, si elle me mande qu'elle est besoing de son service. Je serois bien aise de savoir sy madamoiselle Dumeux est tousjours en volontĂ© de me donner son filz pour page. Sy c'est son intention, je ne m'en chargerois point d'autre et serois bien aise de l'avoir bien tost. Il faut nĂ©cessairement mĂštre mon grant hors de page, autrement il Ă©pousera quatre ou cinq femmes, et quant il ne sera plus si Ă son aise ni Ă tant de chois, il considĂ©rera que les autres ce contentent d'une, dont il ce trouve souven bien empeschĂ©s. 340 LA MAISON DE LAVAL J'ay receu aujourd'huy deux lettres du roy de Navare fort plaines d'honnestetĂ©s. En l'une, il me recomande fort mada- moiselle ', Ă laquelle je voudrois avoir plus de moien de faire service. A Dieu, bon Cain, auquel je vous recomande et moy de bien bon ceur Ă vostre bonne grĂące, come aussy mon fdz ; luy et moy sommes entiĂšrement Ă vostre comandement. J'en- voie deux lettres que j'ay escrites Ă Messieurs de Chat et de Bois. Je mande au premier que vous luy nomerĂ©s les noms de ceux de nos oliciers auquelz il sera besoing qu'il escrive de bon ancre. Faictes luy donc savoir, je vous prie, et Ă moy ce que vous aurĂ©s rĂ©solu pour nies affaires. BaisĂ©s bien hum- blement les mains de ma part Ă toute la compagnie. Je rĂ©pon- dray une autre fois Ă vostre derniĂšre lettre. Pour ceste heure, vous n'aurĂ©s autre chose de *noy, sinon que je seray Ă jamais, Ce xi e d'avril 1588. Vostre bien affectionnĂ© amie. Au dos J'oublieis de vous dire que je ne me puis dĂ©faire sans pour de cete belle Fleuripes que Ă mon retour, mais vous ne dĂ©lairĂ©s de tramer ce qui est contenu en ce mot. 2903. â 1588, 27 aoĂ»t, Bois-Dauphin. â Lettre adressĂ©e Ă Henri III par Urbain de Laval-Bois-Dauphin, nommĂ©, ainsi que le lieutenant de sa compagnie, dĂ©putĂ© aux Etats-gĂ©nĂ©- raux ImprimĂ© B. de Broussillon, Documents inĂ©dits, 99, d'aprĂšs B. N., français, 3408, 67. 2904. â 1589, 1 er janvier. â Lettre adressĂ©e par Henri IV Ă Anne d'AlĂšgre ImprimĂ©, Lettres missives, II, 420. A madame de Laval. Ma cousine, nous travaillons icy Ă recouvrer gens et argent pour le secours de Jametz et Sedan ; nous avons dĂ©peschĂ© de tous costez, j'espĂšre que le fruict en rĂ©ussira bien tost. Je vous prie tenir la main, de vostre part, que toutes choses aillent bien au lieu oĂč vous estes. Vous voyez dĂ©jĂ les Ćuvrss merveilleuses de Dieu ; c'est bien pour reprendre courage. Nourrissez vostre petit pour l'employer Ă son service, car nous debvons espĂ©rer mieulx. 1. Catherine de Bourbon, niĂšce d'Henri IV. Voir sa lettre de la lin de mars, sous le numĂ©ro 2900. Cartulaire 1586-1605 34 1 Faites toujours estĂąt de moy comme de vostre bien affec- tionnĂ© cousin et meilleur amy, Henry. 2905. â 1589, l 8r mars, Le Mans. â Mandement par lequel Bois-Dauphin prescrit de signer et de jurer la Ligue dans chaque paroisse du Maine ImprimĂ©, abbĂ© Ledru, Urbain de Laval, 172. 2906. â 1589, vers le 23 mars. â Les habitants de VitrĂ© demandent trois piĂšces de canon Ă Mercoeur qui les leur ac- corde par trois lettres successives [Bulletin de la SociĂ©tĂ© arch. d'Ille-et- Vilaine, XI, 200-204. 2907. â 1589, 23 mars au 14 aoĂ»t. â SiĂšge de VitrĂ© par M. de MercĆur ' Notes, Paris-Jallobert, 42. 2908. â 1589, 23 mars au 14 aoĂ»t. â Relation du siĂšge de VitrĂ© par MercĆur ImprimĂ©, de BarthĂ©lĂ©my, Choix de documents inĂ©dits su?' Ligue en Bretagne, 18-27. 2909. â 1589, 27 aoĂ»t, VendĂŽme. â Acte par lequel Urbain de Laval-Bois-Dauphin reconnaĂźt devoir six cents Ă©cus a M. de Lignerac ImprimĂ©, Ledru, Urbain de Laval-Bois- Dauphin, 28. Je, Urban de Laval du Bois-Dauphin, confesse debvoir Ă monsieur de Lignerac 8 six cens escus sol pour une vandition qu'il m'a faicte d'ung cheval d'Espagne gris. Laquelle somme de six cents escus je luy promets paier Ă Pasques prochĂšne- ment. En tesmoing de sej'Ă© sine ceste de mon seing. Faict Ă Vendosme ce vint septiesme de oust MDLXXX1X. pour la somme de six cens escus sol. Urban de Laval. 2910. â 1589, 8 septembre, Le Mans. â Acte par leque Bois-Dauphin dĂ©clare que ce que la Motte-Serrant a fait contre le sieur du Vau en VendĂŽmois l'a Ă©tĂ© par ses ordres et est acte de guerre ImprimĂ©, abbĂ© Ledru, Urbain de Laval, 183. 1. C'est le 21 mars qie les huguenots s'Ă©taient Ă©tablis dans VitrĂ©, dont MercĆur ne parvint pas Ă les dĂ©loger. 2. Lieutenant de la Haute-Auvergne, gouverneur d'Aurillac. 22 342 LA MAISON DE LAVAL I 2911. â 1589. â DĂ©penses faites par les Ă©chevins du Mans en vertu des ordonnances de Bois-Dauphin et du sieur de La Pierre, son lieutenant ImprimĂ©, abbĂ© Ledru, Urbain de Laval, 173-183. 2912. - 1589, 2 dĂ©cembre, Le Mans. â Capitulation de la ville du Mans, signĂ©e par Urbain de Laval-Bois-Dauphin, du Puy du Fou, Pescheray et autres ImprimĂ©, B. de Broussil- lon, Documents inĂ©dits, 103, d'aprĂšs B. N., français, 3275, 136, et 3977, 357. 2913. â 1590, 14 mars, Ivry. â Victoire remportĂ©e par Henri IV sur les ligueurs. Guy de Laval, marquis de Nesle, y fut blessĂ© Ă mort dans l'armĂ©e royale ; Urbain de Laval- Bois-Dauphin, de l'armĂ©e de la Ligue, y fut fait prisonnier MĂ©moires de la Ligue, IV, 248, 249. 2914. â 1590, 15 avril, Esclimont. â DĂ©cĂšs de Guy de Laval, marquis de Nesle ', causĂ© par les blessures reçues par lui le 14 mars, Ă Ivry [MĂ©moires de la Ligue, IV, 249. 2915. â 1590, 16 avril. â Coup de main avortĂ© contre le chĂąteau de VitrĂ© Note, Paris -Jallobert, 44. 2916. â 1590, 30 avril, Rennes. â Ordonnance par laquelle le sĂ©nĂ©chal de Rennes dĂ©clare rebelles au Roi un grand nom- Dre de ligueurs de VitrĂ© et des paroisses des environs Ă©nu- mĂ©rĂ©s dans l'acte ImprimĂ©, dom Morice, III, 1506. 2917. â 1590, 25 novembre, Pontavert. â Lettre Ă©crite par le duc de Mayenne Ă Urbain de Laval-Bois-Dauphin ImprimĂ©, Henry et Loriquet, Correspondance du duc de Mayenne, I, 70. A monsieur de Bois-Dauphin Monsieur de Bois-Dauphin, je vous envoyĂ© par Legrand toute la dĂ©pesche des provinces oĂč s'addressera vostre che- min, que je- vous prie de faire distribuer sur les lieulx et recommander autant que vous pouvez qu'il soit prompte- ment proceddĂ© Ă la dĂ©putation de tous les ordres pour avan- 1. Ce Guy de Montmorency-Laval, marquis de Nesle, est le seul Laval dont nous ayons rencontrĂ© un portrait peint ; nous en donnons ici sous le numĂ©ro 198 la photogravure. Le tableau fait partie du musĂ©e de Versailles, oĂč il ligure soiis le numĂ©ro 3326. CABTULAIRli 1586-1605 843 cer l'assemblĂ©e des Estats dans le temps que nous avons pour la seuretĂ© des dĂ©putez au moyen des passeports dont j'envoye pareillement ung pour chaque province. Je vous ai desjĂ mandĂ© une autre fois que Legrand vous accompagnera jusques lĂ et vous dira les lieus ausquels nous avons Ă faire pour ce regard, en quoy vous serez soulagĂ© de luy, comme cogneu au pays. Je vous supplye d'y faire procĂ©der en la plus grande dili- gence qu'il se pourra. N'estant cest Ă aultre fin, je prie Dieu.... 2918. â 1590. â Lettre Ă©crite par Anne d'AlĂšgre Ă la duchesse de laTrĂ©moĂŻlle Archives de la TrĂ©moĂŻlle. A madame, madame de la Trimoille Madame, jevous puis dire avec vĂ©ritĂ© que depuis le retour du porteur que m'avez derniĂšrement envoyĂ©, j'ay recherchĂ© tous moyens de satisfaire Ă ce que mon filz vous doibt, pour les arrĂ©- rages de sept annĂ©es des mil dix huict livres troys sols six de- niers tournois pour chacune d'icelles qui escheoirront le xxm" de ce moys. Comme il est trĂšs raisonnable, et Ă ceste fin j'ay envoyĂ© en toutes les terres de mon dict filz qui ne sont possĂ©- dĂ©es de la Ligue, ausquellesil a convenu mectre des receveurs Ă confĂ©rence, depuis deux moys que j'ay eu l'administration de ses biens pour n'avoir peu trouver de fermiers, mais il ne m'a estĂ© possible d'en recouvrer un seul escu. Quant au passĂ©, il a estĂ© entiĂšrement receu par monsieur de SourdĂ©ac, qui en avoit eu l'administre tion, et n'y a moyen d'en recouvrer de luy. Au contraire, j'ay estĂ© contraincte de luy laisser la jouis- sance de la baronnye de GaĂ«l, jusques Ă ce qu'il se soit payĂ© de quatre mil escuz qu'il a voullu avoir pour quitter la dicte administration et sans laquelle somme il eust jouy du tout autant qu'il eust peu, â et s'est mis dans le chasteau de Comper, dĂ©pendant de la dicte baronnie, dont je ne le puis tirer, encores qu'il y soit au dommage de mon filz et Ă la foulle des subjeetz d'icelle, â ne m'estant restĂ© aucun revenu duquel je puisse Ă prĂ©sent faire estĂąt pour la nourriture de mon filz et de moy, ce que, madame, je vous dis avec larmes, sinon environ de sept ou mil escuz que les fermiers de ceste baronnye doibvent de leur derniĂšre ferme qui avoit commencĂ© auparavant ces derniers troubles, et sans la difficultĂ© qu'ilz 344 LA MAISON DE LAVAL ont faicte de payer au dict sieur de SourdĂ©ac, il eust dĂ©vorĂ© encores ceste partye, pour laquelle les dictz fermiers m'ont aussi mis en avant plusieurs difficultez pour les dommaiges et non jouissances que prĂ©tendent leurs soubz fermiers, de sorte de j'ay estĂ© contraincte'de les mectre en procĂšs, que j'espĂšre terminer en brief, et par l'yssue d'iceluy recevoir la meilleure partye de la dicte somme, de laquelle j'ay dĂ©signĂ© les premiers deniers qui en proviendront pour acquitter les arrĂ©rages du dict suplĂ©ment qui vous sont deuz, que pourrez recevoir auparavant la Sainct-Jehan, terme plus prest et mieux asseurĂ© que si je vous baillois une terre Ă jouir, parce que je n'en ay aucune affermĂ©e, mais Ă recepte, dont ilz ne comptent pas du tiers du revenu, pour n'ozer aller par pais pour le recuillir, comme, pour exemple, ceste terre qui estoit affermĂ©e six mil escuz ne revient aujourd'huy Ă 11 mil livres ; encores peu de personnes se veullent hazarder de recevoir le revenu, si ce n'est avec grand sallaire ; tellement, madame, que quand vous auriez faict saisir et establir commissaires, ilz consumeroyent le tout en fraiz, de quoy vous ne recevriez aucun proffict et mon filz un trĂšs grand dommage. Et pour ce, madame, je vous suplye au nom de Dieu de mectre en considĂ©ration mes justes dollĂ©ances et que nous faciez ceste faveur d'aider Ă vous payer. Si vous aviez opinion de pouvoir recouvrer environ de quinze cens escuz que feu monseigneur le prince me devoit, je vous envoiroys ses promesses, ou bien s'il plaisoit Ă monsieur de la Trimoille prendre la vaisselle de feu monsieur mon mary , laquelle il a autres fois dĂ©sirĂ©, comme j'ay entendu depuis quelque temps, je la luy ferois dĂ©livrer Ă la Rochelle oĂč elle est, et aviserions Ă faire pris du marc, compris celle qui est brunye dorĂ©e, ainsi qu'il vous plairoit d'en ordonner. J'ay bien espĂ©rance qu'aprĂšs la prise d'Avran- ches, qui se doibt rendre jeudy prochain, les armes de mes- sieurs de Montpensier et prince de Dombes se pourront join- dre et remectre en l'obĂ©issance du roy la meilleur partye de ce pais Et si ainsi advient, je ne vous demanderay si long terme, vous promectant que de ce que je pourray prompte- ment recevoir, je seray aussi songneuse de vous payer que de secourir mon filz. Et si j'avois autres moyens, je les vous dĂ©clarerois comme j'ay faict ouvertement ceulx que je vous reprĂ©sente, vous supliant bien humblement, madame, de CARTULAIRE 1586-1605 345 croire que k retardement ne provient que de faute d argent et non de bonne vollontĂ©, de laquelle tout ce que jauray jamais de moyen, voire moy mesmes, seray entiĂšrement tous- jours dispos/Ă vous rendre tout le service bien humble que pouvez dĂ©sirer, . , Madame, de votre plus humble et affectionnĂ©e cousine a vous faire service. Anne d AllĂšgre. 2919 _ Vers 1590. â Lettre Ă©crite au duc de Nevers par RenĂ©e 'de Laval, comtesse de CrĂ©ance B. N. français, 3630, 60. Monseigneur le duc de Nevers Monseigneur, je suis infiniment marrie de vous estre tant importune. L'honneur qu'il vous plaist de me faire me tenir pour vostre trĂšs humble servante faict qu'avec plus d assu- rance ie vous supplie trĂšs humblement, monseigneur, m oc- troyer ungz passeport pour aller aux villes de vostre gouver- nement oĂč j'ay quelques affaires. J'en ay donnĂ© ung mĂ©moire Ă ce gentilhomme, et vous m'obligerĂ©s de plus en plus a demeurer Ă©ternellement, Monseigneur, Votre trĂšs humble et trĂšs hobĂ©sante servante. R. de Laval. 2920. â 1591, 21 avril, Nantes. â Long rapport adressĂ© par Die^oMaldanado Ă Philippe II, dans lequel il mentionne l'Ă©change qui venait de s'effectuer de Bois-Dauphin contre d'Avaugour, dĂ©tenu au chĂąteau de Nantes CarnĂ©, Documents sur la Ligue en Bretagne, I, 37, d'aprĂšs A. N., K. 1580. 2921. â 1591, mai. â MĂ©moire adressĂ© par M. de la Motte- Jacquelot Ă l'ambassadeur d'Espagne, dans lequel il parle de la nĂ©cessitĂ© d'imposer Ă MercĆur la constitution d'un grand conseil et indique Bois-Dauphin comme devant y prendre place ImprimĂ©, CarnĂ©, Documents sur la Ligue en Breta- gne, \, 45, d'aprĂšs K. 1577. 2922. - 1591, 28 juin, Guengugli. â Lettre Ă©crite par Bois-Dauphin Ă don Mendo de Ledesma afin de lui raconter les escarmouches qui venaient d'avoir lieu dans la lande de Marhalla, en Boqueho ImprimĂ©, CarnĂ©, Documents sur la 346 LA MAISON DE LAVAL 58, d'aprĂšs l'autographe A. N., K. Ligue en Bretagne, I, 1577. i ^f- 15 ^ 1 ;, 2 Ji»et, DĂ©cĂšs de Suzanne de Laval, dame Dallonville Note, Durand, ChĂąteau de Montuel p. 24. 2924. _ 1591, 3 juillet. â Etat des forces du duc de Mer- cĆur reunies au camp de Corlay ; le rĂ©giment de M. du Bois- Dauphin, composĂ© de sept compagnies comptait deux cent quarante cuirasses ImprimĂ©, CarnĂ©, Documents sur la Ligue- en Bretagne, I, 59, d'aprĂšs A. N., K. 1577. 2925 - 1591, 13juillet. âLettre Ă©crite par Bois-Dauphin adonMendode Ledesma oĂč il se plaint de son manque de ressources ImprimĂ©, CarnĂ©, Documents sur la Ligue en Bretagne, I, 84, d'aprĂšs A. N., K. 1577. 2926. - 1591, 15 juillet. -Instructions donnĂ©es par Bois- Dauphin et M. de la Roche-Hue envoyĂ© par lui vers don Mendo de Ledesma ImprimĂ©, CarnĂ©, Documents sur la Ligue en Bretagne, I, 70, d'aprĂšs A. N., K. 1577. 2927. â 1591, juillet. â MĂ©moire adressĂ© au roi d'Espa- gne par la Motte-Jacquelot dans lequel on voit que le sieur du Bois-Dauphin, sans argent, sans ville de retrette et sans passage aucun de riviĂšre, a tirĂ© nĂ©anmoins des ditz pais plus de deux cens gentilshommes et plus de seize cens harquebu- ziers, qu'il a menĂ©s en l'armĂ©e du duc de MercĆur » analysĂ© Carne, Documents sur la Ligue en Bretagne, I, 71, d'aprĂšs A. N., K. 1577. " ' yl ' ud P res 2928. â 1591, 6 aoĂ»t. - Lettre Ă©crite par MercĆur Ă don Mendo de Ledesma lui donnant des nouvelles de l'armĂ©e Im- primĂ©, CarnĂ©, Documents sur la Ligue en Bretagne I 83 d'aprĂšs A. N., K. 1577. ' 2929. - 1589, avril Ă 1591, septembre. - Etat des finances de la Ligue en Bretagne par lequel on apprend que les ligueurs ont reçu dix-sept mille six cent cinquante livres pour supplĂ©ment de l'Ă©change de d'Avaugour contre Bois-Dauphin ImprimĂ©, CarnĂ©, Documents sur la Ligue en Bretagne I 101, d'aprĂšs A. N., K. 1577. ' ' 2930. â 1591, 14 septembre. â Lettre adressĂ©e par CAUTCLAIRE 1586-1605 347 Henri IV Ă M. d'HumiĂšres et relative Ă la libĂ©ration deBois- Dauphin Copie informe au cabinet de l'auteur. Monsieur d'HumiĂšres, je dĂ©sire instamment que M. de Laval, prisonnier Ă Pierrefond, soit en libertĂ© 1 , et, n'ayant Ă prĂ©sent un bon moyen pour l'en tirer, je vous prie vous em- ployer pour cest effet et vous asseurer de tout l'argent que vous sera possible pour paiement et assurance de sa rançon et croire que me ferez en cela chose qui me sera trĂšs agrĂ©able. . 1 N'estant cestuy Ă aultre fin, je prie Dieu, monsieur de HumiĂšre, qu'il vous ait en sa saincte gai de. Le xiv e jour de septembre. Henry. 2931. - 1591, 5 octobre, Laval. â Lettres par lesquelles le mĂ©tier de tanneur est rĂ©glementĂ© dans la ville de Laval ' ImprimĂ©, la BeauluĂšre, Notices et recherches, 268. 2932. â 1591, 15 novembre, Craon. â Lettres par les- quelles Bois-Dauphin autorise RenĂ© Joubert, son chirurgien, Ă s'emparer des plus beaux meubles ayant appartenu au feu capitaine Rallais, jusqu'Ă concurrence des quatre vingt livres qu'il lui devait ImprimĂ©, Bulletin de la Mayenne, VIII, 1894, 41. 2933. _ 1591, 18 dĂ©cembre, Rennes. â ArrĂȘt par lequel la Chambre des comptes de Bretagne vĂ©rifie les lettres du Roi du 2 novembre 1591, autorisant la ville de VitrĂ© Ă faire une levĂ©e pendant six ans ImprimĂ©, Paris-Jallobert, 45. 2934. â 1591, 31 dĂ©cembre. â Quittance de la somme de neuf mille Ă©cus, dĂ©livrĂ©e au nom du seigneur de Bois-Dau- phin Ă valoir sur ses Ă©tats et appointements do gouverneur de l'Anjou et du Maine B. N , français, 28154, 240. 1 II s'agit Ă»i d'Urbain de Laval-Bois-Dauphin, qui, fait pri- sonnier Ă Pa bataille d'Ivry, Ă©tait l'objet d'un Ă©change mentionne au numĂ©ro 2918. Gomme Bois-Dauphin Ă©tait, l'un des chefs de la Liaue, il y a heu de penser que si Henri IV attachait tant de prix Ă la libertĂ©, c'est que celle de d'Avaugour en dĂ©pendait. Voiries numĂ©ros 2918, 2927, 2939, 29'i0, 2959, 2975. ? Pour la rĂ©daction de ces statuts on s'est inspirĂ© de ceux donnĂ©s par Louis XI aux tanneurs d'Angers, par ses lettres datĂ©es a ChĂ teau-Gontier, mai 1487. 348 LA MAISON DE LAVAL 2935. â 1591. â ExĂ©cution du juge de Laval Bulletin de la Mayenne, 1889, 354. 2936. â 1592, 11 mars. â Contrat de Pierre II de Laval- Lezay avec Isabeau de Rochechouard Note, du Chesne, Histoire, 623. 2937. â 1592, fin mai, Nantes. âLettre Ă©crite par Bois- Dauphin au roi d'Espagne Ă la suite de la bataille de Craon ImprimĂ©, CarnĂ©, Documents sur la Ligue en Bretagne, I, 127, d'aprĂšs A. N., K. 1581. 2938. â 1592, 1" juillet, ChĂ teau-Gontier. âQuittance de quinze cent quatre-vingts Ă©cus, dĂ©livrĂ©e par Urbain de Laval- Bois-Dauphin, Ă valoir sur ses gages de gouverneur d'Anjou et du Maine pour nosseigneurs, les princes catholiques » Original signĂ© et scellĂ©, B. N., français, 28154, 241. 2939. â 1592, 15 juillet. â Acte par lequel Bois-Dauphin reconnaĂźt avoir reçu quatre mille Ă©cus dĂ©pensĂ©s par lui au profit de la Ligue* ImprimĂ©, Revue du Maine, XXIX, 363. 2940. â1592, 1»' octobre. âRelation de la victoire rem- portĂ©e Ă AmbriĂšrespar Bois-Dauphin adressĂ©e par donMendo de Ledesma Ă Philippe II Mention, CarnĂ©, Documents sur la Ligue en Bretagne, I, 158, d'aprĂšs A. N., K. 1584, et traduc- tion, Revue du Maine, XLVIII, 24-30. 2941. â 1592, 28 octobre. â Acte par lequel François de Faudoas, comte de Belin, s'engage Ă payer douze cents Ă©cus pour la rançon d'Urbain de Laval-Bois-Dauphin Copie informe au cabinet de l'auteur. Je, seigneur de Belin, mareschal de camp des armĂ©es catho- liques et gouverneur de la ville et citĂ© de Paris, soussignĂ©, confesse debvoir et promest paier la dite somme [1200 Ă©cus] de ce jourd'hui, date de ces prĂ©sentes, en trois mois accomplis et rĂ©voluz en son propre et privĂ© non. Obligeant Ă ceste fin 1. Ici, sous les numĂ©ros 199, 200. 201, on trouvera les dessins de trois cachets dont le marĂ©chal de Bois-Dauphin a fait usage entre 1592 et 1609, Ă une Ă©poque oĂč, par suite du dĂ©cĂšs, le 15 avril 1590, de Guy de Laval-LouĂ©, Urboin de Laval, devenu chef du nom et des armes de Montmorency-Laval, avait abandonnĂ© la bordure chargĂ©e de cinq lionceaux, qui figure encore au numĂ©ro 196, et ne portait plus qu'un blason sans brisure. cartulaire 1586-1605; 349 tous ses biens, seigneuries, meubles et immeubles en quelques lieux qu'ils soient assiz et existant. Faict ce vingt huictiesme jour d'octobre mil cinq cent quatre vingt et douze. DE BELIN. 2942. â 1592, fin d'octobre. â Lettre adressĂ©e psr M. d'Hu- miĂšres Ă Jean de Faudoas, comte de Belin, et relative Ă la libĂ©ration de M. du Bois-Dauphin Copie informe au cabinet de l'auteur. Monsieur, je vous mercie bien humblement du bon secours que a receu M. de Laval par vos mains en la composition de sa rançon et libertĂ©. Je reconnoist assez que c'est en la considĂ©ration de la priĂšre que je vous ai faicte, du commandement du roy qui a 199, 500,501. â Cachets du marĂ©chal de Bois-Dauphin, 1592, 1601, 1G09. eu ce service trĂšs agrĂ©able et m'a asseurĂ© qu'il vous fera des- charger des douze cents Ă©cuz dont vous avez respondu au sieur de Bieux pour la rançon. Je tiens cela pour chose bien certaine et vous supplie aussi de vous asseurer que le sieur de Bieux sera bientĂŽt satisfait de le laisser partir et que vous en recevrez aulcune perte d'intĂ©rest ou incommoditĂ© en vostre particulier. Sa MajestĂ© vous en faict un mot de remerciement et mon advis est que vous debvez respondre Ă sa lettre, car pour cela je n'estime pas que vous puissiez estre soubçonnĂ© de vostre parti. Ledit sieur de Laval vous prie de lui envoyer un passeport afin qu'il puisse vous aller voir Ă Paris et vous remercier luy mesme de la faveur que luy avez faicte en ceste occasion. Je suis, monsieur, vostre respectueux. Ch. HumyĂšre. 350 LA MAISON DE LAVAL 2943. â 1592, 8 novembre, Rennes. â Mandement par lequel le duc de Montpcnsier prescrit au sieur du LiscoĂ«t d'aller tenir garnison Ă VitrĂ© ImprimĂ©, dom Morice, III, 1552. 2944. â 1593, 20 fĂ©vrier, Laval. â Acte par lequel Bois- Dauphin donne pouvoir Ă Jean de Blony seigneur de PincĂ©, de prendre place en son nom aux Etats gĂ©nĂ©raux ImprimĂ©, Etats gĂ©nĂ©raux de 1593, p. 582. 2945. â 1593, 2 mai. â Liste des victimes de la bataille du Port-Ringeard ImprimĂ©, Bourjolly, II, 27. 2946. â 1593, 3 mai, les Riceys. â Lettre d'Anne de Laval au duc de Nevers B. N., français, 4719, 30. 2947. â 1593, 13 septembre, Nantes. â Acte de baptĂȘme de Philippe, fils d'Urbain de Laval-Bois-Dauphin et de Made- leine de Montecler Copie, B. N., français, 28154, 274. 2948. â 1593. â Vente par Gabrielle de Laval, marquise de Nesle, comtesse de Joigny, veuve de François Aux-Epau- les, Ă Barbe TribolĂ©, dame de PĂ©tau et Misery, veuve de Denis d'Etampes, et Ă Loup de la FertĂ©, des terres de Merry- Sec, Usselot et Pierrefitte note, Bulletin de la SociĂ©tĂ© de l'Yonne, XXXVIII, 450. 2949. â 1594, 17 fĂ©vrier, Encre. â Procuration donnĂ©e par Jean de Laval-la-Faigne, seigneur d'Aveluis, Tartigny, Bussu, Montigny, Fresne, Gournay et autres lieux, pour aliĂ©- ner ses droits sur l'hĂŽpital Saint-Mathieu d'Arras ImprimĂ©. Louis Ricouart, Documents sur l'hĂŽpital Saint-Mathieu, 11. 2950. â 1594, 18 fĂ©vrier. â Acte par lequel le procureur de Jean de Laval aliĂšne tous les droits que celui-ci tenait de Hugues de Laval, son pĂšre, sur l'hĂŽpital Saint Mathieu Im- primĂ©, L. Ricouart, op. cit., 10. 2951. â 1594, 11 mars. â Lettre Ă©crite par du Plessis- Mornay Ă M. de Bouillon, dans laquelle il relate les inquiĂ©tu- des que lui causent, au point de vue des intĂ©rĂȘts du parti pro- testant, les nĂ©gociations engagĂ©es pour la resonnaissance du roi par Bois-Dauphin ImprimĂ©, Correspondance de Duplessis-Mornay , VI, 21. 2952. â 1594, mars. â Compte d'argent dĂ» par Phi- CARTULAIRE 1586-1605 351 lippe II en Bretagne ; on y mentionne deux mille livres prĂȘ- tĂ©es par Bois-Dauphin ImprimĂ©, CarnĂ©, Documents sur la Ligue en Bretagne, II, 16, d'aprĂšs A. N., K. 1591. 2953. â 1594, 28 avril et 8 mai, Laval et Saint-Germain- en-Laye. â TraitĂ© de la capitulation delĂ ville de Laval avec les engagements pris par le roi Henri IV envers elle Impri- mĂ©, Bertrand de Broussillon, Documents inĂ©ditspour servir Ă l'histoire du Maine, 125-132, d'aprĂšs A. N., X la . 8641,65. 2954. â 1594, 6 juin. â ArrĂȘt par lequel le Conseil d'Etat attribue pour un an au lieutenant du prĂ©vĂŽt de Laval, con- naissance des crimes commis dans l'Ă©lection de Laval B. N., français, 18159, 178. 2955. â 1594. â MĂ©moire du sieur du Vineau au roi d'Espagne, oĂč il mentionne les vellĂ©itĂ©s que Bois-Dauphin aurait eues, selon lui, de se rallier Ă la trĂȘve gĂ©nĂ©rale, vellĂ©itĂ©s auxquelles il aurait renoncĂ© aprĂšs une entrevue avec Mer- cĆur Ă Nantes ImprimĂ©, CarnĂ©, Documents sur la Ligue en Bretagne, II, 24. d'aprĂšs A. N., K. 1584. 2956. â 1594, 30 juillet. â Sentence constatant que le dit jour Elisabeth de Laval, Ă©pouse de du Bocquet, seigneur de la GadaliĂšre et de Saint-Aignan, a renoncĂ© Ă la succession de RenĂ© de Laval Note, B. N., français, 28154, 352. 2957. â 1594, 8 novembre, Saint-Germain-en-Laye. â ArrĂȘt par lequel le Conseil d'Etat accorde Ă Lavardin, gou- verneur du Maine, de Laval et du Perche, une indemnitĂ© de quinze cents Ă©cus pour ses dĂ©penses pendant les nĂ©gociations de la trĂȘve conclue avec les provinces de l'Anjou et du Maine. 2958 â 1594, 9 novembre, Saint-Germain. â ArrĂȘt du Conseil du Roi, par lequel Henri IV, pour rembourser les habitants de VitrĂ© des Ă©cus, 26 sous, 6 deniers dĂ©- boursĂ©s par eux pour rĂ©sister Ă la Ligue, autorise dans ce but une imposition exceptionnelle ImprimĂ©, de BarthĂ©lĂ©my, Documents sur la Ligue en Bretagne, p. 176. 2959. - 1594, 10 novembre, Saint-Germain-en-Laye â ArrĂȘt par lequel le Conseil d'Etat ordonne le remboursement de vingt milliers de poudre, achetĂ©s par la Rochepot, en mars 1593, alors que Henri IV voulait assiĂ©ger ChĂąteau- 352 LA MAISON DE LAVAL Gontier et Laval, et prescrivant de les livrer Ă l'armĂ©e de Bre- tagne B. N., français, 18159, 424. 2960. â 1595, 17 janvier, Nantes. â Lettres par lesquelles le marĂ©chal de Bois-Dauphin ' ordonne la mise en libertĂ© des sieurs de la Barre et de la Lande de Crespy, dĂ©tenus Ă An- gers ImprimĂ©, Revue de l'Anjou, 1854 3 , 351. 2961. â 1595, 20 janvier, Paris. â ArrĂȘt par lequel le Conseil des finances prescrit diverses levĂ©es de deniers des- tinĂ©s Ă satisfaire aux engagements pris par la Rochepot envers Bois-Dauphin, lors de la conclusion de la trĂȘve convenue pour les mois d'octobre, novembre et dĂ©cembre 1594 B. N., Clair ambault, 653, 124. 2962. â1595, 26 janvier, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat rĂ©glant Ă huit mille Ă©cus la somme que le sieur d'Avaugour devra payer aux sieurs de Vignacourt et de Sainte-GeneviĂšve pour sa rançon et pour celle de Bois-Dauphin A N., E la 70, et B. N., français, 10841, 29. 2963. â 1595, 16 fĂ©vrier. â Etat des garnisons Ă©tablies dans les villes de Bretagne dressĂ© par le marĂ©chal d'Aumont ImprimĂ©, de BarthĂ©lĂ©my, Documents sur la Ligue, 179-197. 5. â VitrĂ©. â A cinquante salades soubz la charge du sieur de Montmartin, pour leurs gaiges et solde d'ung mois, 761 escuz, 6 solz, 8 deniers, sçavoir audit sieur de Montmar- tin 63 escuz 1/3; Ă son lieutenaut, 31 escus,23 sols, 4 deniers; Ă l'enseigne, 24escus, 26 sols, 8 deniers ; au guidon pareille, somme ; au marchai des logis 17 escus 1/2, et Ă 45 salades, chacun 13 escus 1/3; cy 761 cscus, 6 sols, 8 deniers. A quarante harquebusiers Ă cheval commandĂ©s par le capi- taine Phelipes, pour un moys. 347 escus 2/3 ; au capitaine 33 1/3 ; cornette 10 ; sergent 8 1/2 ; 37 harquebusiers Ă chacun 8, cy 347 escus 1/3. Le rĂ©giment du sieur de Ferchaut composĂ© de 7 compa- gnies de gens de pied, chacune de 50 hommes servira, en ladite garnison avec 30 harquebusiers Ă cheval soubz la charge du capitaine Bourgneuf et en lacampaigne, desquel- les sept compagnies de gens de pied y en aura deux qui tien- 1. Il faut rectifier le texte imprimĂ© dans lequel le marĂ©chal reçoit le prĂ©nom de Jean au lieu de celui d'Urbain. ! CARTULAIRE 1586-1605 353 dront garnison en ladite ville et seront payez des deniers levĂ©s pour l'entretĂšnement desdites garnisons; et les cinq autres restantes avec lesdits harquebuziers, sur les deniers des trois escuz par feu. Pour ce ne sera cy faist estĂąt que de deux compaignies, sçavoir la premiĂšre compaignie Ă 50 hommes de pied soubz la charge du capitaine Maignan, pour leur solde et apointement d'ung mois 250 escus, sçavoir au capitaine 33 escus 1/3 ; Ă son lieutenant 18 escus ; Ă l'ensei- gne 10 escus ; Ă un sergent 6 escus 1/3 ; Ă deux caporaulx cha- cun 6 escus ; Ă un fourier, au tambour et au phifre, 4 escus chacun ; et Ă 41 harquebusiers Ă pied, aussy 4 escus chacun, cy 256 escus. La deuxiĂšme compaignie... soubz la charge du capitaine Matz Montmartin, [identique Ă la premiĂšre], cy 256 escus. Plus Ă 40 harquebuziers Ă pied ordonnĂ©s pour tenir gar- nison dans le chasteau dudit VitrĂ©, commandĂ©s par ung lieu- tenant, pour leur solde et apoinctement d'ung moys, la somme de 180 escus 2/3, sçavoir audit lieutenant 18 escus ; Ă ung ser- gent 6 escus 1/3 ; Ă deux caporaulx 6 escus chacun, et Ă 36 desdits harquebuziers, 4 escus chacun, cy 180 escus 2/3. Ceste partie est augmentĂ©e pour la solde dudit lieutenant par chacun mois de 15 escus 1/3 par ordonnances particu- liĂšres, cy 15 escus 1/3. Audit sieur de Montmartin pour son estĂąt de gouverneur, 33 escus 1/3. Au sieur de la Villevoysin, son lieutenant, pour ce que le- dit de Montmartin est marĂ©chal de camp, 33 escus 1/3. Et au sieur de Raton, sergent major, aussy pour son estĂąt d'un mois, 33 escus 1/3. Somme escus, 6 solz, 8 deniers 2964. â 1595, 14 mars, Paris. â Lettre de Henri IV Ă du Plessis-Mornay sur les nĂ©gociations relatives Ă la soumission de MercĆur et de ses adhĂ©rents ImprimĂ©, Lettres missives, VIII, 550. ... Quant au sieur du Bois-Dauphin, le duc de Montbazon a fait entendre au Roi ce qu'il espĂšre de luy ; sur quoy S. M. a dĂ©clarĂ© audit duc de Montbazon sa volontĂ© et le fera partir dans deux ou troys jours, pour aller trouver ledit sieur du Bois-Dauphin, lequel a fait congnoistre au Boy qu'il dĂ©sire traiter avec ledict sieur de Montbazon seulement, lequel a 354 LA MAISON DE LAVAL charge de S. M. d'advertir ledict sieur du Plessis de ce qu'il advancera en ceste affaire 2965. â 1595, 22 mars, Bois de Vincennes. â Lettre Ă©crite par Henri IV Ă Duplessis-Mornay au sujet des nĂ©go- ciations avec Bois-Dauphin ImprimĂ©. Duplessis-Mornay, Correspondance, VI, 35. Monsieur Duplessis Vous sçaurĂ©s de mes nouvelles par la Bastide, prĂ©sent porteur. Il s'en rĂȘva par delĂ avec mon cousin le duc de Montbazon, auquel j'ai donnĂ© charge, suivant ce que je vous ai ci-devant escrit, de traiter avec M. de Bois-Dauphin pour estre mon serviteur. EmployĂ©s-vous en ceste nĂ©gociation, comme chose que j'ai fort Ă cĆur et que j'aurai trĂšs agrĂ©able ; et m'avertisses en diligence de ce que vous en espĂ©rĂ©s, afin que suivant cela, avant mon esloignement de ces quartiers, j'y pourvoye. MandĂ©s-moi toutes nouvelles de vostre nĂ©gociation et rĂ©ponse de ce que je vous ai ci-devant escrit par un g de mes lacquais et dĂ©posĂ©s par vostre secrĂ©taire. A Dieu, M. Duplessis, lequel je prye vous avoir en sa saincte garde. Henry. Au Bois de Vincennes, ce 22 mars 1595 '. 2966. â 1595, 18 avril. â Acte par lequel Elisabeth de Laval, fille de Jacques de Laval-la-Faigne, Ă©pouse de Gabriel du Bocquet, seigneur de la GadeliĂšre, renonce au profit de ses enfants Ă la succession de RenĂ© de Laval-Auvilliers, son frĂšre Note, Durand, ChĂąteau de Montuel, 22. 2967. â 1595, 15 mai, VitrĂ©. â Aveu fait Ă Guy XX par Marie d'Antraigues, tutrice de sa fille Marguerite de Beau- manoir ImprimĂ©, S. Frain, Une terre.... de 1200 Ă 1600, Rennes, 1879, in-12, p. 131. 2968. â 1595, 30 juin, Nantes. â MĂ©moire du duc de Mer- cĆur Ă don Mendo de Ledesma ; on y remarque la priĂšre de 1. Bien que le texte imprimĂ© porte 1594, la correction en 1595 s'impose en effet, tout d abord, il faut rapprocher cette lettre de celle du 14 mars 1595 notre numĂ©ro 2961, puis en 1594 Henri IV Ă©tait Ă Paris, tandis qu'en 1595 il Ă©tait Ă Vincennes. I SARTULAIRE 1586-1605 355 comprendre le marĂ©chal de Bois-Dauphin au nombre de ceux auxquels Philippe 11 devait allouer des gratifications Impri- mĂ©, CarnĂ©, Documents sur la Ligue en. Bretagne, II, 82, d'aprĂšs A. N., K. 1596. 2970. â 1595, 18 juillet, ChĂąteau-Gontier. â Procuration donnĂ©e par Urbain de Laval-Bois-Dauphin Ă Ourceau et Ă du Breil leur donnant mission de traiter en son nom de sa soumission Ă Henri IV ImprimĂ©, Bertrand de Broussillon, Documents inĂ©dits, p. 133, d'aprĂšs Collection Godefroy. 2971. â 1595, 25 aoĂ»t, Lyon. â Articles prĂ©sentĂ©s au nom d'Urbain de Laval-Bois-Dauphin, lors de sa soumis- sion Ă Henri IV, et engagements pris en sa faveur par le Roi ImprimĂ©, B. de Broussillon, Documents inĂ©dits, 133- 149, d'aprĂšs Collection Godefroy. 2972. â 1595, 25 aoĂ»t, Lyon. â Nouveaux articles deman- dĂ©s par Urbain de Laval-Bois-Dauphin, avec les rĂ©ponses du Roi ImprimĂ©, B. de Broussillon, Documents inĂ©dits, 149, d'aprĂšs Collection Godefroy. 2973. â 1595, 25 aoĂ»t, Lyon. â Nouvelles demandes sup- plĂ©mentaires d'Urbain de Laval-Bois-Dauphin ImprimĂ©, B. de Broussillon, Documents inĂ©dits, 157, d'aprĂšs Collec- tion Godefroy. 2974. â 1595, 25 aoĂ»t, Lyon.â Demandes formulĂ©es par Urbain de Laval-Bois-Dauphin en faveur de ses adhĂ©rants se soumettant comme lui au Roi ImprimĂ©, B. de Broussillon, Documents inĂ©dits, 155, d'aprĂšs Collection Godefroy. 2975. â 1595, 12 septembre, Lyon. â Lettre Ă©crite par Henri IV Ă Urbain de Laval-Bois-Dauphin en l'appelant au secours de Cambrai ImprimĂ©, Lettres missives, IV, 400. A monsieur de Bois-Dauphin, cappitaine de] cinquante hommes d'armes de mes ordonnances Monsieur de Bois-Dauphin, toutes les nouvelles que je reçoy de ma province de Picardie menacent la perte de Cam- bray, si elle n'est bientost secourue ; et je suis rĂ©solu de la sauver ou de me perdre. C'est pourquoy je vous prie sur toutte l'affection que vous avez Ă mon service et la preuve que vous m'en dĂ©sirĂ©s faire, que vous montiĂ©s Ă cheval avec tout ce que vous pourrĂ©s assembler de gens de cheval ou de pied et 356 MAISON DE LAVAL vous rendre dans la fin de ce mois Ă Houdan, oĂč vous sçaurĂ©s de mes nouvelles. Ce secours est tel et si important, que j'auray en perpĂ©tuelle mĂ©moire ceulx qui m'y assisteront, car c'est le salut de Cambray et la conservation de ma province de Picardie et de l'honneur et de la rĂ©putation de la France. M'asseurant donc que vous n'y fauldrĂ©s pas, je prie Dieu qu'il vous ayt, monsieur de Bois-Dauphin, en sa saincte garde. Escript Ă Lyon, le xii 3 jour de septembre 1595. Henry. Je suis bien aise d'avoir vu par vos lettres escriptes Ă la la Varanne que vostre intention s'accorde avec le sujet de ma lettre. HastĂ©s-vous donc et croyĂ©s que je ne vous lairray pas inutile. 2976. â 1595. 15 septembre , Lyon. â Engagement pris par les mandataires d'Urbain de Laval-Bois-Dauphin, au sujet des sommes qui lui Ă©taient allouĂ©es ImprimĂ©, B. de Broussillon, Documents inĂ©dits, 159, d'aprĂšs Collection Godefroy. 2977. â 1595, octobre. â Lettre Ă©crite par Urbain de Laval-Bois-Dauphin au connĂ©table de Montmorency Impri- mĂ©, B. de Broussillon, Documents inĂ©dits, p. 168, d'aprĂšs B. N., français, 3569, 16. 2978. â 1595, 12 dĂ©cembre, SablĂ©. â DĂ©pĂŽt par le marĂ©- chal de Bois-Dauphin du testament l'ait par lui ImprimĂ©, abbĂ© Ledru, Urbain de Laval, 184. 2979. â AprĂšs 1595. â RequĂȘte par laquelle François de Faudoas, comte de Belin, prie Henri IV de le mettre Ă l'abri des poursuites de la veuve du sire de Rieux, qui lui rĂ©cla- mait les douze cents Ă©cus dont il s'Ă©tait portĂ© fort pour la rançon de Bois-Dauphin Copie informe au cabinet de l'auteur. Sire, le sieur de Belin, chevalier des ordres, vous remons- tre trĂšs humblement que durant les troubles, estant le sieur de Laval, premier capitaine de vos gardes, dĂ©tenu prisonnier de guerre Ă Pierrefond par le sieur de Rieux, vous auriez commandĂ© par la lettre cy attachĂ©e du quatorziĂšme septembre 1591 adressante au sieur d'HumiĂšres qu'il eĂ»t Ă moyenner la dĂ©livrance du sieur de Laval ; ce que ledit sieur d'HumiĂšres ! CAKTULAIRE 1586-1605 357 ayant fait entendre au suppliant et envoyĂ© la lettre portant votre commandement, l'auroit priĂ© de respondre delĂ rançon dudit sieur de Laval. Ce que le suppliant auroict faict et faict modĂ©rer la rançon Ă douze cens escus dont il auroit faict la promesse audit sieur de Rieux Ă lui payer dans trois mois. Moyennant ce, ledit sieur de Laval auroit estĂ© mis en libertĂ©, ce que V. M. auroit eu trĂšs agrĂ©able, ainsi que porte la lettre du sieur d'HumiĂšres, lui promettant de le faire descharger de sa promesse, ce qu'il n'auroit faict estant dĂ©cĂ©dĂ© peu de temps aprĂšs au service de V. M Ă Ham ', de maniĂšre que le sup- pliant, estimant que par l'exĂ©cution faite de la personne du sieur de Rieux pour ses dĂ©licts 2 , ainsi que parla confiscation de ses biens, qui appartiennent Ă V. M., il est du tout dĂ©livrĂ© et deschargĂ© de sa promesse de douze cens escus. il n'en au- roit voulu importuner V. M. ; mais depuis peu de temps la veuve du sieur de Rieux, qui s'est absentĂ©e du royaume, auroit transportĂ© sa promesse de douze cens escus Ă un nommĂ© François Bazin, se disant colonel des gens de pied estant en garnison Ă Soissons, qui, en vertu de ce transport, faict Ă prĂ©sent poursuivre le suppliant pour le paiement de sa pro- messe de douze cens escus, par devant messieurs des enques- tes du Palais Ă Paris. ConsidĂ©rez, Sire, ainsi qu'il vous appert des- choses des- sus par les piĂšces cy attachĂ©es et qu'il ne seroit raisonnable que le suppliant, pour avoir exĂ©cutĂ© le commandement de V. M. et faict chose qui vous a estĂ© trĂšs agrĂ©able, il fĂ»t aprĂšs travaillĂ© et poursuivi, ne s'estant obligĂ© que pour vous ren- dre service et obĂ©ir Ă vostre commandement, et que ledit de Rieux a estĂ© exĂ©cutĂ© Ă mort pour ses dĂ©licts, dont par la confiscation ses biens appartiennent Ă V. M. Il vous plaira ordonner qu'il demeurera quitte et deschargĂ© de sa promesse de douze cens escus et deffense faicte tant aux huissiers des enquestes du Palais Ă Paris qu'Ă tous aul- trĂšs justiciers d'en cognoistre et au sieur Bazin et Ă tous aul- tres de le poursuivre pour ladicte raison, soubs peine de dommages et intĂ©rĂȘts. 1. Le 11 mars 1594. 2. Le 10 juin 1595. 23 35§ LA MAISON DE LAVAL Si ainsi faicte, le suppliant continuera de prier Dieu pour la santĂ© et prospĂ©ritĂ© de V. M. 2980. â 1596, 20 mars, VitrĂ©. â Lettre Ă©crite par Anne d'AlĂšgre, comtesse de Laval, Ă Charlotte-Brabantine de Nassau ImprimĂ©, Lettres du XVI e siĂšcle, n* 268. A madamoiselle d'Orange Sy vous aviĂ©s creu, madamoiselle, en perdant la prĂ©sence d'une fĂącheuse, estre quite de ces importunitĂ©s, vous vous sĂ©riĂ©s trompĂ©e, car je tiens trop chĂšre l'honneur de vostre bonne grĂące pour ne m'y ramentevoir en toutes les occasions qui m'en seront offertes ; et je dĂ©sirerois bien plus que mes services m'amenassent ce bonheur que par mes mauvaises paroles vous rendre ce dĂ©bile tesmoignage de mes vĆux Ă vostre obĂ©issance, mais favorisĂ©s moy tant de croire, je vous supplie trĂšs humblement, madamoiselle, que vostre mĂ©rite et gentille humeur vous ont acquis tout comandement sur moy, et que je tiendrois Ă honneur trĂšs grant que vous m'en dai- gnassiĂ©s gratifier, pour esprouver l'effect des vĂ©ritables pro- testations que je vous ay taictes de la trĂšs dĂ©vote servitude d'une trĂšs fidclle servante, telle que vous me jugerĂ©s par toutes mes actions. Et par l'asseurance de vostre bon naturel j'espĂšre la continuation de voetre amitiĂ© dont je me fie fort, puisque sy libĂ©ralement il vous a pieu m'en prometre, et que la distance des lieux, la diversitĂ© des objeetz, ne me raviront point ce bien ; et je vous en requiers de toutes mes affections, madamoiselle, et de me favoriser de vos nouvelles, vous assurant qu'elles ne peuvent jamais estre meilleures que je les dĂ©sire. ObligĂ©s moi tant, s'il vous plaist, de me mander quant vous serĂ©s de retour Ă Paris, quel sĂ©jour vous y veniĂ©s faire, afin que j'envoie vers madame vostre belle mĂšre et vers vous, car de madame vostre seur elle ne sera pas de la partie pour cevoiage. Elle vous randra ce mesme office de vous amener un de ces jours en vostre mesnage, comme vous la laisĂ©s au sien, oĂč je prie Dieu la bĂ©nir et vous donner autant de bon- heur que vous en souhaite, madamoiselle, vostre trĂšs humble et trĂšs obĂ©issante Ă vous faire servince. Anne d'AllĂšgre. Il CARTULAIRE 1586-1605 359 Madamoiselle, le mĂ©rite de monsieur de Rohan est tel que cela ne Pofencera point que mon fils vous assure qu'il est vostre bien humble serviteur. PermĂ©tĂ©s lui de ce qualifier tel, et l'obligĂ©s tant, s'il vous plaist, le tenir aux bonnes grĂąces de monsieur vostre petit frĂšre, qu'il honore de tout son cĆur. A Vitray, ce 20 mars 1596. 2981. â 1596, 7 mai. â Acte par lequel Anne d'AlĂšgre, au nom de Guy XX, dont elle est tutrice, donne quittance des cent Ă©cus dus pour rachat par Gilles de Dampierre, Ă©poux de Suzanne de CharniĂšres, dame de Beauvais ImprimĂ©, Guiller, Hist. de ChangĂ©, 11,387. 2982. â 1596, vers le 1 er juin. â Lettre adressĂ©e par Anne d AlĂšgre au synode protestant de Saumur pour lui annoncer l'envoi du pasteur Pierre Merlin ImprimĂ©, Vaurigaud, Essai sur l'histoire des Ă©glises rĂ©formĂ©es de Bretagne 1535-1808, II, xliii. 2983. â 1596, 14 aoĂ»t, VitrĂ©. â Lettre par laquelle Anne d'AlĂšgre recommande Guy XX Ă toute la sollicitude du con- nĂ©table de Montmorency ImprimĂ©, Dictionnaire de la Mayenne, 1,694. Monsieur, J'envoye mon fils par le commandement de Sa MajestĂ© la trouver dans l'espĂ©rance de l'honneur de vostre support et que vous daignerez, monsieur, l'advouant pour vostre servi- teur, dissiper tout ce qui se pourroit opposer et l'empescher de se rendre assez honneste homme pour pouvoir ung jour mĂ©riter ceste qualitĂ© et se faire recognoistrepour tel par tous les effects de l'obĂ©issance en quoy il vous est consacrĂ© et vouĂ© entiĂšrement de sa misĂ©rable mĂšre. 2984. â 1596, 18 aoĂ»t, Angers. â Lettre Ă©crite par Bois-Dauphin au connĂ©table de Montmorency B. N., fran- çais, 3569, 81. A Monsieur le duc de Montmorancy , per et connĂ©table de France Monsieur, estant venu en ceste ville, je y ai trouvĂ© Monsieur de la Saulaye, acheminĂ© pour vous aler trouver, et se randre au jour de son assination, qui, ayent dĂ©sirĂ© de moy que je 360 LĂ MAISON DE LAVAL vous assurasse de son indisposition, qui vous sera aulsy assu- rĂ©e par Monsieur de la Rochepot et atestation des mĂ©decins qui le trĂ©tes, je vous supliray que, ne se trouvent au jour comme sa prĂ©sence est requise en ceste affaire pour vous faire entandre ses dĂ©fanses, luy vouloir donner temps que sa santĂ© luy puisse permetre d'entreprandre le vosyage, et vous l'obli- gerĂ©s et moy daventaige qui tiendray se bien luy estre faict Ă ma recommendation, Ă vous demeurer pour jamais, Mon- sieur, vostre trĂšs humble et plus affectionnĂ© serviteur. De Angers, ce 18 aust 1596. de Laval. 2985. â 1596, 10 octobre, SablĂ©. â Lettre Ă©crite par Bois- Rois-Dauphin au connĂ©table de Montmorency B. N., fran- çais, 3569, 79. ^4 Monsieur le duc de Montmorancy, connĂ©table de France Monsieur, il y a quelques jours que le sieur Ourceau, bailly du Mans, fut pris prĂšs de Meaux et menĂ© prisonnier Ă la con- ciergerie du Palais Ă Paris, comme plus particuliĂšrement le sieur de Sainct-ChĂ©reau vous fera entendre le subject de sa prise, qui est directement contrevenir Ă la volontĂ© du Roy portĂ©e par son Ă©dict faict en ma faveur. Et parce que vous m'avez tousjours faict l'honneur me promettre de le faire en- tretenir, vous supplie, Monsieur, en ceste occasion principal- lement, vouloir apporter de vostre auctoritĂ© Ă ce qu'il soit remys en libertĂ© ; ce me sera augmentation d'obligation pour vous rendre tous les services que vous sçauriez dĂ©sirer de personne quy soit au monde ; m'asseurant que la supplication que je vous fais ne luy demeurera infructueuse, je ne vous en feray plus particulliĂšre recommandation, vous baisant trĂšs humblement les mains, Monsieur, pour demeurer vostre trĂšs humble et obĂ©issant serviteur. de Laval. De SablĂ©, ce 10 e d'octobre 1596. 2986. â 1596. â RĂšglement du chapitre de Saint Tugal La BeauluĂšre, CommunautĂ©s et chapitres, 14. - 2987. â 1597, 5 janvier, Paris. â DeuxiĂšme promotion des CARTULAIRE 1586-1605 361 chevalier du Saint-Esprit faite par Henri IV ; Bois-Dauphin est au nombre des nouveaux chevaliers '. 2988. â 1597,21 fĂ©vrier, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat assignant trois mille trois cent trente-trois Ă©cus un tiers Ă Bois-Dauphin pour sa pension de marĂ©chal de France durant l'annĂ©e 1596 B. N., français, 18160, 111. 2989. â 1597, 8 avril. â DĂ©libĂ©ration des habitants de VitrĂ© dans laquelle ils dĂ©cident de faire une levĂ©e de douze cents Ă©cus pour subvenir aux pauvres ImprimĂ©, Paris-Jallo- bert, 47. 2990. â 1597, 19 avril, SablĂ©. âLettre Ă©crite par Bois- Dauphin au connĂ©table de Montmorency B. N., français, 3607, 72. A Monsieur le duc de Montmorancy Monsieur, sur l'occurance de la rĂ©duction du chasteau et ville de Chasteaubriant 8 en l'obĂ©yssance du Roy, j'ay jugĂ© estre Ă propos vous en donner advis, tant pour le service de Sa MajestĂ©, que pour le vostre particullier. Et vous supplie, Monsieur, me vouloir commander ce que je vous pourĂ©s ser- vir en ceste occasion, je l'effecturay et tesmoigneray la vo- lontĂ© que j'ay de vous servir, et demeurer Ă jamais, Monsieur, vostre trĂšs humble et affectionnĂ© serviteur. de Laval. De SablĂ©, ce 19 avril 1597. 2991. â 1597, 30 avril- â Acte par lequel les habitants de VitrĂ© demandent au parlement de Bretagne l'autorisation de faire une levĂ©e de douze cents Ă©cus destinĂ©s au soulagement des pauvres 3 ImprimĂ©, Paris-Jallobert, 48. 2992. â 1597, 2 juillet. â Lettre Ă©crite par Bois-Dauphin au connĂ©table de Montmorency. 1. Ici on trouvera, sous le numĂ©ro 202, une photogravure du por- trait du marĂ©chal conservĂ© Ă la BibliothĂšque nationale, fonds du Saint-Esprit, numĂ©ro 112'», folio 181. DĂ©jĂ , en 1878, une eau forte en avait Ă©tĂ© donnĂ©e par M. l'abbĂ© Ledru dans son Bois-Dauphin. 2. Le 16 avril 1597, Saint-Gilles reprit sur les ligueurs la ville de ChĂ teaubriant. 3. L'autorisation du parlement est du 2'* mai 1597. 362 LA MAISON DE LAVAL A Monsieur, Monsieur le duc de MonUnorancy, pair et connestable de France Monsieur, ayant eu avis de la mort de monsieur le marĂ©chal de Matignon, j'ay dĂ©peschĂ© vers Sa MajestĂ© pour la supplier trĂšs humblement de se ressouvenir de la promesse qu'il y a pieu me faire. Je vous supplie, monsieur, de me continuer en si bonne occasion l'honneur de votre amitiĂ© et assister ma priĂšre de la vostre envers Sa MajestĂ©, afin que par votre faveur elle m'entretienne sa parolle ; ce me sera plus de moyen de vous rendre toute ma vie le trĂšs humble service que je vous ai vouĂ©. Je vous supplie donc, monsieur, de m'y tenir la main comme Ă celuy qui sera jusques au tombeau, monsieur, votre trĂšs humble et obĂ©issant serviteur. de Laval. 2993. â 1597, 25 juillet, Amiens. â Brevet de marĂ©chal de France dĂ©livrĂ© par Henri IV Ă Bois-Dauphin. Henri... Ă tous ceux.... salut. Depuis qu'il a pieu Ă Dieu retirer de ce monde deffunct nostre cher et bien amĂ© cousin le sieur de Matignon, mares- chal de France d'heureuse mĂ©moire, et nous priver de l'as- sistance et des services trĂšs signaliez que nos prĂ©dĂ©cesseurs rois et nous avons reçus de luy, nous ne pouvons qu'apporter beaucoup de discrĂ©tion et meure considĂ©ration au choix de ceulx auxquels nous puissions fier l'importance de la dicte charge de mareschal de France et reposer asseurĂ©ment do la conduite et maniement des affaires qui dĂ©pendent de la fonc- tion d'icelle ; et sur ce, mettant en considĂ©ration les grands et recommandables services qu'a dĂšs long temps Ă cette cou- ronne nostre cher et bien aymĂ© cousin Urbain de Laval de Bois-Daulphin en diverses importantes charges, qui luy ont Ă©tĂ© commises, oĂč nous avons suffisamment fait preuve de ses vertus, mĆurs et valeur, grande expĂ©rience et cognoissance qu'il a eue du maniement des affaires de cet EstĂąt ; nous con- fiant d'ailleurs en la fidĂ©litĂ© et affection qu'il porte au bien, advancement et establissement de nos affaires et service, avec ferme crĂ©ance qu'il sçaura trĂšs dignement s'acquiter avec tout ce que nous pouvons dĂ©sirer de soing et de dilligence et debvoir qu'il est requis pour bien desservir comme il appar- tient la dicte charge, Pour ces causes et aultres grandes et lĂ©gitimes considĂ©ra- LA MAISON DE LAVAL l T RBAIN DE LAVAL .rfr^Bo^nu/injianp^ de SiiĂšfe' Comte deJ3rc,r/eau Jflaat 'de l'rance^fai't CliĂźidu >J!' Efbiiiric $. Janvier JSy~- /nart i6zi . tfKftutypie berlliaud, l'a -iil-i. â Portrait du marĂ©chal de Bois-Dauphin. Encre de Chine du Fonds du Saint-Esprit, ir>'>. 181 cautulaire 1586-1605 363 tions Ă ce nous mouvant, avons au dict sieur de Bois-Daul- pliin donnĂ© et octroyĂ©, donnons et octroyons par ces prĂ©sen- tes, signĂ©es de nostre main, les dicts estĂąt et office de mares- chal de France que naguerre tendit et exerçoit nostre dict cousin ; pour le sieur du Bois-Daulphin devenir paisible pos- sesseur d'iceluy pour le dict. office avoir, tenir et doresnavant exercer, en jouir et user aux honneurs, auctoritez, prĂ©roga- tives, facultez, prééminences, franchises, libertĂ©s, gages, pentions, appointements, estĂąt, entretĂšnement, pouvoir, puissance, droitz, proffitz, revenus et esmoluments qui y appartiennent, tels et semblables que les avoit et pouvoit avoir nostre dict deffunct cousin, les ont encores et en jouis- sent en tous temps les aultres mareschaux de France, tant qu'il nous plaira. Sy donnons en mandement Ă nos amez et fĂ©aulx conseillers les gens tenant nostre cour de parlement, tous nos lieute- nants gĂ©nĂ©raux, gouverneurs, capitaines, chefs de nos gens de guerre et Ă tous nos justiciers et officiers qu'il appartien- dra et Ă chacun d'eulx que le sieur de Bois-Dauphin, de qui nous avons pris et receu le serment en tel caz requis et ac- coustumĂ©, et icelluy mis et instituĂ© au dict estĂąt et office, ils le facent, souffrent et laissent jouir et user d'icelluy, ensem- ble des honneurs, pouvoir, auctoritez, prĂ©rogatives, facultez, prééminences, franchises, libertez, droictz, fruictz, proffictz, revenus et esmoluments dessus dicts pleinement et paisible- ment et Ă luy obĂ©ir et entendre de tous ceulx et ainsi qu'il appartiendra, touchant et concernant le dict estĂąt et office. Mandons en outre Ă nos amez et fĂ©aulx conseillers les trĂ©- soriers de l'ordinaire et extraordinaire de nos guerres, prĂ©- sens et advenir, que chascun en droict et selon qu'Ă chascun d'eulx appartiendra ils ayent en l'annĂ©e de leur exercice Ă payer, bailler et dĂ©livrer Ă nostre dict cousin les gages, pen- tions, estĂąt, appoinctements et entretĂšnement au dict estĂąt affectez et y appartenant et doresnavant par chascun an aux Ă©poques et en la maniĂšre accoustumĂ©e Ă commencer du dict jour et datte des prĂ©sentes, apportant lesquelbs ou vidimus d'icelles deument colla tionnĂ© pour une foys avec lesquictances de nostre dict cousin sur ce semblablement nous voulions les dicts gages, pensions, estĂąt, appoinctement et entretĂšne- ment et tout ce que pour ce payĂ© et dellivrĂ© luy aura estĂ©, estre passĂ©, allouĂ© respectivement et la despense.... 364 LA MAISON DE 2994.â 1597, 9 septembre, SablĂ©. - Acte par lequel le marĂ©chal de Bois-Dauphin confirme son testament ImprimĂ© abbe Ledru, Urbain de Laval, 189. 2995. - 1597, 26 octobre, Paris. - Lettre Ă©crite par Bois-Dauphin au connĂ©table de Montmorency B N fran- çais, 3607, 76. ' '" A monsieur le duc de Montmorancy Monsieur, je passĂ© derniĂšrement par Chantilly pensent avoir l'honneur de vous y baiser les mains ; je vous menois ung gentilhomme qui m'a toujours assistĂ©, et est poursuivy au prĂ©judice de ledit qu'il a pieu au Boy faire en ma faveur, con- tre lequel ses parties, par surprises au prĂ©judice des dĂ©fances qui avoint estĂ© faictes d'exĂ©cuter aucun descret Ă l'encontre de luy, ont faict ordonner qu'ils se randrait prisonnier en nos- tre suite, en quoy il n'a voulu manquer. Et d'aultent qu'il est tumbĂ© malade, je vous suplie, monsieur, voir une requeste qui vous sera prĂ©sentĂ©e de sa part pour luy ordonner se qu'il vous plĂ©ra, vous asseurant qu'il vous ira tousjours trouver lorsque luy commanderĂ©s. Je vous suplie luy faire ceste fa- veur qu'il resente l'honneur que me faictes de m'esmer par la supplication trĂšs humble que je vous en fais, vous protes- tant d'estrejusques au tombeau, Monsieur, vostre trĂšs hum- ble et obĂ©issant serviteur. DE Laval De Paris, ce 26 octobre 1597. 2996. - 1597, 7 novembre, Paris. â Lettre Ă©crite par Bois-DauphinauconnĂ©tablede Montmorency ' B N français 3607, 38. * ' Monsieur le duc de Montmorancy , pair et connes table de France Monsieur, j'escrisauBoy, ayant sceulamaladied'ungde rues parans estre trĂšs grande ; il a deux abayes que je suplie le Boy me donner. Sa MajestĂ© m'a donnĂ© des grades et de l'hon- neur, je la suplie me donner du moyen pour despandre prĂšs de Sa MajestĂ©. Ses abayes sont de petites valleur et fais estĂąt 1. On trouvera ici. sous le numĂ©ro 203, le dessin du lac d'a- mour qui, a cette Ă©poque, constituait le cachet du marĂ©chal de oois-Dauphin. U CARTULAIRE 1586-1605 365 s'ils vaquest de donner quelques pensions desus les bĂ©nĂ©fises Ă son frĂšre. L'honneur que m'avĂ©s faict de me prometre de l'amitiĂ© me enhardist vous suplier, Monsieur, de me favori- ser envers le Roy de vostre faveur ; pour obtenir ma suplica- tion je despanderay sela et ma vie Ă vous rendre le service que je vous ay vouĂ© et seray toute ma vie, Monsieur, vostre trĂšs humble et obĂ©issant serviteur. De Paris, ce 7 novembre 1597. de Laval. 2997. â 1597, 27 novembre, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat assignant Ă Bois-Dauphin trois mille trois cents trente- 203. â Cachet du marĂ©chal de Bois-Dauphin, 1597. trois Ă©cus un tiers Ă lui dus pour sa pension de marĂ©chal de France B. N., français, 18161, 105. 2998. â 1597, 5 dĂ©cembre. â Lettre Ă©crite par Bois-Dau- phin au connĂ©table de Montmorency B. N., français, 3606,28. A Monsieur le duc de Montmorancy, pair et connĂ©table de France Monsieur, je vous suplie trĂšs humblement m'excuser si je vous importune de dĂ©pescher le sieur de la CherriĂšre, prĂ©sent porteur, de l'affaire qu'il a. Monsieur de Boissy est son rapor- teur. S'il vous plaisoittant m'obliger que d'escrire audit sieur vous aller trouver et aporter se proses, en une demie heure vous l'aurĂ©s jeugĂ©. [I dĂ©sireroit s'en retourner au pais s'il peult revenir ; il servira trĂšs bien le Roy et connoist les forces des ennemis et de leurs villes. Je vous supplie, Monsieur, me tant obliger que de juger son proses ; vous connoistrĂ©s le tort qu'on luy faict. Je vous fusse moy mesme allĂ© faire ceste suplication, sens que on m'a dit que le mareschal des logis Valon m'a deslogĂ© pour loger des gens do Monsieur le ma- reschal de Biron ; j'ay envoyĂ© voir se qui s'en est ; je vous suplie luy commender de baller ung aultre logis Ă ses gens, 366 LA MAISON DE LAVAL lĂ sont des tours innacoustumĂ©s. Je m'assure, Monsieur, que m'en ferĂ©s faire raison et que me tiendrĂ©s, Monsieur, pour vostre trĂšs humble et plus obĂ©issant serviteur. Ce 5 dĂ©cembre 1597. de Laval. 2999. â 1597, 16 dĂ©cembre, Saint-Germain-en-Laye. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat portant assignation de trois mille trois cent trente-trois Ă©cus un tiers, dus Ă Bois-Dauphin pour ses gages de marĂ©chal de France A. N., E lb 298, et B. N., français, 18161, 134. 3000. - 1597, 22 dĂ©cembre, Saint-Germain-en-Laye. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat validant les payements faits par Julien Fontaines, commis Ă la recette gĂ©nĂ©rale de Touraine, en vertu des ordonnances de Bois-Dauphin, sauf ceux faits Ă des personnes actuellement rebelles A. N., E lb 336, et B. N., français] 18161, 144. 3001.â 1598, 13 mars. â Accord Ă©tabli entre Jean de Laval, seigneur de Tartigny et de Montigny, et Esprit d'Al- lonville, en qualitĂ© de tuteur de ses enfants, nĂ©s de feu Suzanne de Laval Copie, B. N., français, 28154. 242, 3002. â 1598, 27 juin, Bois-Dauphin. â Lettre Ă©crite par Bois-Dauphin au connĂ©table de Montmorency B. N., fran- çais, 3607, 70. monsieur, monsieur le duc de Montmorency, pair connestable de France et Monsieur, je ne veux, s'il vous plaist, perdre aulcune occa- sion de vous offrir mon service que je ne m'aquitte de ce deb- voir. Faites moy cest honneur de croire qu'il n'y a d'homme au monde plus plain d'affection que moy ; sy me faites cest honneur me despartir de vos commandements je les effectue- ray de tout mon cueur. Monsieur, j'ay reçu une lettre de Lascoux, qui fait mais affaires en court, par laquelle me mande qu'il m'est besoin d'obtenir ung certifficat comme ma compagnie a servy au siĂšge d'Amiens et ung autre pour avoyr servy en Bretaigne ; je vous supplie me les vouloir accorder et me vouloir grattif- fier de votre faveur, al'fin que je sois payĂ© pour deux carliers comme chose raisonable. CARTULAIRE 1586-1605 367 J'espĂšre d'aller bien tost Ă la court trouver le Roy, j'auray ce bonheur de vous veoir. Ceppendant, monsieur, je serai toute ma vye vostre bien humble parent et serviteur. de Laval. De Bois-Dauphin, ce xxvn juin 1598. 3003. â 1598, 8 juillet, Bois-Dauphin. â Lettre Ă©crite par Bois-Dauphin au connĂ©table de Montmorency B. N., fran- çais, 3585, 48. A monsieur, monsieur de Montmorency, duc, pair et connestable de France. â En court Monsieur, estant ung diffĂ©rent que j'ayavecq le sieur d'Avo- gour remis davant vous et messieurs les mareschaux de France, Monsieur le mareschal de Bouillon en ayant eu desjĂ connaissance, veu votre absence, j'ay envoyĂ© le sieur de Saint-Chereau vers vous, pour vous faire entandre la justice de ma cause et ne vous dira rien qu'il ne vous justifie par escrit. Je vous supplie, monsieur, l'ouĂŻr; c'est chose qui me conserne de si prĂšs que sens que je me trouve tout mal, je me fusses acheminĂ©, sachant que le dit d'Avogour est allĂ© en court. Je m'assure, Monsieur, que me ferĂ©s l'honneur de me con- server ce que j'auray de bon droit ; je le remets entre vos mains comme je ferois chose plus grande. Ne vous tenĂ©s pour importunĂ© si ledit Saint Chereau vous parle d'aultresde mes affaires que j'ay au conseil ; ce qui en rĂ©ussira, je le tiendray de vous et vous supliray me tenir, Monsieur, pour votre trĂšs humble parent et obĂ©issant serviteur. de Laval. De Bois-Dauphin, ce vm jullet 1598. 3004. â 1599, 9 janvier, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat renvoyant au sieur de Norroy, chargĂ© par le roi de se trans- porter sur les lieux, la requĂȘte de Bois-Dauphin, de Puy- charic, de la Bastide, de Saint-Offange et de Bourcaney, tendant Ă obtenir que les subsides Ă eux accordĂ©s sur les vins et les marchandises passant sur la Loire continuent Ă ĂȘtre perçus aux Ponts-de-CĂ© et Ă Ingrandes B. N., français, 18164, 3. 3005. â 1599, 13 janvier, Paris. â CĂ©rĂ©monial dressĂ© par le connĂ©table et les marĂ©chaux de la rĂ©paration Ă faire par 368 LA MAISON DE LAVAL M. de Saint-Phalle Ă Duplessis-Mornay. Bois-Dauphin, figure au nombre des signataires ImprimĂ©, MĂ©moires- Jour- nauxde Pierre de l'Estoile, 1879, VII, 169'. 3006. â 1599, 22 fĂ©vrier, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat statuant sur le procĂšs intentĂ© Ă Bois-Dauphin par le sieur d'Avaugour au sujet de douze mille Ă©cus payĂ©s par ce dernier sur Tordre de MercĆur. Les parties sont mises hors de cour B. N., français, 18164, 58. 3007. â 1599, 20 mars. â Lettres par lesquelles Urbain de Laval-Bois-Dauphin donne mission Ă son procureur de rĂ©clamer au nom de son fils la seigneurie d'AmpoignĂ© Ă François de la Tour-Landry Note, Revue du Maine, XXIX, 365. 3008. â 1599, 20 mars, Paris. - ArrĂȘt du Conseil d'Etat relatif au remboursement de sept mille sept cent quatre- vingts Ă©cus avancĂ©s Ă Bois-Dauphin par la Rochepot, lors de la trĂȘve conclue pour les provinces de l'Anjou, de la Tou- raine et du Maine B. N., français, 18164, 98. 3009. â 1599, 18juillet. â Aveu pour la MaltiĂšre et la Haye en Saint Mars de la Fustaye rendu Ă Urbain de Laval-Bois- Dauphin par Pierre et Jean Rouzeau ImprimĂ©, Frain, Le Tiers-Etat au Petit-Maine, VitrĂ©, 1885, in-12, p. 83. 3010. - 1600, 40 fĂ©vrier, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat renvoyant aux trĂ©soriers de France Ă Tours la requĂȘte en modĂ©ration prĂ©sentĂ©e par Pierre Belot, cessionnaire de Martin PĂ©an, pour la ferme du subside octroyĂ© au marĂ©chal de Bois-Dauphin A. N., E2t> 44. 30'J1. âVers 1600, 16 fĂ©vrier, Saumur. â Lettre Ă©crite par Anne d'AlĂšgre Ă M. de la TrĂ©moĂŻlle Archives de la TrĂ©moĂŻlle. A monsieur, monsieur de la Trimouille Monsieur, vos lettres m'ont confirmĂ© ce matin ce que le sieur Salomon m'avoit mandĂ© de vostre part, qui m'a faict venir en toute diligence en ce lieu voir sy, selon l'honneur de vos promesses, nous pourrions sortir par voie d'acort de nos affaires, ce que je dĂ©sire autant que chose du monde, et de vous tesmoigner par toutes mes actions le dĂ©sir que j'ay de vous cArtulaire 1586-1605 369 faire service. Je m'atendois trouver ici quelqu'un de vostre part ; je m'atens demain, Monsieur, Ă l'honneur de vos nou- velles. Sy c'estoit une vaine espĂ©rance, je vous supplie me mander le temps de vostre comoditĂ©, afin que j'y dispose mes autres affaires et que je voie en quel temps je pourray desro- ber ung jour pour voir Madame de Chavigni, cependant que j'en suis sy prĂšs. Syje n'estois en doute que vous vinsiĂ©s ou envoiassiĂ©s demain quelqu'un de vostre part, je fuse partie pour ceste visite, que je remeteray quant nous aurons faict nos affaires, s'il vous plaist de vous haster, corne je vous en supplie trĂšs humblement, et de croire que je suis, Monsieur, vostre trĂšs humble et trĂšs affectionnĂ©e cousine Ă vous faire service. Anne d'allĂšgre. Monsieur, rĂ©assurant que vous avĂ©s adverti Madame vostre mĂšre de vostre desain d'acort, est cause que je ne luy en mande rien. Monsieur le marquis de NormoutiĂ© dit qu'il en doit aussy estre. Je laise tout cela Ă vostre prudence. A Saumur, ce 16 e fĂ©vrier. 3012. â 1600, 25 fĂ©vrier. â Accord Ă©tabli entre Claude de la TrĂ©moĂŻlle et Guy XX, liquidant Ă une somme de douze mille six cent soixante-six francs le payement Ă faire pour rĂ©gler ce qui restait dĂ» de la dot d'Anne de Laval Note, B. N., français, 28154, 353. Transaction originale en parchemin, faite le 25 fĂ©vrier 1600, entre haut et puissant seigneur messire Claude de la TrĂ©- moĂŻlle, duc de Thouars, pair de France, prince de Talmont, comte de Guines, Benon et Taillebourg, conseiller du Boy en ses Conseils d'Etat et PrivĂ©, demeurant ordinairement audict Thouars en Poitou, d'une part ; et haut et puissant seigneur messire Guillaume de Hautemer, duc de Grancey, sieur de Fervaques, mareschal de France, conseiller du Boy en ses Conseils d'Etat et PrivĂ©, capitaine de cinquante hom- mes d'armes de ses ordonnances et l'un des lieutenans gĂ©nĂ©- raux pour Sa MajestĂ© au pays et duchĂ© de Normandie, et daine Anne d'AlĂšgre, son Ă©pouse, en leurs noms et comme se portants fort de messire Guy, comte de Laval, de Mont- fort, de Quintin et de Harcourt, et son hĂ©ritier universel, qu'ils promettent de faire ratifier aussitĂŽt qu'il sera majeur! sur le procĂšs pendant entre les parties au Parlement, en exĂ©- m LA MAISON DĂ LAVAL cution d'un arrĂȘt de ladicte cour du 4 aoust 1565, et sur ce que ledict seigneur de la TrĂ©moĂŻlle demandoit qu'il lui fĂ»t assignĂ© mille dix-huit livres trois sous six deniers de rente eu Ă©gard Ă la valeur des terres au tems du contrat de mariage de delĂźunts messire François de la TrĂ©moĂŻlle et de dame Anne de Laval, ses ayeuls, du 23 fĂ©vrier 1521, lequel seigneur de la TrĂ©moĂŻlle cĂšde auxdicts seigneur et dame de Fervac- ques es dicts noms tous les droits qui lui appartenoient, tant Ă cause dudict contrat de mariage que dudit arrĂȘt, moyennant la somme de douze mille six cents soixante-six Ă©cus deux tiers. j Cet acte passĂ© devant LĂ©onore de Saint-Leu et Nicolas Le Camus, qui en a la minutte, notaires au Chastelet de Paris, et d'eux signĂ©. 3013. â 1600, 26 juin. â DĂ©positions de Madeleine de MontĂ©cler, qui se dit ĂągĂ©e d'environ trente ans, et de Jacques Gallery, sur ce qui s'est passĂ© en mai 1592 au sujet de Pierre de Boisson ImprimĂ©, dom Taillandier, Histoire de Bretagne, IL ccxnv. 3014. â 1600, 12 octobre. â Note sur la prestation au parlement de Rennes du serment d'Anne d'AlĂšgre. en qualitĂ© de tutrice de Guy XX et de François Harpin, sieur de Mari- gnĂ©, en qualitĂ© de tuteur spĂ©cial du jeune comte, lors de l'as- sielte du douaire et des deniers dotaux de sa mĂšre ImprimĂ©, Bourjolly, Notes delĂ Beculnere, p. 54. 3015. â 1601, 6 avril. â Quittance de ses gages de marĂ©- chal de France pour une annĂ©e dĂ©livrĂ©e par le marĂ©chal de Bois-Dauphin Original signĂ© et scellĂ©, B. N., français, 28154, 252. 3016. â 1601, 18 avril, Paris. â Quittance dĂ©livrĂ©e par le marĂ©chal de Bois-Dauphin Original signĂ© et scellĂ©, B. N., français, 28154, 253. 3017. â 1601, 30 octobre, Fontainebleau. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat accordant un rabais Ă P'erre Belot, cession- naire de la ferme du subside octroyĂ© au marĂ©chal de Bois- Dauphin A. N., E3" 238 et B. N., français, 18165, 143. 3018. â 1601, 27 novembre, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d 'Etat relatif au procĂšs pendant entre maĂźtre François d'Alesso , CĂRTULAIRE 1586-1605 3?i ci-devant maĂźtre des comptes, et le marĂ©chal de Bois-Dau- phin A. N., E3b 359 et français, 18165. 198. 3019. â 1602, 26 janvier, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat rĂ©glant le recouvrement des sommes restĂ©es dues par les receveurs des greniers Ă sel de Laval, de Cholet, de Craon et de PouancĂ© A. N., E4* 36 et B. N., français, 18166, 27. 3020. â 1602, 22 mars. â Acte par lequel les hĂ©ritiers de François de SĂ©nectere et de Jeanne de Laval-LouĂ©, vendent Marcilly Ă Charles Fouquet, seigneur d'Esves, pour quarante mille livres Cabinet de M. d'Achon. 2021. - 1002, 30 mars, Paris. â ArrĂȘt au Conseil d'Etat statuant sur les procĂšs pendants entre le marĂ©chal de Bois- Dauphin et les habitants de ChĂąteau-Gontier A. N., E4a 1, et B. N., français, 18166, 148. 3022. â 1602, 13 avril, Fontainebleau. - Lettre Ă©crite par Henri IV au marĂ©chal de Bois-Dauphin ImprimĂ©, Lettres missives, V, 570, d'aprĂšs B. N., français, 3348, 20. 3023. â 1602, 21 avril. â Quittance de ses gages dĂ©livrĂ©e par le marĂ©chal de Bois-Dauphin Original signĂ© et scellĂ©, B. N., français, 28154, 255. 3024. â 1602, 13 aoĂ»t, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat Ă©tablissant une taxe sur le vin vendu en dĂ©tail dans l'Ă©lection de ChĂąteau-Gontier, pour le produit en ĂȘtre affectĂ© au paye- ment des fournitures faites en 1592 Ă la garnison Ă©tablie par Bois-Dauphin A. N., E4a , 324. 3025. â 1602, 10 septembre, Paris. âArrĂȘt du Conseil d'Etat rĂ©glant te remboursement du reste des sommes avan- cĂ©es par le sieur de la Varenne, contrĂŽleur des Postes, au marĂ©chal de Bois-Dauphin A. N., E4b , 58. 3026. â 1602, 25 octobre, Bois-Dauphin. - Lettre Ă©crite par Bois-Dauphin au connĂ©table de Montmorency B. N., français, 3549, 5. A monsieur, monsieur le duc de Montmorency , per et connestable de France Monsieur, le dĂ©sir que j'ay d'estre continuĂ© en vos bonnes grases me faict vous escrire cestre lettre et vous suplier 372 LA MAISON DE LAVAL m'honorer de vos nouvelles et de me commender oĂč me iuo-erĂ©s de âą ignĂ© vous iaire service. J'espĂšre aller bientost trouver le Roy et avoir l'honneur de vive voix vous assurer que je suis votre serviteur. Je vous nouris ung lĂ©vrier et une levrete que je m'assure trouvĂšres trĂšs beaux et sont de trĂšs bonne rase ; j'en ay donnĂ© ung de ceste rase Ă Monsieur de Vileroy, que je m'as- sure que les Ă©merĂ©s. Je vouldrois estre si heureux de vous pouvoir par mes services tesmoigner que je suis, Monsieur, vostre trĂšs hum- ble et trĂšs affectionnĂ© serviteur. de Laval. Du Bois-Daulphin, ce 25 octobre 1602. 3027. â 1603. 7 mars, Bois-Dauphin. â Lettre Ă©crite par Madeleine de MontĂ©cler Ă Ourseau ' ImprimĂ©, abbĂ© Ledru, Urbain de Laval, 197. 3028. â 1603, 16 mars. â Guy XX assiste au prĂȘche du pasteur Mozet sur la passion Note, Bulletin du Protestan- tisme français, V, 288. 3029. â 1603, 16 mars, Metz. â Lettre Ă©crite par le marĂ©- chal de Bois-Dauphin Ă Mathurin Ourceau ImprimĂ©, abbĂ© Ledru, Urbain de Laval, 194. 3030. â 1603, 2 mai, Fontainebleau. â Lettre Ă©crite par Bois-Dauphin Ă Ourceau ImprimĂ©, abbĂ© Ledru, Urbain de Laval, 195. 3031. â 1603, 1 er juillet, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat dĂ©chargeant le marĂ©chal de Bois-Dauphin des condamnations prononcĂ©es contre lui par la Cour des Aides au profit de maĂź- tre Etienne de Vaulx, chirurgien Ă Laval B. N., français, 16216, 131 3032. â 1603. 8 aoĂ»t. â Lettre Ă©crite par Bois-Dauphin au connĂ©table de Montmorency B. N., français, 3583, 81. A monsieur, monsieur le duc de Montmoiency, per et connestable de France Monsieur, c'est avecq beaucoup de regret que je n'ay eu 1. Faute de pouvoir leur assigner des dates, nous laissons de cĂŽtĂ© les lettres Ă©crites par Madeleine de MontĂ©cler Ă Ourseau et qui figurent au mĂȘme ouvrage, pag^s 190, 191, 192, 193, 195, 196. cartulaire 1586-1605; 373 l'honeur de prandre congĂ© de vous avent mon parlement comme jesperois et vous trouver encore icy. En quelque 1 eu que je sois, je sms vostre serviteur ; j'espĂšre de vive voix vous en assurer bientost, le Roy m'aient commandĂ© d'estre icy Ă son retour, ce que je feray s'il plaist Ă Dieu Se gentilhomme vous diraledebvoir oĂč je me suis mis pour e garder les sieurs de Corbasson et Saint-Aman de se batre S le Roy ne nous faict mieux obĂ©ir, ou qu'il ne nous donne la puzssance de le faire, il sera et nous mal obĂ©y; j'envoye e gentilhomme esprĂšs vers Sa MajestĂ© pour luy Lire entaSre Faites estĂąt, je vous suplie, monsieur, que je suis votre trĂšs humble cousin et plus affectionnĂ© serviteur DE La va T Ce 8 aust 1603. ^aval, La 3 val 3 BoTs 7"' ! "^ 7 Lettre Ă«CrUe ^ le marĂ©c1 ^ de Laval-Bois-Dauphin au chancelier de BelliĂšvre au sujet de 1 office de heutenant gĂ©nĂ©ral Ă Angers B N f,2l 15900, 495. ^" ers { a. W . ? français, A monsieur, monsieur de BeliĂšvre, chancelier de France Monsieur le porteur vous va trouver de la part de Monsieur Ladvocat ;j ay sc euqueleRoy dĂ©sirait gratifier Moâ sieu de la FrĂ©hĂšre de TestĂąt de lieutenant gĂ©nĂ©ral d'Angers ede lt deIa , f â âą ^ sela est, nou, nous esCrtns ton heureux car la justice se remecteroit en ceste ville-lien meilleur estĂąt, estant rĂ©gie par ung si homme de bTen Vous obhgenes tout le pais Ă prier Dieu pour vous Mais aprĂšs le dit sieur de la FrĂ©tiĂšre, le sieur Ladvocat est Se porteur vous en dira davantage et moy je vous assure ray que je sais, Monsieur, vostre plus humble servfteur 9 aust 1603. DE UvAL - 6 septembre, Bois-Dauphin. _ Lettre Ă©crite par Bois-Dauphin au connĂ©table de Montmorency B N français, 3569, 71. y [ iN- ' 24 374 LA MAISON DE LAVAL A monsieur, monsieur le duc de Montmorancy, per et connestable de France Monsieur, je ne veux manquer, aient trouvĂ© ceste commoditĂ©, de vous assurer tousjours du service que je vous ay vouĂ© qui sera tousjours tel que pouvez dĂ©sirer d'ung vray et fidel ser- viteur. Je vous suplie, monsieur, vous resouvenir de la promesse que m'avĂ©s faicte d'ung tiercelet de passage ; j'ay estĂ© mal- heureux aux miens que j'avois aportĂ©s ; ils n'ont rĂ©ussy comme j'espĂ©rois. J'escris Ă Monsieur Pertuis de me faire le plaisir me l'en- voiyer par homme esprĂšs maisme par celuy sy quy le rĂȘva trouver. Et s'il vous plaisoit me donner ung chien pour l'oi- seau de la rase des miens, je le garderay etenfcray rase; s'ils rĂ©usissest, ils seront tous Ă vous comme tout ce qui est en mon pouvoir. Vous suplient me continuer l'honneur de vos bonnes grĂą- ces et vous assurer que je seray jusques au tombeau, mon- sieur, vostre trĂšs humble cousin et trĂšs affectionnĂ© serviteur. de Laval. Du Bois Dauphin, ce vi septembre 1603. 3035. â 1603, 1" octobre, Paris. â Lettre par laquelle Henri IV recommande au duc de Savoie Guy XX de Laval, s'en allant en Italie ImprimĂ©, Lettres missives, VI, 170. A mon frĂšre le duc de Savoye Mon frĂšre, ceste lettre vous sera rendue par mon cousin le comte de Laval, lequel, s'en allant en Italie pour estre un jour plus capable de me faire service, a dĂ©sirĂ© passer par la Sa- voye pour avoir l'honneur de vous saluer, l'ayant bien voulu accompagner de ceste-cy pour luy donner accĂšs auprĂšs de vous et vous prier, comme je fais, de le voir de bon Ćil, et l'avoir au surplus en toute bonne et favorable recommanda- tion. Et quand il se prĂ©sentera occasion de m'en revancher Ă l'endroict de ceux qui me seront recommandez de vostre part, je le feray bien volontiers, ainsy que vous cognoistrĂ©s par effect; priant Dieu, mon frĂšre, qu'il vous ayt en sa saincte garde. EscriptĂ Paris, le vu' jour d'octobre 1603. Vostre bon frĂšre Henry. CA1ĂTULAIRE 1586-1005 375 3030. â 1003, 10 novembre, !3ois-Dauphin, â Lettre Ă©crite par Bois-Dauphin au connĂ©table de Montmorency B. N., français, 3569, 107. A monsieur, monsieur de Monlmoranctj. per et connectable de France Monsieur, je vous demande pardon si plus tost je ne vous ay remerciĂ© du beau tierselet que m'avez envoiyĂ© c'estoit le meilleur que j'ay jamais veu voler; mais il ne m'a guiĂšres durĂ© m'estant mort, ayant la mulette ? toute pourie ; je m'en suis pensĂ© dĂ©sespĂ©rer. Je vous suplie croire que je ne sĂ©deray Ă personne du monde d'estre plus affectionnĂ© Ă vostre service que moy. J'espĂšre estre bientost prĂšs Sa MajestĂ©, oĂč je vous assu- reray de vive voix de la puissance qu'avĂ©s sur moy. Je me suis mis Ă faire une petite diĂšte pour avoir plus de moeyen d'estre prĂšs Sa MajestĂ© et rompre le cour Ă matous. Je vous suplie et conjure me tenir, monsieur, pour vostre trĂšs humble cousin et trĂšs affectionnĂ© serviteur, de Laval. Du Bois-Dauphin, ce 16 novambre 1603. 3037. â 1003, 27 novembre, Nantes. â ArrĂȘt par lequel la Chambre des comptes de Bretagne, en consĂ©quence de lettres de jussion du 27 dĂ©cembre 1602, vĂ©rifie les lettres de mai 1598, portant augmentation des privilĂšges des vainqueurs du tir du papegai Ă VitrĂ© ImprimĂ©, Paris-JalJobert, 61. 3038. â 1603, 7 dĂ©cembre, Bois-Dauphin. â Lettre Ă©crite par le marĂ©chal de Bois-Dauphin au chancelier de BeliĂšvre B. N., français, 15900, 533. A monsieur, monsieur de BeliĂšvre, chancelier de France Mons'eur, on ne peust avoir recours Ă une perfidie qu'Ă la justice quy est vous quy la reposantes ; c'est dont l'occation que je vous supliray, monsieur, me la faire contre ung per- fide nommĂ© Belis quy avoit permutĂ© ung priorĂ© nommĂ© Bonny avecq moy pour une abaye que le roy m'a donnĂ©e comme vous voirĂ©s par le concordat. Il jouist et du priorĂ© et de l'abaye. Je vous suplie que le concordat soit suivy ou qu'il rande le priorĂ© libre et quite entre les mains de celuy quy en est pro- 376 LA MAISON DE LAVAL veu par sa rĂ©sination ou, s'il ne peult, que l'abaye me soit randue, suivant le don que le Roy m'en a faict. J'ay priĂ© le sieur du Bois, segrĂ©taire du Roy, et Monsieur Laleman vous faire entandre la juste plainte que je vous fais, vous supplient trĂšs humblement m'en randre prompte jus- tice. Vous aviĂ©s distribuĂ© ceste affaire Ă Monsieur Langlois, qui est prest Ă faire son raport et me conservĂ©s le don que je dĂ©sire avoir. Votre trĂšs humble serviteur. de Laval. De Bois-Daulphin, ce 7 e dĂ©cembre 1603. 3039. â 1604, 14 aoĂ»t, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat autorisant la levĂ©e d'une taxe sur le vin et le cidre vendus Ă Laval, dont le produit doit ĂȘtre affectĂ© au payement des dettes delĂ ville A. N., E7" , 267. 3040. â 1604, 23 octobre. â Acte par lequel SĂ©bastien Zamet vend pour quatre-vingt cinq mille cent quatre livres la chĂątellenie deMoretĂ Jacqueline de Bueil; le marĂ©chal de Bois-Dauphin est au nombre des tĂ©moins Annales du GĂąti- nais, XIII, 34. 3041. â 1604, 7 novembre, Laval. â Lettre Ă©crite par Anne d'AlĂšgre Ă Guy XX, son fils Archives de laTrĂ©moĂŻlle. A monsieur, monsieur de Laval Mon cher filz, Dieu soit louĂ© et bĂ©nit de vostre heureux retour. Pourveu que vous n'aies point fet le froit chez Mon- sieur de R[osny] et que vous y aies estĂ© tout prontement tout ira, Dieu aidant, bien, car, soit que la chose rĂ©usise ou qu'elle ne rĂ©usise pas, sy faut-il que cela pase honorablement et sans que vous en receviĂ©s Ă l'advenir, ny mĂ©contentement ny do- mage, et certes outre le mĂ©rite de toute ceste maison-lĂ , qui n'est pas petit, corne vous sçavĂ©s, nous leur somes infini- ment obligĂ©s des tesmoignages qu'ilz nous rendent de force bonne volontĂ©s. Sy vous avĂ©s le basque, que je vous avois envoie, vous verres de quoy par les lettres que je vous envoiois de Madame de Rosny et mon petit advis par les miennes. Maintenant je vous en envoie encores d'elle que je vous prie me renvoier, par lesquelles vous verres oĂč ilz en sont d'une autre recherche, sy nous ne parlons. Cela me fet de tant plus affectionner ceste aliance pour plus d'une raison, CAUTULAIBE 1586-1605 377 pourveu que vos conditions soient bonnes, Ă quoy je m'asure qu'ilz s'Ă©forceront le plus qu'il pourront. Reste Ă savoir sy le mestre en fera autant. Vous estes sur les lieux et aurĂ©s des amis qui descouvriront tout ce que vous en voudrĂ©s savoir; mais Ă toute fin voies les souvent avec grant soing et guaitĂ©. Pour vous dĂ©clarer, cela dĂ©pent de vous. Sy vous y voulĂ©s de la remise, il ne faudra que dire que vous ne savĂ©s pas encore ce que j'auray traitĂ©. Vous avĂ©s ung instrument fort propre Ă reprĂ©senter vos intentions, qui est Monsieur Ar- nault, pourveu qu'il ne ce pique point de son propre intĂ©rest, come il fet souvent. Dieu vous veille bĂ©nir, conseiller et con- duire Ă ce qui sera pour vostre bien'. Syjecroiois ma prĂ©sence vous estre lĂ plus nĂ©cessaire qu'icy, je lairois tout pour vous aller trouver ; mais ce fet de Monsieur de Bois-Dauphin qui nous ruine tout, m'atachera pour quelque mois pour essaier d'en sortir, aprĂšs lequel temps je vous iray voir, soit Ă Paris ou en Normandie, ce que je dĂ©sire autant que de vivre, et difĂ©rois tousjours de m'esloi- gner, pensant avoir ce bien de vous voir avant que venir icy. Mais quant long m'asura que vous estiĂ©s en Angleterre, je m'acheminay icy, pensant m'aprocher de vous, et il n'y a que huit ou dix jours que j'y suis par malheur, oĂč je n'ai encore rien vendu ny rien fet. J'y attens Madame de Bois-Dauphin. Je vous assure qu'en ce fet et tous autres jusques Ă ceux qui sont prĂšs de vous, vous estes trĂšs mal servi. Vous avĂ©s besoing d'estre mariĂ© ; croies en lien [sic ou l'octoritĂ©. Sans vous y occuper trop ici de vos affĂšres, j'y aporteray toute ma vie, tout mon soing et mon labeur ; assurĂ©s vous en ; mais cela n'est pas assĂ©s fort, veu la malice du rĂšgne oĂč nous somes et les orages qui ont couru sur vostre maison, que Dieu relĂš- vera par sa bontĂ©, malgrĂ© les mĂ©chantz plus florisante que jamais, et elle en est en chemin par sa grĂące. Je vous envoie trois centz escus ; je n'ay pas encore receu ung liart ; si j'en euse eu d'avantage vous les auriĂ©s par ceste voie. Dites Ă Osane et GuichardiĂšre qui me mandent tout ce qu'ilz ont receu en vostre voiage, afin que je conte et satis- 1. Tout ce premier paragraphe est relatif au projet de mariage entre Guy XX et In fille du duc de Sully. 378 LA MAISON DE LAVAL face le povre monsieur Zamet de ce que je luy devray, ce que je n'ay peu fĂšre, quant mesme j'aurois eu l'argent, que je ne sache ce qu'ilz auront touchĂ© sur ces lettres de change qu'ilz ont receue, quoy qu'il vous disent, mais je ne say pas s'ilz ont touchĂ© l'argent. Le bruit est qu'ilz en ont plus que vous du vostre. Je vous ay desjĂ dit que vous fĂ©riĂ©s fort bien de vous accoutumer Ă le guarder vous mesme. Quant vous aurĂ©s estĂ© quelque mois ou cinq semaines Ă la court et que vous voudrĂ©s venir reposer quinze jours Ă Lizieulx, il me semble que ce sera bien fet. Nous adviserons lĂ Ă tout ce que nous aurons affĂšre, sans estre interrompus, et vous me guĂ©rirĂ©s ceste sote fiĂšvre carte qui me print d'aprĂ©hention de ceNaple. Or bien, il faut estre sain et ma- lade quand il plaistĂ Dieu. Je vous supplie rechercher le plus que vous pourrĂ©s par lettre et autrement Monsieur de Fervaques. Vous luy estes obligĂ©, je vous diray cornant. Attendant que vous le puissiĂ©s venir voir, mandĂ©s-luy de vos nouvelles, et tout ce que vous dĂ©sirerĂ©s de luy, il le fera, n'en doutĂ©s point. Sy vous pences qu'il vous puisse servir d'aller Ă la court, il ira tout aussy tost, je m'en assure. Bref, fĂȘtes estĂąt d'avoir en vostre puis- sance tout ce qui dĂ©pent de luy et de moy, qui suis, chĂšre part de mon ame, Vostre trĂšs fidelle et serviable mĂšre. Anne d'AllĂšgre. Je suis bien aise que vous n'aies point estĂ© en Angleterre. J'aprĂ©hendois ceste mer pour vous. A Laval, ce T novem- bre 1604. 3042. â 1604, 15 novembre, Bourmoi. â Lettre Ă©crite par du Plessis-Mornay Ă Rivet, ministre protestant Ă Thouars ImprimĂ©, Correspondance de Daplessis-Mornay, X, 35. ... Je crains fort que nous n'ayons mauvaises nouvelles de Monsieur de Laval. Il a estĂ© Ă Fontainebleau Ă la messe du Roy, et est fort combatteu, et dit toutesfois qu'il attend qu'on lui monstre son erreur prĂ©tendeue par l'Escripture. 3043. â Vers 1604, novembre. â Lettre Ă©crite par Anne d'AlĂšgre Ă Guy XX Archives de la TrĂ©moĂŻlle. A monsieur, monsieur de Laval Mon cher fĂźlz, je vous fay ce mot pour vous vous prier do n'estre en peine de vostre laquais. Je le retiens encore de- CARTULAIRE 1586-1605' 379 main pour savoir assurĂ©ment tout ce que je puis faire pour vostre contentement, Ă quoy je n'ay pas moins d'afection que j'ay dĂšs le premier jour de vostre naisance de pation Ă faire pour vous tout ce que j'ay recognu estre pour vostre bien. Maintenant que vous avĂ©s cognoisance de ce que l'ong vous peut aporter de comoditĂ©, jugĂ©s sy je ne le ferois encore plus librement que jamais, sy l'incomoditĂ© des affĂšres n'empes- choit l'effect de ma bonne volontĂ© aussy entiĂšrement que vous la recognoitrĂ©s tousjours en toutes occasions, mesme en celle- sy qui s'ofre, oĂč je m'Ă©forceray par desus mes forces. Et attendant que je vous puisse assurĂ©ment dire quoy, je vous prie de ferre fĂšre les habis que vous dĂ©sirerĂ©s pour ce voiage, qui ne seront sy tost prest que vous aurĂ©s quelqu'un de ma part Ă vous. Vives assurĂ© de cela et ne perdes point de temps Ă choisir vos Ă©tofes. Monsieur RĂ©mont a portĂ© une lettre de trois centz escus ; le Peinteur en a baillĂ© cent, ce messager cent. Vous aurĂ©s tout ce que je vous pourray bail- ler Ă la fois et vous le toucherĂ©s, s'il vous plaist, vous mesme. Dramart [vient d'arriver]... ' ; il m'a dit votre dĂ©sir d'aller, dont je suis bien aise et de ce que vous vous rĂ©solvez de ne mener pas grant train. Il sera bon que vous soies trĂšs bien pour vostre voiage. Il y a un gentilhome qui a estĂ© par tout'le monde et de qualitĂ©, qui dit que, sy vous voulĂ©s, il fera ce voiage avec vous et qu'il vous guardera d'estre malade sur la mer, qui est tout ce que je crains pour vous en ce voiage. Le reste par vostre laquais. Dieu vous doint mille bons soins et vous multiplie ses grĂąces de plus en plus. A Lizieulx, ce samedi soir. 3045. â 1604, 19 novembre. â Lettre Ă©crite par du Plessis- Mornay Ă Guy XX afin de le maintenir dans le protestantisme ImprimĂ©, Correspondance de Duplessis-Mornay, X, 36, et B N., Dupuy, 424, 170. 3046. â 1604, 29 novembre, Sedan. â Lettre de Tilenus Ă Guy XX sur ses projets de conversion Copies, B. N., Dupuy, 424, 171, et 838, 189. 1. La fin de la lettre, comme une partie du commencement, est effacĂ©e. 380 LA MAISON DE LAVAL 3047. - 1005, 20 janvier, Sedan. - Dissertation thĂ©ologi- que adressĂ©e par Tilenus Ă Guy XX au sujet de sa conversion B. N., Dupuy, 424, 172, et 838, 191. 3048. â 1605, 25 janvier, Paris â ArrĂȘt du Conseil d'Etat donnant mainlevĂ©e Ă plusieurs marchands de Laval et de Morlaix d'une somme de trois mille six cent seize Ă©cus chargĂ©e en Espagne sur le navire la Marie de Pernef et saisie par le capitaine Horrigoity A. N., E. 8/a 67 et B N 18168, 28. ' *' 3049. - 1605, 25 fĂ©vrier. â Lettre Ă©crite par Philippe de MornayĂ son pĂšre ImprimĂ©, MĂ©moires de Mme de Momav II, 235. y ' Je pense vous avoir escript comme je saluay M de Laval par rencontre chez le Roy; il me demanda de vos nouvelles ; je respondis qu'il en avoit eu depuis quelques temps, que je voulois espĂ©rer qu'il n'auroit pas oubliĂ©es. Il rĂ©partit que peu devant qu'aller en Italie il avoit eu de vos lettres, et non depuis. LĂ je brisay fort brusquement, pour le dĂ©savantage du lieu. Depuis, je l'ay trouvĂ© Ă propos ; mon abord fust que je venois Ă luy avec serment de n'entrer point en discours qui lui estoit commun avec tous, qu'autrefois j'avois assez sondĂ© sa connoissance pour juger que, quelque changement qui parust en sa vie, il n'en pouvoit recevoir en sa crĂ©ance. A cela il n'eust pour rĂ©plique que des honnestetĂ©s et sans rien dĂ©clarer de son intention. Alors je fis tomber le discours sur vostre lettre, et le pressay fort s'il estoit vray qu'il en eust abusĂ©. Il me le nia fermement. Encore que je croie le con- traire, je luy dis que j'Ă©tois rĂ©solu de luy en demander des nouvelles et m'arrester Ă ce qu'il m'en diroit, qu'au pis aller son infidĂ©litĂ© eust estĂ© plus blasmĂ©e que vostre libertĂ©. A cela il rĂ©itĂ©ra ses sermens. Enfin je lui parlay de Lafin ', et 1. Dans le texte imprimĂ© par Mme de Witt ce mot est Ă©crit la f'i âą Ăź%°? a n l e P rĂ©senter aucun sens; il eut Ă©tĂ© cependant tacite a Ă©diteur de retrouver ce qu il venait d'imprimer quelques pages plus haut, dans les MĂ©moires eux-mĂȘmes II 63 Le sieur de Lafin, l'un des siens, qu'il avait laissĂ© prisonnier en la tour des Nonnes a Rome, Ă la requeste de M. de BĂ©thune ambassadeur pour le Roy, et Ă l'instigation sans doute de la dame de rervacques, qui n'avoit trouvĂ© bon qu'il fist le voyage cartulaire 1586-1605; 381 vivement ; il me promit qu'il en parlĂšrent au Roy, comme il avoit fait Ă M. de Villeroy et sentit bien qu'il y alloit fort avant de son honneur. A nostre sĂ©paration il me dit qu'il vous vouloit escrire, et me demanda par quelle voie ; je m'obligeay de l'avertir, et l'ay fait j'attens s'il s'en souviendra ; et pour l'adieu je tiray parole qu'il vous Ă©criroit franchement, luy remonstrant com- bien faisoient contre luy les mauvoises opinions que produit son hĂ©sitation et combien il travailleroit aies surmonter. J'ose presque vous demander congĂ© de voir sa lettre, afin que nous apprenions de sa rĂ©solution ce qu'il ne descouvre ni aux uns ni aux autres. Son mariage avec mademoiselle de Bourbon s'avance fort et n'y a plus grande difficultĂ© qu'Ă luy garder son rang ' avec son fils, eust trouvĂ© moyen de dĂ©pescher Ă M. du Plessis, un valet de la prison, allemand, jusqu'Ă Saumur, pour le prier de prendre soin de luy. M. du Plessis 1 adressa Ă nostre fds Ă Paris avec les lettres qu'il portait pour luy, nostre dit fds, et M. de Laval, afin que sur les lieux, par lesplus'discrettes voyes qu'il adviserait avec nos amis, il procurĂąt sa dĂ©livrance. Mais pour l'heure il ny eut que refus et rudesses et M. de Laval, qui promettait toujours beaucoup, ne l'assista, ni de faict, ni de parolles. Ces lettres contiennent avec toute libertĂ© le discours de sa prison, les disputes qu'il avoit avec divers docteurs, les tentations qui luy estoient prĂ©sentĂ©es Ă gauche et Ă droicte, les vives reparties qu'il y faisoit. les rigueurs qui lui estoient tenues, desquelles il n'atten- dait la fin que par le feu ou par l'eau ; et n'est Ă croire avec quelle libertĂ© et avec quelz termes il avoit prononcĂ© tout ce qu'il s'en suit du Pape, de la court et de la doctrine romaine, ses lettres toutes estans suffisantes pour le perdre. Depuis nĂ©antmoins, parce qu'il n'estoit prisonnier que du Roy, il fut dĂ©livrĂ©, aprĂšs que l'on eut veu l'innocence de M. de Mon- barot, gouverneur de Rennes, prisonnier Ă la Bastille, duquel on vouloit le faire complice, sur l'instance que les dĂ©putĂ©s de la Religion eurent charge en l'assemblĂ©e de Chastellerault de faire vers S. M pour luy, et que dĂšs lors ils firent Ă M. de Rosny qui s'y trouva de la part du Roy, le tout principalement par le soin de M. du Plessis, qui avoit recommandĂ© cest affaire aux dĂ©putĂ©s de diverses provinces. Retournant aussy de Rome, il vint droict de Lyon Ă Saumur pour le voir et l'en remereyer, d'oĂč il prit son chemin pour s'en aller prĂ©senter devant S. M. en fĂ©vrier 160C. » 1. Voici le passage peu bienveillant que dans ses MĂ©moires Mme du Plessis-Mornay consacre Ă Guy XX, en traitant de l'Ă©poque oĂč, par suite dĂ© sa conversion, elle avait dĂ» renoncer Ă le voir un jour son neveu. Quant Ă M. de Laval, aprĂšs plusieurs tergiversations, il quitta la Religion, faisant voir Ă l'Ćil Ă un cha- 382 LA MAISON DE LAVAL 3050. â 1605, 18 mars, Saumar. â Lettre Ă©crite par du Plessis-Mornay Ă Guy XX, en rĂ©ponse Ă celle qu'il lui a Ă©crite le 27 fĂ©vrier ; s'appuyant sur la lettre de Tilenus, il s'efforce de rĂ©futer les huit objections que Guy XX lui avait exposĂ©es contre l'orthodoxie du protestantisme ImprimĂ©, Correspondance de Duplessis-Mornay, X, 69. 3051. â 1605, 19 mars, Paris. â Lettre Ă©crite par Philippe de Mornay Ă sa mĂšre ImprimĂ©, MĂ©moires de Mme de Mornay, II, 240. .... Dimanche le 13 mars, M. de Laval fut Ă la messe et oneques puis n'a estĂ© veu, toujours reclus dans les capu- chins, Ă se confesser, faire pĂ©nitence, et solenniser son abju- ration 3052. â 1605, 6 juin. - EntrĂ©e de Guy XX Ă VitrĂ© note, Paris-Jallobert, 62. 3053. - 1605. 13 et 26 juin, VitrĂ© et Quintin. â Deux reçus d'ensemble six mille trois cents livres dĂ©livrĂ©s par Guy XX Ă M. de La Motte original, archives de la TrĂ©- moĂŻlle. Nous Guy, comte de Laval, etc., confessons avoir eu et receu du sieur de la Motte la somme de trois mil livres, sur la somme six mil six cens livres qu'il a entre les mains, pro- venant delĂ ferme de nostre baronnie de VitrĂ©, de laquelle somme de trois mil livres nous le quictons. Faict au chasteau de VitrĂ©, le xiii e jour de juin 1605. Gui de Laval. Pour la somme de trois mil livres. J'ay reseu de monsieur de la Motte, outre les trois mil cun par ses procĂ©dures que la desbauche de sa vie, qu'il n'eust peu continuer telle parmi nous, le menoitlĂ . En Italie nussy, il s'estoit adonnĂ© aux devins et sorlelĂšges. Et d'ailleurs le Roy n'y oublioit point ses inductions, ce que le pĂšre Cotton, jĂ©suite, ne dissimula pas en une lettre Ă un amy en ces mots qu'il espĂ©roit bien de sa conversion parce que les majestĂ©s divines et humaines y coopĂ©roient. Les escripts rĂ©ciproques lĂ dessus sont en publiq, et particuliĂšrement M. du Plessis, que le pĂšre avoit aymĂ© uni- quement, estima de son devur de luy en escrire vivement ; mais, Ă la suggestion de M. d'Andelot, son oncle, instrument en partie de sa rĂ©volte, il montra la lettre au Riy, qu'aucuns taschĂšrent de piquer contre M. du Plessis sur ce subject. » cahtulaire 1586-1605 383 livres cy dessus, trois mil trois cens livres. Fait Ă Quintin, ce 28' juin. Gui de Laval. 3054. â 1605. 4 juillet, Laval. â Mandement par lequel Guy XX prescritĂ M. de la Motte de payer certaines sommes Ă diverses personnes original, Archives de la TrĂ©moĂŻlle. Monsieur de la Motte, incontinant vostre retour en ceste nostre ville, je vous prie de dĂ©livrer la somme de quatre cens quatre-vingts dix-sept livres trois sols unze deniers aux cy aprĂšs nommez, sçavoir A Levesque, notre apoticaire, trante quatre livres cinq sols deux deniers pour chose de son estĂąt, qu'il nous a fournie ; A Denis Crosnier, cenct quarante deux livres traise solz six deniers pour vin, viande et poisson par luy fournis ; A Mottais, trante livres pour autre vin aussy par luy fourni ; A Charles Frin, boullenger, cinquante trois livres dix sol? pour pain, qu'il a baillĂ© semblablement ; A Bilheu, mareschal, cinquante cinq livres ; A Jouet, sellier, dix livres pour ce qu'il a fourny Ă noz escuyries. Ausquelz et chacun d'iceux ont estĂ© arrestĂ©es leurs partyes par l'un de noz maistres d'hostel et autres noz oficiers, et icelles mises et emploiĂ©es par nostre argentier sur le bureau, sans qu'il vous soit nĂ©cessaires d'en avoir partyes ou arti- cles des dessus dicts que le prĂ©sent. Doncques vous dĂ©livrerez la dicte somme de quatre cent quatre-vingts dix-sept livres, comme dict est en nostre acquit, et ce faisant d'iceux particuliers vous retirerez acquits chacun pour sa somme, raportants lesquelles avec ccstes, nous voulions et promettons qu'elles vous vaillent asseurance de pareille somme de 497 livres 3 sols 11 deniers vers nous. En foy et tesmoignage de quoy, les avons signĂ©es. En nostre chasteau de Laval, ce quatriesme jour de juillet mil six cent cinq. Plus payez, s'il vous plaist, comme dessus la somme de vingt-six livres Ă Corneille de Vernay. Gui de Laval. 3055. â 1605, 13 aoĂ»t, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat 384 LA MAISON DE LAVAI. confirmant un arrĂȘt du Parlement du 23 dĂ©cembre 1602 donnĂ© contre Ives delĂ Lande, fermier des traites du Poitou, au profit de plusieurs voituriers par eau A. N., E 9/a 312. 3056. â 1605, 26 aoĂ»t, Paris. â Mandement adressĂ© par Guy XX Ă M. de la Motte au profit de Gervaiseau Archives de la TrĂ©moĂŻlle. Monsieur de la Motte, je vous prie que des deniers tant ordinaires qu'extraordinaires du revenu de mon bien vous payer, baillez et dĂ©livrez comptant Ă Jehan Gervaiseau, messager de ma ville de Laval Ă Paris, la somme de soixante cinq livres tournois que je luy doibs pour port et voiture de hardes et voiages qu'il a faiet pour mon service. Prenez quictance du dict Gervaiseau, raportant laquelle et la prĂ©- sente sur ce suffizante, je vous desduiray la dicte somme sur ce que vous aurez receu pour moy. Escript Ă Paris, le xxvi* jours d'aoust 1605. Gui de Laval. Vostre plus affectionnĂ© ami Ă vous servir. Laval. i 3057. â 1605, 26 aoĂ»t, Paris. â Mandement adressĂ© par Guy XX Ă M. de la Motte lui prescrivant de remettre cent francs Ă M du Rosset original, archives de la TrĂ©moĂŻlle. Monsieur de la Motte, je vous prie que des deniers tant ordinaires qu'extraordinaires du revenu, de mon bien vous payez, baillez et dĂ©livrez comptant Ă du Rosset, l'un de mes secrĂ©taires, la somme de cent frans, de laquelle je luy ay faict don pour se faire penser d'une maladie qu'il a. Prenez quictance du dict Rosset, raportant laquelle et la prĂ©sente sur ce suffizante, je vous desduirĂ© la dicte somme de cent francs sur ce que vous avez receu pour moy. Escript Ă Paris, le xxvi» jour d'aoust 1605. Vostre plus affectionnĂ© Ă vous servir. Laval. ?058. â 1605. 27 aoĂ»t, Paris. â Lettre par laquelle Guy XX demande Ă dom Pedro Arlonte de venir l'accompagner dans son expĂ©dition de Hongrie Archives de la TrĂ©moĂŻlle. A Monsieur, Monsieur don Pietro Arlonte Monsieur, j'ay reseu un contantement extrĂȘme par vostre responce ; mais, depuis ma lettre, j'ay estĂ© obligĂ© Ă demeurer CAUTULAIRE 1586-1605 385 icy quelque temps plus que je ne pensois, de fason qu'au- jourd'uy mesmes je pars pour aller Ă Viene, oĂč je seray dans douze ou quinze jours. Il n'y a que sinq ou six journĂ©es de Venize. Je vous requiers ? Ă genoux d'y venir et je vous honoreray comme mon pĂšre, et ne manquerez ni des mil escus, dont est question, ni de chose qui soit en mon pouvoir. C'est vostre trĂšs obligĂ© Ă vous faire service, Laval. Paris le 27 oust. Se vostra signoria si degna mi voler bene, venga paternita sua a Viena dove saro fra quindici di. Il viaggio Ăš molto minore che di ven-re qui. Sapra dĂ©lie mie nove a L'Armata del Imperator, et se me fa questa gratia, io gli juro che saro piusuoche mio et non avro mente in poter mio che non sia al suo servitio. Vivendo lieto et contento con questa speransa, gli basso le mani. 3059. â 1605, 9 septembre. Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat portant Ă cinq sols le droit levĂ© sur chaque pipe de vin passant par la Mayenne, entre Laval et ChĂ teaĂč-Gontier, pour le produit en ĂȘtre affectĂ© aux rĂ©parations des vingt- deux chaussĂ©es et aux quarante quatre portes mariniĂšres Ă©tablies sur la Mayenne entre les deux villes A. N., E 9/b 87. 3060. â 1605, 12 septembre, Paris. â Acte par lequel un nommĂ© Foureau certifie que le mandement du 26 aoĂ»t 1605 en faveur de M. du Rosset Ă©mane bien de Guy XX Archives de laTrĂ©moĂŻlle. Je certifie que Monseigneur le comte de Laval a faict don Ă Monsieur du Rosset, cy dessus nommĂ© de ladicte somme de cent livres et que la lettre suscripte est signĂ©e de mon dict seigneur. Faict Ă Paris, le 12° septembre 1605. Foureau. 3061. â 1605, 29 novembre, Laval. â Quittance signĂ©e par Gervaiseau de la somme de soixante-cinq livres tournois Archives de la TrĂ©moĂŻlle. Je Jan Gervaiseau, messager ordinaire de Laval Ă Paris, confesse avoir eu et receu de noble Daniel Hay, escuier, sieur de la Motte, la somme de soixante-cinq livres tournois, suy- 386 LA MAISON DE LAVAL vant et au dĂ©sir de la missive cy-dessus signĂ©e de monsei- gneur le comte de Laval. Faict Ă Laval, ce vingt-neutĂŻesme jour de novembre mil six cens cinq. GeiivĂšseau. 3062. â 1605, 3 dĂ©cembre, 1609, 26 janvier, Saint-Tugal. â Epitaphe du cĆur de Guy XX ImprimĂ©, la BeauluĂšre, CommunautĂ©s et chapitres, 25. Le cĆur de haut et puissant seigneur Guy XX e du nom, mort en Hongrie le 3 dĂ©cembre 1605, ĂągĂ© de vingt ans, dont le corps fut enterrĂ© au chĆur des Jacobins le xxvi fĂ©vrier MDCIX. 3063. â 1605, 31 dĂ©cembre, Paris â Lettre Ă©erite par Louise de ColignyĂ sa belle-fille, la duchesse de la TrĂ©moĂŻlle, au reçu de la nouvelle du dĂ©cĂšs de Guy XX ImprimĂ©, Bulle- tin du Protestantisme français, XX, 550. 3064. â 1606, 20 janvier, VitrĂ©. â Lettre Ă©crite Ă la du- chesse de la TrĂ©moĂŻlle par Parent de PrĂ©aux, pasteur pro- testant Ă VitrĂ© ImprimĂ©, Vaurigaud, Eglises rĂ©formĂ©es de Bretagne, II, vu. 3065. â 1606, 21 mars, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat ordonnant la levĂ©e sur les habitants de Laval de la somme de deux mille trente-six sols neuf deniers qu'ils ont Ă©tĂ© condam- nĂ©s Ă payer au curateur des enfants du feu sieur de LadouyĂšre A. N., E 10b 97, et B. N., français, 18170, 132. 3066. â 1606, 22 avril, Villers-Cotterets. â Lettre Ă©crite par Henry IV au marĂ©chal de Bois-Dauphin ImprimĂ©, Lettres missives, VI, 607, d'aprĂšs B. N., français, 3348, 12. 3067. â 1606, 4 mai, Lisieux. â Lettre Ă©crite par Anne d'AlĂšgre au duc de Montpensier Original, archives de la TrĂ©moĂŻlle. A monseigneur, monseigneur le duc de Montpencier, pair de France, gouverneur et lieutenant gĂ©nĂ©ral pour le roy en Normandie. Monseigneur, si je doibs recevoir consolation de chose du monde, ce doibt estre des eiĂŻectz de vos bontez qui ne desdai- gaent point la commisĂ©ration du dĂ©sastre qui accompagno CARTULAIRE 1586-1605 387 vostre trĂšs humble servante. Le moindre mal que j'aie senty depuis ce malheur, c'est une fiebvre tierce qui me travaille maintenant et que j'essairay de chasser au plus tost qu'il me sera possible, pour ne point manquera me trouver Ă Rouen au jour qu'il vous plaira me limitter et que j'ose croire, mon- seigneur, qu'aurez aggrĂ©able de donner aussy Ă madame la princesse d'Orange et Ă madame de la Trimouille, afin qu'elles preinent la peine de s'y rendre au mesme temps. Et quand je seray honorĂ©e de voz commandemens sur ce subject, je sur- monteray ma maladie, si elle n'est plus forte que moy, pour aller recevoir telle loy qu'il vous plaira m'ordonner sur ces occurrences, ausquelles vous me trouverez toute soubzmise et Ă voz volontez, puisqu'elles daignent prendre le soing de ce qui me touche et nous faire l'honneur d'affectionner que nous en sortions Ă l'amiable, Ă quoy vostre authoritĂ©, mon- seigneur, et vostre puissance ne sera moings absolue sur moy que sur tous ceulx qui ont intĂ©rest en cest affaire, et quand il iroit de nostre vye, nous recevrons, monsieur le ma- rĂ©chal et moy, vos jugemĂšns avec aultant d'humble satisfaction que de vĂ©ritable recongnoissance de l'honneur qu il vous plaist nous faire, et Ă moy particuliĂšrement qui suis obligĂ©e plus que personne du monde d'estre jusques au dernier jour de ma vye, monseigneur, vostre trĂšs humble et trĂšs obĂ©issante servante. Anne d'AllĂšgre. A Lisieux, le 1111 e may 1606. Monseigneur, pardon, je vous supplie trĂšs humblement ce que ma sote liĂšvre me fet emprunter une main pour escrire Ă V. G., au pieds de laquelle je me randray au jour qu'elle me comandera. Elle m'honnorera, s'il luy plaist de me ren- voier ung laquais pour cest effect. Ce sont Ćuvres de vostre charitĂ© d'avoir pitiĂ© d'une misĂ©rable de qui la misĂšre est sans pareille et qui sera jusques Ă sa derniĂšre pencĂ© vostre esclave. 3068. â 1606, 20 juillet, Paris. âArrĂȘt du Conseil d'Etat ordonnant au sieur de Vienne, contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral des finan- ces, de contrĂŽler les lettres d'assiette obtenues le 28 dĂ©cembre 1605 par les ecclĂ©siastiques du comtĂ© de Laval A. N., E 11» , 130. 3069. â 1606, 12 aoĂ»t, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat, 388 LA MAISON DE LAVAL relatif au remboursement du solde des vingt-sept mille livres prĂȘtĂ©es Ă Bois-Dauphin en 1594 par Simon Richet, sieur de LaubiniĂšre, en vertu d'un traitĂ© conclu par ordre de Henrv IV A. N., E 11b 107 . J 3070. - 1607, 18 janvier, Paris. - ArrĂȘt du Conseil d LtPt, concĂ©dant Ă Bois-Dauphin la moitiĂ© du profit rĂ©sultant de certain expĂ©dient que le marĂ©chal offre de faire connaĂźtre et lui assurant tout au moins trois cent mille livres, pourvu que l'expĂ©dient soit trouvĂ© juste et raisonnable A. N. E 12a 20, etB. N., français, 18171, 9. 12 mars, Chantilly. _ Lettre Ă©crite par Henry IV au marĂ©chal de Bois-Dauphin ImprimĂ©, Lettres missives, VII, 123, d'aprĂšs B. N., français, 3348, 14. 3072. - 1607, 27 mars, Paris - ArrĂȘt du Conseil d'Etat dĂ©clarant que le prĂ©vĂŽt des marĂ©chaux du Mans Ă©tabli Ă Laval n'est tenu d'escorter les deniers des aides, tailles et taillons que dans sa circonscription et au plus loin jusqu'Ă la FlĂšche A. N., E 12b f 192j et B N ; français, 18171, 230. 14 juillet, Paris. - ArrĂȘt du Conseil d'Etat rĂ©glant le payement d'une somme de quatre mille huit cents livres assignĂ©e par acquits patents Ă Bois-Dauphin A N E 14a j2 5. v âą' 3074. â 1607, 13 septembre, Paris. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat ordonnant aux habitants de ChĂąteau-Gontier de reprĂ©- senter l'Ă©tat de la recette et de la dĂ©pense d'une taxe de trois deniers par pinte de vin, dont le produit avait Ă©tĂ© affectĂ© au remboursement des fournitures faites pendant la Ligue sur les ordres de Bois-Dauphin A. N., E 14b , 172. 3075. - 1607, 11 octobre. â ArrĂȘt par lequel le Conseil d'Etat ordonne la rĂ©ception de Jean Rallu en l'office d'au- neur de toiles Ă Laval, sauf aux habitants de la ville Ă lui rembourser dans les trois mois deux mille cinq cents livres A. N., E 15a t 341j et B N ^ français, 18172, 21. 3076. â 1607, 14 octobre, Fontainebleau. â Provision de la charge de gouverneur d'Anjou en faveur de Bois-Dauphin EnregistrĂ©e le 26 novembre 1607 Copie, A. N., Ordonnances de Henri IV, t. VI, 368. 3077. â 1607, 25 octobre. â Quittance d'un arriĂ©rĂ© dĂ©li- CARTULAIRE 1586-1605 389 vrĂ©e par le marĂ©chal de Bois-Dauphin Original signĂ© et scellĂ©, fraiçais, 28154,256. 3078. â 1608, 15 janvier. â Lettre par laquelle le procu- reur fiscal de VitrĂ©, G. le Lymonnier, avise la duchesse de Thouars que les ponts Billon et de Cantache Ă VitrĂ©, ayant Ă©tĂ© emportĂ©s par les eaux, ont Ă©tĂ© reconstruits en bois Im- primĂ©, Revue des SociĂ©tĂ©s savantes, cinquiĂšme sĂ©rie, t I 132. 3080. â 1608, 7 fĂ©vrier. â ArrĂȘt par lequel le Conseil d'Etat autorise la levĂ©e d'une somme de deux mille cinq cents livres, due par les habitants de Laval Ă Jean Rallu, pour le remboursement d'un office d'auneur de toile supprimĂ© A. N., E 16a f 126. etB. N., français, 18173, 47. 3081. â 1608, 29 mars, Paris. â Lettre Ă©crite par Bois- Dauphin au connĂ©table de Montmorency B. N., français 3549, 4. ' A monsieur, monsieur le duc de Monlmorancy, per et connestable de France. Monsieur, je me suis enquis, suivant la lettre que vous avĂ©s rescrite Ă messieurs le marĂ©chal de Bouillon, de la Roche, marquis de TrĂ©nel et Ă moy, touschant ung nommĂ© Habraham Constant, dit la Jeunesse il estoit ung de ceux que monsieur le marĂ©chal de Bouillon ranvoya. Vous vous ressouviendrĂ©s, monsieur, que me distes lorsque vous dĂ©sirate que je visse les estropiĂ©s que ceux que monsieur le marĂ©chal de Bouillon et moy avions faict visiter en vostre aĂ»sance et trouvĂ©s dignes du bienfaict du Roy fusent mis Ă notre rĂŽle et que ceux qu'il avoit ranvoeyĂ©s fusent aulsy par moy et messiĂźurs de la Rochepot et marquis de Tresnel ranvoeyĂ©. C'est pourquoy seluy-sy a estĂ© ranvoeyĂ© et me resouviens que lorsqu'il se prĂ©santa Ă mon dit sieur de Bouillon, qu'il ne fut trouvĂ© ny estropiĂ© ny par ses certificas digne d'estre sur le rĂŽle. C'est tout ce que je puis vous mander poursela. Bien vous assure-je que je ne veux sĂŽder Ă personne du monde d'estre plus que moy, monsieur, vostre trĂšs humble el obĂ©issant serviteur. de Laval. De Paris, le 29 mars 1608. 25 390 LA MAISON DE LAVAL 3082. â 1608, 26juillet, Fontainebleau. â Lettre d'Henri IV aux marĂ©chaux de Brissac et de Bois-Dauphin ImprimĂ©, Lettres Missives, VII, 589, d'aprĂšs français, 3585, 80. 3083. â 1608, 27 juillet. â Lettre Ă©crite par Bois-Dau- phin au connĂ©table de Montmorency B. N., français, 3569, 77. A monsieur, monsieur le duc de Montmorancy , per et connestable de France. Monsieur, j'ay se jourd'uy veu monsieur le chancelier etluy ay dit ce que m'avĂ©s rescrit ; il m'a assurĂ© qu'il en parleroit au Roy et m'a priĂ© l'en faire resouvenir, se que je feray ; et en toutes aultres occations oĂč je vous pouray randre trĂšs hum- ble service, je m'y amployeray de ceur et d'afection. Commandez-moy donc et me connoistrĂ©s, monsieur, que je suis vostre trĂšs humble et trĂšs affectionnĂ© serviteur. de Laval. Le 27 juyllet 1608. 3084. â 1608, 2 aoĂ»t, Paris. â Lettre des marĂ©chaux de Brissac et de Laval au connĂ©table de Montmorency B. N., français, 3607, 44. 3085.â 1608, 11 septembre. â ArrĂȘt par lequel le Con- seil d'Etat maintient Bois-Dauphin en possession du droit de nommer aux offices de la seigneurie du Bourg-Nouvel, aussi longtemps qu'il en jouira Ă titre d'engagement A. N., E, 18b i 64. 3086. â 1608, 13 novembre. â ArrĂȘt du Conseil d'Etat statuant sur un procĂšs pendant entre Simon Richer, sieur de LaubiniĂšre, d'une part, Urbain de Laval-Bois-Dauphin et le sieur de Rossieu, de l'autre A. N., E, 19=» , 192, et B. N., français, 18174, 05. 3087. â 1608, 29 novembre. â ArrĂȘt par lequel le Conseil d'Etat ordonne une levĂ©e de seize cents livres, dues par les habitants de Laval Ă JĂ©rĂŽme Martin, contrĂŽleur du grenier Ă sel de la ville A. N., E, 19 a 311, et B. N., français, 18174, 113. 3088. â 1608, 13 dĂ©cembre. â ArrĂȘt par lequel le Conseil d Etat porte Ă dix sous le droit levĂ© sur chaque pipe de vin CARTULAIRE 1586-1605 391 transportĂ©e par la Mayenne de Laval Ă ChĂąteau-Gontier ; le produit doit ĂȘtre affectĂ© Ă l'entrelien des chaussĂ©es, portes mariniĂšres et de vuidanges scituĂ©es sur ladite riviĂšre » A. N , E, .19, 136, et B. N., français, 18174, 151. 3089. - 1608, 18 dĂ©cembre - ArrĂȘt par lequel le Conseil d'Etat ordonne le rĂ©tablissement de certaines parties rayĂ©es parla Chambre des comptes sur le compte d'un impĂŽt mis sur les habitants de Laval et destinĂ© Ă l'acquittement des det- tes de la ville A. N., E, 19b 220, et B. N., français, 18174, 182. y ' 3090. â 1608, 20 dĂ©cembre. - ArrĂȘt par lequel le Conseil d Etat ordonne la levĂ©e sur les habitants de Laval d'une somme de quinze cent vingt-huit livres neuf sols, destinĂ©e au remboursement de ce qu'ils ont empruntĂ© durant la Ligue Ă 1 Ăźerre de Champ-Huon, juge des exempts delĂ ville A N E 19b 266, et B. N., français, 18174, 196. '' 3091. - 1608, 20 dĂ©cembre. - ArrĂȘt par lequel le Conseil dlitat ordonne que Jacques Gigan, prieur de la Sainte- Trinite de FougĂšres et ancien Ă©conome de l'abbaye de Hom- bhĂšres, emprisonnĂ© Ă la requĂȘte de Bois-Dauphin, Ă qui le Roi avait fait don de ladite abbaye, sera Ă©largi, mais main- tenu sous la garde d'un huissier du Conseil A. N , E 19b 317 et B. N., français, 18174, 215;. 3092. - 1609, 7 fĂ©vrier, SablĂ©. - Lettre Ă©crite par Bois- Dauphin au connĂ©table de Montmorency B. N., français, A monsieur, monsieur de Montmorency, connĂ©table de France. Monsieur, aiant sceu qu'estes Ă Paris, je n'ay voulu man- quer Ă vous suplier par ceste lettre de me continuer vos bon- nes grĂąces que je conserveray plus soigneusement que ma vie Ce gentilhomme vous dira, Monsieur, ung combat qui s'est faitensepaĂŻsdetroisdcsfrĂšresdeM de Crisey [CrissĂ©?] contre le sieur de JarzĂ©, son frĂšre et beau-frĂšre nommĂ© Lusan ; le combat a estĂ© fort courageusement faict et franchement d'une part etd'aultres ; et, si jamais duel mĂ©rite la grĂące du Roy seluy-sy la mĂ©rite et les gentils hommes d'estres conservĂ©s pour servir ung jour le Roy, ayant tous montrĂ© beaucoup de 392 MAISON DE LAVAL courage et de franchise. Se gentilhomme vous dira, Monsieur, s'il vousplaist, toutes ces particularitĂ©s et moyjevous supli- ray me tenir, Monsieur, pour vostre trĂšs humble cousin et trĂšs affectionnĂ© serviteur, de Laval. De SablĂ©, se 7 fĂ©vrier 1609. 3093. â 1609, 26 fĂ©vrier. â Epitaphe de Guy XX dĂ©cĂ©dĂ© le 3 dĂ©cembre 1605 La BeauluĂšre, CommunautĂ©s et Chapi- tres, 25. 3094. â 1609, 2 juin. â ArrĂȘt par lequel le Conseil d'Etat accorde un rabais de trois mille livres Ă RenĂ© Charbonnel, ci-devant fermier des six deniers par pot de vin et des trois deniers par pot de cidre vendus Ă Laval, attendu l'Ă©pidĂ©mie qui, pendant trois ans, a paralysĂ© le commerce de ladite ville A. N , E 22, 23. 3095. â 1609, 4 juin. - ArrĂȘt par lequel le Conseil d'Etat ordonne que Jean du Tillet et ses associĂ©s seront entendus au Conseil au sujet d'une requĂȘte de Charlotte de Nassau, tutrice du duc de la TrimoĂŻlle. seigneur de Laval, laquelle demande que l'Ă©dit de rĂ©union des recettes des consignations ne soit exĂ©cutĂ© ni dans le comtĂ© de Laval, ni dans la sĂ©nĂ©- chaussĂ©e de Saint-Ouen A. N., E 22, 53. 3096. - 1609, 28juillet. â Quittance de dix mille livres dĂ©livrĂ©e par le marĂ©chal de Bois-Dauphin Original signĂ© et scellĂ©, B. N., français, 28154, 254. 3097. -1609, 29juillet, Lisieux. â Lettre Ă©crite par Anne d'AlĂšgre Ă la duchesse de la TrĂ©moĂŻlle Archives de la TrĂ©moĂŻlle. A madame, madame la duchesse de la Trimouille. Madame, je loue Dieu du retour de vostre voiage, sachant que vous estes en bonne santĂ© et espĂ©rant qu'il vous aura aportĂ© du contentement. Vous n'en pouvĂ©s avoir plus, madame, que vous en dĂ©sire, avec toute sorte de prospĂ©ritĂ©, vostre servante bien affectionnĂ©e, qui vous supplie, aprĂšs avoir pencĂ© Ă plusieurs autres choses, vous resouvenir de son extrĂȘme misĂšre et l'en vouloir soulager en ce qui vous con- serne ; car, sy cela ne vient de la puretĂ© de vostre Ăąme et de la crainte de la charger d'ung si pesant fĂ©s, que des grantz tors quel'ong me fet, madame, et que vous vous en attendiĂ©s au cartulaiiie 1586-1605 393 tiers ny au quart, mes tristes jours s'Ă©couleront sans autre fruict que d'esprouver de grandes ingratitudes, au lieu de tant d'affections et de bonne volontĂ©s promises Ă qui les a, et vous le sçavĂ©s, madame, sy justement mĂ©ritĂ©es, par ces effects uti- les et par ces dĂ©votions Ă vostre service, auquel le zĂšle me continura, sy vousl'avĂ©s agrĂ©able, comme estant, Madame, vostre trĂšs humble servante. Anne d'allĂšgre. A Lisieulx, ce 29° juillet 1609. Monsieur de Fervaques ce promet, sy vous estes encore quelque temps Ă Paris, d'avoir l'honneur de vous y voir et vous assurer qu'il est vostre serviteur et de messieurs vos enfans. Il vous supplie et moy aussy trĂšs humblement de sortir d'avec le sieur Salomon. Vous sçavĂ©s s'il est juste de me tirer de ceste poursuite. Vous en ferĂ©s plus, jecroy, d'ung mot avec luy, que tout le reste du monde ne sçauroit fĂšre. 3098. â 1609, 31 aoĂ»t, Paris â Lettre Ă©crite par Bois- Dauphin au connĂ©table de Montmorency B. N., français, 3569, 103. A monsieur, monsieur le duc de Montmorency , per et connĂ©table de France. Monsieur, encore que je sache que la priĂšre que vous faict monsieur le duc de Maubasson vous sera agrĂ©able, si veux- je y joindre ma suplication trĂšs humble vous assurant, mon- sieur, que le sieur du Clas est homme capable de ceste charge et qu'il s'en acquitera dignement ; je vous suplie l'an gratifier, vous obligerez mon dict sieur de Maubason et moy Ă vous randre trĂšs humble service Pour moy, je m'assure que me tenĂ©s pour vostre serviteur je le suis, monsieur, et dĂ©sirerois vous le pouvoir tesmoigner par dignes services et que je suis, monsieur, vostre trĂšs hum- ble cousin et trĂšs affectionnĂ© serviteur, de Laval. De Paris, se dernier aust 1609. 3099 â 1609, 14 septembre, â Lettre Ă©crite par Anne d'AlĂšgre Ă la duchesse de la TrĂ©moĂŻlle Archives de la TrĂ©moĂŻlle. A madame, madame la duchesse de la Trimouille. Madame, je n'ay sceu le partement de ce gentilhomme que lorsqu'il est prest Ă monter Ă cheval, de sorte que sa pronti- tude vous exemptera pour ceste heure d'une longue impor- 394 LA MAISON DE LAVAL 1 tunitĂ©de moy, qui n'ay du temps que pour vous donner ce petit advis, madame, que vous pourries bien avoir le fiel ung de ces matins de vostre vielle mĂšre et servante, puisque vous ne luy fĂȘtes point cest honneur de luy tesmoigner les effectz de tant de bonnes volontĂ©s promises et jurĂ©es sy solemnelle- ment et que vous ne prenĂ©s pas la peine seulement de luy mander de vos nouvelles, qui est de quoy je vous supplie maintenant trĂšs humblement et que je sache, par l'effect de vostre belle main, TestĂąt de vostre santĂ©, celle de messieurs vos enfans et sy en ce voiage, duquel vous m'aprendrĂ©s ce qu'ilvous plaira, vous avĂ©s veumadamela princesse d'Orange. Dieu vous donne Ă tous tout le bonheur et prospĂ©ritĂ© que vous souhaite, madame, vostre trĂšs humble servante, Annb d'AllĂšgre. A Lizieux, ce 14 e septembre 1609. 3100. â 1610, 11 fĂ©vrier. âArrĂȘt du Conseil d'Etat sta- tuant sur les oppositions formĂ©es par les villes d'Anjou et du Maine, notamment Angers et Laval, Ă l'exĂ©cution du traitĂ© passĂ© avec Etienne Ringues et Jean Ravenel, fermiers gĂ©nĂ©- raux des traites et impositions foraines A. N., E 25 a 271, et B. N français, 18177, 315. 3101. â 1610, 20 mars. â ArrĂȘt par lequel le Conseil d'Etat renvoie aux trĂ©soriers de France Ă Tours une requĂȘte en dĂ©charge prĂ©sentĂ©e par Denis Crosnier, fermier des cinq sols par pipe de vin octroyĂ©s aux habitants de Laval pour l'entretien des portes mariniĂšres et des chaussĂ©es de la Mayenne entre Laval et ChĂąteau-Gontier A. N., E 25 b 228, etB. N., français, 18177, 433. 3102. â 1610, 24 avril, Paris â Lettre des marĂ©chaux de Brissac et de Bois-Dauphin Ă M. de Montmorency, en lui de- mandant de signer l'accord Ă©tabli entre les sieurs de Chalais et Caminade Original, B. N., français, 3585, 56. 3103. â 1610, 9 juin, Paris. âActe par lequel le marĂ©chal de Bois-Dauphin et Madeleine de SouvrĂ© fondent Ă PrĂ©cignĂ© le couvent de Notre-Dame de la Salle ' ImprimĂ©, abbĂ© Ledru, Urbain de Laval, 198;. 1. Il est relatĂ© dans cet acte que RenĂ© de Laval a Ă©tĂ© tuĂ© Ă la bataille de Saint-Laurent et RenĂ© de MontĂ©cler Ă celle de Saint- Denis. CARTULAIRE 1586-1605 395 3103 bis. â 1 610, 7 octobre, Tusculum. â Bulle par laquelle le pape Paul V accorde des indulgences Ă la confrĂ©rie de Saint-Martin Ă©rigĂ©e Ă Laval ImprimĂ© en photogravure, Pro- vince du Maine, 1899, p. 386. 3104. â 1610, 20 octobre. â Quittance dĂ©livrĂ©e par le ma- rĂ©chal de Bois-Dauphin B. N., français, 28154, 257. 3105. â 1611, 31 janvier. â Accord entre Charlotte de Nassau, tutrice de Henri de la TrĂ©moĂŻlle, et Jacques Chabot, portant cession par ce dernier de tous ses droits sur la succes- sion de Guy XX, moyennant cent quinze mille livres A. N., T 1051 19 , 212. 3106. â 1611, 14 fĂ©vrier, Lisieux. â Lettre Ă©crite par Anne d'AlĂšgre Ă la duchesse de la TrĂ©moĂŻlle Archives de la TrĂ©moĂŻlle. A madame, madame la duchesse de la Trimouille. Madame, vous devĂ©s estre importunĂ©e de mes vilaines letres. Les vostres, belles et tousjours trĂšs courtes, me sont bien chĂšres, mais elles me sont rares. Mais aussy ne valĂ© ge pas que vous en preniĂ©s la peine. Encore ce peu me satisfe- roit fort, sy je croiois que vous ne laisasiĂ©s pour cela de m'ai- mer le quart de ce que vous m'avĂ©s promis, de quoy je vous conjurerois, madame, sans que je sens mon inutilitĂ© Ă vostre service ; et en ce temps l'ong ne fet pas grand cas de ceux qui ont tout baillĂ© et Ă qui il ne reste rien que les bonnes vo- lontĂ©s et les dĂ©votions d'honnorcr. Sur quoy ce porteur vous reprĂ©sentera mieux mes intentions en vostre endroit, madame, et vous dira, sy vous luy permĂ©tĂ©s, TestĂąt de mes misĂ©rables affĂšres et mes supplications Ă en prendre quelque pitiĂ©, qui est une douleur grande que de m'estre mise en TestĂąt oĂč je suis. Dieu a voulu tout cela pour mes pĂ©chĂ©s ; mais vous sçavĂ©s, madame, que s'en est ung bien grand d'oprimer TafligĂ©, et sy jamais persone le fut par dessus toute imagi- nation et plus qu'il n'y en eut jamais au monde, c'est moy, qui prie Dieu continuellement me donner patience, sans cela je serais mal. Je le suplie aussy vous donner la suite de ces bĂ©nĂ©dictions et autant de contentement que vous en dĂ©sire, Madame, vostre trĂšs humble servante et douloureuse mĂšre. Anne d'alĂšgre. A Lizieulx, ce 14 e fĂ©vrier 1611. 396 LA MAISON DE LAVAL 3107. â 1611, 4 mars, Paris. â Lettre Ă©crite par le marĂ©- chal Bois-Dauphin Ă M. Dumesnil, maire et capitaine de la ville d'Angers ImprimĂ©, Port, Inventaire des Archives muni- cipales d'Angers, 417. 3108. â 1611, 31 juillet, Paris. â Lettre Ă©crite par Bois- Dauphin au connĂ©table de Montmorency B N., français, 3583, 134. A monsieur, monsieur le duc de Montmorency , per et connestable de France. Monsieur, j'ay dĂ©sirĂ© accompagner la lettre que madamoy- selle de SĂ©neterre vous escrit pour vous assurer tousjours de mon trĂšs humble service. Elle vous mande ce quy s'est en- suyvy sur l'afron que monsieur le conte de Bresve luy a faict et, encore qu'elle l'ait teu Ă tous ses parans crĂšgnant se quy estarivĂ©, je ne sçay comme monsieur le marquis de Nelle l'a sceu quy rencontrant mon dit sieur le conte de Bresve luy parla ; et, de propros en propos se hausĂšrent de parole comme je m'asseure qu'aurĂ©s sceu. Je regrette fort tout se quy c'est passĂ©, m'assurant qu'en aurĂ©s du desplaisir. C'est Ă vous, monsieur, que les rois ont estably juge, et nous aprĂšs, sur l'honneur des seigneurs et gentilshommes, mesme attribuĂ© par le dernier Ă©dit. Monsieur le mareschal de Brissac a faict informer par le lieutenant du grand prĂ©vost et monsieur le premier prĂ©sidant a commandĂ© qu'on informast aulsy de sa part et a desernĂ© prinse de corps ; monsieur de Vitry arivĂ© hier a baillĂ© des gardes au dit sieur marquis, monsieur le mareschal de Brissac a faict sercher partout monsieur le conte de Bresve quy ne se trouve point. Vostre prudance avisera, s'il luy plaist, Ă accommoder le tout, comme estant juge de l'honneur de la noblesse et de ne laisser prandre pied Ă monsieur le premier prĂ©sidant sur se quy est le plus honorable Ă vostre charge et la nostre, vous estes nostre chef ; c'est Ă vous Ă nous dĂ©fandre et l'honneur de dames et damoyselles. Madamoyselle de SĂ©neterre a recours Ă vous ; je m'assure que ne luy desnirĂ©s vostre secours. J'oubliois Ă vous dire encore que monsieur de SĂ©neterre est tellement courroucĂ© contre sa seur, pour lui avoir scellĂ© cautulaibe 1586-1605 397 le tout, qu'il ne la veult voir ; ce qu'elle a le plus craint luy est arrivĂ©. Je vous suplie aussy, monsieur, donner souvenance des let- tres que m'avĂ©s promis d'escrire Ă monsieur le duc de Van- tadour et Ă madame vostre fille ; se me sera tousjours obli- gation sur obligation de vous randre tous les trĂšs humbles services que pencez dĂ©sirer, monsieur, de vostre trĂšs humble et trĂšs obĂ©issant serviteur, db Laval. Paris, se dernier juyllet 1611. 3109. â 1611, aoĂ»t '. â Lettre Ă©crite par Bois-Dauphin au connĂ©table de Montmorency B. N., français, 3569, 83. A monsieur, monsieur le duc de Montmorency , pair et connĂ©table de France aoĂ»t 1611. Monsieur, vous m'avĂ©s fait beaucoup d'honneur de m'avoyr fait part de vos nouvelles ; je me resjouys de se qui c'est pasĂ© puisque c'est Ă voste contantement et comme vous le pouviĂ©s dĂ©sirer. Je prendre toujours part Ă se qui vous touchera et porterĂ© ma vie et celle de mes amyes de trĂšs bon cĆur en toutte occasion oĂč il ira de vostre servise, comme le plus hum- ble et fidelle serviteur que veus ayĂ©s au monde. An cette vĂ©ritĂ© je vous baiserĂ© trĂšs humblement les mains et demeu- rerĂ©, monsieur, vostre trĂšs humble et obĂ©issant serviteur. de Laval. 3110. â 1611, 10 dĂ©cembre. â Quittance de ses gages de gouverneur d'Anjou dĂ©livrĂ©e par le marĂ©chal de Bois-Dau- phin Original, B. N., français, 28154. 258. 3111. â 1612, 7janvier. â ArrĂȘt par lequel la Chambre des Comptes enregistre des lettres par lesquelles, le 12 no- vembre 1611, la Reine rĂ©gente a ordonnĂ© de payer au marĂ©- chal de Bois-Dauphin la somme de quatre-vingt-quatorze mille cinq cents livres B. N., français, 28154, 259. 3112. â 1612, 16 avril, Lisieux. â Lettre Ă©crite par Anne d'AlĂšgre Ă la duchesse de la TrĂ©moĂŻlle Archives de la TrĂ©- moĂŻlle. 1. Le document n'est pas datĂ© par son auteur, mais une note mise au revers nous indique le jour oĂč il est parvenu Ă sa desti- nation ; c'est cette date que nous donnons ici. 398 LA MAISON DE LAVAL I A madame, madame la duchesse de la Trimouille. Madame, je croiois aprĂšs tant de remises, de longuers et de charte, estre d'accort de l'achat de la Roche-Bernard et que vous agrĂ©riĂ©s le traitĂ© que monsieur de Lamothe, corne intendant de vos affĂšres, madame, et vostre procureur, avoit negotiĂ© icy avec tant d'ardeur pour vostre profit et contente- ment, que je ne pence pas, madame, qu'il mĂ©rite ung dĂ©saveu ny pour son affection en vostre endroit ny pour sa sufisance qui est grande en plusieurs choses et sa cognoissance sy en- tiĂšre en ce qu'il a nĂ©gotiĂ©, qu'il est trĂšs vray qu'il n'a passĂ© nulle partie en ce petit traitĂ© qu'il ne sache qu'elle me soit trĂšs Ă©quilablement deue, comme j'espĂšre que je les feray recognoistre bonnes et qu'elles me seront trĂšs bien poiĂ©es avec le temps. Mais puisqu'il vous plaist, madame, feindre d'en douter sur l'advis de ce Conseil qui n'en peut rien sça- voir que par monsieur de Lamothe, c'est Ă vous Ă conclure ce qu'il vous plaira et Ă moy Ă vous obĂ©ir et Ă tenir sy ferme Ă ma parole que j'aimerois mieux mourir que de l'enfreindre et Ă manquer Ă ung seul point ny une seule journĂ©e Ă tout ce qui a estĂ© accordĂ©. CroiĂ©s-le, madame, s'il vous plaist, et que quant il n'y auroit rien d'escrit, je suis de ce viel temps oĂč nous croions que ce qui estoit promis estoit deu. Je suis trop vielle pour changer cette franchise et ne m'excuse jamais sur mes impuisances, que je pourrois bien plus lĂ©gitimement allĂ©guer que celles qui sont libres et sy bien servie et assis- tĂ©e. Que ces raisons lĂ sont nulles, madame, excusĂ©s moy, je vous supplie trĂšs humblement, sy je le vous di, et que sy dans le conte que vous dites que vous avĂ©s Ă randre Ă mes- sieurs vos enfans il [n'y a] point d'autre mauvais mesnage que ce que [vous] aurĂ©s traitĂ© avec moy, il vous seront plus obligĂ©s qu'enfans du monde Ă mĂšre, tous jeunes qu'ilz sont ; je leur montrerĂ© cela quant il leur plaira. Pour ce que vous dites, madame, des cohĂ©ritiers, il vous sera fort aisĂ© de leur justifier que vous aurĂ©s valablement poiĂ©, et le sĂ©nĂ©chal de Montfort baillera les papiers, sans y rien manquer de ce qui est de notre concordat. De cela n'en doutĂ©s point et ne vous alarmĂ©s, s'il vous plaist, que rien qui vienne de moy vous aproche presjudice. Mes intentions sont bien autres et mes affections sy rĂ©solues Ă vostre service que le dernier qui pĂ©rira en moy sera le dĂ©sir d'estre le reste de mes jours, vostre CARTULAIRE 1586-1605 399 trĂšs humble et obĂ©issante mĂšre et servante. Anne d'AllĂšgre. A Lisieulx, ce 16 e d'avril 1612. Madame, je ne faudray point d'envoier la procure de mon mary et la mienne Ă Nante le temps que monsieur de Lamo- the me prescrit. 3113. â 1612, 4 mai, Lisieux. â Lettre Ă©crite par Anne d'AlĂšgre Ă Daniel Hay, sieur de la Mothe Archives de la TrĂ©moĂŻlle. A monsieur, monsieur de Lamothe, intendant des afferes de madame la duchesse de la Trimouille. Monsieur, je ne puis jamais rien improuver de mes amis et vous voulant croire tel, je consens au procĂ©der que vous avĂ©s voulu tenir, mais aussy je m'assure que n'estant en ce rang vous ne trouveriĂ©s pas Ă propos que j'achetase une terre pour avoir des procĂšs, et ce pourquoy je l'ay dĂ©sirĂ©e, est pour m'en tirer et ne point chicaner pour de petite chose, puisque j'en ai quitĂ©e de sy grandes. Sy mon intention est injuste en cela, jugĂ©s en, et nul mieux que vous ne peut sçavoir sy les debtes que vous m'avĂ©s passĂ©es en nostre accord sont bonnes ou non et, sy vous ne les eussiĂ©s creues trĂšs valables et sans dificultĂ©, vous ne me les eusiĂ©s pas alouĂ©es, corne vous eusiĂ©s bien fet. PremiĂšrement pour celle des huit mille livres, vous sçavĂ©s sy elle est bien deue, les fretz et l'intĂ©rest. Celle de douze, je croy que vous n'en doutĂ©s non plus et que quant il y auroit de l'insolvabilitĂ© au Fort, je ne la de- vrais porter, veu que c'est pour vos debtes que j'ay estĂ© em- pĂȘchĂ©e d'en estre poiĂ©e et vous mesme en avĂ©s offert le poi- ment, il y a plus de deux ans. Vous sçavĂ©s toute ceste histoire mieux que moy, qui vous diray encore, pour vous oster d'alarme de ce costĂ© lĂ , que Lambin est caution du Fort, qui est valable Ă mon advis et vous le recognoissĂ©s bien pour cela. De tous les papiers qu'il vous faudra pour cest effect je vous en fourniray, sy nous traitons entiĂšrement. Il y a ceste debte de Lamouche, de quoy je me suis trouvĂ©e fort offencĂ©e, car de croire quej'euse voulu butiner neuf centz livres sur cest article, ce ne seroit pas pour me recouvrĂ© de mes pertes. J'aimerois mieux en avoir perdu neuf mille que d'i avoir pencĂ©. Les papiers sont encore entre les mains du fermier de BĂ©cherel, qui vous les livrera et les condamna- 400 LA MAISON DE LAVAL tions qui luy ont estĂ© fĂȘtes. Alors vous verres qu'il y a plu- tost plus que moins. La debte de la veufve Bernart a estĂ© disputĂ©e, ce qui ce peut ; et tous les papiers en sont encores es mains du Fort, qui en a fet le poiment, et vous seront livrĂ©s fort stricte- ment. Le sĂ©nĂ©chal de Montfort ce chargera de ne vous laiser rien en arriĂšre de tout ce qui vous fera besoing. De tout ces papiers lĂ je ne croy pas que madame d'Elbeufen voulut rien rĂ©voquer en doute, puisque l'ong luy a fet toutes ces deman- des en justice, corne Ă madame de la Trimouille. Il n'y a donc plus de ceste partie de la Fresnaie pour le poiment de ces officiers de BrĂ©silien. Je vous envoie la copie de son conte, vous jugerĂ©s par lĂ sy je mens ou sy je di vray. Tous ces debtes estant telles et passĂ©es de vous avec bonne cognoissance de cause, je ne sçay de quoy vous voulĂ©s que je m'oblige, corne dit madame la duchesse de la Trimouille, envers tous et contre tous. Ces mots lĂ efraie ung petit esprit dĂ©bile corne le mien ; c'est pourquoy il vaut beaucoup mieux Ă©claircir devant ung marchĂ© qu'aprĂšs. Quant Ă moy, Dieu me fait la grĂące d'avoir plus d'envie de tenir et d'Ă©fectuer mes promeses que je n'en ai de vivre. Je voudrois que l'ong m'asomĂ t au dĂ©pens du public, sy j'y avois manquĂ©. Il y a plusieurs annĂ©es que nous nous cognoissons, je pence que vous ne m'y avĂ©s, ny vous ny autre, veu faillir. J'espĂšre ache- ver le reste de ma triste vie en ceste fidellitĂ© et franchise, que j'observeray fort curieusement pour nostre concordat et croy que monsieur de Broise, auquel vous vous remetĂ©s par vostre lettre, corne je fay, jugera que tout ce que vous avĂ©s traitĂ© avec moy est Ă l'adventage de madame de la Trimouille, qui s'en doit bien fier en vous come aussy saige. Je receus hier des lettres de monsieur le sĂ©nĂ©chal de Mont- fort, qui dit qu'il n'a point eu de vos nouvelles ny Lorial et qu'ilz en attendoient. C'est Ă vous Ă leur mander ce que vous voudrĂ©s, car de ma part j'ay envoie ceste procure que j'ay eu tant de peine Ă tirer, de sorte que ce sera quant vous voudrĂ©s que ceste adjudication ce fera, et le plutost sera le meilleur el pour vous et pour moy, qui vous prie me mander vostre volontĂ© lĂ dessus, car j'ay quelque argent Ă Paris, que j'y ay tousjours retenu pour madame de la Trimouille, et ceux qui l'ont s'ennuie de le guarder. CABTULA1RE 1586-1605 401 Que j'aie bien tost de vos nouvelles, afin que selon cela j'en mande des miennes en Bretagne, oĂč vous trouvĂ©s tout prest de mon costĂ©. L'occasion de ce gentilhomme assĂ©s pronte m'empesche de vous pouvoir pour ceste heure envoier la copie de ce conte de la Fresnaie. Vous en verres l'original, quant il vous plaira, soit entre les mains de monsieur le sĂ©nĂ©chal de Montfort, ou il vous sera envoie Ă Paris ; mais puisque cela ce doit dĂ©cider en Bretaigne et que vous mesme y allĂ©s, vous verres tout sur les lieux. Je croy que ce sera le mieux et que vous avĂ©s assĂ©s d'autres afTĂšres Ă Paris, sans vous y importuner de ceste panquarte. Je ne vous diray donc plus rien pour ceste heure, sinon vous baiser les mains et vous assurer que je suis, monsieur, vostre bien humble Ă vous fĂšre service. Anne d'AllĂšgre. A Lizieulx, ce 11 e may, veille de mon cruel malheur. Le mesme jour de la naissance, la mort. JugĂ©s ma douleur et en aies pitiĂ©. 3114. â 1612, 17 mai. - DĂ©cĂšs de Madeleine de Mon- tĂ©cler, Ă©pouse du marĂ©chal de Bois-Dauphin Note du Chesne, Histoire. 646. 3115. â 1612, 26 mai, Vannes. â Lettre dans laquelle le marĂ©chal de Bois-Dauphin assure la ville d'Angers de toute son affection Original, Archives municipales d'Angers, AA. 3. 3116. â Vers 1612. â Lettre Ă©crite par Anne d'AlĂšgre Ă la duchesse de la TrĂ©moĂŻlle. A madame, madame la duchesse de la TrimouiVe. Madame, encore que toutes mes lettres demeurent sans responce, corne indigne que je suis, corne vous a dit Lafin, que vous en preniĂ©s la peine, sy vous importunerai-ge de celle-sy, quelque malade que je sois, sur l'occasion qui s'en offre de vous dire que j'ay sceu que vous estes sur les termes de vendre la Roche-Bernart, Ă quoy vous vous attaquĂ©s la premiĂšre. Les raisons s'en pencent, sans les dire. Or, ma- dame, je souhaite de sçavoir par vous-mesme, s'il vous plaist me faire cest honneur de me dire quel pris vous en dĂ©sirĂ©s, quel l'ong vous offre. Vous m'avĂ©s tousjours promis la prĂ©- 402 LA MAISON DE LAVAL fĂ©rance, nous verrons ce coup come vous estes jalouse de tenir vos promeses. Sy vous y avĂ©s manquĂ© en quelques au- tres choses, je veux croire que c'est que vous ne l'avĂ©s pas peu, mais Ă cecy sela dĂ©pend du tout de vous. Je serois marrie de vous y fĂšre perte d'ung teston, mais aussi la sic devriĂ©s vous estre de me traiter injustement et indignement, me chasant d'une maison dont il ne me reste que les douleurs. Et [Ă ] ceste petite terre qu'il sic n'est afermĂ©e et ne l'a jamais estĂ© tant que mille escus, vous y adjoutĂ©s une trĂšs petite forest fort ruinĂ©e et n'y a plus nul bastiment au logis ; jugĂ©s, madame, si ce n'estoit l'affection du lieu oĂč elle vient, sy j'en voudrois bailler plus de trente mille escus. NĂ©antmoins pour accomoder vos affĂšres et pour m'aider Ă me poier de peu que vous me devĂ©s, et le reste en argent content, je la vous feray valoir cinquante cinq mille escus. Monsieur de Lamothe, pour m'en fĂšre paser mon envie, m'en demande soixante. JugĂ©s en Dieu et en vostre Ăąme, madame, qui est le plus Ă©quitable de luy et de moy, et en confĂ©rĂ©s, s'il vous plaist, Ă monsieur de Tous, duquel aiant l'advis vous me manderĂ©s vos vollontĂ©s et, sy elles sont conforme Ă ce que je puis etĂ l'ofre quej'ay fĂȘte de.... cinquante cinq mille escus, vous me ferĂ©s paroytre que vous.... gligez pas du tout les services que je vous puis encore randre [et que] vous agréés ceux que je vous en fets, dont je me promets de.... l'honneur de quelque petit.... eune en ceste occasion et en une.... ra en pronte suite. Je vo.... or que.... us seray.... nt inutile et que vous ne.... persone.... eux la.... 3117. â 1613, fĂ©vrier. â Satisfaction du marquis deNesles RenĂ© aux Epaules dit de Laval Ă Henry de la Marck, comte de Brenne B. N., Dupuy, 90, 275. 3118. â 1614, 6 juillet, Paris. â Acte par lequel le marĂ©- chal de Bois-Dauphin prend diverses mesures afin de solder le sieur de Pommier, pourvoyeur de sa maison ; mesures au nombre desquelles figure un transport des vingt-quatre mille livres Ă lui accordĂ©es par le roi pour 1615 CommuniquĂ© par M. Dolbet, d'aprĂšs un original appartenante M. le docteur Niobey. Furent prĂ©sens en leurs personnes hault et puissant sei- gneur messire Urban de Laval, chevallier des ordres du roy, KS CARTULAIRE 1586-1605 403 conseiller en ses conseils d'Estat et privĂ©, gouverneur et lieu- tenant gĂ©nĂ©ral pour Sa MajestĂ© au pays et duchĂ© d'Anjou, maresclial de France, seigneur du Bois-Dauphin, estant de prĂ©sent en ceste ville de Paris, logĂ© rue Sainte-Marie Egyp- tienne, paroisse Saint-Eustache, d'une part, et Claude Pom- mier, marchant, pourvoieur de madame sĆur du royet pour- voieur du dit sieur mareschal, demeurant Ă Paris, rue des Grainetiers, paroisse Saint-Nicolas-des-Champs, d'autre part. Lesquelles parties recognurent et confessĂšrent avoir ce jourd'huy faict compte ensemble de touttes les fournitures de vivres, par le dit Pommier fournies pour le dit seigneur ma- reschal, sa maison et train, depuis le dernier compte gĂ©nĂ©ral faict avec luy le seiziesme janvier dernier passĂ© jusques au dernier de juing dernier, et par iceluy s'est trouvĂ© la des- pence et fournitures faictes par le dit Pommyer suivant son marchĂ© monter depuis le dit jour, y comprins l'augmenta- tion de pris du dit marchĂ©, Ă la somme de vingt-miL neuf cens cinquante une livres dix-huict solz tournois, plus, par pro- meses du dict seigneur, deue au dit Pommier, en datte du jour de.... dernier, la somme de dix-sept escus quarante-six livres tournois, revenant les dites sommes ensemble Ă la somme de vingt-deux mil six cens quatre-vingt dix-sept livres dix-huict solz tournois, de laquelle le dit seigneur mareschal s'est trouvĂ© redebvable vers le dit Pommier depuis le dit jour seiziesme janvier dernier. Pour faciliter le paye- ment et demeurer par le dit sieur mareschal quicte vers le dit Pommier de partie de la dite somme [de] XXlI m VI e IIII XX XVII livres dix-huict solz tournois et de la somme de six mil livres tournois par le dit Pommier ce jourd'huy prestĂ©e au dit seigneur mareschal, ainsy qu'il a recognu et confessĂ©, a le dit sieur mareschal ceddĂ© et transportĂ©, cedde et transporte par ces prĂ©sentes et promet garantir, fournir et faire valloir au dit Pommier ce acceptant la somme de vingt-quatre mil livres qu'il plaist au roy luy accorder en l'annĂ©e prochaine pour augmentation de son appointement de mareschal de France en la dite annĂ©e, pour recevoir laquelle le dit sieur mareschal a prĂ©sentement baillĂ© et mis es mains du dit Pom- mier son blanc de luy signĂ© cottĂ© au dos de sa main Pour servir de quictance Ă monsieur le trĂ©sorier de l'Espargne de la somme de vingt quatre mil livres Ă moy ordonnĂ©e pour 404 LA MAISON DE LAVAL augmentation de mon appointement de mareschal de France pour l'annĂ©e six cens quinze ». Duquel blanc il faict le dit Pommier porteur de la dite somme de XXIII mil livres tournois, vray acteur, procureur, pourchasseur, demandeur, receveur et quioteur, l'a mis et subrogĂ©, met et subroge du tout en son lieu et place pour en faire et disposer Ă sa vollontĂ©. Et Ă ce moyen le dit Pommier promet et sera tenu continuer la dĂ©livrance des dites fourni- tures selon qu'il est portĂ© en son marchĂ© de Laval. Et pour le surplus de la dite somme deue au dit Pommier montant [Ă ] quatre mil six cens quatre vingtz dix-sept livres dix-huict solz tournois, le dit sieur mareschal en a prĂ©sente- ment payĂ© au dit Pommier la somme de quinze cens livres tournois ; et le reste, montant [Ă ] trois mil cent quatre-vingtz dix-sept livres dix-huict solz tournois, le dit sieur mareschal Ă promis et promet les payer au dit Pommier, ou au porteur, au premier jour d'octobre prochain venant, Ă peyne de tous despens, dommaiges et intĂ©restz. Et au cas que le dit Pommier ne feust entiĂšrement payĂ© de la dite somme de vingt-quatre mil livres prĂ©sentement ceddĂ©e deux mois aprĂšs la dite annĂ©e VI quinze expirĂ©e, ou dit cas a promis et promet le dit seigneur mareschal payer au dit Pommier le surplus de ce qui restera des dites XXIII mil livres tournois incontinant Ă la vollontĂ© du dit Pommier. Et pour l'exĂ©cution des prĂ©sentes et dĂ©pendances, a le dit sieur mareschal esleu son domicilie irrĂ©vocable, tant pour luy, ses hoirs, ayans cause, en ceste ville de Paris, en la maison oĂč le dit sieur mareschal est de prĂ©sent demeurant, devant dĂ©clarĂ©e, auquel lieu il veult, consent et accorde que tous exploictz de commandement sommations, significations et actes de justice qui y seront faictz, soient produits, obligeant chacun en droict.... Faict et passĂ© en la maison du dit sieur mareschal, le sixiesmejourde juillet aprĂšs midi, l'an mil six cens quatorze. Urban de Laval, Claude Pommier, Turquet, Briquet. 3119. â 1615, 8 janvier, Paris. â Acte par lequel le marĂ©- chal de Bois-Dauphin dĂ©livre Ă François de Broc un certifi- cat de son admission au nombre des chevaliers de Saint - Michel ImprimĂ©, AbbĂ© Ledru, Maison de Broc, preuves, 550. CARTULAIRE 1586-1605 405 312 °u r, 16 ^ 5 ' ler a ° Ăt ' Paris - - Lettre adressĂ©e par le marĂ©chal de Bois-Dauphin Ă la duchesse de la TrcmoĂŻlle ImprimĂ©, Les la TrĂ©mottle, IV, 246. A madame, madame la duchesse de la TrĂźmouille, Ă Laval. Madame, je me rĂ©jouis infiniment du bon accort fait antre monsieur vostre fils et monsieur de Rohan. Il me souvient quileust estĂ© dĂšs celte ville faict si mondit seigneur de Rohan eust voulu faire se qu'Ă cest heure a consanty Je regrette, madame, qu'en ceste occation je n'ay peu vous tes- moignerle dĂ©sir que j'ay que me teniĂ©s pour vostre trĂšs humble serviteur. S'il se prĂ©sante aultre occation pour vostre et de messieurs vos enfans, je vous suplie, madame de me commander, et connoitrĂ©s lors qu'antre tous ceux quy ont 1 honneur d'estre de vos aliĂ©s, je suis seluy quv le plus d afection et de dĂ©sir d'Ă©fectuer vos commandemans Je ne vous escris point des nouvelles delĂ court, m'assurant que le sieur Chauveaules vous dira, et me contanteray seule- ment de vous dire qu'on continue Ă faire le voyage, et vous protester que lant que je vivre, je seray tousjours, madame vostre trĂšs humble et plus obĂ©yssant cousin et serviteur. r> n âą . DE l -*val. Ue Fans, se premier aust 1615. 3121. - 1615 5 septembre, Meaux. - Lettre adressĂ©e par le marĂ©chal de Bois-Dauphin au prince de CondĂ© Im- prime, Recueil V, Paris 1761. 3122. - 1615 5-6 septembre. - CondĂ© et Bois-Dauphin. B. N.,Dupuy, 91, 195. v 1615, 14 septembre, camp du pont de Saint- Maxent - Lettre Ă©crite par le marĂ©chal de Bois-Dauphin Ă lui annonçant qu'avec toutes les troupes du roi il va faire lever le siĂšge de Roye et le priant de venir se joindre a lui Note, Amateur d'autographe, II, 47. 3124. - 1615 21 octobre. - DĂ©faites prĂšs de Joigny des troupes de M . de par le marfchal de Bois-Dauphin ImprimĂ©, Annuaire de l'Yonne, pour 1879 3125. - 1615, 17 novembre, camp de Sainte-Maure. - 26 406 LA MAISON DE LAVAL Lettre Ă©crite par le marĂ©chal de Bois-Dauphin Ă M. de Bois- guĂ©rin, gouverneur de Loudun ImprimĂ©, Archives histori- ques de Poitou, XIV, 325. Monsieur, estant approchĂ© comme je suis de vous avec l'armĂ©e du Roy, j'ay creu vous en donner advis et de faict j'ay dĂ©peschĂ© le sieur d'Armaignac exprĂšs, lequel vous dira de bouche ce que j'estime que vous sachiez estre nĂ©cessaire pour le service du Roy. Vous le croirez donc de ce qu'il vous dira de ma part, qui m'empeschera de vous faire ceste-cy plus longue, sinon pour vous assurer que je suis, monsieur, vostre plus affectionnĂ© Ă vous servir, de Laval. Du camp de Saincte-More, ce XVII novembre 1615 3126. â 1615, 17 novembre, Bordeaux. â Lettre dans laquelle Louis XIII annonce Ă M. de BoisguĂ©rin, gouverneur de Loudun, la venue du marĂ©chal de Bois-Dauphin Ă la tĂȘte de l'armĂ©e royale ImprimĂ©, Archives historiques du Poitou, XIV, 324. 3127. â 1615, 21 novembre. Bordeaux. â Lettre dans laquelle Louis XIII informe M. de BoisguĂ©rin, gouverneur de Loudun, que le marĂ©chal de Bois-Dauphin est prĂšs de Poitiers Ă la tĂȘte de forces qui vont s'Ă©lever Ă vingt mille chevaux ImprimĂ©, Archives historiques du Poitou, XIV, 326. 3128 â 1615, 1 er dĂ©cembre, Montreuil. â Lettre Ă©crite par le marĂ©chal de Laval-Bois-Dauphin Ă la duchesse de la TrĂ©- moĂŻlle Archives de la TrĂ©moĂŻlle, imprimĂ©, Les la TrĂ©moĂŻlle, IV, 246. A madame, madame la duchesse de la TrimoĂŻlle. Madame,je vous suplie de croĂšre que vous estes la dame du monde que je dĂ©sire plus faire de service. Je vous ay escrit, et m'estonne quen'avĂ©s receu ma lettre, se que je pouvois Ă l'afaire dont m'escrivez car ayant receu commandement du Roy, comme j'ay, il n'y a que Sa MajestĂ© seule Ă trester ceux quy sont dans vostre ville ; et d'aultant, madame, que ceux de la religion prĂ©tendue rĂ©formĂ©e ont cette ville, je y ay mis deux capitaine de ladite religion, car an vostre particulier vous n'y aurĂ©s nul dommage, et nĂ©an- moings, s'il vous plaist d'an escrire au Roy et que seluy que vous anvoerez passe par lĂ oĂč je seray, si l'avez aggrĂ©able, cartulaire 1586-1605 407 j'accompagneray vos lettres et resmontrĂ© le peu de consĂ©- quanse qu'est ceste place. Je vous suplie ancore ung coĂ»t de croĂšre que je m'estime- ray trĂšs heureux et seray trĂšs contant lors qu'il se prĂ©san- tera occation de vous tesmoegner par effet que je suis vĂ©rita- blement, madame, vostre trĂšs humble cousin et plus affec- tionnĂ© serviteur, de Laval. Au camp de Montreuil, se premier dĂ©sambre 1615. 3129. - 1615, 16 dĂ©cembre. â Epitaphe de Françoise de Laval-Bois-Dauphin, Ă©pouse de Louis de Rohan B. N. Clai- rambault, 1124, 120. Cy gist madame Françoise de Laval, seconde femme de haut et puissant prince Louis de Rohan, prince de GuemenĂ©. Elle mourut le xvi de dĂ©cembre MDCXV. Ils ont fondĂ© cet hospital et couvent du Mont-de-PiĂ©tĂ©. Priez Dieu pour eulx. 3130. - 1616, 4 mai, Laval. â Lettre par laquelle les Ă©chevins de Laval se plaignent Ă la duchesse de la TrĂ©moĂŻlle, des ravages causĂ©s par les troupes du marĂ©chal de Bois- Dauphin ImprimĂ©, Bulletin de la Mayenne, 1889, 396. 3131. â 1617, 14 fĂ©vrier, le Mans. â Serment de fidĂ©litĂ© au Roi prĂȘtĂ© par les habitants de Laval dans les mains du comte d'Auvergne ImprimĂ©, Bulletin de la Mayenne, 1889 398. 3132. â 1617, 3 mars. â Lettre par laquelle Richelieu, Ă©vĂȘque de Luçon, prie au nom de leurs MajestĂ©s le marĂ©chal de Bois-Dauphin de se remettre en bons termes avec du Bel- lay ImprimĂ©, Lettres de Richelieu, I, 339. 3133. â 1617, 3 mars. â Lettre par laquelle au nom de leurs MajestĂ©s Richelieu prie du Bellay de se remettre en bons termes avec le marĂ©chal de Bois-Dauphin ImprimĂ© Lettres de Richelieu, I, 340. 3134. â 1617, 7 juin, Bois-Dauphin. â Lettre Ă©crite par Philippe-Emmanuel de Laval Bois-Dauphin au duc de la TrĂ©moĂŻlle Archives de la TrĂ©moĂŻlle et imprimĂ©, Les La TrĂ©moĂŻlle, IV, 246. 408 LA MAISON DE LAVAL A monsieur, monsieur le duc de la TrimouĂŻlle. Monsieur, j'ay dĂ©sirĂ© joindre ce devoir Ă celuy que monsieur le mareschal, mon pĂšre, vous rend, pour vousasseurer de la continuation de mon servise, et vous susplier de vous servir du pouvoir que vous avĂ©s sur moy pour en tirer les preuves vĂ©ritables, afĂŻin que je puisse mĂ©riter la part que je dĂ©sire avoir en vos bonnes grĂąces, dont vous ne pouriĂ©s honorer personne qui soit plus que moi, monsieur, vostre trĂšs humble serviteur. P. de Laval. Au Bois-Daulphin, ce 7° juin 1617. 3135. â 1617, 15 aoĂ»t, Laval. â Lettre par laquelle les habitants de Laval se plaignent Ă la duchesse de la TrĂ©moĂŻlle des excĂšs des troupes de du Plessis de JuignĂ© ImprimĂ©, Bulletin de la Mayenne, 1889, 399. 3136. â 1618, 6 septembre. â Acte par lequel Pierre de Laval et Isabelle de Rochechouart, son Ă©pouse, fondent au bourg de TrĂȘves un prieurĂ© de religieuses Note, B. N., dom Rousseau, XIII 1 , 9450. 3137. â 1618, 9 septembre. â DĂ©dicace de l'Ă©glise de Mon- tigny-sur-Avre faite par François de PĂ©ricard, Ă©vĂȘque d'Evreux; le seigneur de Montigny Ă©tait alors Hugues de Laval, Ă©poux de Michelle de PĂ©ricard Inscription reproduite par M. l'abbĂ© MĂ©tais dans Eglises et chapelles du diocĂšse de Chartres, t. I, notice sur Montigny. 3138. â Vers 1618. â Note de Henry de la TrĂ©moĂŻlle sur les droits de son frĂšre et de sa sĆur sur le comtĂ© de Laval Les la TrĂ©moĂŻlle, IV, III. 3139. â 1619, 19 janvier. â Sentence entre Pierre de Laval Lezay et Madeleine RoussillĂ©, tutrice de Jean-Baptiste du Laurens, seigneur de la Hariette, au sujet du cens dĂ» Ă raison de la place des Halles Ă Gennes Archives de M. d'Achon. 3140. â 1619, 8 fĂ©vrier. â Aveu rendu Ă Pierre de Laval- Lezay par Gaspard de Daillon, abbĂ© commendataire de l'ab- baye Chdtelliers, n°GCGVlII. 3141. â 1619, 9 avril, VitrĂ©. â DĂ©libĂ©ration des habitants de VitrĂ© relative au tir de l'oiseau royal {Les la TrĂ©moĂŻlle IV, 106. cartulaire 1586-1605 409 3142. â 1619, 14 avril, Laval. â Lettre par laquelle les âąĂ©chevins de Laval font connaĂźtre au duc de la TrĂ©moĂŻlle les ordres qu'ils ont reçus du Roi par M. de Bouille relatifs Ă la garde de la ville ImprimĂ©, Bulletin de la Mayenne, 1889, 400. 3143. â 1619, avril, Saint-Germain- en-Laye. â Lettres par lesquelles Louis XIII confirme Ă Henri de la TrĂ©moĂŻlle le droit de nomination aux offices du comtĂ© de Laval Les La TrĂ©moĂŻlle, IV, 117. 3144. â 1619, 3 mai, Saint-Germain-en-Laye. â Lettre Ă©crite par Louis XIII au marĂ©chal de Bois-Dauphin B. N., français 3348, 104. A Monsieur le sieur de Bois-Dauphin, marĂ©chalde France, gouverneur et mon lieutenant gĂ©nĂ©ral en mon pais et duchĂ© d'Anjou. Mon cousin, pour ce que mon cousin, le cardinal de la Rochefoucauld, et le sieur de BĂ©thune, quoj'ay envoyĂ©s vers la royne, Madame ma mĂšre, pourl'accomodement des affaires prĂ©sentes, m'ont faict entendre qu'elle leur a fait sentir qu'elle dĂ©sirait avoir pour sa retraite le gouvernement du paĂŻs d'Anjou, avecq la ville et chĂąteau d'Angers et le Pont de Ce, j'ay pensĂ© ne luy pouvoir pas desnier ce contentement, tant pour le respect que je luy porte, que pour ce qu'il s'agit en cela de l'accomodemenl des dites affaires et consommation de la paix en mon royaume. Et me suis promis que, pour ces mesmes considĂ©rations, vous me feriez paroistre ce qui est de votre zĂšle et dĂ©votion envers moy et le bien public, et Ă cet effet me remettiez entre les mains volontiers le dit gou- vernement d'Anjou et m'en envoyeriez votre dĂ©mission, ainsy que je vous prie de le faire, par le sieur de Nervise, que j'envoye exprĂšs vous voir pour ce sujet, lequel vous assurera aussi de ma part que mon intention est de vous en donner la rĂ©compense, que je say que mĂ©rite la dite charge et onc de ne vous laisser sans employĂ© convenable Ă votre qualitĂ©, et vous graliffier encore et le sieur marquis de SablĂ©, votre fils, en ce que vous pourrez dĂ©sirer de moy pour votre part et con- tentement aux occasions qui s'en prĂ©senteront, ainsi que le dit de Nervise vous pourra fĂšreplus particuliĂšrement entendre 410 LA MAISON DE LAVAL de ma part. Sur lequel m'en remettant, je prie Dieu, mon cousin, vous avoir en sa sainte garde.. Escrit Ă Saint-Germain-en-Laye, ce mi» jour de mav 1619. Louis. J 3145. â 1619, 11 mai, Bois-Dauphin. â Lettre Ă©crite par le marĂ©chal de Bois-Dauphin Ă Louis XIĂI B. N., français 3348, 94. ' ' Sire, J'ay reçue la lettre qu'il a plus Ă Votre MajestĂ© m'Ă©crire par le sieur de Nervise et entendu de luy ce qu'il avoit Ă me dire de sa part sur le subjet d'icelle. Puisqu'on cette occasion il y va du bien de votre service! du repos de votre Ă©tat, et que c'est votre volontĂ©, je quiteray, non seullement le gouvernement d'Anjou, que le feu Roy, d'heureuse mĂ©moire, votre pĂšre, m'avoit donnĂ© pour rĂ©com- pense de partye de mes services, sans luy avoir demandĂ©, mais encores ma vye et tout ce que j'ay au monde, pour l'augmentation et manutention de l'un et de l'aultre ; mais je suplye trĂšs humblement votre MajestĂ© avoir agrĂ©able d'enten- dre le dit sieur de Nervise sur ce que je luy ai dict touchant cette affaire, tant pour mon intĂ©rest, que celuy de mon fils, et y aporter, s'il vous plaist, considĂ©ration, afin que pour le moings nous ne puissions servir de fable aux estrangers et de risĂ©e Ă mes ennemis. J'espĂšre tant en la bontĂ© et justice de Votre MajestĂ© qu'elle me fera l'honneur de me tesmoigner en cette occasion que mes services luy ont estĂ© agrĂ©ables et ainsy comme bon roy juste et Ă©quitable me ferez parroistre que vous estes bon maistre Ă ceux qui vous servent fidelle- ment, comme j'ay tousjours faict. Ma rĂ©solution est de continuer Ă rĂ©gler tellement mes actions Ă vos volontĂ©s et commandements que Votre MajestĂ© n'aura jamais aultre subjet de dire de moy, sinon que j'ay estĂ© et seray tant que je vivray, sire, de votre MajestĂ©... de Laval. Bois-Dauphin, ce xi may 1619. 3146. â 1619, 4 juillet, SablĂ©. âLettre Ă©crite parle marĂ©- chal de Laval-Bois-Dauphin Ă un personnage qui n'est pas nommĂ©, au duc de la TrĂ©moĂŻlle, probablement Archives delĂ TrĂ©moĂŻlle et imprimĂ© Les la TrĂ©moĂŻlle, IV, 247. V CARTULAIRE 1580-1605 411 Monsieur, se gentilhomme vous dira que j'ay aulsi tost faict se que m'avez escrist comme je feray an toutes choses quy vous toucheront et oĂč je pouray vous randre servise. J'ay assĂ©s de contantement Ă l'afaire quy me conserne et quy s'est passĂ©e Ă Tours, puisque le Roy l'a eue agrĂ©able. Voicy le temps que les bon? serviteurs pĂątissent pour les mauvais ils fault louer Dieu de tout. J'ay priĂ© se dit gentilhomme de vous faire une priĂšre do ma part, que je vous suplie, monsieur, l'avoir aggrĂ©able, et de me croĂšre plus que personne, Monsieur, votre plus humble cousin et affectionnĂ© serviteur, de Laval. A SablĂ©, se4juylletl619. 3147. â 1622, 5 septembre.â Instance en Parlement entre les marchands frĂ©quentant la Loire et Henri de la TrĂ©moĂŻlle, comte de Laval, au sujet des droits de coutume et de prĂ©votĂ© qu'il possĂ©dait sur les denrĂ©es et marchandises apportĂ©es dans Laval ou sorties de la ville Note, Manteliors, Histoire de la communautĂ© des marchands frĂ©quentant la Loire, III, 369. 3148. â 1622, 13 dĂ©cembre. â Sentence entre Pierre de Laval-Lezay et Madeleine RoussillĂ©, veuve du Laurens, au sujet des droits honorifiques dans l'Ă©glise de Gennes Archi- ves de M. d'Achon. 3149. â 1623, 26 septembre. â Aveu rendu Ă Guy de Laval, de la Trimouille, duc de Thouars et de la Trimouille, pair de France.., » parles religieux de Bellebranche pour ce qu'ils tenaient dans la chĂątellenie de Bazougers Archives de la Sarthe H, 667, 322. 3150. â1626, 7 mars.â ArrĂȘt maintenant le duc delĂ TrĂ©moĂŻlle en possession des droits de coutume et de prĂ©vĂŽtĂ© dont il jouissait sur les denrĂ©es et marchandises apportĂ©es dans Laval ou sorties de la ville Note d'aprĂšs un imprimĂ© dans Manteliers, CommunautĂ© des marchands, III, 370. 3151. â 1628, 20 mars â Quittance dĂ©livrĂ©e par le marĂ©- chal de Bois-Dauphin. Original, B. N., français, 6211, 406J. Nous, Urban de Laval, sieur de Bois-Dauphin, mareschal de France, conseiller du Roy en son Conseil d'Estat et privĂ©, gouverneur et lieutenant gĂ©nĂ©ral pour Sa MajestĂ© en Anjou, 412 LA MAISON' DE LAVAL confessons avoir eu etreceu comptant de M. MacĂ© Berthrand sieur de la BazmiĂšre, aussy conseiller du Roy en son dit conl seild EstĂąt, et trĂ©sorter de son espargne, la somme de dix mille livres, Ă nous ordonnĂ©e par Sa MajestĂ© pour nos ap- pointements ordinaires Ă cause de ladite charge de mareschal de France durant la prĂ©sente annĂ©e MDCXXVIII De laquelle somme de dix mil livres nous nous tenons comp- tant; et en quittons ledit sieur de la BaziniĂšre, trĂ©sorier susdit, ettousaultres. Tesmoing nostre seing cy mis le vingt mars MDCXXVIII- 3152. â 1635, 2 mai. â Transaction entre Hilaire de Laval 1 marquis de Lezay et de TrĂȘves, fils de Pierre de Laval Lezay' et Jean-Baptiste du Laurens Archives de M. d'Achon 204. â Cachel d'Hilaire de Laval-Lezay, 1707. 3153. â 1644, fĂ©vrier, Paris. - Lettres patentes par les- quelles il est reconnu que les appels des juges de Laval doi- vent aller directement au Parlement de Paris et qui autorise le duc de la TrĂ©moĂŻlle Ă rembourser leurs offices aux mem- bres du prĂ©sidial de ChĂąteau-Gontier Les la TrĂ©moĂŻlle, IV, 3154. - 1658, 14 fĂ©vrier, Thouars. - Lettres par laquelle le duc de la TrĂ©moĂŻlle abandonne au prince de Tarente, son fils aĂźnĂ©, entre autres terres le comtĂ© de Laval et la bĂ ron- nie de VitrĂ© {Les la TrĂ©moĂŻlle, IV, 179. 3155. â 1661, 9 aoĂ»t, Thouars. â Acte par lequel le duc Henri de la TrĂ©moĂŻlle abandonne en toute propriĂ©tĂ© la baron- nie de VitrĂ© Ă Henri-Charles de la TrĂ©moĂŻlle, prince de Tarente, son fils aĂźnĂ© ImprimĂ©, Paris-Jallobert, 539. 1. Sous le numĂ©ro 204, on donne ici le dessin du cachet d'Hilaire de Laval-Lezay. cartulaire 1586-1605 413 3156. â 1663, 31 octobre. â Lettre du maire, Ă©chevins et syndic de Laval Ă Colbert B. N., MĂ©langes de Colbert, 117 bis, 1099. 3157. â 1663, 14 dĂ©cembre. â Acte par lequel Hilaire de Laval, marquis de Lezay, Ă©poux de Françoise du Puy du Fou, fonde une chapelle en l'Ă©glise du Bourg d'IrĂ© Note, B. N., dom Rousseau, XIII 1 , 9481. 3158. â 1665, 22 janvier. â Bail du cimetiĂšre de Saint- Martin de VitrĂ© appartenant Ă la fabrique de Notre-Dame de VitrĂ© Association Bretonne, xix e session, p. 158. 3159. - 1669, 30 janvier. â Acte par lequel Henri de la TrĂ©moĂŻlle concĂšde Ă son fils aĂźnĂ©, Henri-Charles, Montfort, VitrĂ© et Rennes Copie, A. N., T. 1051 19 , dossier 213. 3161. â 1671, 21 septembre. â Aveu rendu Ă Henri de la TrĂ©moĂŻlle parles religieux de Bellebranche, pour ce qu'ils tenaient dans la chĂątellenie de Bazougers Archives de la Sarthe H, 667, 334. 3162. â 1674, fĂ©vrier, Saint-Germain-en-Laye. â Lettres patentes par lesquelles Louis XIV confĂšre au duc de la TrĂ©- moĂŻlle le gouvernement de VitrĂ©, vacant par suite du dĂ©cĂšs de son pĂšre {Les la TrĂ©moĂŻlle, IV, 212. 3163. â 1689, 27 mars. â Certificat dĂ©livrĂ© par Henri- Marie de Laval-Bois-Dauphin, Ă©vĂȘque de la Rochelle Biblio- thĂšque delĂ Rochelle, 642, 118. Cet acte porte le sceau pla- quĂ© du prĂ©lat. 3164. â 1693, 27 octobre. â RĂšglement pour les fonctions d'administrateur de FHĂŽtel-Dieu Saint-Julien de Laval, dressĂ© en exĂ©cution de la dĂ©libĂ©ration du bureau de l'HĂŽtel Dieu du 20 septembre 1693 in-extenso, Bibliophile du Maine, sep- tembre 1896, 3. 3165. â 1714. â Statuts des marchands tailleurs de Laval B. N., franc, n. acq. 4154. 3166. â 1714, 8 fĂ©vrier, Tours. â Ordonnance par laquelle l'intendant Chauvelin homologue les statuts des marchands tailleurs d'habits de Laval Copie, B. N., français, nouv. acq. 5154. ! 414 LA MAISON DE LAVAL 3167. â 1739. â Liquidation entre madame de FĂ©nelon et le comte de Laval, passĂ©e par devant le conseiller SĂ©guier A. N.,T'108 3 . 3168 â 1746, 27 avril. â DĂ©claration faite par les R. P. jĂ©suites du collĂšge de la FlĂšche pour les biens de l'ancienne abbaye de Bellebranche dĂ©pendant de Bazougers Archives delĂ Sarthe H, 667, 357. 3169.â 1748, 22 mars, Versailles â ArrĂȘt du Conseil d'Etat par lequel il proroge d'un an le bĂ©nĂ©fice de la dĂ©cision du 25 mars 1747 accordant Ă Guy-AndrĂ©-Pierre, marquis de Laval, et Ă Louis-Joseph de Laval, abbĂ© de Sainte-Croix de Bordeaux, une annĂ©e de dĂ©lai pour rĂ©pondre aux crĂ©anciers du comte de Laval, leur pĂšre A. N , E 2269, 98. 3170. â 1766, 30 octobre, Versailles. â Lettres par lesquelles Louis XV investit Pierre-Marie-Alexis, vicomte du Plessisd'ArgentrĂ©, du gouvernement de la ville de Laval. ImprimĂ© Armoriai de d'Hozier, registre VII, complĂ©men- taire, Didot, 1883, p. 478. TABLE DES MATIĂRES XXI. â Guy XVI 28 janvier 1501-20 mai 1531. . XXII. â Guy XVII 20 mai 1531-25 mai 1547. . . XXIII. - Guyonne et Guy XVIII 25 mai 1547-13 dĂ©cembre 1567 XXIV. â Guy XIX 13 dĂ©cembre 1567-15 avril 1586. XXV. â Guy XX 15 avril 1586-3 dĂ©cembre 1605 . 5 105 229 268 326 GARTULAIRB DE LAYAL XVI 2141-2359 1501-1531 25 XVII 2360-2612 1531-1547 112 XVIII 2614-2771 1547-1567 236 XIX 2772-2889 1568-1586 278 XX 2890-3170 1586-1605 334 GRAVURES 151. â Guy XVI 12 152. â Anne de Montmorency 12 153. â Paix en ivoire 12 154-155 â Sceau et contre-sceau de Guy XVI, 1507. 16 156. â Anne de Laval, dame de la TrĂ©moĂŻlle. . 18 157-158. â Jeton de François de Laval, Ă©vĂȘque de Dol. 21 4*6 TADLE 159-160. - Inscription et blason de la cloche du Port-Brillet, 1548 2 3 161. â Sceau plaquĂ© de Guy XVI, 1529. 91 162. - Guy XVII .' 108 163. â Claude de Foix 108 164 165. â Jeton de Guy XVII \ \ 10 9 166. â Sceau de Guy XVII, 1542. ...."' no 167. â Sceau de Claude de Foix, 1542 ...'.' .' m 168 â Sceau de la Cour de VitrĂ© au dĂ©but du XVI" siĂšcle 4,0 169 â Sceau de Jean de Laval-ChĂąteaubriant, 1532. 117 170 â Sceau de Jean de Laval ChĂąteaubriant, 1534. 121 171 172. â Sceau et contre-sceau plaquĂ©s du Vivier des Landes, 1534 123 173-174. â Sceau des contrats et la Cour de VitrĂ© ayant un contre sceau au nom de L. et Rus- son, 1436-1538 141 175. â Clef de voĂ»te de l'Ă©glise de Marcilly sur Maulne ^ 176. â Galerie du chĂąteau de Laval 192 177 â Sceau et contre sceau des contrats de VitrĂ© 46 I 226 178. â Guy XVIII Louis de Sainte-Maure. ... 234 179. â Guyonne de Laval RenĂ©e de Rieux ... 234 180 â Sceau plaquĂ© de Guy XVIII, 1548 .... 235 181. â Blason de Laval Bois Dauphin 241 182 â Sceau de RenĂ© II de Laval Bois Dauphin . . 243 183. â D'Andelot âą . 268 184 - Guy XIX . '. 2 68 186. â Signature de Guy XIX, 1577 274 187. â Sceau de Guy XIX, 1577 275 188. â Sceau de Guy XIX, 1579 276 185. â Anne d'AlĂ©gre, veuve de Guy XIX, 1595. . 276 189. â Jeton de Guy XIX, 1583 277 190. â Sceau de Jean de Laval LouĂ©, 1567. . . . 287 191. â Sceau de Jean de Laval-LouĂ©, 1576. . . . 301 192 194. â Jetons de Guy de Laval marquis deNesle, 1584 321 195 â Anne d'AlĂ©gre marĂ©chale de Fervaque, 1599. 327 196. â Sceau d'Urbain de Laval-Bois Dauphin,1584. 337 TABLE 417 197. â Sceau de Madeleine de MontĂ©cler, 1582 . . 338 198. â Guy de Laval, marquis de Nesle, 1590. . . 338 199-201. â Cachets du marĂ©chal de Bois-Dauphin, 1592-1609 349 202. â Le marĂ©chal de Bois-Dauphin 361 203. â Cachet du marĂ©chal de Bois-Dauphin, 1597 . 365 204. - Cachet d'Hilaire de Laval, 1707 412 FIN DU TOME QUATRIEME Imprimerie â LrliĂšvre. â 2 et 4, rue du Lieutenant. I OUVRAGES DU MĂME AUTEUR Documents inĂ©dits pour servir Ă l'histoire du Maine 1572- 1594 ; 4 fascicules, in-8°, 1876-1882. Le Saint G-raal ou le Joseph d'Arimathie, publiĂ© par M. E. Hucher, compte-rendu Ă la SociĂ©tĂ© du Maine, in-8° ornĂ© de 4 vignettes, 1879. .MĂ©moire de Maucourt de Bourjolly sur la ville de Laval suivi de la chronique de Guitet de la Houllerie ; 2 vol. in-8\ 1886 Sigillographie des Seigneurs de Laval 1095-1605 in-8» orne de 209 vignettes, 1888. Lettre escrite par l'un des gentilshommes du marcmis de Villaines, 1590 ; in-18, 1892. RenĂ© d'Orange, poĂšte du Bas-Maine XV e siĂšcle ; in-8° 1892 tire a cent exemplaires. Une lettre Ă©crite en 1802 par le futur cardinal de Cheverus in-8°, 1893 tirĂ© Ă cent exemplaires. La Maison de Craon 1050-1480, Ă©tude historique accompagnĂ©e du Lartulaire de Craon; 2 vol. in-8°, ornĂ©s de 206 vignettes, 1893 tirĂ©s a 200 exemplaires numĂ©rotĂ©s, honorĂ©s d'une mention par 1 AcadĂ©mie des Inscriptions et Belles-Lettres. Le Cartulaire de Saint-Michel de l'Abbayette 997-1421 ; in-8°, ornĂ© de 4 fac-similĂ© et de 12 vignettes, 1894 tirĂ© Ă 175 exemplaires numĂ©rotĂ©s. Notes sur Laval en 1751 de Le Blanc de la Vignolle, in-8» 1894 tirĂ© Ă cent exemplaires numĂ©rotĂ©s. _ Cartulaire de Saint- Victeur du Mans 994-1400 ; ornĂ© de fac-similĂ© et de 45 vignettes, 1895 tirĂ© Ă 150 exemplaires numĂ©- rotes. * La Maison de Laval 1020-1605 t. I. Les Laval 1020-1264 in-8», ornĂ© de 2 planches et de 44 vignettes ; t. II, Les Mont- morency-Laval 1264-1412, ornĂ© de 2 planches et de 62 vignettes ; t. III, Les Montfort-Laval 1412-1501, ornĂ© de 6 planches et de 29 vignettes tires a deux cents exemplaires numĂ©rotĂ©s. Table du Cartulaire de l'abbaye du Ronceray d'Angers dressĂ©e par M. EugĂšne VallĂ©e, in-8», ornĂ© d'une planche et dĂ© deux vignettes tirĂ© Ă 120 exemplaires numĂ©rotĂ©s. Les Laval-la-Faigne et leur livre de raison 1452-1533, 31 i> in-8» tirĂ© Ă 100 exemplaires. . La Charte d'AndrĂ© II de VitrĂ© et le siĂšge de Karac en 1184 8 p. in-8°, avec fac-similĂ©. Cartulaire de l'EvĂȘchĂš du Mans 936-1790, 1 vol. in-8°, tome I des Archives historiques du Maine tirĂ© Ă 200 exemplaires! Sous presse Cartulaire de l'abbaye Saint-Aubin-d'Angers 769-1200, 2 vol. in-8° ornĂ©s de fac-similĂ© tirĂ©s Ă 150 exemplaires numĂ©rotĂ©s. Imp. LkuĂšvre. â Laval etPaiis.
ceotto avis de deces vitry le francois